Question de Mme GRUNY Pascale (Aisne - Les Républicains) publiée le 07/03/2024

Question posée en séance publique le 06/03/2024

M. le président. La parole est à Mme Pascale Gruny, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Pascale Gruny. Madame la ministre déléguée auprès du ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire, en mai 2022, l'Union européenne décidait, par solidarité avec l'Ukraine, de lever les droits de douane et les quotas pour les produits agricoles ukrainiens.

Deux ans plus tard, la concurrence de ces importations est devenue insoutenable pour nos agriculteurs. Sur le seul mois de janvier 2024, un million de tonnes de blé tendre ukrainien ont été importées en Europe, soit la totalité du volume par an avant la guerre ; le cours du maïs a également chuté de 30 %.

Face à cet afflux devenu hors de contrôle, il est urgent que la Commission européenne réagisse.

Dans sa proposition de règlement sur les échanges avec l'Ukraine, elle introduit, certes, un frein d'urgence pour les oeufs, le sucre et la volaille, permettant de rétablir les droits de douane si les importations de ces produits dépassent un certain contingent annuel, mais elle oublie d'y inclure les céréales.

Le Premier ministre a affirmé le 1er février vouloir engager une négociation à Bruxelles pour limiter les importations de céréales.

Or les représentants de la France à Bruxelles ont voté le 21 février dernier en faveur de cette proposition, sans demander l'inclusion d'une clause de sauvegarde pour les céréales.

La position de la France est incompréhensible.

Êtes-vous favorable ou non au déclenchement de la clause de sauvegarde pour préserver nos producteurs de blé et de maïs ? Quelles consignes allez-vous donner à vos députés européens pour le vote du 7 mars prochain ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

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Réponse du Ministère auprès du ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire publiée le 07/03/2024

Réponse apportée en séance publique le 06/03/2024

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée auprès du ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire. Madame la sénatrice Pascale Gruny, la France est un soutien résolu de l'Ukraine, car défendre l'Ukraine, c'est défendre les Français et les Européens, c'est répondre à une puissance violente qui fait la guerre aux portes de l'Europe, qui multiplie les attaques informationnelles, les cyberattaques et les manoeuvres de déstabilisation contre les intérêts français et européens, en Europe et dans le monde.

Sur le sujet que vous abordez, M. Poutine a parfaitement compris que l'arme agricole était une arme de guerre. Ne renversons donc pas le sens des corrélations : ses actions ont déstabilisé les marchés agricoles comme elles ont déstabilisé le marché de l'énergie.

Les céréales ukrainiennes ont perdu leur débouché principal de la mer Noire. Malgré les corridors de solidarité mis en place en Pologne et en Roumanie, avec le soutien de l'Union européenne, un trop grand volume de ces céréales reste stocké en Europe, en particulier dans les États membres frontaliers de l'Ukraine.

Dans ce contexte, notre pays - c'est tout à son honneur - a, depuis le début du conflit, soutenu des mesures temporaires facilitant les échanges avec l'Ukraine ; pour autant, solidarité ne signifie pas naïveté. Conformément à l'engagement du Président de la République, nous avons obtenu deux avancées pour protéger nos agriculteurs dans le règlement européen.

En premier lieu, une mesure de sauvegarde pourra être prise en cas de perturbation significative d'un marché pour un ou plusieurs États membres...

M. Pierre Cuypers. C'est le cas !

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée. Auparavant, cela devait concerner l'ensemble du marché européen. La Commission pourra alors imposer tout type de mesures et non plus seulement des droits de douane, aussi longtemps que nécessaire.

En second lieu, dans des circonstances critiques, la Commission pourra mettre en oeuvre une mesure de sauvegarde provisoire pour une durée maximale de 120 jours afin de limiter l'impact de la libéralisation du commerce de ces produits.

Vous avez raison de mentionner la situation différente des oeufs, des volailles et des céréales. Nous avons agi sur les deux premiers produits, nous continuons à négocier sur le troisième.

La position de la France est sans ambiguïté : nous défendrons nos agriculteurs.

M. Jean-Marc Boyer. Les voilà rassurés !

M. le président. La parole est à Mme Pascale Gruny, pour la réplique.

Mme Pascale Gruny. Il faut bien évidemment faire preuve de solidarité avec l'Ukraine. J'ai évoqué l'absence de clause de sauvegarde pour les céréales, mais je crains que vous ne mesuriez pas la gravité de la crise agricole actuelle. J'aurais pu également aborder la question du miel.

Vous faites des promesses à Paris, mais vous votez à l'inverse de ces promesses à Bruxelles. On entend souvent dire que c'est la faute de l'Europe, mais je vous rappelle que vous siégez dans les instances européennes : le Président de la République, les ministres, vos députés européens y participent, gardez cela à l'esprit.

Il s'agit de ne pas oublier les Français : sur l'agriculture, nous attendons vraiment que vous soyez plus incisifs.

Je souhaitais rappeler également le règlement relatif à la restauration de la nature, lequel contient des indicateurs qui ont attiré mon attention : indice des papillons de prairie, indice des oiseaux communs...

M. le président. Il faut conclure.

Mme Pascale Gruny. Il faut mettre un terme à ces normes imposées aux agriculteurs ! (Exclamations ironiques sur les travées du groupe GEST. - Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

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