Question de M. PERRIN Cédric (Territoire de Belfort - Les Républicains) publiée le 14/03/2024

M. Cédric Perrin interroge M. le ministre de l'intérieur et des outre-mer sur le modèle français de sécurité civile.

Le comité européen des droits sociaux du Conseil de l'Europe (CEDS), saisi par un syndicat de sapeurs-pompiers professionnels, a rendu une décision assimilant les sapeur-pompiers volontaires (SPV) à des travailleurs. Les membres de ce comité estiment que les SPV subissent, de facto, un traitement discriminatoire en matière d'indemnisation et de temps de travail. Ils condamnent également l'implication des sapeurs-pompiers de 16 à 18 ans dans les opérations de lutte contre l'incendie.

Si cette décision n'a pas de force contraignante, elle remet fondamentalement en cause notre modèle de sécurité civile, qui repose essentiellement sur le volontariat (près de 80 % de SPV). Elle aurait en outre des conséquences insurmontables, puisqu'elle conduirait à plafonner leur nombre d'heures de mission et à rémunérer l'ensemble des gardes.

Pour ces raisons, il lui semble indispensable qu'il réaffirme dans les meilleurs délais que l'activité de sapeur-pompier volontaire ne peut être assimilée à celle d'un travailleur, et lui demande de soumettre une réponse juridique effective à ses partenaires européens.

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Réponse du Ministère auprès du ministre de l'intérieur et des outre-mer, chargé des outre-mer publiée le 20/03/2024

Réponse apportée en séance publique le 19/03/2024

Mme la présidente. La parole est à M. Cédric Perrin, auteur de la question n° 1165, adressée à M. le ministre de l'intérieur et des outre-mer.

M. Cédric Perrin. Madame la ministre, le comité européen des droits sociaux du Conseil de l'Europe, saisi, il y a plusieurs années déjà, par un syndicat de sapeurs-pompiers professionnels, a rendu récemment une décision assimilant les sapeurs-pompiers volontaires à des travailleurs.

Les membres de ce comité estiment que les sapeurs-pompiers volontaires subissent un traitement discriminatoire en matière d'indemnisation et de temps de travail. Ils condamnent également l'implication de sapeurs-pompiers âgés de 16 ans à 18 ans dans des opérations de lutte contre l'incendie.

Si cette décision n'a pas de force contraignante, elle remet en revanche fondamentalement en cause notre modèle de sécurité civile, qui, je le rappelle, repose essentiellement sur le volontariat.

Dans le même temps, le rapport commandé l'année dernière par le ministre de l'intérieur à l'inspection générale de l'administration plaide également pour une révision des contraintes qui pèsent sur les sapeurs-pompiers volontaires et formule diverses propositions.

Madame la ministre, ce débat n'est évidemment pas nouveau. Nous l'avons eu à maintes reprises dans cet hémicycle. Mais il est aujourd'hui plus que temps de clarifier la situation.

Il est temps que le Gouvernement affirme que l'activité de sapeur-pompier volontaire ne peut être assimilée à celle d'un travailleur. C'est une telle mise au point que je vous demande aujourd'hui : vitale pour nos services départementaux d'incendie et de secours (Sdis), elle devra aussi être portée à la connaissance de nos partenaires européens.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Marie Guévenoux, ministre déléguée auprès du ministre de l'intérieur et des outre-mer, chargée des outre-mer. Monsieur le sénateur Perrin, comme vous le rappelez, le comité européen des droits sociaux a récemment rendu une décision sur le bien-fondé de deux réclamations collectives déposées par un syndicat, concernant la situation des sapeurs-pompiers volontaires.

Cette décision a été communiquée au comité des ministres du Conseil de l'Europe, afin qu'il l'examine. À ce jour, ledit comité n'a pas transmis de recommandations à ce titre.

Vous avez raison de le souligner, la complémentarité fait la force de la sécurité civile en France, qu'il s'agisse des actions complémentaires de l'État, des collectivités et des associations, ou encore de la complémentarité entre les sapeurs-pompiers professionnels et les sapeurs-pompiers volontaires.

Depuis de nombreuses années, le Gouvernement et le Parlement ont veillé à mettre en place des mesures destinées à conforter la spécificité des sapeurs-pompiers volontaires français, caractérisés par leur engagement citoyen au service de nos concitoyens, notamment le principe selon lequel cet engagement ne peut être assimilé à celui d'un travailleur.

Vous m'invitez à faire une mise au point, monsieur le sénateur. Je veux y procéder devant vous. Contrairement à ce qui a pu être dit, le Gouvernement n'envisage en aucune manière, pour ce qui concerne les sapeurs-pompiers volontaires, de transposer la directive du 4 novembre 2003 concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail.

Le modèle français de sécurité civile repose sur l'engagement quotidien de 253 000 sapeurs-pompiers, civils et militaires, en particulier sur celui de 198 700 sapeurs-pompiers volontaires. Ces derniers incarnent la richesse et la complémentarité des forces qui, chaque jour, assurent la protection de nos concitoyens. Notre objectif est bien de protéger l'engagement volontaire et citoyen au sein des services d'incendie et de secours.

Enfin, le ministre de l'intérieur et des outre-mer a annoncé la tenue d'une grande concertation portant sur notre modèle de sécurité civile, dans le cadre d'un « Beauvau de la sécurité civile » ; nous permettrons ainsi à chacun d'être associé à la réflexion sur l'avenir de la sécurité civile en France.

Permettez-moi enfin, monsieur le sénateur, de saluer à cette occasion le travail des sapeurs-pompiers, professionnels comme volontaires, dans le cadre de la lutte pour la sécurité de nos concitoyens.

Mme la présidente. La parole est à M. Cédric Perrin, pour la réplique.

M. Cédric Perrin. Je vous remercie de votre réponse, madame la ministre.

Oui, il faut prendre la mesure des conséquences que pourrait avoir la transposition de la directive du 4 novembre 2003 sur le modèle français de sécurité civile, en particulier sur l'organisation de nos services départementaux d'incendie et de secours.

Je voudrais à mon tour saluer le courage, l'engagement et le dévouement de nos pompiers, qu'ils soient professionnels ou, comme 80 % d'entre eux, volontaires. C'est bien grâce à eux que notre système fonctionne aujourd'hui.

De manière similaire, nous avons un profond différend avec l'Union européenne sur la question du temps de travail des militaires. Dans ces deux cas, nous devons affirmer certains principes. Nos modèles fonctionnent de la sorte, et nous ne pouvons pas les laisser s'effilocher.

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