III. PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR

Le moindre dynamisme du budget des Communautés - dû à des facteurs plus conjoncturels que structurels - permet de solliciter de la France un prélèvement moins important qu'en loi de finances initiale pour 2002, mais n'en constitue pas pour autant la manifestation d'une amélioration substantielle de la gestion des crédits européens, bien que de louables réformes aient été récemment engagées sur ce terrain.

1. L'évolution de la contribution française, témoin d'une évaluation perfectible du budget communautaire

Ainsi qu'il a été exposé dans la partie relative à l'examen de la contribution française, l'évolution du prélèvement sur recettes au profit du budget 2003 des Communautés européennes peut être considérée de deux manières : il s'inscrit en baisse de 6,3% par rapport au montant retenu dans la loi de finances initiale (LFI) pour 2002, mais en hausse de 8% par rapport à la prévision d'exécution pour 2002 (et de 5,5% par rapport au montant inscrit en loi de finances rectificative). Quelle que soit la base considérée, l'évolution demeure toutefois beaucoup plus modérée qu'en LFI 2002, puisque le prélèvement connaissait alors une forte augmentation de 11,2% par rapport à la LFI 2001, et de 16,3% par rapport à l'exécution en 2001.

Cette hausse était en bonne partie imputable à la réforme des ressources propres adoptée par le Conseil le 29 septembre 2000, mais devait également financer une hausse de 2,5% du budget européen. Inversement, l'évolution constatée pour 2003 reflète le moindre impact de la décision relative aux ressources propres et la progression plus modeste du budget européen , du moins en l'état actuel de la procédure budgétaire. Sur le long terme, la progression continue du prélèvement au profit de l'Union européenne demeure néanmoins incontestable, puisqu'il était de 4,1 milliards d'euros (soit 3,7% des recettes fiscales nettes) en 1982.

L'écart entre prévision et exécution tend néanmoins à fausser l'appréciation et illustre le manque de réalisme des prévisions budgétaires de la Commission . La surestimation des besoins des Communautés, et in fine du montant de la contribution française, est chronique depuis 1989 et tend à s'aggraver depuis quatre ans, comme l'illustre le tableau suivant :



On constate clairement deux périodes : avant la mise en place de la ressource PNB, l'exécution dépasse systématiquement la prévision, reflétant le dynamisme des dépenses agricoles et l'insuffisance des recettes dont disposait alors la Communauté. Depuis 1989, la surestimation est en revanche davantage liée à la montée en puissance de la politique régionale et au surcalibrage de crédits de paiement dont elle fait l'objet, notamment en début de période de programmation (1989/1990, 1994/1995, 2000/2001). Ce décalage tient certes à des aléas qui rendent la prévision nécessairement imparfaite (plus ou moins grand dynamisme des ressources propres, régularisation a posteriori de la correction britannique et des assiettes TVA et PNB, impact en 2002 de l'application rétroactive de la hausse des frais de perception...), mais également à de réelles lacunes en matière d'exécution de certains programmes communautaires - les fonds structurels et actions extérieures en particulier - qui se traduisent par l'accumulation d'excédents budgétaires 17( * ) .

Le manque de fiabilité des prévisions communautaires conduit ainsi à ce que les Etats membres soient davantage sollicités que nécessaire, alors même que la conjoncture économique dégradée et le pacte de stabilité exercent des contraintes majeures sur leurs finances publiques . Certes la loi de finances rectificative conduit in fine à ramener le prélèvement à un niveau plus conforme aux besoins effectifs, mais l'affichage en loi de finances initiale n'en est pas moins douloureux et conduit les Etats membres à financer l'inertie et les déficiences des services communautaires. Plus précisément, la confrontation de restes à liquider massifs à la situation budgétaire tendue de certains Etats ne peut que donner une amère impression de gaspillages, si ce n'est de « caisse d'épargne » accumulant les excédents financiers, succédant ainsi à ceux des produits agricoles dans les années 80.

Il importe toutefois de rappeler que la majeure partie des sous-consommation de crédits et des erreurs de paiement est imputable à la « gestion partagée », c'est-à-dire au système de gestion des fonds communautaires (structurels notamment) appliqué par les Etats membres eux-mêmes 18( * ) . A ce titre, la Cour des comptes européenne avait dans son rapport relatif à l'exercice 2000 émis des critiques justifiées sur les graves défaillances des systèmes de contrôle des paiements agricoles 19( * ) en France et en Italie. Les évolutions en la matière dépendent tant de la capacité de coercition et de persuasion de la Commission que du niveau d'inertie des Etats membres.

Cette inertie budgétaire de certains Etats membres peut être reliée à l'inertie juridique en matière de transpositions des directives . Votre rapporteur tient à rappeler que la France est à cet égard le pays le moins bien positionné , avec le plus grand nombre de procédures engagées par la Cour européenne de justice (205 infractions constatées) et le taux le plus élevé de directives non transposées (3%, contre moins de 2% en moyenne dans les autres pays de l'Union). Le gouvernement a ainsi récemment pris une initiative, dont se félicite votre rapporteur, pour tenter de remédier à cette fâcheuse situation : dans les six prochains mois, chaque ministère devra réduire des deux tiers le nombre de directives non transposées de son ressort, et intégrer prioritairement celles qui ne l'ont pas été depuis plus de deux ans. En outre, une communication sur la transposition sera effectuée en conseil des ministres tous les six mois.