I. LES PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL

Les crédits proposés au projet de budget pour la communication audiovisuelle au titre de l'année 2005 s'inscrivent dans la continuité , mais dans le cadre d'une réforme de fond consistant à proposer , à l'article 24 du présent projet de loi de finances, l'adossement de la collecte de la redevance audiovisuelle à la taxe d'habitation pour les particuliers, et à la taxe sur la valeur ajoutée pour les professionnels .

Le projet de budget de l'audiovisuel public en 2005 atteint 3,464 milliards d'euros (y compris les ressources propres), en augmentation de 2,6 % par rapport à 2004.

Hors ressources propres, les dotations budgétaires s'élèvent à 2,66 milliards d'euros , dont 2,59 milliards d'euros ( en augmentation de 2,4 % ) au titre de la redevance audiovisuelle et 72,13 millions d'euros de dotations de RFI provenant du budget du ministère des affaires étrangères.

Votre rapporteur spécial regrette que la redevance soit ainsi maintenue à un niveau (116 euros) à peine supérieur à la moitié de celui de plusieurs de nos partenaires européens , dont l'Allemagne et la Grande-Bretagne (environ 190 euros dans ces deux pays). Votre rapporteur spécial se félicite que des ressources supplémentaires soient attendues du changement du mode de recouvrement mais observe que, sauf une augmentation du nombre de foyers fiscaux, les principales marges de progression à l'avenir seront fondées sur une augmentation du taux, arrondi cette année à l'unité inférieure (116,50 euros contre 116 euros). En effet, les gains déjà obtenus suite au renforcement de la lutte contre la fraude et l'exonération des résidences secondaires, proposée à l'article 24 du présent projet de loi de finances, rendent les perspectives d'évolution future de l'assiette moins dynamiques.

L'année 2005 devrait être caractérisée par des évolutions importantes pour le paysage audiovisuel, du fait notamment de la mise en place des premières chaînes de la télévision numérique terrestre (TNT), prévue début 2005 , laquelle contribuera à redessiner profondément le paysage audiovisuel, dans un contexte d'essor continu des télévisions locales.

En revanche, l'aléa du financement de la chaîne française d'information internationale pose la question du délai dans lequel notre pays disposera d'un indispensable outil de rayonnement international.

La mise en place de la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) , issue d'une initiative parlementaire, rénovera en profondeur le cadre de discussion budgétaire à compter de 2006. Les ressources de l'audiovisuel public devraient être examinées principalement lors du vote de la mission « Soutien aux médias », selon des objectifs et des indicateurs de performance en partie déjà définis.

A. UN CONTEXTE ÉCONOMIQUE CARACTÉRISÉ PAR L'ÉROSION DES RÉSULTATS D'AUDIENCE DES CHAÎNES DE L'AUDIOVISUEL PUBLIC

1. Audience des chaînes de télévision

Concernant le paysage télévisuel, le secteur du câble et du satellite a poursuivi son développement. Selon le bilan 2003 effectué par le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA), le nombre d'abonnés fin 2003 a atteint 5,9 millions (soit 25 % des 23,3 millions de foyers équipés d'un téléviseur), en hausse de 8 % par rapport à 2002, dont 2,4 millions d'abonnés au câble et 3,5 millions au satellite. Le chiffre d'affaires du secteur, estimé à 893,6 millions d'euros , a enregistré une progression de 5 % en 2003 , atteignant 13 % du chiffre d'affaires global du secteur de la télévision (lequel s'élève à 7,02 milliards d'euros), contre 12 % en 2002.

La part des chaînes thématiques tend à s'accroître : leur chiffre d'affaires en 2003 s'est élevé à 106,7 millions d'euros, ayant octuplé depuis 1993.

Le CSA a souligné que la France comptait toutefois « parmi les pays d'Europe les moins avancés en matière d'accès à la télévision multichaînes », en relevant a contrario que 2 millions de foyers étaient abonnés à Canal+ en version analogique hertzienne.

Dans un contexte global de consolidation de la situation financière des sociétés du secteur audiovisuel public, les résultats d'audience des chaînes de l'audiovisuel public, enregistrés entre septembre 2003 et juin 2004, ont marqué le pas ( cf. tableau ci-après ). Si la tendance longue à l'érosion de l'audience des principales chaînes hertziennes affecte France Télévisions à l'instar de TF1 et de Canal+ (à l'exception notable de M6), du fait de la diversification du paysage audiovisuel, les résultats globaux de France Télévisions ont reculé fin 2003 et début 2004 (38,5 % de part d'audience moyenne, contre 39,5 % entre septembre 2002 et août 2003), à la différence de TF1 (32,1 % contre 32,0 %), malgré les bons résultats de France 5 dont l'audience a progressé de 2,8 % à 3,0 % au cours de cette période et a doublé depuis 1996. L'érosion de l'audience a affecté plus fortement France 3 (de 16,1 % à 15,3 %) que France 2 (de 20,6 % à 20,2 %).

Entre septembre 2003 et juin 2004, France 2 s'est placée 39 fois en tête des chaînes pour ses résultats d'audience en première partie de soirée, dont 22 fois grâce à une fiction, un film ou une série. Quatre des cinq meilleurs résultats d'audience de la chaîne ont toutefois été obtenus à l'occasion de la retransmission d'événements sportifs, du fait notamment de la retransmission des matches de football de l' « Euro 2004 ».

Les meilleurs résultats d'audience de France 2
(septembre 2003 - juin 2004)

« La fiction française se classe bien dans le palmarès des meilleures audiences de la chaîne avec notamment de beaux succès pour les mini-séries telles que Les Thibault avec Jean Yanne (7,2 millions de téléspectateurs en moyenne pour les 4 épisodes), Franck Riva avec Alain Delon (7,1 millions de téléspectateurs pour les 3 parties) ou encore Ambre a disparu avec Miou-Miou (7,2 millions pour les 2 parties). Mais les séries continuent également à enregistrer de bons résultats : 7.1 millions de téléspectateurs pour l'épisode « Secrets » de L'Instit (15 ème position) ou encore 7,2 millions pour « Violences conjuguées » de P.J. (18 ème position).

« Le sport est également très présent cette année dans le palmarès (7 occurrences sur 20, dont 4 parmi les 5 premiers résultats). Le football attire en particulier avec l'Euro 2004 et notamment le match France / Croatie qui réunit plus de 14 millions de téléspectateurs, soit la meilleure audience de la chaîne depuis le 28 juin 2000 (demi-finale de l'Euro France / Portugal). Mais le rugby fait également recette cette saison : notons les 9.4 millions de téléspectateurs pour la demi-finale France / Angleterre lors de la Coupe du monde à 10h du matin (4 ème position) et 8,8 millions pour la revanche de cette rencontre dans le tournoi des 6 nations, pour la première fois en Prime Time (5 ème position).

« Le documentaire se classe dans le palmarès grâce à la Soirée spéciale Pompéi : à 21h, Le dernier jour de Pompéi attire 8,8 millions de téléspectateurs (6 ème position) et à 21h50, Les mystères de Pompéi en réunit 7,4 millions (13 ème position).

« L'information obtient toujours de bons résultats : 14 éditions du Journal de 20h réunissent plus de 6,6 millions de téléspectateurs.

« Les variétés sont également une valeur sûre : Shirley et Dino & Cie réunit 8,6 millions de téléspectateurs (7 ème position) et pas moins de 5 éditions du Plus grand cabaret du monde attirent plus de 6,7 millions de téléspectateurs.

« Deux classiques du cinéma français se classent dans le palmarès : 7,7 millions de téléspectateurs pour Le Père Noël est une ordure (D7) (9 ème position) et 7,5 millions pour Les Tontons flingueurs (D7) (11 ème position). L'inédit Tigre et dragon attire 6,7 millions de téléspectateurs et clôt le classement [en 20 ème position] ».

Source : France Télévisions

2. Audience des radios

Dans le domaine radiophonique, l'audience de la radio a enregistré un tassement au cours de la période récente (septembre 2003 - juin 2004), après des résultats 2003 considérés comme exceptionnels. A moyen terme, en dix ans, l'audience de la radio , en semaine, a fortement augmenté, passant de 36,2 millions à 40,3 millions d'auditeurs quotidiens (soit une progression de 4,1 millions d'auditeurs de 11,2 % ) entre les périodes septembre 1993 - juin 1994 et septembre 2003 - juin 2004.

En revanche, la durée moyenne d'écoute a diminué , de 193 à 175 minutes ( soit une baisse de 9,3 % ) au cours de la même période, traduisant une évolution des comportements de loisirs des Français. L'écoute de la radio sur Internet a enregistré une progression de 15 % au cours des six derniers mois, représentant 5.451.000 auditeurs.

S'agissant des parts d'audience , au cours de la saison radiophonique, septembre 2003 - juin 2004, 13.600.000 personnes (27,4 %) ont écouté au moins un programme produit par Radio France. Le groupe Radio France représente 22 % de la consommation totale du média, soit un tassement par rapport à la précédente saison septembre 2002 - juin 2003 (23,2 %) .

France Inter , avec une audience cumulée de 10,6 % soit 5.250.000 auditeurs, est en retrait de 0,6 point par rapport à l'an dernier. A l'instar de la quasi-totalité des stations, sa durée d'écoute quotidienne (130 minutes) diminue (- 7 minutes) mais elle est la radio généraliste qui recule le moins concernant cet indicateur et est, très proche derrière RTL, la station qui fidélise le mieux ses auditeurs au long de la journée.

France Inter se classe dans le trio de tête des radios dans 31 des 97 agglomérations mesurées par Médiamétrie en nombre d'auditeurs.

France Info , avec 10 % d'audience cumulée, enregistre une perte de 500.000 auditeurs en un an. Cette baisse est en partie imputable à la période de grèves du début de l'année 2004. France Info est première à Lyon, Nantes et Aix-en-Provence, ainsi que sur la région de Paris et de la petite couronne.

Avec 3.400.000 auditeurs, France Bleu est en progression pour la deuxième saison consécutive. Avec une audience cumulée s'établissant à 6,9 %, ce réseau généraliste est le seul à améliorer son score de l'an dernier.

France Culture , comme lors de la saison précédente, enregistre son meilleur résultat sur un jour moyen avec 1,3 % d'audience cumulée. Les 642.000 auditeurs sont restés en moyenne 89 minutes à l'écoute de France Culture. En élargissant son auditoire, la station réussit à toucher un public plus jeune et plus populaire.

France Musiques est écoutée un jour moyen par 900.000 personnes soit une part d'audience de 1,8 %.

L'audience de FIP reste stable par rapport à la saison précédente en Ile-de-France avec 2,3 % d'audience cumulée, soit 215.000 auditeurs, et à Strasbourg avec 4,4 % d'audience cumulée soit 16.300 auditeurs. La station progresse à Bordeaux, où sa part d'audience s'élève à 4,1 %, soit 27.100 auditeurs, contre 3,4 % l'an dernier, et à Nantes (4,9 % de part d'audience, soit 23.000 auditeurs, contre 3,4 % l'an dernier).

Ne comptant que 17 fréquences, Le Mouv' est écouté chaque jour par 454.000 personnes soit 0,9 % de la population âgée de plus de 13 ans. Les meilleurs scores du Mouv' sont obtenus à Toulouse (8,5 %), Dijon (7,8 %), Brest (6,9 %) et Rennes (6,8 %). Cette radio n'a pas encore atteint ses objectifs d'audience dans d'autres régions, notamment en Ile-de-France (0,9 %).

Le paysage radiophonique est toutefois appelé à évoluer prochainement, du fait du renouvellement entre 2006 et 2008 de plus de 57 % des autorisations accordées (soit 1.616 fréquences) , pour parvenir à un équilibre entre les radios nationales, indépendantes, associatives et du service public. En effet, de nombreux opérateurs se plaignent d'une couverture nationale insuffisante.

Sur cette question sensible, votre rapporteur spécial rappelle que le principe de reconduction des fréquences, pour une durée de deux fois cinq ans, a effectivement tendu à figer le paysage radiophonique pendant quinze ans ( cf. encadré ci-dessous ).

Face aux difficultés ainsi posées, le CSA a constitué en 2004 un groupe de travail spécifique, en vue d'apprécier les perspectives et les coûts d'une refonte de la bande FM susceptible de dégager des fréquences supplémentaires.

Le point de vue du CSA sur les dispositions réglementaires relatives à l'attribution des fréquences radiophoniques

« Tous les opérateurs souhaitant créer un nouveau service radiophonique ou développer un service déjà existant - que ce soient les radios associatives, les radios locales ou régionales commerciales, les réseaux thématiques et musicaux ou les radios généralistes - rencontrent des difficultés pour obtenir de nouvelles autorisations .

« En effet, depuis la loi de 1982 permettant d'attribuer des autorisations aux radios privées, des centaines de projets ont vu le jour et, au fur et à mesure des différents appels aux candidatures, toutes les régions ont été planifiées et toutes les fréquences susceptibles d'être utilisées ont été cherchées et attribuées. Actuellement, plus de 3.500 fréquences sont utilisées sur le territoire de la métropole par des radios privées .

« La loi du 1 er février 1994 - en instaurant le principe de la reconduction des autorisations hors appel aux candidatures deux fois pour une durée de cinq ans chacune- a contribué à figer le paysage pour une durée de quinze ans, alors que la totalité du spectre hertzien avait déjà été attribué.

« Depuis 1995, aucun appel général n'a donc pu être lancé par le CSA et il faudra attendre 2006 pour relancer des appels aux candidatures dans la plupart des régions où un grand nombre d'autorisations viendront à terme permettant la remise à plat du paysage radiophonique de ces régions.

« Le CSA n'a donc pu lancer que des appels aux candidatures très partiels portant sur les quelques fréquences qui se trouvaient avoir été libérées à la suite de liquidations judiciaires, de dissolutions d'associations, de restitutions d'autorisations, de rares non-reconductions et encore plus rares retraits d'autorisations. Radio France a également restitué un certain nombre de ses fréquences non utilisées , ce qui a offert de nouvelles disponibilités pour les radios privées.

« A chaque appel lancé, les candidats ont été très nombreux compte tenu de la rareté des fréquences vacantes. On peut souvent comptabiliser une vingtaine de candidatures pour une seule fréquence.

« Le choix du CSA est donc très difficile et il doit s'appuyer sur les critères fixés par la loi pour, sur chaque zone, sélectionner le projet qui répond le mieux au pluralisme des courants d'expression socioculturels, à la diversification des opérateurs et des formats, en veillant à l'équilibre des différentes catégories de radios . Il est évident que, pour un opérateur donné, la possibilité d'obtenir de nouvelles fréquences et d'augmenter son bassin de population est lente et incertaine.

« Au moment où un grand nombre de fréquences vont pouvoir être remises en jeu au terme de leurs quinze ans d'autorisations à partir de 2006, la question se pose de savoir si les plans de fréquences pourront être optimisés et si de nouvelles fréquences pourraient être dégagées.

« C'est pourquoi, le Conseil supérieur de l'audiovisuel a décidé lors de sa réunion plénière du 3 février 2004, de créer un groupe de travail dénommé "FM 2006".

« Ce groupe est chargé d'apprécier les perspectives et les coûts d'une refonte de la bande FM susceptible de dégager des fréquences supplémentaires. Une étude d'optimisation des méthodes de planification de la bande FM est conjointement conduite par le CSA et la DDM. Un appel d'offres a été publié au BOAMP le 18 juin 2004 et l'étude sera réalisée au cours des prochains mois.

« Par ailleurs, en application de l'article 105-1 de la loi du 30 septembre 1986, le CSA va lancer avant le 10 octobre 2004 une consultation contradictoire relative, d'une part, à l'aménagement du spectre hertzien et à l'élaboration d'un nouveau plan de fréquences en vue du développement optimal de la diffusion radiophonique, au plan national, et d'autre part, à l'optimisation de la diffusion et de la couverture des services associatifs, locaux, régionaux et thématiques indépendants . Les conclusions de cette consultation seront rendues publiques.

« En outre, la loi du 9 juillet 2004 a instauré un régime juridique pour la radio numérique. Préalablement au lancement d'un appel aux candidatures, le CSA procèdera dans les prochains mois à une consultation publique sur l'utilisation de la ressource pour la diffusion en mode numérique .

« Enfin, la loi sur les communications électroniques du 9 juillet 2004 prévoit un certain nombre de dispositions pour améliorer les procédures d'instruction des appels aux candidatures et en réduire les délais .

« Un délai de huit mois maximum devra s'écouler entre la date limite de dépôt des dossiers de candidatures et la délivrance des autorisations. Afin d'atteindre cet objectif, la liste des fréquences disponibles sera publiée en même temps que l'appel aux candidatures. Ces dispositions seront ainsi de nature à répondre aux souhaits des opérateurs radiophoniques de voir les appels aux candidatures aboutir plus rapidement ».

Source : CSA

B. LA RÉFORME DE LA REDEVANCE AUDIOVISUELLE

En application de la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances, la loi de finances initiale pour 2004 a remplacé la redevance, taxe parafiscale, par une « imposition de toute nature », mais sans modifier l'imputation du produit correspondant ni les bénéficiaires de son produit.

L'article 24 du présent projet de loi de finances propose, suite au rapport d'information 1 ( * ) de notre collègue député Patrice Martin-Lalande ayant effectué des recommandations en ce sens, d' adosser le recouvrement de la redevance audiovisuelle à la taxe d'habitation pour les particuliers, et à la taxe sur la valeur ajoutée pour les professionnels . En l'absence de détention d'un appareil de télévision, une déclaration sur l'honneur serait ainsi effectuée par le redevable.

Une augmentation du produit de la redevance audiovisuelle est attendue de cette réforme, du fait d' économies de gestion liées au redéploiement de 1.000 des 1.400 agents du service de la redevance, ainsi que d'une diminution de la fraude.

En revanche, la détention d'un poste de télévision dans les résidences secondaires serait désormais exonérée du paiement de la redevance audiovisuelle. Lors de la première lecture du projet de loi de finances pour 2005, l'Assemblée nationale a adopté en outre, à l'article 24, un amendement exonérant de redevance audiovisuelle une partie des enfants rattachés fiscalement au foyer de leurs parents pour le paiement de l'impôt sur le revenu.

Enfin, pour des raisons d'ordre technique, le taux de la redevance a été arrondi de 116,50 euros à 116 euros en métropole, et de 74,31 euros à 74 euros outre-mer.

Votre rapporteur spécial tient à rappeler ses positions sur la redevance et, plus généralement, sur les besoins de financement de l'audiovisuel public .

S'il ne veut pas être marginalisé, le secteur public doit bénéficier de ressources courantes - indépendamment de ses besoins d'investissements propres pour acheter des programmes - mais aussi se placer sur le marché de l'interactivité dont la croissance reste du même ordre de grandeur que celle de ses concurrents .

Il lui faut investir dans des programmes suffisamment attractifs, qu'il s'agisse de payer les droits de plus en plus lourds exigés pour les retransmissions sportives ou de conserver les animateurs vedettes - ce qui est un problème non seulement pour la télévision mais également pour la radio - ou de faire réaliser des émissions de fiction de prestige. C'est ce que le gouvernement a fait en consacrant aux programmes les moyens qui devaient être affectés aux nouvelles chaînes du numérique.

Votre rapporteur spécial se demande cependant si ces moyens sont suffisants. En effet, TF1 continue de disposer de recettes d'exploitation dont la croissance est deux fois plus rapide que celles de France Télévisions.

La question du devenir de la redevance reste entière . Si votre rapporteur spécial comprend que l'on ait pu retarder l'augmentation de la redevance pour des raisons psychologiques, il estime toujours qu' il faut, à moyen terme, l'augmenter substantiellement pour la rapprocher du niveau en vigueur chez nos principaux partenaires et, notamment en Allemagne où elle est de l'ordre de 190 euros, alors que le projet de loi de finances pour 2005 maintient son niveau à 116 euros. Il se demande, à cet égard, si le succès des bouquets payants en France ne vient pas précisément de la relative faiblesse du montant de notre redevance qui a permis aux Français d'accéder plus facilement aux services privés.

Défavorable à une budgétisation des ressources de l'audiovisuel public ainsi qu'à son financement par le produit des jeux , dans la mesure où il est essentiel de conserver au travers de la redevance un lien entre les Français et leur télévision, votre rapporteur spécial estime que l' adossement de la redevance sur la taxe d'habitation doit s'effectuer dans des conditions qui permettent d'éviter la confusion entre deux impositions aux finalités très différentes, l'une ayant un caractère local et l'autre un caractère national .

Pour d'évidentes raisons de lisibilité, l'article 24 du projet de loi de finances pour 2005 tend à aligner les exonérations de redevance audiovisuelle sur celles de taxe d'habitation , tout en prévoyant le maintien - au moins à titre transitoire - des actuelles exonérations de redevance audiovisuelle pour les redevables qui en perdraient le bénéfice. Ce choix pose toutefois la question d'une budgétisation à un niveau suffisant du remboursement des exonérations de redevance audiovisuelle , lequel s'établit à 440 millions d'euros dans le présent projet de loi de finances (contre 428 millions d'euros en loi de finances initiale pour 2004).

Votre rapporteur spécial s'interroge enfin sur les conséquences des évolutions technologiques quant au dynamisme de la redevance audiovisuelle, dont le fait générateur est inchangé . En particulier, lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2004 à l'Assemblée nationale, le gouvernement avait précisé que l'assujettissement à la redevance de toute personne possédant un moyen de réception de la télévision n'avait pas pour effet d'étendre cette imposition aux propriétaires de micro-ordinateurs .

Or les opérateurs de téléphonie ont développé des offres combinées à l'accès à Internet et à la télévision par ADSL , dans des conditions financières attractives. Si l'usager choisit de telles offres, sans détenir de poste de télévision, il n'est pas assujetti à la redevance audiovisuelle et le coût de cet accès à la télévision n'est actuellement pas directement répercuté sur le montant de son abonnement. Votre rapporteur spécial estime que le financement des organismes de l'audiovisuel public par la redevance est ainsi potentiellement menacé .

C. LES DÉFICITS DU FONDS DE SOUTIEN À L'EXPRESSION RADIOPHONIQUE

1. Le principe du fonds : le soutien aux radios locales associatives

Dans ce contexte d'évolution du paysage radiophonique, les dotations du fonds de soutien à l'expression radiophonique locale (FSER) consistent en des subventions à l'installation et des aides à l'équipement des radios locales associatives à faibles ressources publicitaires.

Le FSER a été créé par le décret n° 97-1263 du 29 décembre 1997 modifié, pris en application de l'article 80 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 modifiée relative à la liberté de communication.

Le fonds était alimenté jusqu'au 31 décembre 2002 par une taxe parafiscale assise sur les sommes, hors commission d'agence et hors TVA, payée par les annonceurs pour la diffusion de leurs messages publicitaires par voie de radiodiffusion ou de télévision .

Le produit de la taxe est affecté à la première section du compte d'affectation spéciale n° 902-32, dont la deuxième section relative au fonds d'aide à la modernisation et à la distribution de la presse est analysée par votre rapporteur spécial dans son rapport spécial « Presse ».

La transformation de cette ressource en taxe fiscale par la loi de finances pour 2003, conformément aux dispositions de la loi organique n° 2001-692 du 1 er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), n'a pas changé son affectation.

Aux ressources issues de la taxe sur les recettes publicitaires s'ajoutent diverses recettes, provenant principalement des restes à recouvrer de la précédente taxe parafiscale perçus tardivement ou à la suite de contrôles, ainsi que certains remboursements de subventions par les radios.

L' aide est attribuée aux radios hertziennes éditées par une association et accomplissant une mission de communication sociale de proximité lorsque leurs ressources commerciales sont inférieures à 20 % du chiffre d'affaires total .

L'attribution des aides intervient sur proposition d'une commission composée de onze membres, nommés pour trois ans par arrêté du ministre de la culture et de la communication, et dont la direction du développement des médias des services du Premier ministre assure le secrétariat :

- un président, membre du Conseil d'Etat, de la Cour des comptes ou de la Cour de Cassation ;

- quatre représentants de l'Etat (représentant les ministres en charge respectivement du budget, des affaires sociales, de la culture et de la communication) ;

- quatre représentants des radios associatives ;

- deux représentants des régies publicitaires.

2. Des aides multiformes

Le fonds de soutien à l'expression radiophonique locale verse différents types d'aides : des subventions d'installation, des subventions de fonctionnement et des aides à l'équipement.

L'aide au titre des subventions d'installation concerne uniquement les radios associatives nouvellement autorisées par le CSA. Son montant maximal s'élève à 15.250 euros.

Chaque subvention de fonctionnement est constituée de deux parts : une subvention principale et des majorations.

La subvention principale est versée chaque année aux radios remplissant les critères d'éligibilité du FSER. Le montant de cette subvention est fixé selon un barème établi par la commission compte tenu des produits d'exploitation normale et courante de la radio.

La commission peut majorer, dans la limite de 60 % de son montant, cette subvention de fonctionnement en fonction des efforts effectués par la radio en matière de formation professionnelle, d'éducation, de culture, de projet radiophonique collectif, de diversification de ses ressources, de communication sociale de proximité et d'intégration.

Mises en place en 1998, les aides à l'équipement ont pour but de contribuer au financement du renouvellement du matériel des radios éligibles au FSER. La commission finance ces investissements à hauteur de 50 % pour un montant d'aide plafonné à 15.250 euros. L'aide, versée en deux tranches de 60 % et 40 % chacune, peut être attribuée tous les cinq ans aux radios qui en font la demande.

Le plafond des aides à l'équipement, relativement bas et identique à celui des subventions d'installation, est adapté à la finalité de la taxe : soutenir des radios locales associatives de dimensions relativement modestes.

3. Une situation financière caractérisée par des déficits croissants

En 2003, la commission du FSER a attribué plus de 24 millions d'euros d'aides selon les trois formes précitées :

- les subventions d'installation , dont ont bénéficié 10 radios pour un montant total de 152.000 euros (soit 0,6 % de l'ensemble des aides accordées par le FSER) ;

- les subventions de fonctionnement , dont la part principale est versée chaque année aux radios remplissant les critères d'éligibilité du FSER, selon un barème établi par la commission : 574 radios ont obtenu une subvention de fonctionnement pour un montant total de plus de 20 millions d'euros en 2003 ; les majorations ont concerné 358 radios pour un montant total de 3,2 millions d'euros la même année, soit au total 23,2 millions d'euros (représentant 96,7 % des aides du FSER) au titre des subventions de fonctionnement ;

- les subventions d'équipement ont bénéficié à 108 radios en 2003, pour un montant total de 671.000 euros (soit 2,8 % de l'ensemble des aides du fonds en 2003).

S'agissant des ressources, de janvier 2003 à janvier 2004 inclus , les recettes du FSER issus du produit de la taxe ont représenté, après déduction de 2,5 % prélevés par la direction générale des impôts, 20,08 millions d'euros, en retrait de 2,02 millions d'euros par rapport aux recettes prévues en loi de finances initiale pour 2003 (soit 22,1 millions d'euros) .

Les restes à recouvrer de taxe parafiscale ont toutefois atteint 5,63 millions d'euros au cours de la même période, portant le total des ressources à 25,7 millions d'euros.

Si ces restes à recouvrer ont permis d'équilibrer l'activité du fonds en 2003, l'activité du FSER subit un effet de ciseaux :

- d'une part, les dépenses du FSER augmentent régulièrement (18,5 millions d'euros en 2000 ; 21,1 millions d'euros en 2001 ; 22,7 millions d'euros en 2002 ; 24,2 millions d'euros en 2003), même si l'extension du dispositif d'aide en 2003 ne rend pas les comparaisons entièrement pertinentes pour cette dernière année ;

- d'autre part, les ressources stagnent, à 22 millions d'euros dans les budgets prévisionnels 2003, 2004 et 2005, les ressources effectives issues du produit de la taxe n'ayant atteint que 20,1 millions d'euros en 2003.

Ce décalage entre les ressources et les dépenses pose, à court terme, la question de la pérennité d'un dispositif d'aide dont l'extension montre certes la vitalité du tissu local associatif, mais aussi le caractère limitatif d'une ressource affectée , non retracée au budget général de l'Etat.

Les associations représentatives des radios locales associatives ont ainsi attiré l'attention de votre rapporteur spécial sur les déficits prévisibles du FSER, estimés par ces associations à 3 millions d'euros en fin d'année 2004 et 7 millions d'euros fin 2005 .

Cette situation pose également la question du dynamisme de la taxe publicitaire ; comme pour la taxe sur le hors média dont le produit alimente le fonds d'aide à la modernisation et à la distribution de la presse, il est possible que l'ensemble des redevables ne s'acquittent pas de cette taxe . La relative faiblesse des montants pourrait toutefois expliquer l'absence de contrôles fiscaux spécifiques.

Il s'ajoute, dans le cas de la taxe publicitaire, un phénomène difficilement mesurable : les redevables de la taxe sont les annonceurs de messages publicitaires, notamment par voie radiophonique, dont les intérêts économiques ne coïncident pas nécessairement avec le maintien des radios locales associatives existantes .

D. LA GRÈVE DES JOURNALISTES DE RADIO FRANCE AU PREMIER SEMESTRE 2004

La grève des journalistes de Radio France au mois de janvier 2004, d'une durée sans précédent, a posé la question des disparités salariales entre les personnels des différentes sociétés de l'audiovisuel public qui relèvent d'une seule convention collective . Concernant les journalistes, la négociation conduite en 2000 a abouti à une redéfinition du système de rémunération et d'évolution professionnelle par la création et la mise en oeuvre de filières professionnelles : reportage, spécialisation, présentation, encadrement.

Dans ses réponses aux questionnaires budgétaires de votre rapporteur spécial, la direction de Radio France a précisé que, « conformément aux instructions des tutelles », « [elle] a refusé de négocier sur la base de cette revendication » des journalistes.

Le conflit a pris fin après la signature d'un accord qui prévoit la mise en oeuvre en 2005 d'un nouvel outil salarial collectif , dont Radio France a précisé à votre rapporteur spécial qu'il était fondé sur les principes suivants :

« Il ne modifie pas stricto sensu la valeur du point d'indice , n'intervient en rien sur les grilles de rémunération définies au mois de mai 2000, ni sur le calcul de la prime d'ancienneté.

« Sa valeur pour une année n + 1 est déterminée en deux temps : tout d'abord en année n, au moment de l'élaboration du budget de l'année n + 1 , une première discussion permet de dégager une hypothèse de masse envisageable (qui peut être validée ultérieurement ou non en fonction du budget dont dispose effectivement Radio France ainsi que des orientations décidées en la matière pour l'année n + 1); la seconde discussion intervient au moment où le cadrage salarial de l'année n + 1 est notifié à Radio France (soit habituellement aux alentours de l'été n + 1) : cette discussion porte d'une part sur la masse que l'on entend consacrer aux mesures individuelles, et par conséquent, ce qui « reste » à mettre en oeuvre, s'il y a lieu, sur le nouvel outil.

« Il est collectif (même pourcentage quelle que soit la fonction) mais d'application individuelle . Les ministères de tutelle ont posé comme condition que le système à mettre en oeuvre permette aussi de diminuer le poids des automatismes. L'accord prévoit donc que, lorsqu'un salarié bénéficie d'un avancement garanti, seule la mesure la plus favorable des deux (avancement garanti ou mise en application du nouvel outil salarial) s'applique pendant l'année considérée .

« Cet accord prévoit, outre la mise en oeuvre du nouvel outil salarial, le versement d'une prime exceptionnelle en 2005, qui ne saurait être inférieure à 400 euros bruts par journaliste selon l'usage prorata temporis. La direction de Radio France, conformément à l'accord, a versé un acompte calculé sur la base de 400 euros bruts au mois de mars 2004, sur cette prime. La régularisation de cet acompte interviendra lors du versement effectif de la prime exceptionnelle 2005 ».

Ces dispositions reprennent celles du protocole d'accord de fin de grève relatif au nouvel outil salarial collectif, dont des extraits sont reproduits dans l'encadré ci-dessous.

Compte tenu d'un effectif de 607 journalistes au 31 décembre 2003, il résulte que la prime de 400 euros minimum par journaliste devrait représenter au moins 0,24 million d'euros à l'échelle de Radio France.

Votre rapporteur spécial observe que le versement d'une prime exceptionnelle avait déjà été opéré en 2003, et participé à un dépassement de 3,7 % des dépenses de personnel de l'exercice 2003 par rapport aux prévisions budgétaires. Le dépassement des charges de fonctionnement a toutefois été compensé en 2003 par une augmentation plus importante des ressources de Radio France.

Par ailleurs, sur l'initiative du syndicat SJA-FO représentatif des journalistes, Radio France a été condamnée par le Tribunal de grande instance de Paris, le 4 mai 2004, à tenir une réunion annuelle de bilan de résorption des disparités et à inclure dans le périmètre des négociations l'analyse des disparités par rapport à France Télévisions .

Une première réunion a ainsi eu lieu entre les organisations syndicales et la direction de Radio France le 10 mai 2004, à l'issue de laquelle la direction de Radio France a annoncé qu'elle ferait appel à l' expertise d'un consultant. Les études concernant les rémunérations sont actuellement en cours.

Extraits du protocole d'accord de fin de grève relatifs au nouvel outil salarial collectif

« Article I a/

« Les parties signataires fondent tout d'abord leur accord sur l'obligation absolue d'appuyer ce nouvel élément sur les mécanismes qui régissent le système salarial actuel applicable à Radio France et, à ce titre, inscrit pleinement dans la convention collective de la communication et de la production audiovisuelles , ainsi, évidemment, que dans l'avenant audiovisuel de la convention collective nationale des journalistes.

« En aucun cas, ce nouvel outil ne saurait modifier quelque élément que ce soit des mécanismes salariaux existants dans l'entreprise :

«
• valeur du point d'indice,

«
grilles de rémunération et fonctionnement de celles-ci,

«
• prime d'ancienneté,

«
• principe et niveau des mesures individuelles décidées en commission paritaire annuelle.

« Article I c/

« D'ores et déjà, les parties conviennent d'appliquer à ce nouvel élément les caractéristiques générales suivantes :

«
• son application génère une disposition collective qui prend ses effets individuellement : dans l'année considérée, chaque journaliste en contrat à Radio France, en bénéficiera pleinement à titre individuel, à la condition expresse qu'il ne bénéficie pas au cours de cette même année d'une mesure d'avancement garanti sur la grille de rémunération. Dans ce dernier cas, le salarié bénéficie de la mesure la plus favorable au journaliste.

«
• il s'agit d'un élément constitutif pérenne du salaire de base.

«
• il est variable et soumis chaque année à une négociation annuelle dans l'entreprise dont la première réunion se tiendra dans le second trimestre de l'année, dans le cadre du budget de la société (...)

«
• il s'inscrit dans le cadrage salarial annuel fixé par les tutelles
».

Source : Radio France

E. LA QUESTION DE LA VIABILITÉ FINANCIÈRE DES TÉLÉVISIONS LOCALES

1. Un cadre juridique précisé par la loi du 9 juillet 2004 relative aux communications électroniques et aux services de communication audiovisuelle

a) Les évolutions législatives et réglementaires propres aux télévisions locales

L'attribution d' autorisations pour les chaînes de télévision hertziennes privées locales ou nationales s'effectue après une procédure d'appel à candidatures lancée par le CSA pour l'utilisation des fréquences disponibles conformément aux articles 28, 29, 30, 30-1 à 30-4 et 31 de la loi du 30 septembre 1986 modifiée.

La loi n° 2004-669 du 9 juillet 2004 relative aux communications électroniques et aux services de communication audiovisuelle a notamment modifié les conditions dans lesquelles peut être lancé un appel à candidatures pour des services de télévision. Il a été rétabli un article 31 prévoyant que si les décisions d'autorisation d'usage de la ressource radioélectrique sont susceptibles de modifier de façon importante le marché en cause, le CSA doit procéder à une consultation publique préalablement au lancement des procédures prévues aux articles 29, 30, 30-1, 30-5 et 30-6 de la loi du 30 septembre 1986 modifiée.

La loi n° 2000-719 du 1 er août 2000 modifiant la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication a ouvert, aux personnes morales relevant de la loi du 29 juillet 1901 sur les associations, la possibilité d'exploiter un service de télévision locale par voie hertzienne . La loi n° 2004-669 du 9 juillet 2004 a étendu cette possibilité à d'autres personnes morales que les sociétés commerciales ou les associations . Sont ainsi visées, à l'article 30 de la loi du 30 septembre 1986 modifiée, les sociétés d'économie mixte locale ou les sociétés coopératives d'intérêt collectif ou les établissements publics de coopération culturelle . Les modalités d'intervention des collectivités locales ont ainsi été élargies afin de permettre à toutes les collectivités d'éditer et de financer des télévisions locales , notamment par le biais des sociétés d'économie mixte.

La loi du 9 juillet 2004 précitée a également assoupli le cadre juridique antérieur par la suppression des contraintes liées à la composition du capital de l'éditeur d'une télévision locale hertzienne et par un allégement important des règles de cumul entre autorisations nationales et locales.

Par ailleurs, l'alinéa 1 de l'article 28-1 modifié par la loi du 9 juillet 2004 précité prévoit désormais un délai pour la délivrance de telles autorisations par le CSA. Ce délai est de huit mois à compter de la date de clôture de réception des déclarations de candidatures des éditeurs ou des distributeurs de services.

b) L'impact favorable de l'ouverture des secteurs interdits de publicité pour les télévisions locales

L'ouverture des secteurs interdits de publicité télévisée a également créé des conditions juridiques favorables au développement des télévisions locales.

Un décret du 7 octobre 2003 2 ( * ) a autorisé la publicité télévisée pour les enseignes de la grande distribution , ainsi que sur les produits, à l'exception des opérations commerciales de promotion se déroulant entièrement ou principalement sur le territoire national 3 ( * ) . Cette ouverture doit s'opérer progressivement à partir du 1 er janvier 2004 sur les chaînes locales du câble et du satellite (soit 15 millions de personnes), lors de son lancement, prévu en 2005, pour la télévision numérique terrestre (qui pourrait alors concerner 24 millions de téléspectateurs potentiels) et le 1 er janvier 2007 pour les chaînes nationales hertziennes analogiques.

Après accord avec les professionnels, une ouverture complète est effective depuis le 1 er janvier 2004 dans le secteur de la presse . De fait, dès le 1 er janvier 2004, certains titres de presse ont lancé des campagnes publicitaires télévisées, essentiellement des titres de la presse magazine spécialisés dans les programmes de télévision.

Concernant l' édition littéraire , le syndicat national de l'édition a proposé que la publicité télévisée soit autorisée sur les seules chaînes thématiques du câble et du satellite à compter du 1 er janvier 2004 , compte tenu des tarifs actuels des espaces publicitaires qui les rendraient accessibles à la plupart des acteurs concernés.

Aucune ouverture n'est prévue s'agissant du cinéma.

2. Le paysage élargi des télévisions locales

a) Les télévisions locales permanentes

Au 1 er octobre 2004, on dénombrait 10 télévisions locales hertziennes terrestres permanentes en métropole , dont cinq couvraient des agglomérations importantes et cinq desservaient une ou plusieurs villes moyennes et des zones rurales.

Dans la première catégorie précitée figurent :

- TLM à Lyon, dont le CSA a, par décision du 2 mai 2001, reconduit l'autorisation pour une durée de cinq ans ;

- TLT à Toulouse qui a vu son autorisation reconduite pour une durée de cinq ans par décision du 12 décembre 2000 ;

- la chaîne locale Clermont/1 ère , pour laquelle le CSA s'est prononcé en faveur de la reconduction de son autorisation hors appel aux candidatures le 15 juin 2004, et dont les représentants ont été entendus en audition publique par le CSA le 6 juillet 2004 ;

- la chaîne locale TV7 Bordeaux, autorisée le 26 juillet 2000 ;

- Canal 32, à Troyes, autorisée par décision du 24 juillet 2001 pour une durée de cinq ans.

Dans la deuxième catégorie figurent les télévisions locales dites « de pays » :

- Télé 102, dans l'agglomération des Sables-d'Olonne (Vendée), autorisée en juillet 1999, qui a vu son autorisation reconduite, pour une durée de cinq ans, par décision du 30 mars 2004 ;

- Télé Sud Vendée en Vendée, autorisée en octobre 1999, pour laquelle le CSA s'est prononcé, le 8 juillet 2003, en faveur de la reconduction de son autorisation hors appel aux candidatures, une nouvelle convention ayant été conclue le 15 juin 2004 ;

- TV8 Mont-Blanc en Savoie, autorisée en juillet 2000, pour laquelle le CSA s'est prononcé en faveur de la reconduction de son autorisation hors appel aux candidatures le 15 juin 2004, et dont les représentants ont été entendus en audition publique le 6 juillet 2004 ;

- TLP, dans le Luberon, autorisée le 25 novembre 2003 pour une durée de cinq ans ;

- TL7 Plaine du Forez, également autorisée le 25 novembre 2003 pour une durée de cinq ans.

Votre rapporteur spécial précise que, en 2004, le paysage télévisuel s'est également diversifié outre-mer . Il compte sept télévisions locales autorisées diffusant en clair par voie hertzienne terrestre en modulation de fréquence (ACG, ATV, KMT, Canal 10, Carrib'IN TV, Antenne Réunion, TNTV), trois autres étant en cours d'autorisation à l'issue d'un appel aux candidatures (Archipel 4, Eclair TV, La Une Guadeloupe).

b) Les télévisions locales temporaires en métropole

Des autorisations temporaires pour un service de télévision hertzienne privé peuvent être délivrées par le CSA, hors appel aux candidatures, pour une durée n'excédant pas neuf mois . A ce titre, le CSA a délivré 15 autorisations en 2003 et 9 autorisations au cours des neufs premiers mois de l'année 2004.

Les autorisations concernent à la fois des opérateurs expérimentés ayant déjà bénéficié d'autorisations similaires (vision 24 à Chamonix lors de la course automobile internationale des 24 heures sur glace de Chamonix, Alégria pour la féria à Dax, Solidays lors du festival Solidays à l'hippodrome de Longchamp, TV Mistral à Saint-Tropez, TV Bruits et Activa TV à Toulouse) et de nouveaux opérateurs (004 Télévision à Lille, Voi Sénart dans la région parisienne, Pays d'Aix TV à Aix en Provence).

Le CSA a choisi , par décision du 24 juillet 2003 et compte tenu du calendrier électoral, d'éviter de délivrer des autorisations pour une diffusion entre le 1 er janvier et le 13 juin 2004 inclus pour des projets de télévisions temporaires à caractère généraliste comportant notamment la diffusion de magazines et de journaux d'informations . Le CSA a justifié ce choix par le fait qu'il doit s'assurer que le projet présente toutes les garanties nécessaires pour éviter les éventuels contentieux qui pourraient naître des obligations fixées notamment par l'article L.52-1 du code électoral. Seuls les services de télévision de courte durée proposant une thématique précise qui sont liés à la couverture d'un événement particulier pouvaient ainsi faire l'objet d'une autorisation pendant cette période, selon le CSA.

Suite à cette décision, le CSA a demandé aux opérateurs concernés de modifier les dates des périodes demandées afin de se mettre en conformité avec la décision du 24 juillet 2003 précitée. Aussi, à l'exception de « Voi Sénart » et du « Mois le plus long », aucune autorisation temporaire n'a été délivrée pour la diffusion d'un programme local entre le 14 janvier et le 13 juin 2004.

Au cours de l'année 2003, le CSA a autorisé 12 opérateurs sur le canal 35 : Zaléa TV, Télé Bocal, Télé 91, Pariphérie, ILM La Locale, VO'TV, Téléssonne, Cinéplume, Lemers TSF, Télé Plaisance, OSF et Télé Kif Cité à diffuser des services de télévision de proximité sur Paris et la région parisienne jusqu'à la date d'entrée en vigueur de la recommandation du CSA relative aux campagnes électorales pour l'année 2004.

Depuis cette date, le CSA a été saisi de plusieurs demandes pour la diffusion de services temporaires de télévision sur Paris et la région parisienne, dont les dossiers sont en cours d'instruction.

3. Les appels à candidatures en métropole

Les nombreuses autorisations de différentes télévisions locales dans la période récente témoignent de la volonté de nouveaux opérateurs de nature très diverse de s'engager dans l'exploitation de services diffusés aujourd'hui en mode hertzien analogique et, à terme, en numérique.

S'agissant des demandes actuelles au titre de la ressource hertzienne analogique, à la suite de la mise en oeuvre, le 18 mars 2003 , d'une procédure de consultation des candidats potentiels à l'usage de fréquences analogiques pour des télévisions locales, le CSA a décidé de lancer des appels aux candidatures sur sept nouvelles zones : Montpellier, Marseille, Nîmes, Le Mans, Orléans et Tours, Angers. Par ailleurs, à la suite des appels déclarés infructueux sur les zones de Grenoble (8 juillet 2003) et dans le département de la Dordogne (15 juillet 2003), le CSA a décidé de lancer également de nouveaux appels sur ces deux zones, la ressource hertzienne étant disponible et de nouvelles demandes d'appels ayant été enregistrées.

Une première tranche de trois appels aux candidatures a été décidée par le CSA, lors de sa séance plénière du 25 novembre 2003 pour l'édition de nouvelles chaînes locales : à Nîmes (Gard), à Marseille (Bouches-du-Rhône) et à Montpellier (Hérault).

Une deuxième tranche de trois appels a été lancée, par décision du 27 janvier 2004, sur les zones du Mans, d'Orléans et de Tours.

Une troisième tranche a été lancé, par décision du 30 mars 2004, sur les zones d'Angers, du département de la Dordogne et de Grenoble.

A l'issue de la clôture des appels de la première tranche, le CSA a, par décision du 20 avril 2004, fixé la liste des candidats recevables sur les trois zones concernées : 8 candidatures pour Marseille, 2 pour Nîmes et 7 pour Montpellier.

Le CSA a ensuite entendu en audition publique les représentants des personnes morales candidates à Marseille, le 16 juin 2004, et les représentants des personnes morales candidates à Montpellier et à Nîmes, le 12 juillet 2004.

A l'issue de la clôture des appels de la deuxième et troisième tranche, le 27 août 2004, le CSA a fait connaître la liste des candidats ayant présenté un dossier de candidature sur les six zones : 5 dossiers de candidatures au Mans, 4 dossiers de candidatures à Orléans, 5 dossiers de candidatures à Tours, 4 dossiers de candidatures à Angers, 1 dossier de candidatures dans le département de la Dordogne et 4 dossiers de candidatures à Grenoble. Le CSA doit désormais vérifier que chacune des candidatures répond aux critères de recevabilité : dépôt du dossier de candidature dans le délai fixé par l'appel aux candidatures, existence effective de la personne morale, projet de télévision dont l'objet correspond au texte de l'appel.

4. Une situation financière toujours fragile

Les télévisions locales hertziennes ont connu jusqu'à présent des difficultés financières permanentes.

Bien qu' elles répondent à l'attente de leur public , les difficultés financières qu'elles continuent de rencontrer risquent de mettre en péril leur existence. En effet, les télévisions locales privées, dont les budgets de fonctionnement restent modestes, sont confrontées à des marchés publicitaires limités alors qu'elles doivent assurer quotidiennement la diffusion d'une programmation dont le coût est important même si elles font largement appel à la rediffusion de leurs programmes.

Les cinq télévisions dites « de ville » sont aujourd'hui dans une situation économique difficile. Votre rapporteur spécial rappelle qu'elles sont liées à la presse quotidienne régionale (TLM, TLT, TV7 Bordeaux, Clermont/1ère, et Canal 32 à Troyes). Elles enregistrent pour la plupart des pertes annuelles de 1,2 million à 2,5 millions d'euros en moyenne.

Les télévisions dites « de pays » sont majoritairement déficitaires. Elles sont néanmoins dotées de structures et de moyens plus faibles. L'une d'entre elles, TV8 Mont-Blanc, couvre une zone de diffusion plus vaste ce qui induit de lourdes charges de diffusion (680.000 habitants). Les budgets sont très variables : 1,6 million d'euros pour TV8 Mont Blanc qui réunit une douzaine de salariés et des bénévoles ; 276.000 euros pour Télé Sud Vendée à Luçon (68.000 habitants) et 110.000 euros pour Télé 102 aux Sables d'Olonne (40.000 habitants), moins de cinq personnes animent chacune de ces deux chaînes. La chaîne locale Aqui TV en Dordogne a dû déposer le bilan à la suite de difficultés financières et la liquidation judiciaire a été prononcée en janvier 2003.

Eu égard aux expériences étrangères, votre rapporteur spécial est toutefois confiant dans l'avenir des télévisions locales . Les attentes du public et l'ouverture des secteurs interdits de publicité créent un effet des conditions favorables. Il observe en outre que la mise en commun de l'espace publicitaire , aujourd'hui encouragée par le CSA dans l'instruction des dossiers de candidatures, constitue un facteur de succès financier, afin d'étendre la cible de diffusion .

F. LES PERSPECTIVES DE RÉVISION DE LA DIRECTIVE « TÉLÉVISION SANS FRONTIÈRES »

La directive dite « Télévision sans Frontières » (TVSF) n° 89/552/CEE du 3 octobre 1989 précise le cadre réglementaire d'exercice des activités de radiodiffusion télévisuelle dans l'Union européenne afin de garantir la mise en oeuvre du marché intérieur. A cette fin, la directive européenne coordonne les politiques des Etats membres dans un certain nombre de domaines (détermination de l'Etat compétent, quotas d'oeuvres européennes, publicité parrainage, télé-achat, protection des mineurs, libre accès aux événements d'importance majeure pour la société, droit de réponse). Ces règles sont minimales , ce qui signifie que les Etats membres restent libres de prévoir des mesures plus strictes ou plus précises.

Après une première modification en 1997, un réexamen est en cours suite au quatrième rapport d'application de la directive TVSF portant sur la période 2001-2002 et adopté le 6 janvier 2003 par la Commission européenne .

A l'issue d'une consultation des professionnels, des Etats membres et des autorités de régulation, la Commission européenne a publié le 15 décembre 2003 une communication intitulée « L'avenir de la politique de réglementation européenne dans le domaine de l'audiovisuel » , où est dressé un bilan des contributions au réexamen de la directive TVSF et tracé un plan d'action.

Le 30 avril 2004, la Commission européenne a effectué une proposition de réactualisation de la recommandation du 24 septembre 1998 sur la protection des mineurs et de la dignité humaine dans les services audiovisuels et d'information , en vue d'un aboutissement de ces travaux d'ici la fin de l'année 2004.

A plus long terme, la Commission européenne doit réunir trois groupes d'experts issus du secteur pour approfondir les discussions sur le contenu de la réglementation (s'agissant du champ d'application de la directive et du principe de l'Etat membre compétent), la publicité et le droit à l'information .

Dans ce cadre, le gouvernement français entend, conformément aux évolutions du droit national, limiter le champ d'application de la directive à la télévision (en excluant notamment les services de vidéo à la demande) et approfondir les discussions sur l'Etat membre compétent . Il souhaite également reconnaître en droit communautaire la notion de distributeur de services et poser la question de l' accessibilité des personnes sourdes et malentendantes aux programmes de télévision , ce qui constitue une des priorités nationales définies par le président de la République.

A ce stade de développement du droit communautaire, votre rapporteur spécial considère enfin que la coordination des autorités nationales de régulation , de préférence à la création éventuelle d'une autorité européenne de régulation des télécommunications, reste privilégiée .

G. LA QUESTION DU PIRATAGE AUDIOVISUEL

La question du piratage audiovisuel a pris un relief particulier à l'occasion de la récente condamnation, pour la première fois par un tribunal français, le 9 septembre 2004, d'un réseau de 18 pirates ayant permis à des milliers d'internautes de profiter gratuitement des bouquets cryptés de TPS et Canal+ . Les peines se sont échelonnées entre des amendes et huit mois de prison avec sursis assortis d'une amende de 1.000 euros.

Pour décourager ces pratiques qui leur sont préjudiciables, les chaînes concernées choisissent, notamment, de modifier fréquemment les paramètres des cartes utilisées, alors que le chiffre d'affaires annuel issu de la vente de matériel de décodage s'élève à 1 milliard d'euros en Europe.

Dans un récent dossier consacré à ce sujet, l'Institut national de l'audiovisuel (INA) 4 ( * ) a développé la délicate question de la ligne de séparation entre partage et piratage. Le partage - qui relève en fait d'une pratique illégale, à laquelle ont recours 8 millions de Français - s'opère dans le cadre du « pair à pair » 5 ( * ) sur Internet, c'est-à-dire de la collaboration entre machines sans passer par un dispositif ou un serveur central.

Au moment de la diffusion d'Internet haut débit, l'accès ainsi élargi aux biens culturels pose une question d'interprétation au regard du droit sur la propriété intellectuelle, et permet d'envisager un moyen terme entre la copie privée et la contrefaçon à des fins commerciales, tout en procédant à des distinctions entre les différents domaines, qu'il s'agisse de oeuvres musicales, des films ou des logiciels. La jurisprudence tend à s'engager dans cette voie, malgré les différences de pratique entre les pays.

L'article 49 de la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) fixe comme date butoir, pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires, au plus tard huit jours francs à compter de la date de dépôt du projet de loi de finances.

A cette date, 76 % des réponses étaient parvenues à votre rapporteur spécial.

* 1 Assemblée nationale, rapport d'information n° 101, XII ème législature, juillet 2003.

* 2 Décret n° 2003-960 du 7 octobre 2003 modifiant le décret n° 92-280 du 27 mars 1992 pris pour l'application des articles 27 et 33 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication et fixant les principes généraux définissant les obligations des éditeurs de services en matière de publicité, de parrainage et de télé-achat.

* 3 « Au sens du présent décret, on entend par opération commerciale de promotion toute offre de produits ou de prestations de services faite aux consommateurs ou toute organisation d'événement qui présente un caractère occasionnel ou saisonnier, résultant notamment de la durée de l'offre, des prix et des conditions de vente annoncés, de l'importance du stock mis en vente, de la nature, de l'origine ou des qualités particulières des produits ou services ou des produits ou prestations accessoires offerts » (extrait de l'article 1 du décret).

* 4 INA, « Les nouveaux dossiers de l'audiovisuel », septembre-octobre 2004.

* 5 Cette expression est décalquée de l'anglicisme « peer to peer » (en abrégé, P2P).