MM. Yves Fréville et François Trucy

III. LA REDUCTION DES DÉPENSES DE FONCTIONNEMENT PERMET DE RESPECTER LA NORME DE DÉPENSE

A structure constante, les dépenses de fonctionnement hors LPM (pour le maintien en condition opérationnelle) et hors dépenses de personnel du titre 2 diminuent de - 1,51 % en crédits de paiement et de - 6,79 % en autorisations d'engagement. Vos rapporteurs spéciaux souhaitent mettre en avant deux thèmes particuliers au sein des dépenses de fonctionnement : les externalisations et la dotation en carburant.

A. L'AUGMENTATION DES DÉPENSES D'EXTERNALISATION

Les dépenses d'externalisation du ministère de la défense ont largement augmenté, passant de 592 millions d'euros en 2001 à 963 millions d'euros en 2006, soit une augmentation de 62,5 % en cinq ans, comme le montre le graphique suivant.

(1) Infrastructure + maintenance + fluides +propreté + déchets

L'essentiel des dépenses externalisation concerne l'infrastructure, la maintenance et l'entretien, soit 477 millions d'euros et 49,5 % du total des dépenses externalisées.

Les principales externalisations mises en place jusqu'à présent sont présentées dans l'encadré suivant.

Les principales externalisations déjà réalisées

L'externalisation de la flotte de véhicules de la gamme commerciale

Ce projet dont la notification à General Electric est intervenue en décembre 2006, consiste à confier au secteur privé l'acquisition, le financement, la gestion et la maintenance du parc de véhicules légers de la gamme commerciale (20.120 véhicules).

Au-delà de l'économie directe qu'il procure, le projet devrait se traduire par une amélioration du service à l'utilisateur, une réactivité accrue, l'instauration d'un véritable contrôle de gestion et une mise à niveau des normes environnementales les plus récentes.

Le contrat se déroule de manière satisfaisante et les premières livraisons sont intervenues en avril 2007.

L'externalisation de la mise à disposition et de la maintenance des avions-école de la base de Cognac.

Elle s'inscrit dans un cadre global qui vise à optimiser le cursus de formation des élèves pilotes de chasse et de transport. L'état-major de l'armée de l'air a conduit ce projet en collaboration avec la SIMMAD (« Structure intégrée du maintien en condition opérationnelle des matériels aéronautiques du ministère ») avec comme idée maîtresse d'obtenir à la fois une amélioration de la performance et une réduction des coûts de la formation. C'est pourquoi la démarche a consisté à appréhender la formation des pilotes de chasse et de transport dans sa globalité afin d'en optimiser le cursus.

Cette externalisation permet des gains financiers substantiels, notamment par l'amélioration de la disponibilité des appareils utilisés (gain attendu à hauteur de 35 % par rapport au coût de l'activité en régie). Par ailleurs, une meilleure formation, permettra d'économiser par la suite des heures de vols lorsque les pilotes effectuent leur spécialisation (chasse ou transport).

La location de deux avions TLRA

Celle-ci est destinée à combler le déficit opérationnel induit par le retrait du service des DC8. Le marché a été notifié le 22 juillet 2005 et les deux avions sont entrés en service en juillet 2006 pour le premier et en janvier 2007 pour le second.

Source : extrait des réponses au questionnaire budgétaire de vos rapporteurs spéciaux

Des projets de grande envergure sont prévus pour 2008 : le déménagement de l' école nationale supérieure de techniques avancées (ENSTA) sur le site de l'école polytechnique. Dans le cadre de ce projet, le ministère pourra faire appel à des dispositifs innovants, comme le recours à une occupation temporaire du domaine public et la location des bâtiments avec option d'achat (AOT-LOA). En effet, grâce à la LPM, le ministère de la défense a la possibilité de recourir, en matière immobilière, à la procédure des baux emphytéotiques administratifs (BEA) et à celle des autorisations d'occupation temporaire du domaine public (AOT).

Vos rapporteurs spéciaux tiennent à rappeler que le régime de TVA applicable aux opérations d'externalisation en renchérit le coût par rapport aux dépenses effectuées directement par le ministère, ce qui en réduit l'intérêt apparent pour la défense (les recettes de TVA étant incluses dans le budget général). Ils ont également constaté que le recours aux externalisations posait parfois quelques problèmes dans les unités en période d'économies de fonctionnement dans la mesure où il s'agissait de dépenses « inéluctables » non susceptibles de réduction.

B. LA DOTATION EN CARBURANT

Les prix du pétrole ont pratiquement doublé entre 2004 et 2006 et triplé entre 2003 et 2006. Ils ne cessent d'augmenter depuis, et les prévisions pour 2008 ne contredisent pas cette tendance.

Le ministère de la défense a pris jusqu'à présent trois types de mesures :

- l'accroissement des dotations budgétaires ;

- la réduction des consommations compatibles avec les besoins d'entraînement des forces ;

- et la mise en place depuis septembre 2005 d'une politique de couverture par des instruments financiers à terme .

Cette politique aurait dû permettre de garantir aux armées un volume de carburant minimum à budget donné. Il s'agit en effet d'une couverture à terme contre les fluctuations excessives à la hausse pour tout ou partie du volume nécessaire aux armées. Afin de réduire l'investissement nécessaire pour réaliser ce type d'opération et de limiter les risques opérationnels, le ministère de la défense, en accord avec le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, a confié à l'Agence France Trésor le soin d'exécuter ses instructions et d'en assurer le suivi. La fixation de l'horizon de couverture, du montant, du calendrier et du niveau des prix relève de la décision du ministère de la défense.

La stratégie ministérielle en la matière consiste à : « Permettre de fournir aux armées un volume de carburant minimum à budget donné. Il s'agit donc de s'assurer, en couvrant tout ou partie du volume nécessaire aux armées, d'un niveau d'activité minimum, dans une optique d'assurance contre les fluctuations excessives à la hausse . »

Cette stratégie, élaborée par un comité des risques en fonction des besoins opérationnels des armées, peut être revue par ce dernier en fonction de l'évolution des principaux facteurs économiques et financiers influant sur le cours du pétrole. Ce comité comprend l'état-major des armées, les états-majors d'armées, la direction des affaires financières du ministère, le service d'essence des armées, le contrôle général des armées, ainsi que des experts spécialistes des marchés pétroliers.

L'objectif retenu pour 2007 était la couverture de 80 % des besoins, avec un budget prime de 15 millions d'euros. Le niveau actuellement couvert est de 65 % .

En ce qui concerne l'année 2006, 72 % des achats ont été couverts pour une dépense correspondant au paiement des primes d'option de 6,25 millions d'euros . Le résultat net de la couverture 2006 (dépenses pour le paiement des primes-remboursement par les organismes financiers) représente un coût de 4,17 millions d'euros .

Ce système, unique pour une administration, a pour but de se protéger contre les fluctuations excessives à la hausse. Selon le ministère : « il ne s'agit aucunement d'un instrument de spéculation destiné à gagner de l'argent ou à « en dépenser moins » par un jeu de prise de positions plus ou moins risquées. Il reste encore perfectible, notamment à cause des contraintes imposées par le cadre étatique, et il est encore trop récent pour tirer des conclusions sur son niveau d'efficacité ».

En réalité, le dispositif ainsi élaboré par le ministère pour se prémunir contre le risque de fluctuations conjoncturelles, ne permet pas, quel que soit son intérêt, de résoudre les déséquilibres structurels inhérents à la courbe haussière continue du prix du baril et des produits raffinés (notamment du carburéacteur) et à l'accroissement parfois très rapide de l'activité des forces liée à la conjoncture géopolitique. Vos rapporteurs spéciaux ont appris par ailleurs avec intérêt que la marine nationale avait, au cours de 2007, reconstitué une partie de ses stocks en s'approvisionnant directement et à des moments opportuns grâce à ses pétroliers sur le marché international.

Rappelons de plus, que l'article 5 de la loi de finances rectificative pour 2006 22 ( * ) a instauré une exonération de taxe intérieure sur les produits pétroliers (TIPP) jusqu'au 31 décembre 2008. Sera exonéré le carburant utilisé pour les activités ou les opérations militaires, conformément à la directive européenne 2003/96 relative à la taxation des produits pétroliers.

Vos rapporteurs spéciaux regrettent vivement que les services du ministère de la défense leur aient transmis trop tardivement les informations qu'ils souhaitaient recevoir, pour les années 2001 à 2008, sur la consommation de carburant, l'évolution des stocks de carburant, l'évolution du prix du pétrole, la répartition entre carburants opérationnels de carburant non opérationnel.

Les dotations « carburants opérationnels » pour les années 2006 à 2008 sont présentées dans le tableau ci-dessous.

La dotation en carburant opérationnel

(en millions d'euros courants)

LFI 2006

LFI 2007

PLF 2008

Air

186,26

226,18

214,99

Terre

61,65

47,38

41,57

Marine

70,38

86,48

89,59

Total

318,29

360,04

346,15

L'estimation des besoins budgétaires en carburants opérationnels pour 2008 est fondée sur un cours de baril de brent à 65 dollars avec une parité de 1,3 dollar/euro.

* 22 Loi n° 2006-1771 du 30 décembre 2006.