Les technologies de l'information et de la communication dans la cité : une nouvelle chance pour la démocratie ?

Éléments pour un débat

On pourrait croire que notre organisation démocratique est épargnée par la révolution numérique. Nous votons toujours selon les mêmes règles : le bulletin de vote et la carte d'électeur paraissent immuables. Nous élisons toujours des représentants qui, aux différents échelons de notre organisation politique, nous représentent et agissent avec, pour limite, la sanction électorale et le contrôle du juge.

Pourtant, déjà, de nombreuses collectivités locales ou des institutions ont recours aux réseaux, essentiellement " babillards " et Internet. Le Sénat, l'Assemblée nationale, les ministères, ont ouvert des sites Web.

Une petite navigation sur ces sites tend à prouver tout l'intérêt de ces initiatives. Par exemple, le serveur du Sénat offre l'accès à des informations jusqu'alors difficilement disponibles. En quarante-huit heures après publication au Journal Officiel , les internautes peuvent trouver les débats intégraux du Sénat ainsi que des rapports parlementaires. L'information devient plus démocratique, car gratuite, et consultable en tous points du territoire par quiconque est connecté.

De nombreuses initiatives locales poursuivent des objectifs à la fois de même nature et différents. Qu'il s'agisse d'information touristique ou économique, beaucoup de sites ont pour vocation d'encourager les projets locaux, d'attirer des emplois et de dynamiser l'activité.

D'autres ont une ambition plus citoyenne. Des communes, départements ou régions proposent aux citoyens des sources d'information consultables à tout moment. Aussi, l'essor d'une citoyenneté active dans la cité est-il favorisé par la mise en réseau. Quelques initiatives vont encore plus loin et s'inscrivent dans un projet global, qui entraîne, ou pourrait entraîner à terme, un bouleversement complet du rôle de l'élu. Dans ce cadre, le citoyen est invité à communiquer véritablement avec ses représentants.

Les conséquences induites par une telle réorganisation seront probablement beaucoup plus importantes qu'on ne l'imagine. Les citoyens acteurs n'attendront pas seulement de leurs représentants qu'ils agissent en leur nom ; ils voudront agir de concert et, pour ce faire, être en contact permanent avec les " chefs d'orchestre " que seront les élus.

Ces procédés de communication nouveaux, interactifs et immédiats, ne font-ils pas courir des risques réels à une conception démocratique respectant le temps de réflexion du citoyen ?

Au prétexte d'une démocratie supérieure à toute autre, une interrogation directe, aussi fréquente que possible sur des sujets complexes ou non, peut-elle véritablement simuler une démocratie directe ? Le citoyen invité à donner une réponse instantanée à la question posée de même manière ne le ferait-il pas par réaction ou intuition et non par réflexion, encore plus superficiellement qu'au cours d'un sondage d'opinion ?

On peut facilement imaginer les effets pervers de ce mode de consultation et combien la participation critique du citoyen à la vie de la cité ou de l'État serait illusion.