CONCLUSION

A l'issue d'une analyse nécessairement fouillée d'une réalité très mouvante puisque le fonds de réserve est d'abord un discours avant d'être une échéance, votre rapporteur rappellera, en guise de conclusion, les principales observations qui ponctuent le présent rapport .

En présentant un fonds de réserve construit sur l'hypothèse d'un taux de chômage de 4,5 % en 2020, le Gouvernement retenait un " scénario pédagogique " : convaincre les partenaires sociaux que, même en retenant des hypothèses extrêmement favorables, une réforme des retraites était inéluctable.

Un an plus tard, ce scénario pédagogique est devenu, dans l'esprit du Gouvernement, une " prévision crédible " qui permet de rassurer les Français avec un fonds de réserve aux recettes gonflées et aux échéances dédramatisées.

Il apparaît en outre que ce scénario repose sur une hypothèse de stricte indexation sur les prix de l'évolution des pensions. Or, ce scénario se révèle irréaliste dès sa première année d'application puisque le Gouvernement a choisi de donner un " coup de pouce " pour faire participer les retraités aux fruits de la croissance.

Dès la deuxième année de son existence, le fonds de réserve est en retard sur son plan de marche. Fin 2001, il manque plus de quinze milliards de francs par rapport à la somme affichée en loi de financement pour la sécurité sociale du fait, notamment, des produits des licences UMTS dont le fonds ne recevra en définitive que la portion congrue. Or, pour un fonds de réserve, le retard ne se rattrape jamais sauf à considérer un tel instrument comme une sorte de livret A " où l'on met de côté quand on peut ".

Plus grave encore, à peine séchée l'encre du plan de financement du fonds de réserve en mars 2000, le Gouvernement s'est employé à ... assécher sa première ressource : les excédents du fonds de solidarité vieillesse : financement des trente-cinq heures, prise en charge de la dette de l'Etat à l'égard de l'AGIRC-ARRCO, financement de l'allocation personnalisée d'autonomie (APA). Au total, ce sont 540 milliards de francs en cumulé 2020 qui ont été prélevés sur le FSV. Selon les hypothèses du Premier ministre, ces ressources auraient généré en outre 250 milliards de francs de produits financiers.

Aujourd'hui, ce ne sont plus les excédents du FSV qui sont susceptibles de financer le fonds de réserve : ce sont en réalité les excédents de la branche Famille captés par le FSV en contrepartie partielle des ponctions qu'il a subies. Ainsi, par transfert de charges (majoration des pensions pour enfants) et prélèvement sur recettes (13 % de la taxe de 2 % sur les produits du capital), la branche Famille alimente le FSV à hauteur de 415 milliards de francs en cumulé 2020.

Mais en définitive, sur 725 milliards de francs d'excédents confondus du FSV (310 milliards de francs) et de la branche Famille (415 milliards de francs), seul un quart (185 milliards de francs) est susceptible d'alimenter le fonds de réserve, compte tenu du prélèvement de 540 milliards de francs opéré pour financer les trente-cinq heures, la dette de l'Etat à l'égard de l'AGIRC-ARRCO et l'APA.

Enfin, le fonds de réserve vit aujourd'hui sous l'empire d'un immense paradoxe : l'horizon de ses placements est actuellement de deux ans sous forme de bons du Trésor alors qu'il doit faire face à une échéance à 20 ans. Cette situation est due notamment à l'absence d'une structure autonome dotée d'une mission univoque.