B. UN SYSTÈME INCITATIF PROCHE DU MODÈLE BELGE : UNE TAXATION À 10 % DES REVENUS INFÉRIEURS À 10 000 EUROS

L'avantage fiscal consiste en un taux d'imposition réduit de 10 % applicable aux revenus inférieurs à 10 000 euros, qui constitueraient une nouvelle catégorie de revenus.

Le premier alinéa de l'article 12 dispose ainsi que « les revenus perçus par les utilisateurs à travers les plateformes digitales, dénommés " revenus d'activités non-professionnels de l'économie collaborative" , sont déclarés dans une section spéciale de la déclaration de revenus. Pour les revenus jusqu'à 10 000 euros issus des plateformes digitales s'applique un impôt égal à 10 % . Les revenus supérieurs à 10 000 euros sont ajoutés aux revenus du travail, salarié ou indépendant, auxquels s'applique le taux d'imposition approprié ».

Cette disposition appelle plusieurs remarques :

- elle est fondée sur un seuil de revenu annuel unique , applicable à l'ensemble des revenus perçus via des plateformes en ligne, à l'instar de la proposition du groupe de travail, et conforme à la logique retenue par le Royaume-Uni et la Belgique. D'après la direction générale du Trésor, « le seuil de 10 000 euros a été proposé comme étant le plus pertinent pour distinguer une activité occasionnelle d'une activité régulière de type professionnel » ;

- le seuil de 10 000 euros est certes plus élevé que celui retenu par le groupe de travail, mais les revenus inférieurs sont soumis à un prélèvement libératoire : la proposition italienne est en cela plus proche de la solution retenue par la Belgique que de la solution britannique ou de la proposition du groupe de travail, qui sont des abattements ;

- la création d'une nouvelle catégorie de revenu , qui figurerait dans une case ad hoc de la déclaration fiscale des contribuables (l'équivalent de la déclaration n° 2042 C Pro en France, cf. supra ) et serait soumise à un taux fixe spécifique de 10 % en lieu et place du barème progressif de l'impôt sur le revenu, soulève donc là encore un problème d'égalité devant l'impôt .

Les remarques formulées au sujet de la loi belge s'appliquent donc à la proposition de loi italienne - et peut-être même davantage, compte tenu du fait que l'avantage s'applique à une assiette de 10 000 euros, ce qui peut représenter une part non négligeable du revenu d'un indépendant . Selon les cas, la mesure proposée pourrait donc soit nuire aux indépendants « physiques », soit au contraire susciter un fort effet d'aubaine, ces derniers « basculant » une partie de leurs recettes sur les plateformes, de manière plus ou moins artificielle 117 ( * ) .


* 117 Par exemple, un commerçant pourrait, dans sa boutique physique, proposer à ses clients de payer via une « plateforme », qui ne serait rien d'autre qu'une application sur smartphone voire même un terminal de paiement. Un tel cas pourrait le cas échéant faire l'objet d'un redressement - mais encore faut-il pouvoir le détecter, ce que la déclaration des revenus par la plateforme ne suffit pas à faire.