B. DES OBJECTIFS AMBITIEUX FIXÉS À L'AFD

La première partie du contrat d'objectifs et de moyens fixe 25 objectifs à l'AFD sous les rubriques suivantes : une AFD plus grande, une AFD plus partenariale, enfin une AFD plus innovante et plus « agile ».

1. Une croissance très rapide qui sera difficile à maintenir dans la durée ?
a) Des objectifs de croissance sans précédent

L' « AFD plus grande », première partie du projet de contrat d'objectifs et de moyens, regroupe 13 des 25 objectifs du COM. La période 2017-2019 est ainsi placée sous le signe de la croissance de l'agence , celle-ci devant être capable de se mesurer aux acteurs les plus puissants de l'aide au développement, qu'ils soient allemands, britanniques, américains ou chinois.

Cet objectif de croissance semble légitime dans la mesure où disposer d'une « force de frappe » suffisante et de la capacité à se mesurer aux autres acteurs de l'aide au développement est une condition de la pérennité de la politique de coopération française, des valeurs qu'elle porte et des résultats qu'elle doit permettre d'atteindre.

Avant même les déclarations du Président de la République de juillet 2017 relatives à l'objectif de 0,55%, il était déjà prévu que l'AFD connaisse une croissance rapide. Le précédent Président de la République avait en effet annoncé, lors du sommet des Nations unies sur le développement durable de septembre 2015, puis à la COP 21 en décembre 2015, une croissance de 4 milliards de l'activité de l'AFD dans les États étrangers à l'horizon 2020 par rapport à 2015 , dont 2 milliards pour le climat. Une telle cible impliquait environ 12,7 milliards d'euros d'activité annuelle pour le Groupe AFD à horizon 2020, dont près de 11 milliards d'euros dans les États étrangers. Cette croissance de 4 milliards devait reposer principalement sur les prêts, garanties et prises de participation, mais incluait aussi l'activité de dons, qui devait augmenter de près de 400 millions d'euros sur la même période. La trajectoire reposait sur une croissance de 3,1 milliards d'euros pour l'AFD et de 900 millions d'euros pour Proparco, avec un rythme de +800 millions de prêts et garanties supplémentaires par an. De plus, les fonds propres de l'AFD ont été renforcés en 2016 , pour un montant de 2,4 milliards d'euros, ce qui a permis d'accroître sensiblement les montants annuels moyens d'engagement, notamment dans une douzaine de pays où l'activité du groupe AFD était contrainte par la limite grands risques : Nigéria, Brésil, Colombie, Mexique, Chine, Inde, Indonésie, Vietnam, Maroc, Turquie, Afrique du Sud et Tunisie.

Les prêts du Groupe AFD ont ainsi atteint 7,7 milliards d'euros en 2017 en autorisation d'engagement dans les États étrangers, soit une augmentation de 1,4 milliard d'euros (+23%) par rapport à 2015. Parallèlement, l'activité en don a atteint 1,5 milliard d'euros en 2017 en autorisation d'engagement dans les États étrangers, soit une augmentation de 387 millions d'euros par rapport à 2015.

Toutefois, avec le nouvel objectif des 0,55% du RNB fixé par le Président de la République en 2017, les engagements de l'AFD devront croître encore plus rapidement.

Le premier objectif fixé par le COM prévoit ainsi désormais de passer de 9,4 milliards d'euros d'engagements en 2016 et à 10,3 milliards d'euros en 2017 à 11 milliards d'euros en 2018, puis à 14 milliards d'euros en 2019 .

Or, en 2017, avec 10,3 milliards d'engagements, l'AFD a généré une APD déclarable au CAD de 3,1 milliards d'euros environ 2 ( * ) :

Source : réponses au questionnaire budgétaire

Avec un volume d'engagements de 14 milliards d'euros à l'horizon 2020, l'aide générée devrait donc être (très approximativement) d'environ 4,3 milliards d'euros, soit 1,2 milliard d'euros supplémentaires seulement par rapport à 2017, peut-être davantage si la partie « dons », qui génère davantage d'APD, continue à progresser. Or, il est bien prévu que la hausse de l'APD concerne pour la plus grande partie le bilatéral, ce qui implique que la majeure partie de l'augmentation provienne des engagements de l'AFD. Pour que la France atteigne l'objectif des 0,55%, il est donc nécessaire que les engagements de l'AFD aillent au-delà des 14 milliards annuels.

Ainsi, lors de son audition par votre commission, le 9 octobre, le ministre des affaires étrangères a annoncé que l'agence devrait sans doute atteindre un montant de 17,9 milliards d'euros d'engagements en 2022 , soit une hausse de près de 80% des engagements entre 2017 et 2022.

En tout état de cause, le présent COM, qui se limite à 2019, ne fournit pas d'éléments sur la trajectoire future que devra suivre l'AFD pour contribuer à l'atteinte de l'objectif des 0,55%.

b) Des objectifs difficiles à atteindre ?

Les pays à qui l'AFD a le plus prêté au cours des trois dernières années sont des pays émergents tels que le Maroc, la Tunisie, la Colombie, le Brésil, l'Égypte, le Vietnam, l'Inde, etc. En raison de leur situation économique et financière, plusieurs de ces pays ne vont désormais plus être en mesure de contracter des emprunter auprès de l'AFD .

En outre, celle-ci se rapproche de sa limite « grand risque » sur un certain nombre de pays 3 ( * ) (Indonésie, Tunisie, Maroc), ou des limites géographiques internes au titre des expositions non souveraines (Turquie, Afrique du sud, Maroc).

Enfin, un risque de surendettement se fait jour dans plusieurs pays africains qui auraient pu, jusqu'alors, contracter des emprunts à taux bonifiés (cf. encadré ci-dessous).

Le retour du risque de surendettement des pays africains

Depuis 2010, les ratios d'endettement public et extérieur des économies d'Afrique sub-saharienne ont en effet globalement augmenté de façon rapide : le taux d'endettement extérieur de l'Afrique sub-saharienne est passé de 22 % du RNB en 2010 à 36 % du RNB en 2017, et de 74 % des exportations de biens et services à 155 % sur la même période. Le taux d'endettement public, qui inclut également la dette intérieure, a suivi une trajectoire similaire, de 27 % du PIB en 2010 à 48 % du PIB en 2017. En décembre 2016, sur 39 pays d'Afrique sub-saharienne analysés par le FMI et la Banque mondiale, 14 étaient classés en risque modéré de surendettement contre 10 en 2009, et 11 en risque élevé. Cette augmentation du nombre de pays en risque modéré et élevé de surendettement se traduit directement par une baisse du nombre de pays dans lesquels l'AFD peut intervenir en prêts souverains.

Pour l'ensemble de ces raisons, il risque d'être difficile pour l'AFD dans les mois et années à venir de trouver des contreparties pour continuer à accroître ses engagements financiers.

En conséquence , il paraît légitime de s'interroger sur la capacité de l'AFD à atteindre les objectifs de croissance sans dégradation de la qualité des projets et notamment sans s'éloigner de l'impératif de compatibilité avec les cinq principes mis en exergue par le plan d'orientations stratégiques (POS) de l'agence pour 2018-2022 : 100% Accord de Paris, 100% lien social, 3D (diplomatie, défense, développement), non souverain et partenarial.

c) Augmenter les engagements sans perdre le sens de la mission

Quelle sera la stratégie de l'AFD pour continuer à accroître son encours de prêts malgré les difficultés signalées ?

D'abord, puisqu'il devient difficile de prêter à des États, elle tentera d'avoir toujours davantage de contreparties non souveraines . Les activités non souveraines sont celles qui ne sont pas contractées ou garanties par les États, elles sont donc à destination des entreprises (publiques ou privées), des collectivités locales ou des ONG. Le deuxième indicateur du COM prévoit ainsi une cible d'activités dites « non souveraines » de 50% sur la durée du COM.

Ensuite, elle demandera sans doute de nouvelles extensions de son mandat géographique . De nombreuses extensions de mandat ont déjà eu lieu depuis 2014 (cf. encadré ci-dessous), notamment en Amérique du Sud et dans les Balkans. Lors du CICID du 8 février 2018, l'AFD a également obtenu l'autorisation d'intervenir dans la zone Pacifique pour mettre en oeuvre l'initiative adaptation-biodiversité annoncée à l'issue du Sommet « One Planet ». Enfin, l'AFD évalue depuis quelques mois l'opportunité d'une intervention dans les pays d'Amérique centrale. Elle mène ainsi des missions de prospection au Paraguay, au Guyana et au Costa Rica.

Évolution du mandat géographique de l'AFD entre 2014 et 2018

Si, en vertu du relevé de conclusions du CICID du 31 juillet 2013, l'AFD a « vocation à intervenir dans l'ensemble des pays en développement (éligibles à l'aide au développement au sens du CAD) », toute nouvelle intervention est toutefois soumise à l'accord écrit préalable de ses ministères de tutelle.

Ainsi, par lettre du 27 février 2014, les ministres des affaires étrangères et des finances ont autorisé la prospection dans de nouveaux pays d'Asie et d'Amérique Latine : Équateur, Bolivie, Costa Rica, Uruguay et Mongolie .

Le 25 septembre 2014, les ministres de tutelle ont autorisé l'AFD à intervenir en prêts en Birmanie (et non plus seulement au titre de la catégorie « pays en crise ») et en Équateur . Plusieurs prêts souverains ont depuis été accordés en Birmanie, notamment dans les secteurs de l'eau et de l'assainissement, du développement urbain, de la santé publique et de la sécurité alimentaire. En Équateur, l'AFD a octroyé en 2015 près de 184 M€ de prêts souverains destinés à des projets dans le secteur des infrastructures et du développement urbain. L'année 2016 a été marquée par un premier prêt non souverain accordé à l'Équateur, d'un montant de 63 M€, destiné à un projet visant à améliorer l'accès à l'eau potable.

Par lettre du 5 décembre 2014, les ministres des affaires étrangères et des finances ont autorisé l'AFD à intervenir en prêts en Bolivie . L'AFD a octroyé son premier prêt souverain à ce pays en 2016.

Le 19 novembre 2015, les ministres des affaires étrangères et des finances ont autorisé l'AFD à commencer l'instruction de projets de financements à Cuba . L'AFD a démarré ses activités dans le pays avec l'ouverture d'une agence à la Havane en novembre 2016 et un 1 er octroi en décembre de la même année (25 M€ en prêt souverain).

En 2016, une agence a également été ouverte à Tbilissi, la capitale de la Géorgie , et des projets de financement sont en cours d'instruction.

Par lettre du 10 mai 2017, les ministres des affaires étrangères et des finances ont autorisé l'AFD à intervenir en Argentine pour débuter rapidement des activités de financement dans le cadre d'un mandat spécifique, visant à promouvoir la croissance verte et solidaire, et en y favorisant des partenariats économiques. L'AFD a ouvert un bureau en septembre 2017 à Buenos Aires et a octroyé deux prêts pour un montant total de 100 M€ en 2017 en cofinancement avec la Banque interaméricaine de développement (BID) et la banque latino-américaine de développement (CAF).

L'année 2017 marque le retour de l'AFD en Angola . Le renforcement de la coopération entre les deux pays s'est concrétisé le 14 juillet 2017 par la signature à Luanda d'un accord intergouvernemental entre l'Ambassadeur de France et le Ministre angolais des Finances. Cet accord devrait permettre à l'AFD d'apporter son soutien technique et financier dans les secteurs prioritaires définis avec le Gouvernement angolais : l'énergie, l'agriculture, l'eau et l'assainissement. Un premier prêt souverain de 79 M€ en cofinancement avec la Banque Mondiale a été octroyé en mai 2018 en appui au secteur agricole.

Lors du CICID du 8 février 2018, les ministères de tutelle ont autorisé l'AFD à intervenir en Albanie et, sous conditions, en Serbie : le mandat d'intervention dans ce dernier pays ne deviendra effectif que lorsque ce pays aura mis en oeuvre les mesures requises afin de se conformer aux standards internationaux en matière de lutte anti-blanchiment et de financement du terrorisme.

Par la suite, le 19 juin 2018, suite à un Cosec-CICID, les ministères ont décidé d'autoriser l'Agence à intervenir dans quatre autre pays des Balkans occidentaux (Monténégro, Bosnie-Herzégovine, Kosovo et Macédoine) , en plus du mandat sur l'Albanie et sous conditions sur la Serbie, mais uniquement pour des projets à dimension régionale ou présentant un intérêt en termes d'intégration régionale ou en termes de rapprochement avec l'UE dans le cadre du processus de pré-adhésion.

Les agents de l'AFD devront également accroître leurs efforts de prospection dans tous les pays susceptibles de contracter des emprunts afin de repérer des projets potentiels.

Par ailleurs, l'AFD réfléchit à une évolution de ses méthodes afin d'accroître le rythme d'exécution des projets : création de nouveaux instruments plus attractifs pour les éventuels bénéficiaires, recherche d'impact rapide dans les projets, évolution vers un pilotage de l'activité par les signatures et les versements et non plus seulement par les engagements.

Dans ce contexte, si l'augmentation des moyens de l'AFD et plus globalement des moyens consacrés à l'aide au développement reste un objectif important, cet objectif ne doit pas conduire à moins de soucier de l'appropriation des projets par les bénéficiaires . L'efficacité de l'aide, on le sait, dépendent en effet fortement de cette appropriation . En résumé, la nécessité de trouver impérativement des nouveaux projets afin d'augmenter les engagements de l'AFD ne doit pas conduire à s'éloigner de l'impératif selon lequel il ne faut financer que les projets répondant à des besoins fortement exprimés et que les destinataires sont en capacité de s'approprier.

2. Des objectifs liés aux « Objectifs de développement durable » (ODD)

Après la croissance des engagements financiers, les objectifs suivants du COM se réfèrent aux objectifs de développement durables (ODD) issus de l'agenda international du développement, qui deviennent « la référence commune des activités de l'AFD ». Cette référence aux ODD pouvant paraître quelque peu abstraite, il est précisé que la « lecture » des ODD s'articule autour de la notion de « communs », dont la « gestion concertée » suppose la réussite de six « grandes transitions ».

Les six grandes « transitions » du développement selon l'AFD

-transition démographique et sociale ;

-transition énergétique ;

-transition territoriale et écologique ;

-transition numérique et technologique ;

-transition économique et financière

-transition politique et citoyenne.

Cette interprétation des ODD met certes l'accent sur certains des domaines précédemment identifiés par votre commission comme essentiels 4 ( * ) pour la réussite du développement, tels que la démographie ou la transition politique et citoyenne (qui correspond notamment à la lutte contre la corruption et pour la bonne gouvernance). En revanche, elle semble faire l'impasse sur les secteurs « traditionnels » de l'aide au développement : eau, agriculture, santé, etc.

La présentation des objectifs associés (objectifs 3 à 7) ne peut qu'accentuer cette impression. En effet, parmi les 17 objectifs de développement durable qui constituent la nouvelle feuille de route des Nations unies, seuls les ODD n°13 ( lutte contre le changement climatique ), n° 14 et 15 ( préservation de la biodiversité et des écosystèmes ), n°5 ( égalité hommes/ femmes ) et n°16 ( contribuer à l'avènement de société pacifiques et inclusives reposant sur des institutions efficaces ) sont retenus, sans que les critères ayant conduit à cette sélection ne soit explicités. Ainsi, qu'en est-il de la pauvreté (ODD n°1), de la santé (n°3), ou encore de l'eau/assainissement (n°6) qui constituent depuis longtemps des points forts des interventions françaises, et singulièrement de l'AFD ?

Ainsi, s'il est exact que la lutte contre le changement climatique ou contre l'érosion de la biodiversité, d'une part, la question de l'égalité homme/femmes, d'autre part, constituent des objectifs transversaux à fort effet de levier, néanmoins, le COM semble diluer quelque peu la spécificité de l'AFD dans les grandes tendances actuellement affichées par la communauté internationale en matière de développement durable, au risque de « plaquer » de manière quelque peu artificielle ces objectifs sur les projets de l'agence.

3. Un point positif : le retour de l'éducation parmi les grandes priorités

Vos rapporteurs se félicitent toutefois de l'ajout au sein du COM d'une nouvelle priorité, qui ne figurait plus parmi les grands axes de l'APD française depuis plusieurs années : l'éducation .

L'objectif n° 6 et son indicateur associé prévoient en effet une augmentation des subventions de l'AFD en matière d'éducation, de formation professionnelle et d'emploi, en accompagnement des 200 millions d'euros supplémentaires que la France s'est engagée à verser au partenariat mondial pour l'éducation (PME).

L'indicateur n°8 est ainsi intitulé « Montant des autorisations de financements annuels de l'AFD dans le secteur de l'éducation, la formation professionnelle et l'emploi » et est assorti d'une cible annuelle de 300 M€, tous instruments confondu, dont au moins 80 M€ en subventions (hors délégation de fonds et C2D) calculée en moyenne sur la durée du COM pour atteindre 400 M€ en 2019. Surtout, il est prévu que l'AFD versera 100 millions d'euros de subventions au secteur de l'éducation de base sur la période 2018-2020 .

4. Une priorité africaine qui doit être renforcée
a) Une nouvelle zone « Tout Afrique »
(1) Une priorité réaffirmée

L'objectif n°9 prévoit que l'AFD « reste le bailleur bilatéral de référence pour le continent africain ».

Le 13 et 14 janvier 2017, le Président de la République a annoncé, lors du 27 ème sommet Afrique-France pour « Le partenariat, la paix et l'émergence » à Bamako, que les engagements de l'AFD pour l'Afrique continentale seraient portés à 23 milliards d'euros sur cinq ans (2017-2021), soit une hausse de 15% par rapport aux engagements précédents de 20 milliards d'euros annoncés sur la période 2014-2018.

Le CICID du 8 février 2018 a confirmé que l'Afrique demeurera la première zone d'intervention de l'AFD, en maintenant l'objectif de concentrer la moitié des engagements de l'agence dans les États étrangers sur le continent africain.

Vos rapporteurs se félicitent de cette orientation, conforme aux positions prises par votre commission et qui reflètent à la fois l'histoire de notre aide au développement et la convergence des intérêts de notre pays, et plus largement de l'Europe, avec ceux du continent africain. Celui-ci est en effet la région du monde qui devrait connaître la croissance économique la plus forte au cours du 21 ème siècle, concentrant les plus grandes opportunités économiques, en même temps qu'il cumule les fragilités (risques sanitaires, croissance démographique trop rapide, développement du terrorisme) la fois menaçantes pour l'Afrique elle-même et susceptibles d'avoir des conséquences négatives sur le bien-être et la sécurité de l'Europe voisine.

En outre, la France possède une longue expérience en matière de coopération avec les pays africains, en particulier ceux de la zone francophone, que ce soit dans les domaines de l'agriculture, de l'éducation, de la santé ou encore des infrastructures. Elle dispose donc d'une expertise certaine dans cette région, gage d'une plus grande efficacité. La réaffirmation de la priorité africaine vient ainsi équilibrer le caractère trop « technocratique » des objectifs formulés en référence aux ODD .

(2) La nouvelle géographie « Tout Afrique »

L'AFD entend désormais appréhender l'Afrique selon une approche dite « Tout Afrique », sans distinction entre l'Afrique du Nord et l'Afrique subsaharienne. L'agence avance trois types de raisons pour cette nouvelle approche :

- le souhait de pouvoir mieux traiter les enjeux communs entre l'Afrique du nord et l'Afrique subsaharienne qui se multiplient, notamment en raison de l'accentuation des flux qui les relient. La zone saharo-sahélienne concentre en particulier des enjeux clés pour le continent, autrement mal pris en compte ;

- la re connaissance d'espaces multiples au sein du continent africain : l'Afrique du Nord est l'une des régions du continent Afrique et l'Afrique subsaharienne ne constitue pas un bloc cohérent. L'AFD a ainsi fait le choix de délimiter six régions en Afrique, chacune étant, ou devant être à terme, pilotée par une direction régionale : l'Afrique du Nord, l'Afrique de l'Est, le Golfe de Guinée, la région Sahel, l'Afrique Centrale et l'Afrique Australe ;

- la nécessité d'une approche continentale : c'est en effet à cette échelle que l'Afrique est désormais pensée par les institutions qui la représentent, en particulier l'Union Africaine . Cette approche rejoint également l'enjeu d'intégration régionale, qui se pose sur l'ensemble du continent.

La Répartition des engagements en 2017 par secteur en Afrique est la suivante :

Source : réponses au questionnaire budgétaire

(3) Des objectifs insuffisamment précis

Toutefois, les objectifs qui devraient traduire cette priorité, sont quantifiés par des indicateurs qui manquent de précision : d'abord, le volume de financement du groupe AFD à destination des pays les moins avancés (PMA), avec une cible de 2,2 milliards d'euros annuels à horizon 2019, ensuite, la part de l'effort financier de l'Etat dans les Etat étrangers consacrée par l'AFD à l'Afrique et à la Méditerranée (avec une cible de 85%), enfin, la part des subventions dans les États étrangers consacrée par l'AFD aux pays prioritaires (cible de 67%).

Tableau des subventions par zone géographique :

Source : réponses au questionnaire budgétaire

Ces deux derniers indicateurs, repris du précédent COM, avaient déjà été critiqués par votre commission lors de l'examen de celui-ci.

Sans vouloir remettre en cause le volume très important des prêts, y compris non bonifiés, dont le coût budgétaire est faible, il convient de souligner que leur augmentation constante a nécessairement des conséquences sur l'orientation géographique globale des engagements de l'AFD, puisque cet outil ne pouvant pas être utilisé dans les pays les plus pauvres, dont la capacité d'endettement est très faible. Les objectifs fixés dans le projet de COM concernant la répartition géographique de l'aide devraient permettre d'aller à l'encontre de cette tendance mais ce n'est pas le cas, car ils sont en réalité insuffisants pour mesurer effectivement l'engagement de l'agence dans les pays prioritaires.

En effet, ces objectifs et les indicateurs qui leur sont associés pourraient masquer un engagement réel limité envers les pays prioritaires 5 ( * ) : le deuxième objectif concerne en effet toute l'Afrique et la Méditerranée et englobe des prêts qui ne peuvent bénéficier aux PP, tandis que le troisième objectif ne concerne que les « subventions» qui constituent, pour le moment, une faible part des engagements de l'agence, même si celle-ci devrait croître fortement au cours des prochaines années.

La dispersion des dons apparaît nettement dans le tableau suivant :

Dons par pays en 2017

Source : réponse au questionnaire budgétaire

De plus, l'agence consacrait déjà, en 2015, 69% de ses subventions aux pays pauvres prioritaires. Quel est alors le sens d'un objectif fixé à 67%, comme c'est le cas dans le présent COM ? De même, la cible de l'objectif n°9, relatif au financement des PMA, est de 1,6 milliard d'euros en 2020, ce qui ne représentera que 13% des engagements de l'agence. Sachant que les PMA sont au nombre de 48 6 ( * ) , la proportion des engagements consacrés aux pays pauvres prioritaires (qui sont tous des PMA) sera finalement très faible, inférieure à 10% .

Le tableau qui suit présente ces autorisations d'engagements en subventions (en M€) selon la nomenclature sectorielle du CICID de 2013 et distingue l'Afrique subsaharienne et les pays prioritaires (PP) :

Subventions de l'AFD par secteur

Source : réponse au questionnaire budgétaire

Les autorisations d'engagements en prêts selon la nomenclature sectorielle du CICID de 2013 sont les suivantes, en distinguant l'Afrique subsaharienne et les pays prioritaires (PP) :

Prêts de l'AFD par secteur

Source : réponse au questionnaire budgétaire

Ainsi, en 2017, les pays prioritaires représentent 73,5% des engagements en subventions de l'AFD en Afrique subsaharienne, mais seulement 23,5% des engagements en prêts, de sorte qu'ils ne représentent au total que 29% des engagements de l'agence en Afrique subsaharienne... et 7,2% du total des engagements totaux de l'AFD dans les États étrangers !

Face à la distorsion entre l'objectif général de concentration des aides et la réalité vécue sur le terrain, vos rapporteurs demandent donc à nouveau que soit inscrit dans le COM un objectif supplémentaire pour les pays prioritaires, exprimé en termes d'effort financier global de l'Etat passant par l'AFD, donc pas seulement en subventions, mais également en éventuelles bonifications de prêts, avec une cible ambitieuse pour 2020 . Ceci permettra notamment de prendre la mesure de l'augmentation des subventions annoncée et de leur concentration effective sur les pays pauvres prioritaires.

5. Mieux répondre aux situations de crise

L'objectif 12 du COM s'intitule « renforcer l'action de l'AFD dans les pays en situation de fragilité ». Le COM mentionne deux initiatives associées à cet objectif : la Facilité « Paix et résilience » et l'Alliance Sahel.

Premièrement, le COM prévoit l'intensification de l'action de l'agence au Sahel grâce à sa participation à la mise en place de l'Alliance Sahel, présentée lors su G5 Sahel du 2 juillet 2017 et officialisée en marge du conseil franco-allemand du 13 juillet 2017, afin d'offrir un appui aux structures les plus proches de populations pour un résultat rapide.

L'AFD et l'« Alliance Sahel »

Sous l'impulsion de la France, l'Alliance Sahel, plateforme de bailleurs, a été lancée par le Président Macron et la Chancelière Merkel le 13 juillet 2017 pour une meilleure coordination de l'aide dans la zone. L'Alliance Sahel constitue la plateforme principale de coordination des bailleurs intervenant dans la région Sahélienne (en premier lieu UE, Allemagne, France, Banque mondiale, Banque Africaine de Développement, PNUD, mais également Royaume-Uni, Espagne, États-Unis, Norvège, Danemark, à titre de nouveaux membres ou d'observateurs). D'autres partenaires ont rejoint l'Alliance : l'Espagne, l'Italie, le grand-duché du Luxembourg et le Royaume-Uni. En outre l'USAID, les Pays-Bas, le Danemark, la Norvège et la Fondation Gates sont membres observateurs.

L'Alliance Sahel vise l'obtention de résultats de développement concrets sur les zones les plus fragiles et vulnérables (généralement périphériques et/ou transfrontalières) en favorisant une meilleure articulation des programmes de ses membres avec les problématiques humanitaires et de sécurité. Elle privilégie une approche en termes de redevabilité et d'efficacité de l'APD, ainsi que de transparence et d'évaluation des actions mises en oeuvre, en lien étroit avec les gouvernements partenaires et les sociétés civiles concernées.

L'Alliance repose sur quatre piliers :

a. une concentration des efforts dans six secteurs prioritaires d'intervention : i) employabilité des jeunes (éducation et formation) ; ii) agriculture, développement rural et sécurité alimentaire ; iii) énergie et climat ; iv) gouvernance ; v) décentralisation et services de base ; vi) sécurité et développement ;

b. une meilleure prise en compte des enjeux de sécurité : intégrer la contrainte sécuritaire dans la mise en oeuvre des projets de développement et renforcer les services de sécurité des États ;

c. une objectivation des résultats : les membres de l'Alliance sont déterminés à s'engager collectivement sur un nombre restreint d'objectifs précis à atteindre en 1, 3 ou 5 ans, partagés avec les pays bénéficiaires, par thématique, mesurables et définis à l'échelle de la région ;

d. une amélioration des modes opératoires : les membres sont prêts à examiner tout ce qu'il est possible de faire pour accélérer l'obtention des résultats de développement, en considérant l'ensemble des instruments disponibles, les propositions d'innovations et d'implication de nouveaux acteurs (des ONG locales, des approches communautaires, des partenaires privés...).

À l'occasion de la Conférence internationale de Haut Niveau sur le Sahel, les membres de l'Alliance Sahel ont présenté plus de 500 projets, pour un montant total de de 7,5MdEUR à mettre en oeuvre d'ici 2022. Douze de ces projets, particulièrement illustratifs de l'action de l'Alliance, avaient été présentés aux pays du G5 Sahel le 6 février 2018 à Niamey.

Parmi les 520 projets qui sont aujourd'hui inscrits dans le portefeuille de projets de l'Alliance Sahel, la France au travers de l'AFD contribue à hauteur de 1,8MdEUR, soit près de 18% de l'ensemble des engagements enregistrés (près de 10MdEUR), juste après la Banque mondiale qui contribue à hauteur de 4,7MdEUR, soit près de 47% du total. L'UE est le troisième contributeur avec 1,5MdEUR, suivi de l'Allemagne (950MEUR), de la Banque Afrique de Développement (545MEUR), du PNUD (350MEUR), de l'agence espagnole (AECID) avec 350MEUR et de l'Italie (17MEUR).

L'Alliance Sahel constitue notamment une initiative « moteur » dans l'intensification des liens entre les institutions de coopération et de développement françaises et allemandes. Ainsi, la mise en oeuvre de l'Alliance Sahel permet un dialogue renforcé avec le BMZ. La KfW demeure également l'interlocuteur régulier et naturel de l'AFD pour ses opérations dans la région, tout en soulignant la présence des représentants à la fois de la GIZ et de la KfW lors des rencontres des membres de l'Alliance Sahel. L'AFD et la KfW ont été particulièrement actives dans la création de l'Alliance Sahel en juillet 2017.

La dynamique partenariale entre la Banque mondiale et l'AFD a également joué un rôle essentiel dans la constitution de l'Alliance Sahel et le renforcement de la coordination entre les bailleurs dans la région, fruit de plusieurs années de coordination entre l'AFD et la Banque mondiale dans la région Sahélienne. La Banque mondiale et l'AFD renforceront leur coopération sur les pays du G5 Sahel, en particulier autour de deux programmes phares, l'un dans la région transfrontalière du Lac Tchad, l'autre dans la région de Konna au Mali. D'autres programmes font par ailleurs l'objet d'échanges renforcés, notamment au Niger autour de Tillabéry.

Le Royaume-Uni, au travers du DFID, a rejoint l'Alliance Sahel en mars 2018, ayant par ailleurs souligné son intérêt pour y conduire les réflexions autour de la thématique du genre, thématique co-animée aujourd'hui par le DFID et l'AFD. De plus, une coordination bilatérale entre la France et le Royaume-Uni est assurée par les rencontres annuelles de haut niveau (Sommet trilatéral DFID/MEAE/AFD) et les plans d'action qui en découlent. Ainsi, en 2018, le Sahel fait l'objet d'un axe de coopération renforcée entre le DFID et l'AFD, aussi bien en termes de partage de connaissance et de production intellectuelle (genre, 3D, éducation) qu'en termes de partenariat opérationnel (cofinancement avec la Banque mondiale et le DFID du Programme de protection sociale adaptative au Sahel - 64M Eur DFID, 6M Eur AFD).

La coordination entre la banque africaine de développement (BAD) et l'AFD se décline également à travers l'Alliance Sahel. La BAD dispose d'un Bureau de coordination des États en transition, chargé du développement et de la mise en oeuvre de la Facilité d'appui à la transition, qui s'adresse aux États fragiles et en crise dont les pays sahéliens. Ce bureau est l'interlocuteur désigné de l'Alliance Sahel. La coopération avec la BAD est toutefois restée en 2018 en-deçà du niveau attendu, du fait notamment que la BAD est en cours de réorganisation.

La Commission européenne est également membre de l'Alliance Sahel, et, à ce titre, une coordination régulière est assurée avec l'AFD.

En second lieu, conformément à une préconisation du rapport de nos collègues Henri de Raincourt et Hélène Conway-Mouret 7 ( * ) prônant la création d'un nouvel instrument pour améliorer l' « approche globale », une « Facilité pour l'atténuation des vulnérabilités et la réponse aux crises », rebaptisée ensuite Fonds paix et résilience et dite Minka 8 ( * ) , a été créée en 2016 et confiée à l'AFD, avec une vocation à financer des réponses structurantes à des crises le plu souvent à l'échelle régionale (de manière transfrontalière ). Ces réponses structurantes doivent prendre la forme d'une restauration de la confiance entre gouvernants et gouvernés (grâce par exemple à la restauration de services de base) ou entre groupes sociaux déchirés par des tensions (par exemple grâce à des projets bénéficiant de manière inclusive aux réfugiés et aux communautés hôtes).

Les initiatives portées par la facilité Minka se placent entre, d'une part, les actions humanitaires ou de stabilisation (mises en oeuvre par exemple par le Centre de crise du Quai d'Orsay) et, d'autre part, les actions de défense nationale, de sécurité de l'Etat ou de lutte anti-terroriste.

En 2017, les financements dans le cadre de la Minka se sont montés à 82 millions d'euros, dont 51% ont bénéficié à des Gouvernements partenaires, 33% à des ONG, 8% à la FFW, 6% à la commission économique des États d'Afrique de l'Ouest. Le Conseil d'administration de l'AFD a approuvé quatre initiatives dans ce cadre (cf. encadré ci-dessous).

Les quatre Initiatives du Fonds Minka en 2017

L'Initiative Sawa (« ensemble » en arabe) au Moyen-Orient (86 M€ octroyés en 2017, dont 37 M€ en provenance de MINKA) vise à renforcer la résilience du pourtour syrien et irakien, mesurée par une augmentation de l'indice du développement humain, le retour des personnes déplacées, et la réduction du chômage des jeunes. Elle comprend un volet analytique et sept projets. Parmi ceux-ci, cinq sont financés par le Fonds Paix et Résilience et ont pour objectifs d'améliorer l'accès aux services de base de plus de 230 000 personnes parmi les populations réfugiées et hôtes et l'intégration économique et sociale de 42 500 personnes vulnérables dont au moins 30% de femmes.

L'Initiative Tiwara au Sahel (39 M€ octroyés en 2017, financés en totalité par MINKA) vise à contribuer à prévenir et endiguer les crises au Sahel en agissant sur les facteurs de vulnérabilité qui les sous-tendent et en renforçant la résilience des populations et des États. Elle comprend cinq projets qui visent à renforcer par l'éducation et la formation professionnelle les moyens de subsistance de 3 000 jeunes, augmenter le taux de prévalence contraceptive, réduire l'insécurité alimentaire chronique au Burkina Faso; réduire le nombre et la gravité des conflits entre usagers des espaces agropastoraux, et améliorer le recours et la satisfaction des usagers des services publics déconcentrés et décentralisés au Niger. L'Initiative a précédé d'un mois l'Alliance Sahel annoncée en juillet 2017 pour un engagement concerté, cohérent et axé sur des résultats et qui regroupe France, Allemagne, UE, Banque africaine de Développement, Banque mondiale, et PNUD (rejoints en janvier 2018 par l'Espagne, l'Italie et le Royaume-Uni). Les approches sont complémentaires : Tiwara, axée sur les causes structurelles des crises sahéliennes, fait partie de la contribution française à l'Alliance Sahel.

L'Initiative Kouri autour du Lac Tchad (122,6 M€, mais non servie par MINKA en 2017, année dédiée à la mise en oeuvre des projets octroyés fin 2016) vise à contribuer à atténuer les facteurs de vulnérabilité qui ont nourri Boko Haram. Elle comprend un volet analytique et huit projets qui visent à appuyer le développement territorial local ; la sécurité alimentaire et la gestion des ressources naturelles et l'insertion socio-économique de la jeunesse. Elle vise directement plus de 120 000 personnes et a comme objectif, entre autres, d'augmenter de 30% ou plus le revenu de 2 650 ménages exploitants agricoles vulnérables.

L'Initiative Ga Songo (« paix » en langue songo) en République centrafricaine (7,1 M€, dont 3,9 M€ octroyés par MINKA en 2017) vise à y accompagner la sortie de crise et soutenir le relèvement. Elle comprend un volet analytique et deux projets opérationnels qui ont pour objectifs d'appuyer la relance agricole autour des villes secondaires de Berberati (sud-ouest) et Bambari (centre), avec 6 400 ménages et 20 groupements de femmes ciblés, et redynamiser le secteur de la microfinance pour accompagner 8 200 personnes et 2,3M€ d'investissements.

Le processus de redevabilité de Minka devant le Conseil d'administration de l'AFD est spécifique, ce dont se félicitent vos rapporteurs, tant l'ordre du jour habituellement surchargé de cette instance ne permet pas d'examiner attentivement tous les projets.

Il convient par ailleurs de souligner que l'efficacité de l'emploi du fonds Minka reste subordonnée au « passage à l'échelle » des projets par la mobilisation de co-financements, sans quoi ces projets, même pertinents à court terme, ne pourront pas apporter d'amélioration durable à la situation des régions en crise . Par ailleurs, la création de nouveaux emplois est cruciale pour sortir des crises et l'AFD doit développer des produits permettant d'orienter plus efficacement les ressources locales au bénéfice des très petites entreprises.

Le CICID du 8 février a prévu un doublement des sommes consacrées à la facilité d'atténuation des vulnérabilités et de réponse aux crises (FAV), soit un montant de 200 millions d'euros par an et a précisé que « Les méthodes expérimentées dans le cadre de l'Alliance pour le Sahel pour la mise en oeuvre des projets seront étendues à l'utilisation des fonds de la facilité ».

Vos rapporteurs estiment que le COM devrait inclure un indicateur spécifique pour les pays du Sahel , afin de montrer l'efficacité de la participation de l'agence à l' « approche globale » dans cette région d'Afrique. Il pourrait s'agir, par exemple, du montant des cofinancements mobilisés dans cette région grâce au fonds Minka .

6. Renforcer les partenariats
a) Un accent bienvenu sur les partenariats financiers

La coordination entre l'ensemble des bailleurs de fonds est un objectif essentiel, à la fois pour renforcer l'efficacité de l'aide au bénéfice des populations et pour accompagner les évolutions en cours du côté des financeurs.

Les pays mettant en oeuvre une politique d'aide au développement sont en effet de plus en plus nombreux. Les pays émergents, tels que la Chine ou l'Inde, font partie de ces nouveaux acteurs, mais également des pays du Moyen-Orient comme l'Arabie saoudite et les Émirats arabes unis.

En outre, on assiste à une montée en puissance d'autres acteurs tels que les les fondations « philanthropiques », au premier rang desquelles la fondation « Bill et Melinda Gates », qui accorde chaque année plusieurs milliards de dollars de subventions, en particulier dans le domaine de la santé.

Parallèlement, la diversité des acteurs est source de redondances et d'inefficacités du fait d'une multiplication de stratégies différentes voire concurrentes qui finit par jouer au détriment des pays aidés.

Enfin, compte tenu du faible montant des crédits de subventions qu'elle peut mettre en oeuvre en faveur des pays les plus pauvres, l'AFD doit impérativement rechercher à multiplier les effets de levier en cherchant à compléter le financement de ses projets par des sommes en provenance des fonds multilatéraux et de l'Union européenne.

Le précédent COM ne fixait à cet égard qu'un objectif très limité dans sa portée : le nombre d'autorisations d'engagement de l'AFD associant une subvention de l'Union européenne devait passer de 17 en moyenne entre 2010 et 2012 à 30 en 2016. Conformément aux recommandations faites par votre commission à l'occasion de l'examen de ce précédent COM, le nouveau projet a élargi cet objectif : c'est désormais le montant de l'ensemble des ressources tierces mobilisées en complément des financements du Groupe AFD, et non plus seulement des ressources en provenance de l'Union européenne, qui sera évalué.

b) Favoriser les retombées pour les entreprises françaises

Le COM comprend un objectif intitulé « Renforcer le partenariat pour le développement avec les acteurs économiques français », associé à deux indicateurs : la part en volume des marchés liés aux financements AFD ayant fait l'objet d'un appel d'offres international qui ont donné lieu au dépôt d'au moins une offre française, avec une cible fixée de 80%, ainsi que la part des projets vivants du portefeuille AFD impliquant un acteur économique français, avec également une cible de 80%.

Cet objectif de progression des retombées positives pour les entreprises françaises est conforme aux orientations fixées depuis plusieurs années à la politique de développement par le Gouvernement ainsi qu'aux préconisations faites par votre commission, notamment lors de l'examen du précédent contrat d'objectifs et de moyens.

c) Renforcer les partenariats avec les collectivités territoriales, les ONG, avec Expertise France et avec la Caisse des dépôts

Le projet de COM comporte des objectifs de renforcement de la collaboration avec les collectivités territoriales (soutien, notamment financier, à la coopération décentralisée), avec les ONG, avec Expertise France et avec la Caisse des dépôts et consignations.

(1) Le rapprochement avec la CDC : quel contenu ?

Le COM prévoit que l'AFD « poursuivra le rapprochement engagé avec la Caisse des Dépôts et Consignations qui s'est traduit le 6 décembre 2016 par la signature d'une charte d'alliance stratégique, prévoyant un renforcement mutuel des deux institutions grâce à des synergies en termes de compétences, de réseaux et d'outils de financement ».

Les étapes du rapprochement entre l'AFD et la Caisse des dépôts et consignations

Après avoir annoncé en conférence des ambassadeurs un rapprochement entre l'Agence française de développement (AFD) et la Caisse des dépôts (CDC), le Président de la République a confié le 12 septembre 2015 à Rémy Rioux, alors secrétaire général adjoint du Ministère des affaires étrangères, la mission de mener à bien un rapprochement entre l'AFD et la CDC. L'objectif affiché de cette réforme était double :

- en premier lieu, débloquer les ressources financières nécessaires pour que l'AFD puisse remplir des missions en pleine extension (...) ;

- en second lieu, le rapprochement des deux entités devait permettre de créer, selon les termes du rapport de Rémy Rioux, un « grand pôle financier public, actif au plan domestique et international, et de rejoindre ainsi un modèle institutionnel qui se développe en Europe continentale et dans de nombreux pays émergents » (...).

Le 12 janvier dernier, lors de la cérémonie du bicentenaire de la Caisse des dépôts, le Président de la République avait annoncé que l'AFD serait « intégrée par la loi au sein du groupe de la Caisse des dépôts ». L'AFD conserverait son statut d'établissement public industriel et commercial (EPIC). Il y aurait en outre une « étanchéité financière » entre l'AFD et l'établissement public Caisse des dépôts et consignations. Dès lors, la concrétisation du rapprochement entre les deux entités aurait seulement consisté en l'instauration d'une « gouvernance croisée » entre les deux. Cette réforme impliquait des modifications législatives au sein du code monétaire et financier, qui devaient être intégrées au projet de loi sur la transparence de l'économie dit « Sapin 2 » présenté au Parlement au cours du premier semestre de 2016.

Telle que présentée par le rapport de Rémy Rioux, la réforme soulevait plusieurs interrogations. La première concernait le sens même de la réforme. Alors que l'objectif affiché était de permettre à l'AFD de s'émanciper des contraintes financières qui l'enserrent en s'appuyant sur le capital de la CDC, c'est finalement l'Etat qui devra augmenter les fonds propres de l'Agence, comme cela a déjà été fait par le passé. Cette augmentation des fonds propres de l'AFD n'aurait donc eu aucun lien avec le rapprochement des deux entités.

Se posait ensuite la question de la gouvernance du nouvel ensemble (...). L'intérêt et l'efficacité d'une telle réforme en matière de gouvernance des deux organismes n'apparaissait pas de manière évidente.

Plus fondamentalement, il était nécessaire de rester vigilant sur les grandes orientations politiques qui sous-tendent, et doivent continuer à sous-tendre l'action de l'AFD. Il convenait notamment de veiller à ce que ces objectifs ne soient pas dilués dans un objectif plus vaste d'aide au développement durable se traduisant essentiellement par l'octroi de prêts à taux de marché à des pays déjà relativement développés, dans une démarche qui comporterait en outre une forte composante de soutien à l'international des entreprises françaises. Enfin, il convenait de veiller à ce que l'introduction d'un nouvel acteur, la CDC, ne conduise pas à une complexification supplémentaire du paysage de l'APD, déjà éclaté entre plusieurs opérateurs.

Compte tenu de l'importance de ces questions et considérant qu'en tout état de cause une réforme importante de l'AFD méritait un examen et un débat approfondis, M. Jean-Pierre Raffarin, président de votre Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, avait écrit au Premier ministre pour demander la disjonction de cette réforme du projet de loi sur la transparence de l'économie et la lutte contre la corruption dit « Sapin II ». Son souhait avait été entendu, le Gouvernement renonçant à présenter des dispositions législatives sur ce sujet. Entendu par votre commission, M. Rémi Rioux, directeur général de l'AFD, avait néanmoins fait valoir l'intérêt de poursuivre un rapprochement envisagé de manière pragmatique et a indiqué qu'une convention entre les deux organismes était en préparation.

Avis n° 142 (2016-2017) de M. Henri de Raincourt et Mme Hélène Conway-Mouret, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, déposé le 24 novembre 2016.

Il est notamment prévu « la création de caisses des dépôts en Afrique subsaharienne », sans que des indications soient données sur l'intérêt de telles créations pour les pays en développement de cette région. Les missions de la Caisse des dépôts en France sont en effet le produit d'une histoire ancienne et complexe et il ne semble pas évident qu'elles puissent être transposées dans le contexte de l'Afrique subsaharienne et y apporter une valeur ajoutée.

(2) Le rapprochement avec Expertise France : le choix d'une intégration au groupe AFD
(a) Une première étape de rapprochement inaboutie

L'agence d'expertise et s'assistance technique Expertise France a été créée par la loi du 27 juillet 2010 relative à l'action extérieure de l'Etat afin de rassembler des compétences dispersées dans une multitude d'organismes d'expertise publique, de conférer ainsi un nouvel élan à la coopération technique française et d'oeuvrer pour le développement tout en promouvant l'influence française dans le monde.

L'AFD et Expertise France, qui devaient constituer les deux principaux piliers d'une véritable « Équipe France du développement », devaient se rapprocher afin de développer des synergies potentielles . En effet, les deux agences relèvent des mêmes tutelles et interviennent très souvent dans les mêmes pays. En outre, le transfert à l'AFD, en 2015, par le ministère des affaires étrangères, des compétences en matière de gouvernance, a fait encore davantage converger l'activité des deux agences puisqu'Expertise France réalise une grande partie de ces opérations dans ce secteur.

Afin de concrétiser cette convergence de missions et d'objectifs, un accord-cadre avait été signé le 18 novembre 2015 par les deux agences afin de développer une véritable coopération, prenant la forme du financement sur crédits AFD d'une proportion significative des projets d'assistance technique et de renforcement des capacités mis en oeuvre par Expertise France.

Cet accord prévoyait ainsi qu'Expertise France avait vocation à devenir un partenaire privilégié de l'AFD dans l'accompagnement de ses opérations en matière de renforcement des capacités. À cette fin, il prévoyait des échanges d'information et un dialogue régulier entre les parties (réunions au niveau des directions et des équipes opérationnelles, réunions communes avec les tutelles), une coopération opérationnelle dans des domaines pilotes (notamment les pays en post-crise, la lutte contre le changement climatique, le foncier, les statistiques et les partenariats public-privé) et en matière d'accès aux financements européens ; enfin une collaboration étroite dans le domaine de la gouvernance s'étendant à la conception des projets.

L'accord-cadre fixait en outre un objectif chiffré : la réalisation par Expertise France sur crédits de l'AFD, en matière de gouvernance, « d'un volume d'activité estimé a minima à 25 millions d'euros par an , à compter de 2017, pour la mise en oeuvre des opérations d'ingénierie de projets ou de mobilisation d'expertises afférentes à ce domaine ».

Début 2018, cet objectif chiffré de coopération était cependant loin d'être atteint , malgré la volonté clairement exprimée par les dirigeants des deux entités. La difficulté serait pour une part « culturelle » : l'AFD est une banque de développement qui a pour principe fondamental de « faire faire », autant que possible par des opérateurs locaux et en passant systématiquement par des procédures de marché, ce qui rend selon elle difficile de passer directement par Expertise France. L'AFD ne considère pas, en outre, qu'elle doive déléguer le développement complet des projets à Expertise France. On peut également penser que l'AFD ne souhaite pas se retrouver dans une situation similaire à celle de l'Allemagne, avec une puissante agence de coopération, la GIZ, aux côtés de la banque de développement, la KFW, car ce « duopole » serait selon elle conflictuel et source d'inefficiences.

(b) Le choix d'une intégration d'Expertise France au groupe AFD

Parallèlement à la question du financement par l'AFD d'une partie de l'activité d'Expertise France se posait celle d'un éventuel achèvement de la réforme de l'expertise internationale française par une intégration au sein d'EF des opérateurs ministériels encore indépendants (FVI et ADECIA pour l'agriculture, CIVIPOL pour l'intérieur et JCI pour la justice). Dans son rapport d'information « Expertise France, 3 ans après : une réforme réussie, un modèle à consolider » 9 ( * ) , notre commission avait préconisé une telle intégration, ainsi qu'un renforcement du modèle économique d'Expertise France et une relance de la coopération avec l'AFD.

Sur le premier volet, le CICID du 8 février 2018 a finalement pris une position « minimaliste » en décidant que « des conventions seront conclues entre les ministères disposant d'opérateurs non intégrés à Expertise France en vue de permettre à Expertise France une mobilisation directe de l'expertise publique via les ministères techniques concernés dans le cadre d'actions agréées à l'avance avec eux, notamment sur financement communautaire ». À ce jour, ces conventions ne seraient pas encore négociées.

En revanche, en ce qui concerne le rapprochement avec l'AFD, le CICID a prévu que « le gouvernement décide de procéder à l'intégration d'Expertise France au sein d'un groupe AFD élargi à horizon mi-2019. Cette intégration préservera soigneusement la mission de service public d'Expertise France, les spécificités de son champ d'intervention sectoriel et géographique, ses modalités d'intervention, ses capacités de mobilisation de financement auprès des bailleurs internationaux et sa relation privilégiée avec les administrations mobilisatrices d'expertise publique ».

Lors de son audition par vos rapporteurs, le directeur général de l'AFD a indiqué que la simple perspective du rapprochement avait déjà dynamisé la coopération entre les deux agences et que, en 2018, l'objectif des 25 millions d'euros de financement d'EF par l'AFD serait enfin atteint, voire dépassé. Selon le directeur général, les agents de l'AFD seraient dorénavant davantage convaincus de l'intérêt d'un recours à la coopération technique, notamment dans les pays fragiles ou en crise. En outre, les règles de l'OCDE en matière de comptabilisation de l'aide permettraient à Expertise France de poursuivre ses activités dans le continuum sécurité-développement, même après son intégration au groupe AFD.

Par ailleurs, le COM reprend les points de vigilance formulés par votre commission dans son rapport s'agissant du rapprochement : il précise en effet que « cette intégration préservera soigneusement la mission de service public d'Expertise France, les spécificités de son champ d'intervention sectoriel et géographique, ses modalités d'intervention, ses capacités de mobilisation de financement auprès des bailleurs internationaux et sa relation privilégiée avec les administrations mobilisatrices d'expertise publique ».

Malgré ces assurances, vos rapporteurs observent que, ni dans le plan d'orientations stratégiques (POS) de l'AFD, ni dans le présent COM, les moyens devant permettre de garantir ces points de vigilance ne sont indiqués . Comment l'AFD financera-t-elle des projets d'Expertise France dans le continuum sécurité-développement ? Expertise France restera-t-elle un interlocuteur direct de la Commission européenne et des bailleurs internationaux ou bien cette relation directe sera-t-elle désormais réservée à l'AFD ? De même, si les représentants du ministère de l'Europe et des affaires étrangères ont exprimé devant vos rapporteurs leur volonté de pouvoir continuer à s'adresser directement à l'agence d'expertise, la gouvernance qui permettrait d'aboutir à ce résultat n'est pas encore définie.

7. L'objectif d'une AFD « plus innovante et plus agile »

La dernière partie des objectifs concerne les efforts devant être accomplis par l'AFD en matière d'innovation ainsi que d'amélioration de ses performances opérationnelles et financières et de sa productivité. Il s'agit notamment de moderniser le pilotage financier et le pilotage des risques financiers et opérationnels, d'améliorer la productivité de l'agence, enfin de renforcer sa responsabilité sociale et environnementale ainsi que la transparence de ses activités.

Dans ce dernier domaine, il convient de saluer la mise en ligne dès 2017 des données et informations de suivi des projets d'aide bilatérale de l'Etat et de ses principaux opérateurs, en lien avec le Ministère des Affaires étrangères et du Développement international et le Ministère de l'Économie et des Finances. Une telle mesure de transparence peut contribuer à faciliter le contrôle de la politique de développement et à mieux faire connaître à nos concitoyens les réussites de cette politique .

a) La forte diminution du résultat net de l'AFD en phase de croissance

Le COM affiche une forte baisse du résultat net de l'AFD : 288 millions d'euros en 2017 ; 140 millions d'euros en 2018 ; 90 millions d'euros en 2019. Selon les représentants de la direction générale du Trésor, entendus par votre rapporteur, il s'agit de la conséquence inévitable de la montée en puissance de l'AFD , qui s'accompagnera de nombreux recrutements et de nouveaux engagements financiers dont les retombées positives pour le résultat net n'interviendront qu'ultérieurement.

Tout en étant conscients du caractère inévitable de cette phase d' « investissement » au cours de laquelle le résultat net se dégrade nécessairement, vos rapporteurs estiment que cette période de croissance doit néanmoins aller de pair avec des efforts d'efficacité et de maîtrise des coûts afin de préserver la bonne santé financière de l'agence.

b) Mesurer la réussite des projets de l'AFD : renforcer l'évaluation

La totalité des objectifs présentés par le COM portent sur des engagements de l'agence, aucun sur les résultats atteints en termes de réussite des projets.

Si le précédent Contrat d'objectifs et de moyens comportait un objectif n°16 « Renforcer la qualité des projets de l'AFD par l'évaluation » assorti de deux indicateurs : « Part (en nombre) de projets de I'AFD dans les États étrangers (hors financements spécifiques) évaluée à leur achèvement selon la procédure décentralisée (ou évalués par la division de l'évaluation) » et « Part (en nombre) de concours ayant fait l'objet d'un RAP (rapport d'achèvement de projet) dans les 12 mois, bénéficiant d'une notation qualité au moins satisfaisante », le nouveau projet de COM ne comporte qu'un objectif n°25 intitulé : « Objectif 25 : Renforcer la capitalisation et la redevabilité du Groupe AFD » assorti d'un indicateur : « Organiser des réunions régulières avec l'Observatoire de la politique du développement et de la solidarité internationale ».

Ceci paraît insuffisant. Certes, l'aide française et en particulier celle de l'AFD est contrôlée et évaluée : les procédures internes de l'AFD sont celles d'une banque, avec en amont des contrôles indépendants de tous les projets, une vérification de la non-corruption des partenaires, etc. En aval, le ministère des affaires étrangères et le ministère des finances réalisent régulièrement des évaluations dans tel ou tel secteur de l'APD.

Si l'aide française se caractérise ainsi par l'existence d'une évaluation de redevabilité et de contrôle , elle manque en revanche d'un pilotage selon les résultats : quels sont les résultats que l'on souhaite obtenir avec un projet donné ? Quels sont les résultats dans un pays donné ? Comment modifier les projets pour améliorer l'atteinte de ces résultats ? Ainsi, selon le rapport de l'OCDE de la dernière « revue des pairs » de l'APD française : « La France devrait développer et intégrer la gestion axée sur les résultats dans l'ensemble de ses programmes de coopération au développement, afin que les résultats obtenus (du niveau projet au niveau central) servent à améliorer la redevabilité, le pilotage, la communication et l'apprentissage . »

Entre autres avantages, une telle évolution permettrait d'éclairer davantage les parlementaires ainsi que les citoyens sur les résultats que l'aide permet d'atteindre dans les pays qui en bénéficient. Elle donnerait ainsi davantage de sens à la politique de développement menée par notre pays et permettrait de disposer d'éléments de nature à éclairer des débats trop souvent focalisés sur des éléments purement financiers.

c) Une forte croissance des effectifs de l'AFD, une absence de données pour 2019

Concernant les effectifs de l'AFD, le COM précise simplement que « Le plafond d'ETP moyens (...) pour 2019 sera précisé dans le cadre des discussions sur le budget 2019 de l'AFD ». Il s'agit donc d'un élément supplémentaire pour lequel le COM ne permet pas d'avoir une visibilité suffisante.

Le tableau suivant renseigne sur les effectifs annuels au Siège de l'AFD et dans son réseau sur les cinq dernières années (périmètre hors Proparco). Ces données sont renseignées annuellement dans le cadre de l'enquête CORINTE 10 ( * ) .

Effectifs de l'AFD

Effectifs positionnés

2013

2014

2015

2016

2017

Evolution 2013-2017

TOTAL effectifs Réseau

766

778

787

832

852

11%

dont agences Etats Etrangers

617,5

628

639

687

707

14%

dont agences Outremer

135

136

136

134

134

-1%

dont autres Réseau*

13

14

12

11

11

-15%

TOTAL effectifs Siège

885

905

941

1 041

1 175

33%

TOTAL EFFECTIFS AFD

1 651

1 683

1 728

1 873

2 027

23%

Source : réponse au questionnaire budgétaire

Les effectifs totaux de l'AFD ont ainsi augmenté de près d'un quart entre 2013 et 2017 , principalement du fait de la croissance des effectifs au siège (hausse d'un tiers en cinq ans). Cette augmentation a suivi la montée en puissance de l'activité de l'agence (+32 % sur la même période, de 7,8 Mds€ en 2013 à 10,3 Mds€ en 2017).

Concernant Proparco, filiale du groupe AFD, l'évolution des effectifs est la suivante :

Effectifs de Proparco

Effectifs positionnés*

2014

2015

2016

2017

Evolution 2014-2017

TOTAL effectifs Réseau

146

150

166

205

40%

TOTAL effectifs Siège

12

12

12

14

16%

TOTAL EFFECTIFS Proparco

158

162

178

219

38%

Source : réponse au questionnaire budgétaire

Ainsi, au total, les effectifs annuels moyens du groupe l'AFD sont passés de 1808 en 2013 à 2205 en 2017, soit une augmentation de 22% et une croissance annuelle moyenne d'environ 5%.

L'AFD a effectué 550 recrutements entre 2016 et 2017, puis seulement 168 en 2018.

La poursuite annoncée de cette croissance des effectifs contraste fortement avec les réductions budgétaires annoncées lors de la présentation du PLF 2019 pour l'action extérieure de l'Etat, avec une forte diminution de la masse salariale du ministère de l'Europe et des affaires étrangères. Votre commission sera attentive au caractère raisonnable et contrôlé de cette progression des effectifs de l'agence dans les années à venir.


* 2 L'APD bilatérale nette de l'AFD en 2017 s'élève à 3 508 M€, en incluant un prêt accordé à l'Irak pour le compte de l'Etat. Sans prendre en compte ce prêt, le montant de l'APD bilatérale nette de l'AFD est de 3 127 M€.

* 3 L'AFD ne doit pas dépasser un maximum pour le ratio prudentiel « grand risque », c'est-à-dire ne pas avoir plus d'un quart de ses fonds propres engagés sur un seul Etat.

* 4 Par exemple dans le rapport « Sahel : repenser l'aide au développement »

https://www.senat.fr/notice-rapport/2015/r15-728-notice.html

* 5 La liste des pays pauvres prioritaires annexée au relevé de conclusions du CICID du 30 novembre 2016 est la suivante : Bénin, Burkina Faso, Burundi, Comores, Djibouti, Éthiopie, Guinée, Haïti, Madagascar, Mali, Mauritanie, Niger, République centrafricaine, République démocratique du Congo, Sénégal, Tchad, Togo.

* 6 Ils comptent d'ailleurs des pays qui sont traditionnellement davantage soutenus par d'autres donateurs (tels que le Royaume-Uni et les Etats-Unis), comme ceux de la corne de l'Afrique.

* 7 « Sahel : repenser l'aide publique au développement », Rapport d'information de M. Henri de Raincourt et Mme Hélène Conway-Mouret, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, n° 728 (2015-2016) - 29 juin 2016

https://www.senat.fr/rap/r15-728/r15-728.html

* 8 « Phoenix » en aborigène.

* 9 Rapport d'information n° 240 (2017-2018) de M. Jean-Pierre Vial et Mme Marie-Françoise Perol-Dumont, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, déposé le 24 janvier 2018 - http://www.senat.fr/rap/r17-240/r17-2401.pdf

* 10 Enquête annuelle du Gouvernement visant à disposer d'un état des lieux des moyens humains et financiers consacrés chaque année à l'action extérieure de l'Etat et à l'aide publique au développement.

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