B. DES INQUIÉTUDES PESANT SUR LA FLOTTE INDÉPENDAMMENT DE LA VARIABLE CLIMATIQUE

1. Une accélération de la livraison des Dash à prévoir

Une première inquiétude quant aux moyens aériens concerne une possible rupture capacitaire pour la réalisation du GAAr . Il a en effet été précisé que ce guet est effectué principalement par les Tracker, et, à partir de 2023, uniquement par les Dash qui les auront remplacés.

Si le calendrier de livraison était initialement ajusté pour assurer une constance dans les capacités aériennes, plusieurs personnes entendues ont souligné que l'arrivée de ces nouveaux avions est assez tardive compte tenu de la surutilisation de la flotte ces dernières années . Il faut également préciser que la perte d'un Tracker en août 2019, cumulée au retrait d'un premier Tracker du service au printemps 2019, a ramené leur flotte à 7 aéronefs. Ce nombre paraît insuffisant alors qu'il a été rappelé que les Tracker effectuent généralement leur mission par deux.

En 2020, le groupement d'avions prenant part au GAAr sera composé de 5 Tracker et 5 Dash. Un Dash supplémentaire permettrait de garantir un seuil d'activité opérationnel suffisant, cela suppose donc une accélération de la livraison programmée.

Recommandation n° 7 : afin d'éviter tout risque de rupture capacitaire dans la réalisation du guet aérien armé, envisager l'accélération de la trajectoire de livraison des nouveaux Dash.

2. Une alternative encore incertaine face au vieillissement des Canadair
a) Une prolongation de la durée de vie susceptible d'alourdir le coût de maintenance

Les deux tiers des 12 avions amphibies Canadair CL-415 auront plus de 25 ans en 2020 . Aucune limite de vie n'a été fixée par le constructeur pour ce modèle mais, en 2016, un retrait des plus anciens était envisagé à partir de 2025 - 2030. Le vieillissement de ces appareils, par ailleurs soumis aux usures liées à l'écopage, complexifie en effet les opérations de maintenance. Comme ont pu le souligner les représentants de Sabena, la fréquence et la durée des visites techniques pour ces avions ont ainsi déjà bien augmenté ces dernières années. Cette complexification du MCO est préoccupante à double titre. D'une part, elle réduit la disponibilité moyenne de la flotte à moyen terme, d'autre part, elle risque de susciter des surcoûts par rapport à l'engagement financier du contrat de maintenance .

L'alternative entre une rénovation de la flotte actuelle et le remplacement par de nouveaux avions amphibies demeure cependant toujours en discussion.

Le rapport précité de notre collègue député Éric Ciotti indiquait ainsi que des opérations de modernisation permettraient de prolonger la durée de vie des CL-415 jusqu'à quarante ans. La société Viking Air - qui a acquis le certificat de production des Canadair auprès de Bombardier - propose en effet « un kit de rénovation de l'appareil à mi-vie, offrant plusieurs options qui permettraient de traiter les obsolescences, en particulier en matière d'avionique, et d'apporter des solutions aux pannes récurrentes. »

Il a cependant été rapporté que Viking Air n'avait pas forcément intérêt à assurer le soutien des CL-415, alors même que la société envisage la production d'un nouveau modèle à compter de 2022, les CL-515. Les coûts de cette rénovation, ainsi que ceux du MCO qui s'en suivrait, pourraient ainsi être élevés , aussi ce projet de rénovation mérite-t-il une étude préalable sur son opportunité financière.

Recommandation n°8 : afin d'optimiser les dépenses relatives à la maintenance des avions bombardiers d'eau à moyen terme, établir un bilan coût-avantages précis sur l'opportunité de prolonger l'utilisation des Canadair CL-415.

Si l'estimation des coûts de cette première option semble difficile à réaliser en l'absence de retours d'expériences, s'agissant de la première génération de CL-415, elle paraît indispensable alors même qu'elle conditionne la seconde option tendant au remplacement par de nouveaux avions amphibies, envisagée en cas de forte augmentation du coût du MCO.

b) La commande de nouveaux avions bombardiers d'eau, une option qui semble préférable financièrement, mais qui nécessite des négociations dépassant le cadre national

Le projet de commande de nouveaux Canadair est encore très incertain , le marché des bombardiers d'eau étant caractérisé par une offre et une demande très réduites.

Cependant, il a été plusieurs fois souligné que le temps de redémarrage de la chaîne de production était très long et ne permettrait une livraison qu'en 2025 de deux nouveaux avions amphibies . Par ailleurs, la demande française de nouveaux avions ne suffirait pas pour que l'industriel se décide à produire ces nouveaux modèles. Il faudrait ainsi la commande d'une vingtaine d'aéronefs, un seuil qui excède largement le nombre de Canadairs de la flotte française .

Un projet d'appel d'offres international est donc à l'étude afin d'atteindre ce seuil, et pourrait notamment aboutir à la création d'une « flotte européenne » . Ce projet, comme l'avait souligné notre collègue Claude Haut dès 2006 dans son rapport sur la flotte de la sécurité civile 30 ( * ) , est « en apparence séduisant, mais se heurte à une difficulté liée au calendrier : les besoins de renouvellement des flottes sont étalés dans le temps, en fonction des achats, ce qui rend complexe l'acquisition groupée. » Cette difficulté semble en voie d'être levée, puisque dès 2016 , un groupe de travail rassemblant la France, l'Italie, la Grèce, le Portugal, l'Espagne, la Croatie ainsi que le Maroc et la Turquie, a été mis en place dans le but de favoriser les discussions communes autour du renouvellement de la flotte de Canadair.

Mais les négociations sont loin d'être achevées . Elles se poursuivent sous l'égide la Direction générale de la Protection civile et opérations d'aide humanitaire européennes de la Commission européenne, mais méritent donc d'être accélérées , ainsi que le soulignait notre collègue député Éric Ciotti en novembre 2017, « de nouveaux achats de Canadair doivent être envisagés dès aujourd'hui, au regard de la dizaine d'années qui aura été nécessaire pour mettre en oeuvre le remplacement de notre flotte de Tracker . » 31 ( * )

Recommandation n°9 : afin d'anticiper le remplacement des Canadair CL-415 vieillissants, accélérer les négociations européennes en cours en vue du lancement d'un appel d'offres commun de nouveaux bombardiers d'eau amphibies.


* 30 Rapport d'information n° 452 (2005-2006) de M. Claude Haut, sénateur, du 5 juillet 2006, sur la flotte aérienne de la sécurité civile.

* 31 Avis budgétaire précité de M. Éric Ciotti, député, sur le projet de loi de finances pour 2018.

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