V. UNE PRISE DE CONSCIENCE GÉNÉRALE

La pollution plastique est un sujet très médiatisé. Il ne se passe pas une semaine sans que des images, diffusées par la presse ou sur les réseaux sociaux, ne mettent en lumière le sujet et ses conséquences, participant à la sensibilisation de l'opinion publique et à l'émergence d'une prise de conscience collective.

Ces images, tournées dans des pays asiatiques ou africains, montrent des montagnes de déchets plastiques à ciel ouvert, des villages submergés par les matières plastiques, des recycleurs informels travaillant dans des conditions déplorables, des enfants se baignant dans une mer de plastiques, des plages jonchées de déchets.

Ces images montrent aussi des animaux marins de toutes les mers et les rivages du globe, échoués, entravés, enchevêtrés, emmêlés dans des objets en plastique que nous avons tenus entre nos mains et qui sont devenus des déchets marins.

Enfin, sans image parce qu'elle est moins visible, la prise de conscience de l'ampleur de la pollution par les microplastiques et leurs contaminants suscite une inquiétude croissante.

Face à cette prise de conscience et aux préoccupations environnementales et sanitaires qu'elle parvient à susciter, de plus en plus de voix s'élèvent non seulement pour réclamer un meilleur contrôle de la fin de vie des plastiques et de leur toxicité, mais également pour plaider en faveur de la limitation de certains usages, souvent inutiles.

A. L'IMPLICATION DES POUVOIRS PUBLICS

1. Au niveau international
a) L'interdiction de rejet des plastiques en mer

La mer a longtemps été considérée comme une poubelle. Son immensité permettant de se débarrasser de déchets que l'humanité ne voulait plus voir. Elle a trop longtemps servi de solution, au prétexte qu'elle aurait été en capacité « d'absorber » la pollution générée par les activités humaines sans conséquence pour son état écologique. L'existence d'eaux internationales, qui n'appartiennent à aucun État et qui ne faisaient l'objet d'aucune réglementation, a facilité ces comportements.

Néanmoins, à partir des années 70, et notamment à la suite de marées noires spectaculaires, la communauté internationale a commencé à se doter de règles pour limiter la pollution des océans en interdisant le rejet des déchets en mer. Peu à peu, les plastiques ont été intégrés dans cette logique.

(1) La convention de Londres

La convention sur la prévention de la pollution des mers résultant de l'immersion des déchets , dite « Convention de Londres », a été adoptée le 13 novembre 1972 et est entrée en vigueur le 30 août 1975 .

Elle contribue au contrôle et à la prévention de la pollution des mers à l'échelle internationale, en interdisant l'immersion de certaines matières dangereuses énumérées à son annexe I. L'immersion d'un certain nombre d'autres matières énumérées à son annexe II est subordonnée à la délivrance préalable d'un permis spécifique tandis que l'immersion de tous autres déchets est subordonnée à la délivrance préalable d'un permis général. « L'immersion » est définie comme l'élimination délibérée dans la mer de déchets ou autres matières à partir de navires, aéronefs, plateformes ou autres ouvrages artificiels, ainsi que le sabordage en mer de ces navires ou plateformes.

Initialement, la Convention ne couvre ni les émissions à partir de sources côtières (comme les égouts), ni les déchets provenant de l'exploration et de l'exploitation des ressources souterraines maritimes. Elle ne s'applique pas en cas de force majeure (lorsqu'il s'agit de sauvegarder des vies humaines ou de sécuriser des navires). Elle ne couvre pas non plus le stockage de matière dans un but autre que l'élimination.

En 1996, les Parties ont adopté un Protocole à la Convention de 1972 portant sur la prévention de la pollution des mers résultant de l'immersion de déchets (connu sous le nom de Protocole de Londres). Il est entré en vigueur en 2006 dans 30 pays, dont la France. Ce protocole permet d'actualiser la Convention en déplaçant son périmètre vers le milieu terrestre, permettant ainsi de créer un lien entre les déchets terrestres et maritimes. C'est un changement majeur qui permet une prise en compte plus rigoureuse de la prévention avec l'intégration de solutions de gestion des déchets à terre et qui interdit l'immersion de tous les déchets, à l'exception de ceux qui figurent sur la « contre-liste », dans une annexe du Protocole.

Le Protocole dispose également que « le pollueur devrait, en principe, assumer le coût de la pollution » et il souligne que les Parties contractantes devraient s'assurer que le Protocole n'a pas simplement pour résultat de déplacer la pollution d'un secteur de l'environnement à un autre.

Cette convention a donc pour effet d'interdire les rejets en mer qui pourraient à terme devenir des macrodéchets flottants, immergés sur les fonds marins ou dans la colonne d'eau.

(2) La convention Marpol (Marine pollution)

Cette convention internationale pour la prévention de la pollution marine par les navires a été élaborée par l'organisation maritime internationale et a été adoptée le 2 novembre 1973. Un Protocole additionnel a été adopté en 1978 à la suite d'une série d'accidents de navires citernes survenus en 1976 et 1977. Elle est la principale convention internationale traitant de la prévention de la pollution du milieu marin, que les causes soient liées à l'exploitation de matières premières en mer ou à des accidents.

MARPOL compte six annexes. L'annexe V cible les « Règles relatives à la prévention de la pollution par les ordures des navires ». 119 États (représentant 95,23 % du tonnage mondial des ordures produites par les navires) l'ont ratifiée et elle est entrée en vigueur le 31 décembre 1988. L'annexe V 142 ( * ) définit les différents types d'ordures et précise à quelle distance de la terre, et selon quelles modalités, elles peuvent être évacuées. Une disposition de l'Annexe V prévoit l'interdiction totale de jeter à la mer des matières plastiques, sous quelque forme que ce soit. Un registre des ordures doit être tenu et un contrôle des normes d'exploitation du navire peut être diligenté par les autorités portuaires.

(3) La convention des Nations Unies sur le droit de la mer

La convention des Nations Unies sur le droit de la mer a été adoptée le 10 décembre 1982 et est entrée en vigueur le 16 novembre 1994 . L'article 207 est consacrée à la pollution d'origine tellurique : « Les États adoptent des lois et des règlements pour prévenir, réduire et maîtriser la pollution du milieu marin d'origine tellurique, y compris la pollution provenant des fleuves, rivières, estuaires, pipelines et installations de décharge. » L'article 210 prévoit que les États adoptent « des lois et des règlements afin de prévenir, réduire et maîtriser la pollution du milieu marin par immersion. »

(4) Les conventions régionales

Il existe 18 conventions sur les mers régionales qui ont vocation à identifier les menaces qui pèsent sur l'environnement marin dans leur zone maritime et à fixer des objectifs approuvés au niveau international, par les engagements des gouvernements participants, pour protéger collectivement la biodiversité marine.

Deux conventions concernent la France métropolitaine : la Convention pour la protection du milieu marin de l'Atlantique du Nord-Est et la Convention de Barcelone pour la protection de la Méditerranée.

(a) La convention OSPAR

La Convention pour la protection du milieu marin de l'Atlantique du Nord-Est, dite Convention OSPAR, a été signée à Paris le 22 septembre 1992 par 16 parties contractantes 143 ( * ) . Elle résulte de la fusion de deux conventions internationales : la convention d'Oslo de 1972 (traitant de la prévention de la pollution marine) et la convention de Paris de 1974 (traitant des rejets de substances d'origine tellurique). La convention OSPAR vise à prévenir et à éliminer la pollution marine résultant des activités humaines en Atlantique Nord-Est (dont celle liée aux sacs plastiques et à la perte en mer de granulés en plastique), afin d'en protéger les écosystèmes et la diversité biologique.

La Commission OSPAR, composée des représentants de chaque partie contractante, évalue périodiquement l'état du milieu marin de sa zone de compétence, adopte diverses recommandations et décisions et veille à leur mise en oeuvre.

(b) La convention de Barcelone

La convention pour la protection de la mer Méditerranée contre la pollution régionale (convention de Barcelone) a été signée le 16 février 1976 pour prévenir et réduire la pollution marine par les navires, les aéronefs et les sources terrestres en mer Méditerranée. Elle interdit l'immersion de plastiques et s'adosse à un plan d'actions qui vise les sacs plastiques et la gestion des déchets dans les ports.

b) Une réglementation qui s'élargit aux plastiques
(1) La convention de Stockholm du 22 mai 2001 relative aux polluants organiques persistants

La Convention de Stockholm réglemente les polluants organiques persistants (POP), dont certains se retrouvent dans les produits ou déchets de matières plastiques.

Elle vise à réduire les niveaux de polluants organiques persistants qui s'accumulent dans l'environnement au fil du temps, en éliminant ou restreignant les rejets de POP provenant de produits chimiques industriels et de pesticides, des sous-produits de POP produits non intentionnellement, ainsi que des stocks et des déchets de POP. Elle a été adoptée le 22 mai 2001 et regroupe 184 parties.

En 2001, 12 substances chimiques ont été inscrites à son annexe A 144 ( * ) : l'aldrine, le chlordane, le DDT (dichlorodiphényltrichloroéthane), la dieldrine, l'endrine, l'hepatachlore, le mirex, le toxaphrène, les PCB (polychlorobiphényles), l'hexachlorobenzène, les dioxines et les furanes.

En 2009, neuf nouveaux composés ont été ajoutés à cette annexe A : le chlordécone, le lindane, l'alpha-hexachlorocyclohexane, le bêta- hexachlorocyclohexane, l'octabromodiphényléther, le pentabromodiphényléther, l'acide perfulorooctane sulfonique, l'hexabromobiphényle et le pentachlorobenzène.

En 2013, l'hexabromocyclododécane et les naphthalènes polychlorés ont été ajoutés, puis les chloroparaffines en 2018.

En mai 2019, les Parties à la convention de Stockholm ont adopté de nouvelles mesures relatives à l'interdiction de produits chimiques, dont l'inscription de deux nouveaux groupes de produits à l'annexe A : le dicofol (un pesticide particulièrement nocif pour les oiseaux et les poissons), et l'acide perfluorooctanoïque (PFOA, utilisé comme antitache et imperméabilisant).

Polluants organiques persistants et plastiques

Les pesticides organochlorés tels que l'aldrine, le chlordane, le DDT, la dieldrine, l'endrine, l'heptachlore, le mirex, le toxaphène, le dicofol, le chlordécone, le lindane, l'alpha-hexachlorocyclohexane, le bêta- hexachlorocyclohexane et l'endosulfan sont des polluants persistants dans l'environnement qui peuvent être adsorbés sur les plastiques lors de leur séjour dans l'environnement.

En revanche, les PCB (polychlorobiphényles), les PBDE (polybromodiphényléthers), l'hexabromocyclododécane, les chloroparaffines, les naphthalènes polychlorés peuvent avoir été associés à des polymères lors de leur cycle de vie.

L'hexabromocyclododécane par exemple a été très largement utilisé comme retardateur de flamme dans les panneaux d'isolation de polystyrène pour la construction.

Les PCB ont servi comme isolant électrique liquide, et dans une moindre mesure comme plastifiant.

Ces composés peuvent être émis dans l'environnement à tous les stades du cycle de vie des produits manufacturés (dès leur synthèse ou leur incorporation à un produit fini, par rejet atmosphérique, par le biais d'effluents industriels, lors de l'usage des produits, lors de leur fin de vie).

Dans l'environnement il est impossible d'attribuer la présence de ces composés à un relargage depuis un plastique. Lorsqu'il s'agit d'un composé réglementé de longue date comme les PCB, la probabilité que le relargage ait déjà eu lieu est également plus forte.

Le PFOA et le PFOS appartiennent à la famille des composés perfluoroalkylés et peuvent être émis directement ou être des produits terminaux de dégradation d'autres composés tels que les fluoropolymères. Des études récentes suggèrent que les polymères à base de fluorotélomères constituent une source considérable de composés perfluoroalkylés dans l'environnement.

Source : Yann Aminot, Ifremer.

(2) La convention de Bâle sur le contrôle des mouvements transfrontières de déchets dangereux et de leur élimination

La Convention de Bâle sur le contrôle des mouvements transfrontières de déchets dangereux et de leur élimination a été adoptée le 22 mars 1989. Elle est entrée en vigueur dès le 5 mai 1992 et fait partie des conventions quasi universelles, puisqu'elle comporte 187 parties.

Elle rappelle, en préambule, le risque que les déchets dangereux, et leurs mouvements, font peser sur l'environnement et la santé 145 ( * ) . En outre, la spécificité des pays en développement du fait de leurs « capacités limitées de gestion des déchets » est mentionnée dès le préambule. La première obligation générale consacrée par l'article 4, § 1, a) de la Convention concerne le droit souverain de chaque État d'interdire l'entrée ou l'élimination de déchets dangereux et d'autres déchets d'origine étrangère sur son territoire , sous réserve d'en informer les autres Parties, selon les dispositions pertinentes. La suite de l'article 4 prévoit notamment que les États doivent mettre en place des installations adéquates d'élimination pour permettre une gestion écologiquement rationnelle des déchets et réduire leurs mouvements transfrontières. En outre, la gestion écologiquement rationnelle des déchets par l'État tiers est érigée en véritable condition à leur exportation (article 4, § 2, g)). Un contrôle effectif de leurs mouvements et des documents de traçabilité et d'information est par ailleurs mis en place. Le trafic illicite de déchets est considéré comme une infraction pénale (article 4, § 3).

Avant la quatorzième conférence des Parties, en 2019, les plastiques n'étaient que très partiellement intégrés dans le champ d'application matériel de la Convention 146 ( * ) . Désormais, le contrôle des déchets plastiques contaminés ou en mélange, dont les déchets en plastique difficilement recyclables, s'est vu considérablement renforcé. Les exportateurs devront obtenir, pour ces déchets plastiques, le consentement préalable des pays importateurs « en connaissance de cause », c'est-à-dire qu'ils pourront obtenir des informations sur les produits en question et leur caractère recyclable, ou non, avant de choisir d'accepter, ou pas, l'importation. Cette mesure prend effet au 1 er janvier 2021.

L'Union européenne et ses États membres sont parties prenantes de la convention de Bâle. L'extension de la liste des plastiques soumis au système de contrôle et d'interdiction de la convention de Bâle exige une modification des annexes du règlement (CE) n° 1013/2006 du Parlement européen et du Conseil du 14 juin 2006 sur les expéditions de déchets. Dans ce contexte, la Commission européenne a lancé une consultation publique sur le projet de règlement entre le 24 juin et le 22 juillet 2020 à laquelle vos rapporteurs ont participé (cf. contribution en annexe IV).

Par ailleurs, 24 ans après son adoption en 1995, l'amendement d'interdiction (le « ban amendment ») est entré en vigueur en décembre 2919. Il prévoit l'interdiction de toute exportation de déchets dangereux d'un pays développé (Union Européenne, OCDE et Liechtenstein) vers un pays en développement ou en transition. Cette interdiction ne concerne toutefois que les 98 pays ayant ratifié l'amendement 147 ( * ) .

c) L'agenda 2030

En septembre 2015, les 193 États membres de l'organisation des Nations Unies ont adopté le programme de développement durable à l'horizon 2030, intitulé agenda 2030. Il définit 17 objectifs de développement durable . La production incontrôlée de plastiques, les pollutions qu'elle engendre et les risques qu'elle fait peser sur l'environnement et la santé humaine sont susceptibles de remettre en cause 7 des 17 objectifs de développement durable : la bonne santé et le bien-être ; l'eau propre et l'assainissement ; l'énergie propre et d'un coût abordable ; la consommation et la production responsable ; les mesures relatives à la lutte contre le changement climatique ; la vie aquatique ; la vie terrestre.

Les 17 objectifs de développement durable

Le 25 septembre 2015, l'assemblée générale des Nations Unies a adopté à l'unanimité un « programme de développement durable à l'horizon 2030», dit « Agenda 2030 ». Il est assorti de 17 objectifs de développement durables (ODD) qui abordent différentes dimensions assignées au développement durable : la croissance économique, l'intégration sociale et la protection de l'environnement.

Les 17 objectifs sont les suivants :

1. éradication de la pauvreté ;

2. lutte contre la faim ;

3. accès à la santé ;

4. accès à une éducation de qualité ;

5. égalité entre les sexes ;

6. accès à l'eau salubre et à l'assainissement ;

7. recours aux énergies renouvelables ;

8. accès à des emplois décents ;

9. bâtir une infrastructure résiliente, promouvoir une industrialisation durable qui profite à tous et encourager l'innovation ;

10. réduction des inégalités ;

11. villes et communautés durables ;

12. consommation et production durables ;

13. lutte contre le changement climatique ;

14. vie aquatique ;

15. vie terrestre ;

16. justice et paix ;

17. partenariats pour la réalisation des objectifs.

L'Agenda 2030 établit par ailleurs un processus de revue internationale, par lequel les États sont invités, sur une base volontaire, à rendre compte annuellement de leurs progrès. Déclinée au niveau de chaque État, la mise en oeuvre des ODD fait appel à un engagement actif des gouvernements comme de l'ensemble des acteurs (entreprises, collectivités, associations, chercheurs...).

d) Un exemple de coopération multilatérale : le programme Clean Oceans

Clean Oceans est un programme de coopération internationale porté par l'Agence française de Développement, la Banque Européenne d'Investissement et la Kreditanstalt für Wiederaufbau (KfW, institution de coopération allemande). Lancé en 2018, le programme bénéficie de 2 milliards d'euros de crédits destinés à financer des investissements dans la lutte contre la pollution plastique.

Un bilan du programme mi-2020 montre que 50 % des crédits ont d'ores et déjà été engagés pour accompagner des projets de gestion des déchets solides (24 % des crédits), de gestion des eaux usées (75 % des crédits) et de gestion des déversements d'orages (21 % des crédits).

Deux exemples de projets financés illustrent la diversité des initiatives soutenues :

- 75 millions d'euros ont bénéficié à deux villes du SriLanka pour financer l'extension de son réseau de collecte des eaux usées ;

- 43 millions d'euros ont été accordés à la modernisation du système de gestion des déchets de Lomé au Togo, permettant la construction d'un centre de collecte et de traitement des déchets, la création de 25 emplois et la sécurisation sociale et environnementale des travailleurs concernés.

e) Les limites des conventions internationales

La communauté internationale a pris conscience des dangers que font courir les déchets plastiques et les microplastiques à l'environnement et à la santé humaine. De nombreux instruments juridiques ont été mis en place au niveau international pour lutter contre ces formes de pollution.

Toutefois, ces conventions internationales ont leurs limites : ce sont souvent des instruments déclaratoires et non contraignants. Par ailleurs, la multiplication des initiatives provoque un manque de lisibilité. Enfin, seule la question des déchets plastiques est abordée. En réalité, il faudrait une approche holistique en termes de cycle de vie du plastique (production, consommation, transport, recyclage, déchet et pollution générée à chaque étape de leur cycle de vie) avec des objectifs de réduction contraignants.

Plusieurs États plaident ainsi pour la négociation d'un traité international juridiquement contraignant sur les déchets plastiques et les microplastiques, qui s'inspirerait de l'accord mondial sur le climat et le réchauffement climatique signé à Paris le 12 décembre 2015 .

L'importante prise de conscience de la pollution plastique
par les législations de très nombreux pays

Une enquête auprès des ambassades en France des pays étrangers a été réalisée dans le cadre de la mission afin de les interroger sur les politiques de gestion des déchets plastiques dans leurs pays (cf. annexe II).

L'enquête montre la sensibilisation de la communauté internationale sur le sujet des pollutions plastiques. Une question portait sur la préoccupation des pays vis-à-vis de la pollution (préoccupation notée sur une échelle croissante de 0 à 5). Majoritairement (20 pays sur 38, soit 53 %), la préoccupation est notée à 5 (valeur maximale de l'échelle). Seuls 3 pays (8 % des répondants) situent leur niveau de préoccupation à moins de 3, sur l'échelle de 0 à 5.

Ces préoccupations se traduisent par l'adoption de législations visant à réduire la pollution.

82,5 % des pays qui répondent à l'enquête indiquent avoir adopté des lois pour limiter la pollution plastique. Dans 55 % des cas, ces législations ont été prises dans le cadre d'orientations supranationales (Exemple de la Commission européenne pour les pays européens).

L'interdiction des plastiques à usage unique est une mesure très fréquente : plus de 80 % des pays qui se sont dotés d'une législation contre la pollution plastique ont intégré cette mesure. Deux autres mesures sont fréquemment reprises : les obligations de recyclage (70 % des législations) et l'interdiction des sacs plastiques (plus de 50 % des législations).

S'agissant de l'Union européenne et de la transposition par les pays membres de la directive sur l'interdiction des plastiques jetables, l'enquête montre que :

- la transposition est en cours dans 86 % des pays de l'Union et que 15 % d'entre eux ont déjà adopté certains des articles de la directive ;

- 7 % des états membres ont transposé la directive en l'état ;

- 7 % des états membres l'ont transposée en renforçant ses exigences.

Source : Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques.

2. Au niveau européen

L'Union européenne s'est longtemps intéressée aux plastiques uniquement sous l'angle des déchets. Toutefois, face à la menace croissante que fait peser la production incontrôlée de plastiques sur l'environnement et la santé humaine, l'Union européenne a défini une stratégie sur les matières plastiques visant à concilier protection de l'environnement et croissance économique, le plastique restant pour de nombreux usages un matériau irremplaçable.

a) La hiérarchisation de la gestion des déchets

La hiérarchie des modes de traitement est un ordre de priorité, défini au niveau européen 148 ( * ) , qui conditionne le processus de gestion des déchets.

La première priorité est d'éviter la production du déchet : elle repose sur des démarches de prévention des déchets , définies comme « les mesures prises avant qu'une substance, une matière ou un produit ne devienne un déchet et réduisant :

- la quantité de déchets, y compris par l'intermédiaire du réemploi ou de la prolongation de la durée de vie des produits ;

- les effets nocifs des déchets produits sur l'environnement et la santé humaine ; ou

- la teneur en substances nocives des matières et des produits 149 ( * ) » .

Quand un déchet n'a pas pu être évité, la personne chargée de sa gestion doit privilégier, dans l'ordre :

- la préparation en vue de la réutilisation : l'objectif est que le déchet soit préparé de manière à être utilisé de nouveau sans autre opération de traitement (le traitement du déchet nécessite généralement des opérations de contrôle, de nettoyage ou de réparation). Il s'agit souvent de remettre en état des objets d'occasion, notamment des appareils électroménagers, des pièces de véhicules hors d'usage, etc. ;

- le recyclage : il concerne toutes les opérations de valorisation par lesquelles les déchets sont retraités, soit pour remplir à nouveau leur fonction initiale, soit pour d'autres fonctions. Le recyclage implique une chaîne d'acteurs parfois longue, incluant une étape de préparation de la matière extraite du flux de déchets, qui devient alors une matière première de recyclage (MPR) ;

- toute autre valorisation : toute opération dont le résultat principal est que des déchets servent à des fins utiles en substitution à d'autres substances ou objets qui auraient été utilisés à la place. En particulier, cela concerne la « valorisation énergétique », qui consiste à utiliser des déchets en substitution de combustibles, pour la production de chaleur ou d'énergie ;

- l'élimination : même si cette solution est à éviter dans la mesure du possible, elle consiste à incinérer des déchets sans valorisation énergétique, ou à les stocker dans une décharge dédiée. Elle n'est censée concerner que les « déchets ultimes », c'est-à-dire ceux qui ne sont plus susceptibles d'être réutilisés ou valorisés dans les conditions techniques et économiques du moment.

Cette hiérarchie des modes de traitement a pour but d'encourager la valorisation des déchets et donc de diminuer l'utilisation de matières premières vierges. Elle est l'un des piliers de la réglementation relative aux déchets.

b) Une stratégie des matières plastiques compatible avec la mise en place d'une économie circulaire

Le plastique est un matériau important, omniprésent dans notre économie et dans notre vie quotidienne. Pour autant, sa production, son utilisation, sa consommation et la gestion de sa fin de vie soulèvent des problèmes écologiques importants. L'Union européenne s'est efforcée de sortir de ce dilemme en développant une stratégie sur les matières plastiques qui favorise la réutilisation, le recyclage, la réparation, la promotion de matériaux plus durables et non toxiques, afin de diminuer la quantité de déchets générés et leurs effets délétères sur l'environnement et la santé humaine.

Cette stratégie a été élaborée entre 2015 et 2019 et s'articule autour de plusieurs textes européens :

- la directive européenne 2015/720 du 29 avril 2015 modifiant la directive 94/62/CE en ce qui concerne la réduction de la consommation de sacs en plastique légers ;

- la communication de la commission européenne « boucler la boucle - un plan d'action de l'Union européenne en faveur de l'économie circulaire » du 2 décembre 2015 ;

- la communication de la commission européenne « une stratégie européenne sur les matières plastiques dans une économie circulaire » du 16 janvier 2018 ;

- la directive (UE) 2018/851 du 30 mai 2018 modifiant la directive 2008/98/CE relative aux déchets ;

- la directive (UE) 2018/852 du 30 mai 2018 modifiant la directive 94/62/CE relative aux emballages et aux déchets d'emballages ;

- la directive (UE) 2019/883 du 17 avril 2019 relative aux installations de réception portuaires pour le dépôt des déchets des navires ;

- la directive 2019/904/UE du 5 juin 2019 relative à la réduction de l'incidence sur l'environnement de certains produits en plastique.

La stratégie européenne repose sur plusieurs axes :

(1) La réduction des déchets plastiques par l'interdiction de certains usages

La directive sur les sacs en plastique exige des gouvernements nationaux qu'ils s'assurent que le nombre de sacs en plastique légers consommés chaque année ne dépasse pas 90 par personne d'ici à la fin de 2019. Avant la fin de 2025, ce nombre doit baisser à 40 sacs.

La mise sur le marché des produits fabriqués à partir de plastiques oxodégradables ainsi que de certains objets en plastique à usage unique est interdite à partir du 3 juillet 2021 (cotons-tiges, couverts, assiettes, pailles, bâtonnets mélangeurs et tiges de ballons de baudruche, récipients pour aliments en polystyrène expansé, récipients pour boissons en PSE.

En outre, les États membres doivent prendre les mesures nécessaires pour parvenir à une réduction ambitieuse et soutenue de la consommation des produits en plastique à usage unique suivants : les gobelets et les récipients pour aliments.

Mise en place d'un réseau national de surveillance
des macrodéchets sur le littoral

La directive 2008/56/CE du Parlement européen et du Conseil du 17 juin 2008 appelée « Directive-cadre Stratégie pour le milieu marin » (DCSMM) conduit les États membres de l'Union européenne à prendre les mesures nécessaires pour réduire les impacts des activités sur ce milieu afin de réaliser ou de maintenir un bon état écologique du milieu marin au plus tard en 2020.

En France, la directive a été transposée dans le code de l'environnement (articles L. 219-9 à L. 219-18 et R. 219-2 à R. 219-17). Elle s'applique au travers de Plans d'action pour le milieu marin (PAMM) aux côtes métropolitaines sous souveraineté ou juridiction française, divisées en quatre sous-régions marines : la Manche-mer du Nord, les mers celtiques, le golfe de Gascogne, la Méditerranée occidentale.

La DCSMM poursuit trois objectifs majeurs :

- assurer la protection, la conservation et éviter la détérioration des écosystèmes marins. Là où une forte dégradation est observée, le fonctionnement des écosystèmes doit être rétabli ;

- prévenir et éliminer progressivement la pollution ;

- maintenir la pression des activités humaines (pêche et autres utilisations des ressources marines) à un niveau qui soit compatible avec la réalisation du bon état écologique.

L'évaluation initiale de la DCSMM de 2012 a produit un état des lieux des déchets en mer (objets et microparticules dans la colonne d'eau, au fond des mers ou sur le littoral) et mis en évidence le manque de données sur les microplastiques.

Parmi les critères retenus pour évaluer le bon état écologique du milieu marin figure le critère 10 qui prévoit que « les propriétés et les quantités de déchets marins ne provoquent pas de dommages au milieu côtier et marin ».

Une surveillance harmonisée des déchets sur le littoral a donc été mise en place au niveau de l'Union européenne visant à caractériser ces derniers.

La directive 2019/904/UE relative à la réduction de l'incidence sur l'environnement de certains produits en plastique est directement inspirée des mesures de surveillance. Elle vise les plastiques à usage unique et les engins de pêche.

À la suite d'une étude menée sur 276 plages de l'Union européenne (le meilleur indicateur que nous ayons pour les déchets marins), il a été constaté que les objets en plastique à usage unique constituent près de 50 % de ces déchets, tandis que les équipements de pêche en représentent 27 %. Pour les plastiques à usage unique, la Commission a proposé de se focaliser sur les 10 objets à usage unique les plus utilisés. À partir du 3 juillet 2021, il est interdit de mettre sur le marché les cotons-tiges, les couverts, les assiettes, les pailles, les bâtonnets mélangeurs, les tiges de ballons de baudruche, les récipients pour aliments et pour boissons en polystyrène expansé.

Source : Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer.

(2) L'amélioration de la collecte, du tri et du recyclage des plastiques

D'ici à 2035, 65 % des déchets municipaux doivent être recyclés et seuls 10 % des déchets municipaux en poids pourront être mis en décharge. Les États membres s'efforcent de faire en sorte que d'ici à 2030, aucun déchet susceptible d'être recyclé ou valorisé ne soit admis dans une décharge, sauf exceptions dûment justifiées.

D'ici à 2030, 55 % des plastique et 70 % des emballages plastiques doivent être recyclés.

D'ici à 2030, 90 % des bouteilles en plastique à usage unique doivent être collectées (77 % d'ici à 2025).

L'objectif de la commission européenne est d'atteindre un taux de recyclage de 100 % pour tous les emballages plastiques d'ici à 2030.

(3) Le soutien à l'incorporation de plastiques recyclés

D'ici 2025, les bouteilles pour boisson en PET doivent contenir 25 % de matières recyclées. D'ici 2030, les bouteilles pour boisson en autres résines doivent contenir 30 % de matières recyclées.

Par ailleurs, la commission européenne compte sur des engagements volontaires pour réutiliser au moins 10 millions de tonnes de plastiques recyclés par an d'ici à 2025 dans les secteurs de l'emballage, de la construction, de l'industrie électrique et électronique et de l'automobile.

(4) L'élargissement des obligations pour les producteurs

L'Union européenne a mis en place plusieurs filières de responsabilité élargie des producteurs : emballages, piles et accumulateurs portables, automobiles, équipements électriques et électroniques, médicaments, gaz fluorés. Récemment, elle a créé de nouvelles filières pour les récipients pour aliments (y compris pour la restauration rapide), les filets de pêche, les lingettes, les ballons de baudruche et les produits du tabac avec filtres (comme les mégots de cigarette).

(5) Une meilleure gestion des déchets des navires

La directive du 17 avril 2019 relative aux installations de réception portuaires pour le dépôt des déchets des navires a renforcé les dispositions visant à gérer les déchets des navires. Elle vise tous les navires, quel que soit leur pavillon, qui font escale dans un port d'un État membre. La directive impose, pour chaque port, la mise en oeuvre d'un plan de réception et de traitement des déchets. Les coûts d'exploitation des installations portuaires pour la réception et le traitement des déchets des navires - autres que les résidus de cargaison - sont couverts par une redevance perçue sur les navires. Afin de dissuader ces derniers à jeter leurs déchets dans la mer, ils sont soumis à ladite redevance indépendamment du dépôt ou non de déchets. Enfin, chaque État membre doit procéder à des inspections annuelles d'au moins 15 % du nombre total de navires distincts faisant escale dans ses ports.

(6) Une attention récente portée aux microplastiques

Les microplastiques intentionnellement ajoutés concernent une multitude de produits . En 2018, l'Agence européenne des produits chimiques (ECHA) a été saisie pour une éventuelle interdiction des microplastiques ajoutés intentionnellement. En août 2019, elle a rendu un rapport proposant l'élimination d'ici à 2026 des microplastiques intentionnellement ajoutés dans les fertilisants et les produits phytosanitaires 150 ( * ) utilisés en agriculture et en horticulture, dans les produits cosmétiques à rincer ou sans rinçage (maquillage et crèmes solaires), dans les détergents et produits d'entretien contenant des parfums encapsulés ou des microbilles, dans les cires et les vernis, dans les dispositifs médicaux, dans certains médicaments à usage humain ou vétérinaire, dans certains compléments alimentaires, dans les peintures et les revêtements, dans les cartouches des imprimantes en trois dimensions, dans les encres d'imprimerie, dans les produits de construction, dans les produits utilisés dans le secteur pétrolier et gazier.

Selon l'ECHA, les sources de microplastiques mentionnées précédemment seraient responsables du rejet annuel de 36 000 tonnes de microplastiques dans l'environnement à l'échelle européenne, dont plus de la moitié proviendrait de l'activité agricole (fertilisants et produits phytosanitaires) 151 ( * ) .

Le plan d'action européen pour l'économie circulaire
et la lutte contre la pollution plastique

À l'occasion de la présentation du plan d'action européen pour l'économie circulaire en mars 2020, la commission européenne a rappelé ses objectifs en matière de lutte contre la pollution plastique.

« Alors que le plan d'action en faveur de l'économie circulaire guidera la transition de tous les secteurs, des mesures cibleront en particulier les secteurs à forte intensité de ressources, comme ceux des textiles, de la construction, de l'électronique et des matières plastiques. La Commission assurera le suivi de la stratégie de 2018 sur les matières plastiques en se concentrant, entre autres, sur des mesures visant à lutter contre les microplastiques et les rejets non intentionnels de plastique, par exemple, par les textiles et l'abrasion des pneumatiques. La Commission définira des exigences pour faire en sorte que tous les emballages sur le marché de l'UE soient réutilisables ou recyclables d'une manière économiquement viable d'ici à 2030. Elle élaborera un cadre réglementaire pour les plastiques biodégradables et biosourcés et elle mettra en oeuvre des mesures concernant les plastiques à usage unique. »

« La Commission examinera la possibilité de stimuler le marché des matières premières secondaires par des dispositions juridiques imposant un contenu recyclé obligatoire (par exemple pour les emballages, les véhicules, les matériaux de construction et les batteries). Afin de simplifier la gestion des déchets pour les citoyens et de garantir aux entreprises des matières secondaires plus propres, la Commission proposera également un modèle européen de collecte sélective des déchets. La Commission considère que l'UE devrait cesser d'exporter ses déchets en dehors de son territoire et, dès lors, réexaminera sa réglementation relative aux transferts de déchets et aux exportations illégales ».

Source : Commission européenne.

c) Le lancement de la lutte contre la pollution plastique : la directive relative à la réduction de l'incidence sur l'environnement de certains produits en plastique

À travers l'adoption de cette directive, l'Europe veut à nouveau affirmer son leadership mondial en matière de politiques de lutte contre la pollution plastique. Entrant en vigueur en 2021 et ciblant les plastiques à usage unique, la cause principale de la fuite des plastiques vers l'environnement, cette directive donne à l'Europe les moyens de s'attaquer à la préservation des océans.

La directive s'appuie sur la définition de trois listes : celle des produits interdits, celle des produits avec réduction obligatoire, celle des produits avec mise en place d'une campagne de sensibilisation des consommateurs.

La directive n'exclut pas, pour le moment, les plastiques biodégradables, considérant le besoin de connaissances complémentaires sur le sujet. Pour cette raison, une révision de la directive est prévue en 2027 afin de tenir compte des progrès dans la compréhension du phénomène de pollution.

La directive ambitionne 90 % de collecte des bouteilles en plastique pour boisson sur le continent à l'horizon 2029. À titre de comparaison, et afin de bien mesurer les efforts à entreprendre, le taux de collecte des bouteilles en plastique pour boisson était de 58 % en France, en 2018.

3. Au niveau national
a) De nouvelles mesures législatives

Depuis dix ans, la France a pris une série de mesures législatives visant à encadrer le traitement et la gestion des déchets plastiques, à favoriser leur valorisation, à réduire l'utilisation de plastiques à usage unique ou de microplastiques, à responsabiliser les producteurs, à mieux informer les consommateurs et à promouvoir le réemploi . Ces ambitions s'adossent aux textes suivants :

- la loi n° 2009-967 du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement (loi Grenelle I) ;

- la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement (loi Grenelle II) ;

- l'ordonnance n° 2010-159 du 17 décembre 2010 portant diverses dispositions d'adaptation du droit de l'Union européenne dans le domaine des déchets ;

- la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte ;

- la loi n° 2016-1087 du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages ;

- la loi n° 2018-938 du 30 octobre 2018 pour l'équilibre des relations commerciales entre le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine et durable (loi EGAlim) ;

- la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises ;

- la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire ;

- l'ordonnance n° 2020-920 du 29 juillet 2020 relative à la prévention et à la gestion des déchets.

De nombreuses mesures visent à adapter la législation française au droit européen, mais également à prendre des mesures plus contraignantes.

(1) Les premières interdictions de produits plastiques

Depuis cinq ans, la France a multiplié les interdictions de produits plastiques à usage unique.

Les sacs plastiques à usage unique sont interdits en caisse depuis le 1 er juillet 2016. Les sacs plastiques à usage unique hors caisse (comme les sacs de fruits et légumes) sont interdits depuis le 1 er janvier 2017 152 ( * ) , sauf s'ils sont compostables en compost domestique et biosourcés.

Depuis le 1 er janvier 2020, l'utilisation de bouteilles d'eau plate en plastique dans le cadre des services de restauration collective scolaire est interdite. Les gobelets en plastique mis à disposition vides sont également interdits à cette date, sauf lorsqu'ils sont compostables et constitués partiellement de matière biosourcée et sauf lorsqu'ils sont partiellement composés de plastique et que cette teneur en plastique est inférieure à la teneur maximale en plastique fixée par un arrêté.

Au 1 er janvier 2021 est interdite la distribution gratuite de bouteilles en plastique contenant des boissons dans les établissements recevant du public et dans les locaux à usage professionnel. Sont également interdites les clauses contractuelles imposant la fourniture ou l'utilisation de bouteilles en plastique à usage unique dans le cadre d'événements festifs, culturels ou sportifs.

À partir du 1 er janvier 2022 sont interdits le conditionnement dans des emballages en plastique des fruits et légumes frais non transformés exposés dans les commerces de détail ainsi que la mise sur le marché de sachets de thé et de tisane en plastique non biodégradable. L'apposition d'étiquettes en plastique sur les fruits et légumes est également prohibée. Par ailleurs, les publications de presse doivent être expédiées sans emballage plastique. Enfin, la mise à disposition gratuite de jouets en plastique dans le cadre de menus destinés aux enfants est prohibée.

À partir du 1 er janvier 2025, il devra également être mis fin à l'utilisation de contenants alimentaires de cuisson, de réchauffe et de service en matière plastique. Cette interdiction s'applique : aux services de restauration collective des établissements scolaires et universitaires, aux établissements d'accueil des enfants de moins de six ans, aux services de pédiatrie, d'obstétrique et de maternité.

(2) Les mesures de limitation des plastiques ajoutés intentionnellement

La France a pris également très tôt des mesures pour limiter les microplastiques ajoutés intentionnellement.

Les microplastiques dans les produits rincés à usage d'exfoliation ou de nettoyage sont interdits en France depuis le 1 er janvier 2018, ce qui n'est pas toujours pas le cas au niveau de l'Union européenne.

Par ailleurs, s'inspirant de la proposition mentionnée précédemment faite par l'ECHA d'interdire les microplastiques ajoutés intentionnellement dans toute une série de produits 153 ( * ) , la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire a interdit l'utilisation de microplastiques intentionnellement ajoutés :

- dans les dispositifs médicaux et les dispositifs médicaux de diagnostic in vitro , à compter du 1 er janvier 2024 ;

- dans les produits cosmétiques rincés autres que les produits exfoliants et de nettoyage à compter du 1 er janvier 2026 ;

- dans les produits détergents, les produits d'entretien et les autres produits visés par la proposition de restriction du 22 août 2019 de l'Agence européenne des produits chimiques à compter du 1 er janvier 2027.

Les microplastiques dans les boues d'épuration : une prise de conscience récente et une réglementation à renforcer

Les boues d'épuration font l'objet d'une réglementation au niveau européen avec la directive 86/278/CEE relative à l'utilisation des boues d'épuration en agriculture. Ce texte règlemente les épandages de manière à éviter des effets nocifs sur les sols, la végétation, les animaux et l'Homme. Il fixe notamment des seuils limites de concentration en métaux lourds.

De manière similaire, en France, le code de l'environnement rend obligatoire la réalisation d'un plan d'épandage pour l'utilisation des boues sur les sols agricoles. Il vise notamment à surveiller les concentrations en « éléments trace Métalliques » (ETM) dans les sols et dans les boues ainsi que les composés traces organiques (CTO).

Dans les cadres règlementaires cités la présence de microplastiques dans les boues ne fait l'objet d'aucune réglementation dédié. Cette situation met en évidence un potentiel conflit entre, d'une part, la volonté de réduire les transferts de microplastiques vers les eaux superficielles (au moyen, par exemple, de la filtration qui pourrait être imposée par la directive relative au traitement des eaux résiduaires urbaines) et, d'autre part, la possibilité que ces microplastiques se retrouvent dans les sols s'ils ne sont pas retirés des boues.

Une révision de la directive sur les boues d'épuration mentionnées auparavant devrait donc être envisagée.

Il convient de rappeler que la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire a adopté plusieurs mesures pour renforcer la qualité des matières fertilisantes épandues sur les sols. Ainsi, l'article 86 prévoit une révision des référentiels réglementaires sur l'innocuité environnementale et sanitaire applicables aux boues d'épuration, en particulier industrielles et urbaines, seules ou en mélanges, brutes ou transformées. Il s'agit de prendre en compte, notamment, les métaux lourds, les particules de plastique, les perturbateurs endocriniens, les détergents ou les résidus pharmaceutiques tels que les antibiotiques. Jusqu'à présent, la norme NFV 40041 relative aux boues d'épandage ne prend pas en considération les plastiques.

En ce qui concerne les composts des biodéchets, ils sont soumis à la norme NFU 44051 qui fixe des teneurs limites en macroplastiques (dont la taille est supérieure à 5 mm). Le polystyrène expansé doit représenter moins de 0,3 % de la matière sèche et les autres plastiques doivent représenter moins de 0,8 % de la matière sèche. Toutefois, aucune limitation n'est prévue pour les microplastiques.

(3) De plus en plus de filières REP (responsabilité élargie des producteurs)

En application du principe « pollueur-payeur », l'Union européenne encourage la mise en place de filières REP 154 ( * ) pour assurer la prévention et la gestion des déchets.

La France a largement suivi ces préconisations puisque depuis la création en 1992 de la première filière REP portant sur les emballages ménagers, le principe de la responsabilité élargie du producteur a été étendu à de nombreux autres produits. En plus de vingt ans, 14 filières obligatoires 155 ( * ) ont été ainsi été développées (auxquelles il faut ajouter 3 REP volontaires 156 ( * ) ).

La loi relative à la lutte contre le gaspillage et l'économie circulaire a élargi le champ d'application de certaines filières déjà existantes 157 ( * ) . Elle a également créé huit nouvelles filières REP :

- à partir du 1 er janvier 2021 : les produits du tabac équipés de filtres composés en tout ou partie de plastique et ceux qui sont destinés à être utilisés avec des produits du tabac ;

- à partir du 1 er janvier 2022 : les produits et matériaux de construction du secteur du bâtiment, les jouets, les articles de sport et de loisirs, les articles de bricolage et de jardin, les huiles minérales ou synthétiques, lubrifiantes ou industrielles ;

- à compter du 1 er janvier 2024 : les gommes à mâcher et les textiles sanitaires à usage unique ;

- à compter du 1 er janvier 2025 : les engins de pêche.

(4) La promotion du vrac et du réemploi

En France, les emballages plastiques à usage unique représentent 46,3 % 158 ( * ) de la consommation de plastiques. La lutte contre la pollution plastique passe donc par une réduction drastique de la consommation d'emballages en plastique à usage unique. La vente en vrac et l'utilisation d'emballages réutilisables constituent deux alternatives que la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire s'efforce de promouvoir .

Celle-ci a non seulement autorisé la vente en vrac, mais elle la rend de droit pour tout produit de consommation courante. Son interdiction ne peut être justifiée que pour des raisons de santé publique. Tout commerce de détail dont la surface de vente est supérieure à 400 m 2 doit mettre à la disposition du consommateur des contenants réemployables dans le cadre de la vente de produits présentés sans emballage.

La loi précitée autorise également tout consommateur à se faire servir dans un contenant apporté par ses soins, dans la mesure où ce dernier est visiblement propre et adapté à la nature du produit acheté. Le consommateur est responsable de l'hygiène et de l'aptitude du contenant.

Afin d'encourager l'utilisation de contenants réutilisables dans la vente à emporter, la loi impose aux vendeurs de boissons une tarification plus basse lorsque le consommateur apporte son propre contenant réemployable.

La loi précitée prévoit également plusieurs dispositions visant à encourager la substitution des plastiques à usage unique par des matériaux réemployables :

- à compter du 1 er janvier 2022, les gobelets, les couverts, les assiettes et les récipients utilisés dans le cadre d'un service de portage quotidien de repas à domicile doivent être réemployables et faire l'objet d'une collecte ;

- à compter du 1 er janvier 2023, les établissements de restauration sont tenus de servir les repas et boissons consommés dans l'enceinte de l'établissement dans des contenants et avec des couverts réemployables.

La loi impose à la commande publique d'encourager le réemploi et l'utilisation de biens intégrant des matières recyclées. Les cahiers des charges des appels d'offre doivent prévoir des clauses et des critères dans ce sens.

Les biens acquis annuellement par les services de l'État, ainsi que par les collectivités territoriales et leurs groupements, issus du réemploi ou de la réutilisation ou intégrant des matières recyclées doivent représenter 20 % à 100 % des achats, selon le type de produit.

En ce qui concerne les achats de pneumatiques, la commande publique doit privilégier les pneumatiques rechapés.

Enfin, la loi relative à la lutte contre le gaspillage et l'économie circulaire fixe un objectif national de 5 % d'emballages réemployés mis sur le marché en 2023 et de 10 % en 2027. Pour faciliter l'atteinte de ces objectifs, les éco-organismes sont chargés de définir des gammes standards d'emballages réemployables pour les secteurs de la restauration, ainsi que pour les produits frais et les boissons d'ici au 1 er janvier 2022.

(5) Le renforcement de l'information des consommateurs et des recycleurs sur la composition des plastiques

La loi relative à la lutte contre le gaspillage et l'économie circulaire impose aux producteurs de produits générateurs de déchets et à leur éco-organisme, dans le respect des secrets protégés par la loi, de permettre aux opérateurs de gestion des déchets d'accéder aux informations techniques relatives aux produits mis sur le marché, et notamment à toutes informations sur la présence de substances dangereuses, afin d'assurer la qualité de leur recyclage ou leur valorisation.

Elle oblige également les producteurs et importateurs de produits générateurs de déchets à informer les consommateurs sur leurs qualités et caractéristiques environnementales, notamment l'incorporation de matière recyclée, l'emploi de ressources renouvelables, la durabilité, la compostabilité, la réparabilité, les possibilités de réemploi, la recyclabilité et la présence de substances dangereuses, de métaux précieux ou de terres rares.

(6) La fixation d'objectifs chiffrés de réduction de la consommation plastique

La loi relative à la lutte contre le gaspillage et l'économie circulaire prévoit une diminution de 50 % des quantités de produits manufacturés non recyclables mis sur le marché avant 2020.

Par ailleurs, elle oblige les éco-organismes à prévoir des objectifs de réduction de la mise sur le marché d'emballages, notamment d'emballages plastiques à usage unique. La non-atteinte de ces objectifs est sanctionnée financièrement.

Elle fixe également pour objectif de réduire de 50 % d'ici à 2030 le nombre de bouteilles en plastique à usage unique pour boisson mises sur le marché.

(7) Le renforcement des obligations de recyclage

La loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire a fixé des objectifs ambitieux en matière de valorisation :

- une valorisation de 55 % en 2020 et de 65 % en 2025 des déchets non dangereux non inertes ;

- une valorisation de 70 % des déchets du secteur du BTP en 2020 ;

- un objectif de 100 % de plastique recyclé au 1 er janvier 2025.

Ces objectifs ne pourront être atteints que si la recyclabilité des déchets est améliorée. C'est la raison pour laquelle la loi précitée renforce le dispositif de modulation de la contribution versée par les metteurs en marché aux éco-organismes en fonction des critères de performance environnementale de leurs produits. Non seulement elle énumère les critères qui peuvent être retenus, mais elle renforce le caractère incitatif de l'éco-contribution en permettant aux éco-organismes de fixer des primes et des pénalités supérieures au montant de la contribution financière nécessaire à la gestion des déchets.

La loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire prévoit également, dans un délai de trois ans à compter de l'agrément d'un éco-organisme, une évaluation de la trajectoire d'atteinte des objectifs afin, le cas échéant, de renforcer le niveau des modulations, si cela est nécessaire pour atteindre les objectifs.

L'État se réserve en outre le droit de fixer le montant de la pénalité applicable aux emballages plastiques qui ne peuvent intégrer une filière de recyclage en fin de vie.

En amont, cette loi exige qu'au plus tard le 1 er janvier 2030, les producteurs, metteurs en marché ou importateurs, responsables de la mise sur le marché d'au moins 10 000 unités de produits par an et déclarant un chiffre d'affaires annuel supérieur à 10 millions d'euros, justifient que les déchets engendrés par les produits qu'ils fabriquent, mettent sur le marché ou importent sont de nature à intégrer une filière de recyclage. Cette obligation ne s'applique pas aux produits qui ne peuvent intégrer aucune filière de recyclage pour des raisons techniques, y compris en modifiant leur conception. Le non-respect de cette obligation s'accompagne de sanctions financières.

Enfin, elle généralise l'obligation d'un tri six flux 159 ( * ) à partir de 2025 pour tout producteur ou détenteur de déchets.

b) La signature d'engagements volontaires

La réglementation constitue un outil déterminant dans la lutte contre la pollution plastique. Elle est complétée par d'autres outils tels que les engagements volontaires reposant sur un accord entre les parties qui ont l'avantage de responsabiliser les signataires de l'accord.

(1) Le pacte national sur les emballages plastiques

Le 19 février 2019, le gouvernement français, 13 entreprises et 2 organisations non gouvernementales ont signé le pacte national sur les emballages. Il fixe 7 objectifs :

- éliminer les emballages en plastique problématiques 160 ( * ) ou inutiles. Les industriels se sont engagés à supprimer les emballages contenant du noir de carbone, à renoncer à l'utilisation du PSE dans les contenants alimentaires et les gobelets plastiques à usage unique d'ici à 2025 ainsi qu'à éliminer le PVC dans les emballages ménagers, commerciaux et industriels d'ici à 2022 ;

- mettre en place des modèles de réutilisation , lorsque c'est pertinent, pour réduire le recours aux emballages uniques ;

- faire en sorte que tous les emballages plastiques soient 100 % réutilisables, recyclables ou compostables d'ici à 2025. L'enfouissement, l'incinération et la valorisation énergétique des déchets ne font pas partie des objectifs visés par l'économie circulaire ;

- atteindre collectivement 60 % d'emballages plastiques effectivement recyclés d'ici à 2022 ;

- incorporer en moyenne 30 % de matières plastiques recyclées dans les emballages en partageant publiquement le taux cible et sa progression d'ici à 2025 ;

- découpler l'utilisation des plastiques de la consommation de ressources finies ;

- s'assurer que tous les emballages plastiques sont exempts de produits chimiques dangereux.

(2) Les engagements volontaires en faveur de l'intégration de plastique recyclé

Dans le cadre de la stratégie européenne sur les matières plastiques dans une économie circulaire, la commission européenne a lancé en 2018 une campagne d'engagements volontaires pour stimuler l'utilisation de matières plastiques recyclées dans les produits. Elle a fixé un objectif d'incorporation de matières premières recyclées de 10 millions de tonnes d'ici à 2025 au niveau européen répartis entre les différents États membres, soit un million de tonnes pour la France.

Cet objectif a été repris dans la feuille de route pour une économie circulaire publiée à la fin du mois d'avril 2018.

Celle-ci part du constat que « pour mieux produire » 161 ( * ) , il faut incorporer davantage de matières premières issues du recyclage dans les produits tout en assurant leur qualité, leur traçabilité et une réelle sécurité pour les citoyens.

Pour parvenir à cet objectif, la feuille de route pour une économie circulaire propose de « susciter, d'ici à l'été 2018, des engagements volontaires concrets et significatifs visant à organiser une ambition de filière, incluant des objectifs de volumes d'intégration de matière plastique issue de déchets dans les secteurs suivants : l'emballage, le bâtiment, l'automobile ou les équipements électroniques et électriques. Pour ce faire, l'ensemble des acteurs (fournisseurs de matières vierges, fabricants de produits, metteurs en marché, collecteurs et gestionnaires de déchets) travaillent actuellement sous l'égide du ministère de l'Économie et des Finances et du ministère de la Transition écologique et solidaire à l'élaboration d'engagements d'utilisation de matières plastiques recyclées sur différents types de résines utilisées (polystyrène, polyéthylène, polypropylène, polychlorure de vinyle) ».

Le 2 juillet 2018, 55 entreprises et fédérations signaient des engagements volontaires visant à utiliser 275 000 tonnes par an supplémentaires de plastiques recyclés dans la fabrication de nouveaux produits d'ici à 2025. Trois secteurs, totalisant 75 % de la consommation nationale de plastiques, sont concernés : l'emballage (+ 188 000 tonnes par an, soit un quasi-doublement de la matière recyclée réintégrée à la production) ; le bâtiment (+ 75 000 tonnes par an) ; l'automobile (+ 12 000 tonnes par an).

c) La mobilisation des collectivités territoriales

À différentes échelles, les collectivités territoriales sont largement impliquées dans la prévention et la gestion des déchets ainsi que dans le développement de l'économie circulaire.

La loi NOTRe 162 ( * ) a confié aux régions la compétence de la planification, de la prévention et de la gestion des déchets. Ces plans ont pour objet de coordonner, à l'échelle régionale, les actions des parties prenantes concernées par la prévention et la gestion des déchets, visant ainsi à atteindre les objectifs nationaux de la politique de valorisation des déchets.

Au niveau local, les compétences de collecte et de gestion des déchets des ménages et des déchets assimilés sont confiées aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI).

(1) La réduction et la valorisation des déchets

Des lois successives (le Grenelle de l'environnement et la loi de transition énergétique pour la croissante verte) ont fixé des objectifs de réduction des déchets qui n'ont jamais été respectés. La loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire 163 ( * ) prévoit désormais une réduction de 15 % des quantités de déchets ménagers et assimilés produits par habitant entre 2010 et 2030. En outre, elle transpose la directive européenne relative à la mise en décharge telle que modifiée en 2018, en retenant l'objectif de réduction des quantités de déchets ménagers et assimilés admis en installation de stockage en 2035 à 10 % des quantités de déchets ménagers et assimilés.

La réduction des déchets ménagers et assimilés constitue un axe important dans la lutte contre la pollution plastique. En effet, ces déchets sont destinés à l'incinération ou au stockage. Or, ils comprennent une part importante de déchets plastiques susceptibles d'être valorisés.

Selon les responsables de Lyon métropole, 46 kg de plastiques par habitant et par an sont ainsi jetés avec les ordures ménagères au lieu d'être triés.

C'est la raison pour laquelle de nombreuses collectivités territoriales poursuivent des objectifs ambitieux de réduction des déchets ménagers.

Ainsi, Grand Besançon Métropole, qui regroupe 69 communes et 192 000 habitants, a mis en place dès 2012 un système de tarification incitative avec comme objectif une réduction des déchets résiduels de 35 % en habitat pavillonnaire et de 12 % en habitat collectif . En 2018, cet objectif a été atteint. En outre, la collecte des déchets recyclables et celle du verre ont augmenté de 11 %. Les déchets collectés en déchèterie ont augmenté de 27 %.

Cette réduction des déchets résiduels a pu se faire pratiquement à coûts constants puisque la redevance annuelle est passée de 65,9 euros par habitant en 2008 à 71 euros en 2018.

En outre, l'extension de la consigne de tri introduite en 2016 ne s'est pas accompagnée d'une forte augmentation du taux de refus de tri comme certains le craignaient. Celui-ci est passé de 14,9 % avant l'extension de la consigne de tri à 18,8 % après son introduction.

Colmar agglomération 164 ( * ) s'est également fixé comme objectif une réduction des déchets résiduels et une amélioration de la valorisation de ses déchets à coûts constants à travers trois axes d'action :

- la valorisation des biodéchets ;

- l'amélioration du dispositif d'apport volontaire des déchets recyclables à travers la multiplication des sites de collecte (bacs enterrés au pied des immeubles). Une convention avec les bailleurs sociaux a été signée afin de mutualiser les investissements et d'imposer l'installation de bacs de collecte pour toute construction de plus de vingt logements ;

- la refonte du système des déchèteries pour une meilleure valorisation matière : le site de la déchèterie a été agrandi (un hectare contre 20 ares précédemment), un quai a été dédié aux déchets verts, le nombre de filières de valorisation est passé de 19 à 35 et une ressourcerie, gérée par une entreprise de l'économie sociale et solidaire, a été créée. Ces mesures ont permis de faire passer le taux de recyclage matière en déchèterie de 63 % à 80 %.

Au total, entre 2010 et 2019, les flux d'ordures ménagères résiduelles ont diminué de 39 % (passant de 318 kg à 194 kg par habitant). Les flux en déchèteries ont augmenté de 10 % et la collecte du recyclable sec (plastique, papier, métal) et du verre a augmenté de 21 %.

En 2019, la part de la valorisation matière a atteint 53 %. Cette réforme s'est faite à coût constant.

(2) Le développement de territoires « zéro déchet »

En 2014 et 2015, le ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, a lancé des appels à projet « Territoire Zéro Déchet Zéro Gaspillage » afin d'identifier des territoires volontaires pour réduire leurs déchets 165 ( * ) et développer l'économie circulaire. 153 territoires ont été retenus et ont bénéficié d'une reconnaissance officielle, d'un accompagnement méthodologique et d'un soutien financier par l'Ademe pendant trois ans. Les moyens et les méthodes pour parvenir aux objectifs fixés ont été laissés à la discrétion des territoires.

Ces initiatives ont souvent eu un impact positif sur la lutte contre la pollution plastique, comme en témoigne l'exemple de Roubaix.

N'exerçant pas la compétence en matière de gestion des déchets, cette ville s'est attachée à susciter une dynamique citoyenne et à encourager le développement économique en donnant du sens aux déchets.

Depuis 2015, 100 familles sont accompagnées par an pour réduire leurs déchets, avec un fort effet d'entraînement puisqu'une personne engagée incite sept autres personnes à réduire ses déchets. En outre, cette mobilisation autour d'un projet commun a renforcé l'engagement citoyen, le lien social et le développement économique. Des écoles, mais également de nombreux commerces de proximité sont associés à la lutte contre les déchets et le gaspillage et la ville constate un essor de créations d'entreprises dans le domaine de l'économie circulaire.

Selon les responsables de la ville de Roubaix, la réduction des déchets permet à la fois de redonner du pouvoir d'achat aux citoyens (jusqu'à 3 000 euros sur un an, pour un foyer de quatre personnes par an), mais également de donner du sens aux déchets. Il s'agit de montrer qu'ils ne disparaissent pas, mais qu'ils peuvent constituer des ressources et créer des emplois.

(3) La lutte contre les perturbateurs endocriniens

Une stratégie nationale contre les perturbateurs endocriniens a été lancée en 2014. Elle vise à réduire l'exposition de la population aux perturbateurs endocriniens. Un nouveau programme couvre la période 2019-2022 avec trois axes d'actions : protéger la population ; protéger l'environnement et la biodiversité ; améliorer les connaissances.

Au niveau local, 200 communes, 6 départements et 4 régions, représentant la moitié de la population française ont signé la charte pour des villes et territoires sans perturbateurs endocriniens lancée par le réseau environnement santé. Les signataires s'engagent à :

- restreindre, puis à terme, éliminer l'usage des produits phytosanitaires et des biocides qui contiennent des perturbateurs endocriniens ;

- réduire l'exposition aux perturbateurs endocriniens dans l'alimentation en développant la consommation d'aliments biologiques et en interdisant, à terme, l'usage de matériels, pour cuisiner et chauffer, comportant des perturbateurs endocriniens ;

- favoriser l'information de la population, des professionnels de santé, des collectivités territoriales, de la petite enfance et des acteurs économiques à l'enjeu des perturbateurs endocriniens ;

- mettre en place des critères d'éco-conditionnalité éliminant progressivement les perturbateurs endocriniens dans les contrats et les achats publics ;

- informer tous les ans les citoyens de l'avancement des engagements pris.

Compte tenu de la place des plastiques comme sources de perturbateurs endocriniens, la réduction drastique de leur utilisation constitue l'un des axes majeurs du dispositif .

Par exemple, la ville de Paris s'est particulièrement engagée dans la lutte contre les perturbateurs endocriniens. Elle s'est dotée d'un plan de santé environnementale qui vise notamment à réduire l'exposition des Parisiens à ces substances. De nombreuses mesures ont été prises dans les crèches : les jouets achetés sont désormais pour moitié en bois, en tissu ou en carton. De nouveaux textiles en coton bio remplacent désormais progressivement les articles en contact direct avec la peau des enfants (tels que les couches).

La ville de Paris souhaite également protéger ses collaborateurs. Ainsi, le renouvellement de la vaisselle est en cours afin de supprimer totalement l'usage du plastique (30 millions de repas sont servis par an dans les différents services de la ville).

(4) Les autres initiatives pour lutter contre la pollution plastique

S'il n'est pas possible de rapporter l'ensemble des mesures prises par les collectivités territoriales pour lutter contre la pollution plastique, les exemples suivants illustrent leur implication : développement de fontaines à eau et de poubelles de tri sélectif dans les villes, organisation de groupes de travail avec les commerçants pour réduire l'utilisation de plastiques à usage unique, chartes « plages zéro plastique », fermeture des bouches de lavage 166 ( * ) pour éviter l'arrivée des déchets dans le réseau d'assainissement unitaire, développement de nudges au niveau des avaloirs pour dissuader les citoyens de les utiliser comme poubelles, utilisation de la commande publique pour supprimer le plastique à usage unique, développement de ressourceries pour encourager le réemploi.

Les routes, une source de fuite de macroplastiques dans l'environnement

Une enquête auprès des conseils départementaux a été réalisée dans le cadre de la mission afin de les interroger sur les opérations de nettoyage des routes départementales (cf. annexe V).

Les conseils départementaux assurent l'entretien des routes départementales dont ils ont la compétence. Des opérations de nettoyage sont ainsi régulièrement organisées. Elles se traduisent par la collecte d'un volume non négligeable de déchets. Selon les résultats de l'enquête, 35 % des déchets ramassés sont des plastiques. Les bouteilles sont les plus fréquentes, suivies des sacs plastiques et des emballages. Dans des proportions moindres, des bidons, des débris automobiles en plastique et des bâches agricoles sont également retrouvées dans les fossés routiers. L'enquête permet d'évaluer la quantité annuelle de déchets plastiques ramassés aux abords des routes départementales à 36 kg par kilomètres de voirie.

Les réponses recueilles dans le cadre de l'enquête ont également été valorisées pour chiffrer le coût des opérations de nettoyage : il s'élève, annuellement, à 73 euros par kilomètre de route départementale.

Source : Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques.

Les territoires d'outre-mer ont également pris des mesures pour lutter contre la pollution plastique. Ainsi, Wallis-et-Futuna a mis en place une écotaxe en 2017 qui vise à indemniser les consignes en verre, plastique et aluminium qui sont rapportées de façon volontaire dans les centres d'enfouissement techniques.

La Polynésie française a interdit l'utilisation des sacs plastiques.

La Nouvelle-Calédonie a voté l'interdiction totale d'importation et de mise à disposition de sacs en matières plastiques à usage unique mais également de sacs plastiques réutilisables. Elle a également interdit toute distribution d'objets en matières plastiques jetables, tels que les gobelets, verres, tasses, assiettes, couverts, pailles à boire et touillettes. Enfin, les barquettes en matières plastiques jetables destinées à l'emballage des denrées alimentaires ont vu leur interdiction prendre effet le 1 er mai 2020. Celles destinées au préemballage des denrées alimentaires seront interdites à compter du 1 er mai 2022.


* 142 Elle a été modifiée en 2011.

* 143 Les États riverains de l'Atlantique du Nord-Est (Allemagne, Belgique, Danemark, Espagne, France, Irlande, Norvège, Islande, Pays-Bas, Portugal, Royaume-Uni, Suède), ainsi que le Luxembourg, la Finlande, la Suisse et l'Union européenne.

* 144 Les parties s'engagent à interdire la production, l'utilisation, l'importation et l'exportation de ces produits.

* 145 Cf. Pascale Ricard : Le droit international et la lutte contre la pollution marine par les déchets de matières plastiques, Annuaire Français de Droit International 2019, vol. 65, à paraître fin 2020.

* 146 Seuls certains produits plastiques étaient mentionnés, et cela au sein de deux annexes. D'abord l'Annexe I, qui dresse la liste des catégories de déchets « à contrôler » qui peuvent être réputés dangereux s'ils obéissent aux caractéristiques recensées en Annexe III. Ensuite, d'autres produits plastiques étaient également intégrés à l'Annexe IX, qui concerne les déchets réputés non dangereux et exportés en vue d'être valorisés, à condition donc qu'ils soient destinés à être recyclés d'une manière écologiquement rationnelle et qu'ils soient presque exempts de contamination, dans une logique d'économie circulaire. Ces derniers ne sont pas soumis au système de contrôle et d'interdiction de la Convention des mouvements transfrontières sauf s'ils contiennent l'une des substances recensées à l'Annexe I.

* 147 Ce que n'ont pas fait, entre autres, les États-Unis, le Canada, le Japon, l'Australie, la Nouvelle-Zélande, la Corée du Sud, la Russie, l'Inde ou encore le Brésil.

* 148 Directive 2008/98/CE du Parlement européen et du Conseil du 19 novembre 2008 relative aux déchets et abrogeant certaines directives et directive (UE) 2018/851 du Parlement européen et du Conseil du 30 mai 2018 modifiant la directive 2008/98/CE précitée.

* 149 Article 3-12 de la directive 2008/98/CE relative aux déchets.

* 150 Il s'agit notamment de polymères qui servent à enrober des granulés d'engrais à diffusion lente et des semences.

* 151 Ces chiffres sont tirés du rapport l'Agence européenne des produits chimiques d'août 2019 proposant d'éliminer les microplastiques intentionnellement ajoutés dans un grand nombre de secteurs d'ici à 2026. Vos rapporteurs n'ont pas mené d'investigations sur ce sujet.

* 152 Ils restent autorisés au-delà d'une épaisseur de 50 microns car ils sont alors considérés comme réutilisables.

* 153 Pour rappel, il s'agit des fertilisants et des produits phytosanitaires du secteur de l'agriculture et de horticulture, des produits cosmétiques à rincer et sans rinçage (maquillage, crèmes solaires), des détergents et produits de maintenance contenant des parfums encapsulés ou des microbilles, des cires et des vernis, des dispositifs médicaux, des médicaments à usage humain et vétérinaire, des compléments alimentaires, des peintures et des revêtements, des cartouches des imprimantes en trois dimensions, des encres d'imprimerie, des produits de construction, des produits utilisés dans les secteurs pétrolier et gazier.

* 154 Responsabilité élargie des producteurs.

* 155 Piles, équipements électriques et électroniques, automobiles et véhicules légers, emballages ménagers, fluides frigorigènes fluorés, médicaments, pneumatiques, papiers graphiques, textiles/linge de maison/chaussures, déchets d'activités de soins à risques infectieux, produits chimiques, ameublement, bouteilles de gaz, navires de plaisance.

* 156 Produits de l'agrofourniture, cartouches d'impression bureautiques, mobil-homes.

* 157 Les produits textiles neufs pour la maison intègrent la REP sur les produits textiles d'habillement dès le 1 er janvier 2020 ; à compter du 1 er janvier 2022, la REP « véhicules hors d'usage » est étendue aux voiturettes, véhicules à moteur à deux ou trois roues et quadricycles à moteur ; la REP sur les emballages ménagers couvre les emballages de la restauration à compter du 1 er janvier 2021 et les emballages industriels à compter du 1 er janvier 2025.

* 158 Chiffres de 2018 fournis par PlasticsEurope.

* 159 Papier, métaux, plastiques, verre, bois et textiles.

* 160 Les parties ont défini l'emballage problématique en fonction des critères suivants :

1. il n'est pas réutilisable, recyclable ou compostable ;

2. il contient ou nécessite, pour sa fabrication, des produits chimiques dangereux qui posent un risque important pour l'homme, la santé ou l'environnement ;

3. il peut être évité (ou remplacé par un modèle de réutilisation) tout en conservant son utilité ;

4. il empêche ou perturbe la recyclabilité ou la compostabilité d'autres articles ;

5. il est très probable qu'il soit jeté dans la nature ou qu'il se retrouve dans l'environnement naturel.

* 161 Il s'agit d'un des quatre axes clés de la feuille de route pour une économie circulaire.

* 162 Loi n °2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République.

* 163 Loi n °2020-105 du 10 février 2020.

* 164 20 communes et 116 000 habitants.

* 165 Les objectifs à atteindre correspondaient à ceux fixés par la loi de transition énergétique pour la croissance verte de 2015, soit une réduction de 10 % des déchets ménagers et assimilés (DMA) entre 2010 et 2020.

* 166 L'eau non potable qui coule dans les rues provient de plaques en fonte situées sur les bordures des trottoirs, vers la chaussée.

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