AUDITION DE M. JACQUES BACHELIN,
CONTRÔLEUR FINANCIER AU MINISTÈRE DE L'ÉDUCATION NATIONALE
DE LA RECHERCHE ET DE LA TECHNOLOGIE

(3 FÉVRIER 1999)

M. Adrien Gouteyron, Président - Nous recevons maintenant M. BACHELIN, contrôleur financier au ministère de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie. Monsieur, vous nous expliquerez en quoi consiste vos fonctions.

Le président lit la note sur le protocole de publicité des travaux de la commission d'enquête et fait prêter serment à M. Jacques BACHELIN.

M. Le Président - Si vous le voulez bien, vous pourriez, en introduction, présenter vos fonctions et dire ce que vous avez à dire. Puis, nous vous poserions des questions.

M. Jacques Bachelin - La situation des emplois représente, pour le contrôleur financier de l'éducation nationale, une de ses principales préoccupations, dans la mesure où les enjeux financiers sont des enjeux de rémunération, donc des problèmes d'effectifs.

Le non-respect des dotations d'emploi peut entraîner des dérives budgétaires importantes, de la même façon, toute politique volontariste en matière d'emploi, passe par la capacité à connaître et à maîtriser les effectifs.

Pourtant, c'est dans ce secteur que les résultats sont les moins satisfaisants, du point de vue du contrôle financier. Cette situation est ancienne, mais elle pourrait évoluer prochainement avec la mise en place d'un dispositif de contrôle des emplois, permettant à l'éducation nationale d'optimiser ses moyens dans le respect de l'impératif budgétaire.

Je vous propose de décrire la situation actuelle, puis d'expliciter cette évolution.

Je rappelle en deux mots l'activité de contrôle financier.

M. Le Président - Qui vous nomme, Monsieur le contrôleur ?

M. Jacques Bachelin - Le ministre du Budget.

M. Le Président - C'était important que tout le monde le sache.

M. Jacques Bachelin - Le contrôleur financier délivre des visas a priori sur l'ensemble des actes de gestion ayant une incidence sur la dépense publique. Le contrôle financier s'applique donc aux crédits budgétaires (les engagements, les délégations, les ordonnances de paiement) et aux personnels (tous les actes de gestion individuels et collectifs relatifs aux individus).

Deux objectifs sont poursuivis :

- assurer la régularité de la mise en oeuvre de la dépense publique, dans le respect du contexte légal et réglementaire ;

- assurer le respect de l'autorisation parlementaire, c'est-à-dire le respect des dotations en crédits et en effectifs, autrement dit, exécuter le budget, tout le budget mais rien que le budget.

Une évolution significative du contrôle financier est intervenue depuis quelques années, qui a adapté les modalités de contrôle aux enjeux. Le contrôle a priori est extrêmement lourd car les actes passant par le contrôleur financier sont tout à fait considérables. D'où l'intérêt, quand le ministère essaye de développer sa productivité, que le contrôle financier s'adapte à cette réalité et centre son activité sur ce qui est significatif.

Je donne deux exemples pour le contrôle des personnels : nous avons supprimé des visas a priori sur des actes de gestion incontournables et systématiques, comme les départs en retraite, le visa du contrôleur financier n'apportant pas grand-chose de plus. De la même façon, nous avons supprimé le visa de contrôle financier sur des actes de gestion courante comme les demandes de temps partiel.

On voit l'intérêt de cet allégement, cela décharge le contrôleur financier et l'administration, mais la contrepartie est une perte d'information qui ne permet plus de tenir une comptabilité contradictoire des effectifs en temps réel. En effet, nous n'obtenons l'information qu'a posteriori.

Au ministère de l'éducation nationale, ce n'est pas un gros problème, dans la mesure où cette évolution sanctionnait une réalité qui était que nous n'avions pas de comptabilité contradictoire. Nous ne connaissons pas les effectifs en tant que contrôle financier, il faut le dire.

Ce n'est pas la seule spécificité du contrôle financier dans ce ministère. En matière de crédits, la part représentée par les crédits de rémunération, soit 95 % de 180 milliards sur 300 en 1999, est mise en paiement sans ordonnancement préalable. Pourtant, nous délivrons sur les crédits environ 20 000 visas par an : 5 000 sur les ordonnances de délégations et plus de 15 000 sur les ordonnances de paiement.

Pour les personnels, le contrôle financier ne s'exerce pas non plus comme dans les autres ministères, en raison de la dimension et de la complexité du ministère.

Avec 1 100 000 personnes, ce ministère en a plus que tous les autres additionnés. Il faut donc l'aborder différemment. A titre d'exemple, pour l'enseignement scolaire, environ 60 a 70 corps de fonctionnaires titulaires sont concernés par des concours chaque année (concours externes, internes, réservés, professionnels et autres). Si nous y rajoutons les listes d'aptitude, 70 000 personnes sont concernées par ces concours et ces promotions.

Vis-à-vis des arrêtés individuels et collectifs soumis au contrôleur financier, en 1998 par exemple, nous avons délivré entre 20 000 et 25 000 visas sur les actes de personnel. Ce sont les nominations, les classements, des réintégrations, des détachements, des promotions, des avancements, bref, toutes les situations pouvant survenir à un fonctionnaire ou un contractuel.

Ce ministère est aussi spécifique en raison de sa complexité, au niveau de la lecture des droits ouverts et en exécution. Pour les droit ouverts, les lignes de dotation pour déterminer les effectifs de l'éducation nationale étaient au nombre de 1 300 en 1998, réparties dans 28 chapitres ou articles. C'est extrêmement difficile à lire et je ne suis pas certain que tout le monde en ait la même lecture, avec des niveaux de précision qui contrastent sensiblement avec la capacité d'information réelle dont dispose le contrôleur financier.

M. Le Président - Combien délivrez-vous chaque année de visas ?

M. Jacques Bachelin - 45 000 à peu près.

En exécution, c'est également un ministère complexe avec des règles de gestion et une forte déconcentration.

Au niveau des imputations, par exemple, les personnels relevant d'un chapitre budgétaire, se retrouvent un peu éparpillés. Les ATOS se retrouvent sur tous les chapitres, de même les enseignants du second degré qui se retrouvent aussi bien sur les chapitres d'ATOS, que du premier degré, du supérieur, de la recherche, etc.

De la même façon, les recrutements de contractuels se font sur des chapitres spécifiques. Par exemple, les maîtres auxiliaires se recrutent sur le 31-97 depuis une année ou deux, mais on les retrouve aussi sur des emplois de titulaires vacants.

M. Le Président - Vous ne les visez pas, ils sont recrutés par les recteurs.

M. Jacques Bachelin - C'est un des problèmes. Il est difficile d'appréhender la notion de vacance d'emploi à travers ce genre de mécanisme.

Le constat est très différent, selon que l'on regarde les effectifs de l'administration centrale ou des services déconcentrés.

En administration centrale, la situation est tout à fait satisfaisante. Cela concerne 3 760 agents, d'après la loi de finances. Il y a une comptabilisation mensuelle, donc actualisée, un partage de l'information entre le gestionnaire et le contrôleur financier, l'accès pour le contrôleur financier aux bases de données, Agora, la validation mensuelle des emplois vacants en début de mois et une mise en commun des perspectives à très court terme, dans les quatre mois.

Il y a également des aménagements permettant de tenir compte des contraintes conjoncturelles, c'est-à-dire de faire des gages de gestion dans le respect des consommations indiciaires, c'est-à-dire sans surcoût.

D'un point de vue de contrôle financier, la situation est claire, objective et permet de travailler correctement.

Pour les services déconcentrés, il n'en va pas de même. Ils concernent 950 000 agents et le contrôleur financier ne dispose pas d'une information satisfaisante pour délivrer les visas qui lui sont demandés. De plus, son champ de compétences est trop rétréci pour maîtriser la situation des effectifs.

En matière d'effectifs, le contrôleur financier vise toutes les ouvertures de concours, à l'exception de celles des concours réservés, ces concours étant entérinés par le Budget, comme le cas des recrutements "loi Perben".

Ces visas sont délivrés soit sous ma propre responsabilité, après l'examen des demandes, soit sur instruction du ministre du Budget à la suite d'un arbitrage du Premier ministre. C'est le cas quand il y a un surcalibrage de concours, comme c'est le cas pratiquement chaque année pour les enseignants du second degré.

M. Le Président - Quand le ministre défini le nombre d'enseignants à recruter dans telle ou telle discipline, son acte administratif est soumis à votre visa. Avez-vous la possibilité de bloquer, si vous estimez que le nombre de postes ouverts aux concours, dépasse les possibilités budgétaires ? Comment cela se passe-t-il ?

M. Jacques Bachelin - Les chiffres sont donnés globalement et se répartissent par type de concours mais pas par spécialités.

M. Le Président - Une répartition par CAPES, CAPET, agrégation ?

M. Jacques Bachelin - Oui. Le contrôle financier en viendrait à faire de l'opportunité et ce serait désagréable pour tout le monde.

M. Le Président - Cela vous arrive-t-il de constater que le nombre de postes ouverts dépasse les dotations budgétaires ?

M. Jacques Bachelin - Il y a un surnombre sur le secondaire, aussi, si on devait respecter la dotation budgétaire, on limiterait les concours du second degré.

M. Jean-Léonce Dupont, vice-président - Cela s'élève à combien ?

M. Jacques Bachelin - Pour 1999, l'arbitrage de calibrage des concours prévoyait un surnombre d'environ 3 000 personnes qui se rajoutent avec les autres déjà en surnombre. Il y a une sorte de cumul de surnombres.

M. Jean-Léonce Dupont, vice-président - C'est un surnombre supplémentaire.

M. Jacques Bachelin - Cela résultait de la décision propre aux concours du second degré décidés à l'automne 1998. En ouvrant 25 000 places aux concours, on prévoyait, je crois, de créer 3 000 personnes en surnombre au moment où ces gens seraient nommés et entreraient en activité.

M. Le Président - Le ministre vous propose un arrêté, lorsque vous constatez qu'il y a surnombre, alertez-vous votre ministère et lui demandez-vous l'aval ?

M. Jacques Bachelin - Je refuse de viser.

M. Le Président - Ce refus entraîne-t-il un dialogue entre les deux ministères ?

M. Jacques Bachelin - Pour un concours d'ATOS par exemple, imaginons que le nombre de vacances soit de 100 et l'on propose 120 postes au concours. Si je refuse de viser, deux solutions se présentent au ministère : soit il considère que c'est nécessaire et il demande à passer outre, soit il se rend à cet argument objectif et limite les postes au concours au nombre de vacances.

M. Le Président - Il s'adresse à Bercy pour passer outre ?

M. Jacques Bachelin - Oui. Pour les concours du second degré, nous ne découvrons pas cette situation chaque année. C'est devenu une sorte de répétition : tous les ans, il y a un arbitrage de Premier ministre où le volume des dépassements est arrêté.

M. Jean-Léonce Dupont, vice-président - Cela concerne aussi bien le corps professoral que les ATOS?

M. Jacques Bachelin - Non, pour les ATOS, il n'y a pas de surnombre.

M. Le Président - Etes-vous capable d'évaluer l'effet cumulatif des dépassements annuels ?

M. Jacques Bachelin - Non.

M. Le Président - Vous ne connaissez pas les effectifs.

M. Jacques Bachelin - Tout est relatif. Une enquête annuelle permet de faire le point sur la base d'un décomptage des effectifs à fin décembre et fin janvier. Chaque année, cela permet de comptabiliser la réalité des effectifs de l'éducation nationale.

Je dis que je ne connais pas car au moment où je dois prendre une décision pour viser un concours, je n'ai pas connaissance de l'effectif actualisé du corps considéré. L'information à ma disposition sur la réalité des existants relève de cette enquête de l'année précédente.

Dans ce cas, nous recevons une annexe transmise à la Fonction publique, sur laquelle figurent des chiffres d'effectifs fournis par le service, avec des prévisions d'entrée et de sortie jusqu'au moment du déroulement du concours. C'est une information que je ne peux pas vérifier. Je fais un contrôle de cohérence, de vraisemblance avec des informations relatives aux années antérieures. Ce n'est pas satisfaisant car nous n'éliminons pas le risque d'une possibilité de surnombre.

Pour les ATOS, c'est généralement suffisant parce que les demandes d'ouverture de concours y sont généralement inférieures, parfois très inférieures, aux possibilités. Pour les enseignants du premier et second degré, il y a arbitrage du Premier ministre.

En conséquence, nous n'avons pas trop de problème, malgré une procédure désagréable dans les faits, sur la maîtrise de l'appréciation des effectifs.

M. Pierre Martin - Les surnombres tels que vous venez d'en parler sont constatés a posteriori. Annuellement, accepte-t-on des surnombres ?

M. Jacques Bachelin - Oui.

M. Pierre Martin - Ils se cumulent ?

M. Jacques Bachelin - Oui.

M. Pierre Martin - Ce n'est pas à vous que nous devons poser la question du pourquoi, mais... ?

M. Pierre Martin - Quand l'arbitrage du Premier ministre décide de 25 000 ouvertures de concours pour les enseignants du second degré, c'est accompagné par l'acceptation d'un surnombre de 3 000 enseignants. Ces chiffres sont à titre d'exemple.

M. Le Président - Pourra-t-on avoir les chiffres exacts ?

M. Jacques Bachelin - Oui, le ministère en dispose. Ce volume de surnombre est une prévision, puisque qu'un concours autorisé en novembre 1998 portera ses effets un, deux, voire trois ans plus tard dans certaines catégories. Puis, il y a le constat au jour le jour de la situation des enseignants, le niveau de surnombre aujourd'hui, compte tenu des décisions antérieures, des entrées et des sorties de cette catégorie des population. Ce sont deux questions différentes.

Nous voyons donc que la position du contrôleur financier n'est pas très facile car l'information n'est pas disponible. D'autres éléments sont également pénalisants : par exemple, tous les recrutements locaux de contractuels échappent au visa (maîtres auxiliaires, contractuels, ATOS, etc.) Le plafond dépend alors de la déontologie de l'autorité locale qui respectera ou pas les dotations qui lui ont été octroyées.

M. Jean-Claude Carle, rapporteur adjoint - Qui les vise ?

M. Jacques Bachelin - Personne.

M. Le Président - Nous y reviendrons peut-être quand nous reparlerons du contrôle local.

M. Jacques Bachelin - J'y arrive. J'espère que demain, nous aurons un dispositif plus satisfaisant pour le contrôle financier au budget et pour le ministère.

Les nominations sur listes complémentaires pour les titulaires à gestion déconcentrée sont une autre pénalisation. Le contrôleur financier donne un visa sur un chiffre global pour un concours. Ensuite, ce concours est décliné au niveau académique. Il y aura une liste de lauréats nommés et une liste complémentaire. L'autorité locale peut tirer sur cette liste complémentaire, ce qui pourrait avoir des conséquences considérables.

Par exemple, pour les professeurs des écoles, un inspecteur d'académie pourrait aller jusqu'à 300 % de la liste des admis. C'est une hypothèse d'école, mais théoriquement, cela se peut. Il n'y a pas de blocage objectif. Cela dépend du comportement des uns et des autres.

Enfin, le troisième élément est peut-être le plus significatif pour expliquer cette problématique des emplois à l'éducation nationale.

M. Le Président - Pardonnez-moi. Pourquoi la liste complémentaire peut-elle entraîner une dépense supplémentaire ? Les gens figurant sur cette liste ne sont pas recrutés. Que vous manque-t-il ?

M. Jacques Bachelin - Par exemple, il est ouvert 1 000 emplois pour un concours. Cela se déroule dans 20 académies, ce qui fait donc 50 lauréats dans chaque académie. 50 personnes seront nommées dans chaque académie. On aura ainsi respecté les 1 000 possibles visés au nombre de vacances.

L'autorité locale pourra puiser dans la liste complémentaire si un des lauréats fait défaut.

M. Le Président - Nous ne dépassons toujours pas le quota.

M. Jacques Bachelin - Cependant, elle peut aussi tirer cette liste complémentaire, indépendamment du fait qu'il y a une défection sur la liste principale.

M. Le Président - D'accord.

M. Jacques Bachelin - La liste complémentaire sert à pallier l'absence de candidats reçus, mais elle permet aussi de trouver des candidats jusqu'à l'ouverture de nouveaux concours parce que des vacances ont été constatées.

M. Jacques Legendre - Ce n'est pas un ajout, c'est une substitution.

M. Jacques Bachelin - Non, c'est une substitution si c'est par rapport à un lauréat déficient, mais c'est un ajout si on estime qu'une vacance doit être pourvue et le candidat vient se rajouter à la liste des admis.

M. Le Président - L'autorité locale décide d'établir une liste complémentaire de 50 parmi lesquels elle recrute 10 ou 20 personnes qui ne correspondent pas à la liste principale.

M. Jacques Bachelin - C'est réglementairement possible.

M. Jacques Legendre - Il nous faut être redoutablement précis dans les termes que nous employons.

M. Le Président - Cela nous oblige à être précis.

M. Pierre Martin - Qu'appelez-vous vacance ?

M. Le Président - Un poste vacant. Nous confondons deux choses. Vous parlez des autorisations de recrutement et non des autorisations d'ouverture de poste. Il s'agit des autorisations de mettre tant de postes au concours. C'est par rapport à cette autorisation qu'il peut y avoir des dépassements par l'intermédiaire des listes complémentaires. Vous avez bien distingué vos deux types de visa : celui sur les recrutements et celui sur les emplois.

M. Jacques Bachelin - Quand je disais 25 000, je ne parlais pas des recrutements. Ce sont les visas sur les actes de gestion.

M. Le Président - Tout à fait.

M. Jean-Léonce Dupont, vice-président - Que se passe-t-il quand la " vacance n'est plus vacante " et que la personne a été prise sur la liste complémentaire ?

M. Jacques Bachelin - Cela fait un surnombre. Une délégation vous donne 100 emplois. Vous avez 90 personnes et vous en recrutez 10, cela fait 100. Si vous estimez qu'une personne a disparu et vous en prenez 11, cela en fera 101 et vous aurez un surnombre.

M. Pierre Martin - C'était la différence entre vacance et ouverture de poste. Il peut y avoir ouverture de poste et la vacance continue d'être payée.

M. Jacques Bachelin - L'ouverture des postes est destinée à combler les vacances. On permettra de compenser ces vacances par des entrants à partir de concours, le problème étant d'arriver à doser ces entrants par rapport aux vacants.

Au niveau local, il y a une certaine souplesse pour adapter le volume d'effectifs à partir de ces concours, avec l'estimation des vacances sur le plan local.

M. Jean-Claude Carle, rapporteur adjoint - Comment est payé dans votre exemple le "un" en surnombre ?

M. Jacques Bachelin - C'est autre chose. Il y a un problème d'effectifs et un problème de rémunération. Les rémunérations sont déterminées d'une façon très théorique. Il y a un mécanisme compliqué, avec les lignes souples. Tout le monde est payé, fort heureusement.

M. Jean-Claude Carle, rapporteur adjoint - C'est le problème des emplois autorisés dans le cadre de la loi de finances. Où est affecté le "un" ? Est-il en supplément ?

M. Jacques Bachelin - On l'imputera sur un chapitre de rémunération. Si c'est un ATOS, il sera sur le 31-90, si c'est un maître auxiliaire, il sera sur le 31-97. Puis, il sera payé à la fin du mois sans aucun problème. Le payeur ne va pas limiter le nombre de bénéficiaires à l'équivalence des dotations.

Une explication du dérapage tient au fait que le ministère utilise des outils et des règles de gestion qui ne coïncide pas avec la mandature budgétaire. Cela résulte du fonctionnement, de l'organisation, de l'objet et des contraintes de l'éducation nationale. Une nomenclature fonctionnelle se démarque de la nomenclature budgétaire.

Par exemple, pour l'éducation nationale, on parle d'un emploi d'enseignant dans le second degré, mais sur le plan budgétaire, on ne sait pas ce qu'est un enseignant. On connaît l'agrégé et le certifié. Ce sont deux réalités qui ne sont pas nécessairement toujours cohérentes.

Les services gestionnaires ont recours à cette nomenclature qui, à travers un mécanisme relativement complexe et long, permet de passer des emplois aux postes et aux personnels.

Il s'ensuit que les délégations d'emplois dont bénéficient les académies n'ont qu'un caractère indicatif. Autrement dit, elles ne sont pas systématiquement considérées pour l'implantation des postes. On peut implanter des postes, volontairement ou involontairement, sans être contraint par la référence budgétaire que représente la délégation. C'est ce qui permet d'avoir des surnombres.

Le rapprochement entre les effectifs et la référence budgétaire est effectué annuellement, c'est l'enquête EMI, (enquête des masses indiciaires). Cette enquête est intéressante, mais n'est disponible que tardivement et ne permet pas de tirer des conséquences opérationnelles, notamment lors de l'élaboration de la loi de finances en mai, lors des conférences budgétaires.

En résumé, le contrôleur financier ne dispose pas de situation actualisée des effectifs des services déconcentrés. Il vise les ouvertures de concours sans pouvoir garantir la régularité des volumes autorisés. Des décisions locales conduisent à recruter des titulaires et des contractuels, sans autorisation préalable et sans considération de l'aspect contraignant de la référence budgétaire, que la nomenclature de gestion n'a pas intégrée.

Cette situation n'est satisfaisante pour aucun des acteurs concernés, que ce soit du côté finances ou du côté éducation nationale.

Le ministre de l'éducation nationale a souhaité, en 1997, en partenariat avec le directeur du budget, mettre en place un dispositif permettant de parvenir à un contrôle des emplois. A partir de ce moment, nous sommes entrés dans une nouvelle perspective, complexe à construire et à mettre en place, mais dont l'ambition est d'assurer l'objectivité de la connaissance et de la maîtrise d'effectifs tout en préservant les spécificités des effectifs, tout en préservant aussi les spécificités de gestion de l'éducation nationale, en particulier la nomenclature fonctionnelle.

Il ne s'agit pas de transformer le mode de gestion de l'éducation nationale pour parvenir à un contrôle des emplois. Il s'agit de prendre en compte la réalité et de l'approcher par une forme originale pour parvenir à ce résultat.

Le dispositif repose sur la mise en oeuvre d'une application informatique élaborée par la Direction des affaires financières, dénommée "contrôle national des emplois". Cette application a dû être élaborée en 1992/93. Depuis 1996, elle permet pour les personnels administratifs et du second degré, de disposer d'états de synthèse des emplois et de consommation des moyens comme sous-produit des applications de gestion Agora et EPP (Emplois poste personnel), qui sont respectivement l'application de gestion du personnel administratif et l'application de gestion des personnels du second degré.

Cette application "contrôle national des emplois" agrège ces données autour d'une interface entre la nomenclature de gestion et la nomenclature budgétaires. Ce concept permet désormais d'établir une cohérence entre des nomenclatures parallèles, qui pouvaient converger mais qui ne le faisaient pas nécessairement et, de ce fait, d'obtenir une cohérence entre les droits ouverts et répartis, c'est-à-dire les dotations exprimées en agrégats et la consommation réelle des moyens, exprimées également en agrégats.

Nous pouvons voir les principes de ce dispositif et ensuite sa mise en place.

Les principes : le champ du dispositif recouvre une part importante des effectifs des services déconcentrés. 98 % des chapitres budgétaires ayant des rémunérations de personnels sont concernés. Il y a essentiellement quatre chapitres :

- deux pour les ATOS, le 31-90 et le 36-60.

- deux pour les enseignants, premier et second degré, 31-92 et 31-93.

Cela doit faire 943 000 agents sur les 950 000 possibles.

Ce dispositif est conçu en deux volets.

Le premier volet est une recherche de comptabilisation des effectifs des services déconcentrés. Le second est la mise en place d'un contrôle juridique des emplois.

Notez que pour les enseignants du second degré, le dispositif est limité au simple décompte des effectifs, sans mise en oeuvre d'un contrôle juridique des emplois.

La comptabilisation des effectifs des services déconcentrés peut être découpée en trois phases :

- la notion d'enveloppe de gestion ;

- l'élaboration de situations mensuelles d'emplois dans les services académiques ;

- et l'agrégation nationale des données déconcentrées.

L'enveloppe de gestion est la traduction, après ajustement, des dotations de la loi de finances. Il sera incorporé les surnombres autorisés et pratiqué des compensations internes afin d'adapter cette dotation à la réalité des besoins. Par exemple, on peut avoir besoin de plus d'adjoints administratifs que d'agents administratifs, de maîtres ouvriers plutôt que d'ouvriers professionnels. En conséquence, dans la réservation du coût indiciaire de ces emplois, cette loi de finance sera rectifiée pour l'adapter aux besoin d'une gestion.

Globalement, une bonne traduction de la loi de finance fournira ces enveloppes de gestion en agrégats, c'est-à-dire en dotations budgétaires regroupées. Ces agrégats sont des regroupements plus ou moins importants. Au niveau des ATOS, généralement cela regroupe des corps (attachés, secrétaire administratif, CASU, etc.). Au niveau des enseignants, l'agrégation est très forte, puisque pour le premier degré, il n'y a qu'un seul agrégat. Pour le second degré, il doit y avoir cinq agrégats, en faisant la distinction entre le personnel enseignants, le personnel de Direction, d'orientation, etc.

Ces démarches sont apparues comme étant le degré le plus fin pouvant être géré dans les deux nomenclatures.

Ces enveloppes de gestion feront l'objet d'un visa par le contrôle financier central. L'existence de ce visa est impératif pour permettre aux Directions gestionnaires de procéder aux délégations entre les différentes académies, sachant que celles-ci doivent s'inscrire dans le plafond des enveloppes.

M. Le Président - Sans transfert d'un agrégat à l'autre ?

M. Jacques Bachelin - Nous visons tous les agrégats l'un après l'autre. Il doit y avoir 80 agrégats donc autant de visas qui dureront tant que le total des délégations restera inférieur ou égal à l'enveloppe de gestion. S'il y a dépassement, le visa tombe et il n'y a plus de délégation. C'est le système du visa bloquant.

Dans ce système, les délégations sont nécessairement compatibles avec les dotations de la loi de finances initiale. Il n'est délégué dans les académies que la LFI et pas davantage. C'est une donnée objective sur laquelle tout le monde joue le jeu de façon ouverte.

Pour que ce soit possible, le contrôle financier doit délivrer ses visas extrêmement rapidement pour ne pas bloquer le ministère dans l'attente de validation d'une nouvelle proposition du service gestionnaires.

L'élaboration de situations mensuelles d'emploi par les rectorats : ces situations sont établies suivant le concept d'agrégats. Elles présentent, pour chaque académie, les stocks de dotations (et non des droits ouverts) et les stocks d'effectifs, c'est-à-dire la population gérée dans le rectorat.

Pour un mois, nous avons 80 agrégats, deux colonnes : dotations, effectifs. D'un mois à l'autre, nous avons des flux entrants et sortants.

Ces situations nous donnent une capacité d'appréhension immédiate et actuelle de la situation d'effectifs de l'académie. Cela permet de prendre les décisions nécessaires, dans la mesure où ces situations sont communiquées aux contrôles financiers régionaux et serviront de base pour que ces contrôleurs financiers régionaux visent les demandes de recrutement.

M. Le Président - Cela fonctionne-t-il déjà ?

M. Jacques Bachelin - L'établissement des situations et leur communication aux contrôles financiers régionaux fonctionnent, mais pas partout. Le système a été enclenché.

L'agrégation des données rectorales : tous ces effectifs pourront être agrégés au niveau national. Tous les mois, il y aura une connaissance actualisée de l'ensemble des effectifs du ministère, rapprochée avec les enveloppes de gestion et non pas des délégations, car celles-ci sont inférieures ou égales aux enveloppes de gestion (les droits ouverts sont donc bien les enveloppes de gestion).

Nous aurons une vision immédiate et objective des vacances et des surnombres. Cette information sera à la connaissance du ministère et du contrôle financier.

Ce système est aujourd'hui faisable puisque nous avons les outils pour cela et se met en place progressivement.

La mise en oeuvre du contrôle juridique des emplois au niveau local : c'est l'exercice de délivrance des visas a priori des contrôleurs financiers régionaux sur les recrutements déconcentrés de titulaires et de contractuels.

M. Le Président - Cela vise-t-il les instituteurs ?

M. Jacques Bachelin - Cela vise toutes les catégories de titulaires à gestion déconcentrés, c'est-à-dire tous les ATOS catégorie B et C, les enseignants du premier degré, et tous les contractuels.

M. Le Président - Cela ne vise pas les maîtres auxiliaires ?

M. Jacques Bachelin - Si. Ce sont des contractuels.

A travers ce visa des contrôleurs financiers régionaux sur le recrutement des titulaires à gestion déconcentrés et des contractuels locaux, trois objectifs sont poursuivis.

Le premier est un objectif quantitatif. C'est le respect des dotations, avec la comparaison des situations élaborées par les rectorats mensuellement pour connaître les vacances ou pouvoir viser un recrutement, dans la mesure où il y a des vacances. C'est une activité tout à fait traditionnelle qui ne se fait pas aujourd'hui.

Le deuxième objectif est beaucoup plus délicat. Il s'agit de veiller au respect de la réglementation des directives de la fonction publique, pour ne pas entretenir ou créer de la précarité. C'est toute la problématique des contractuels sur emploi permanent. Il y a une règle du jeu, il faut l'appliquer et on s'aperçoit, au niveau local, mais ce n'est pas propre à l'éducation nationale, qu'il est difficile de ne pas utiliser les contractuels dans des situations non réglementaires.

Le troisième objectif est de pouvoir traduire concrètement les engagements pris par le ministère de l'éducation nationale lors de l'élaboration de la loi de finances. Par exemple, quand le ministère décide de ne pas recruter de nouveaux maîtres auxiliaires, si cette procédure fonctionnait, les contrôleurs financiers régionaux, seraient en droit de refuser des visas a priori de recrutement de maîtres auxiliaires.

M. Le Président - Ce n'est pas le cas ?

M. Jacques Bachelin - Non. Nous allons voir où en est la mise en oeuvre de tout ce dispositif.

C'est ambitieux et complexe, pour des raisons techniques et aussi de mentalité de comportement. Ce que le ministre et l'administration centrale ont décidé dans leur grande sagesse, n'est pas nécessairement vécu avec un enthousiasme débordant sur le plan local.

Pour ce qui concerne le premier volet, la comptabilisation des effectifs des services déconcentrés, entre fin 1997 et mi-1998, nous avons réalisé le contrôle des emplois au niveau central.

Nous avons élaboré des règles et des modalités de fonctionnement du dispositif. Nous avons défini de façon opérationnelle les notions d'enveloppe et d'agrégats. Nous avons déterminé les conditions de délivrance du visa, a priori, celui du contrôleur financier central. Nous avons réalisé l'outil informatique pour délivrer le visa et nous avons formalisé les délégations pour l'ensemble des corps concernés. Tout cela a été fait au premier semestre 1998.

A partir de la rentrée scolaire 1998/1999, l'administration centrale a délégué les emplois dans le strict respect des dotations de la loi de finances. C'est le cas aujourd'hui. Les rectorats et les contrôleurs financiers régionaux ont reçu systématiquement chaque début de mois, les nouvelles dotations représentant les droits ouverts en matière d'emplois. Autrement dit, dans chaque rectorat, on connaît la règle du jeu.

En 1999, l'objectif sera de faire en sorte que l'ensemble des services déconcentrés établisse systématiquement leur situation mensuelle et la transmette dans les temps convenus aux contrôleurs financiers régionaux. Dans la mesure où ce sera fait systématiquement tous les mois par l'ensemble des académies, cela pourra être agrégé et on aura une vision d'ensemble des effectifs de l'éducation nationale.

Nous avons demandé aux contrôleurs financiers régionaux ce qu'ils reçoivent de la part de leur partenaire dans les rectorats et à quoi cela ressemble. Aujourd'hui, la grosse majorité le fait, mais dans des conditions non encore exploitables.

Nous sommes à un point de passage important car l'enquête des masses indiciaires se déroulent fin décembre pour les enseignants de premier degré et fin janvier pour les autres personnels. En conséquence, les académies seront obligées de sortir leur situation, tous les mois, désormais. Le but du jeu est, à partir de cette opération de janvier, d'enclencher sur la production systématique de ces situations.

Les académies auront, avec les contrôleurs financiers régionaux, des relations de partenariat permettant à ces derniers de regarder ces situations, d'une façon informative dans un premier temps, pour enclencher le système.

Pour ce qui concerne le contrôle juridique des emplois, les choses sont à la fois mieux formalisées et moins bien faites. En effet, des groupes de travail ont explicité depuis 1997 un certain nombre de modalités de fonctionnement, notamment la sélection des actes devant faire l'objet d'un contrôle a priori et la délivrance des visas.

C'est très compliqué. Que doit-on soumettre a priori aux contrôles financiers régionaux ? Comment doit-on le transmettre, à partir de quelle pièce ? Faut-il des dossiers très importants ? Quels seront les délais ? Un contrôle financier ne peut pas bloquer la gestion d'un service, surtout s'il s'agit d'un visa a priori. Il faut donc une capacité de réponse extrêmement rapide.

Ces réflexions n'ont pas encore abouti de façon définitive et vont se prolonger en 1999, avec une hypothèse intéressante mais délicate qui est la délivrance d'un visa informatisé, intervenant directement dans les bases de gestion. On gagne du temps et du papier mais, en même temps, cela entraîne des conséquences assez compliquées.

En conclusion, avec les dispositifs de contrôle des emplois, nous entrons dans une nouvelle logique de fonctionnement. Le ministère de l'éducation nationale devrait désormais pouvoir gérer ses effectifs et satisfaire ses besoins dans la transparence et dans l'objectivité.

C'est un choix mais cela peut se faire. Pour que le contrôle financier puisse exercer ses prérogatives, il faudra que ces objectifs soient atteints, mais aussi compléter le dispositif sur trois points dont deux sont techniques et l'un stratégique. Les points techniques sont :

- tout d'abord, l'extension de l'application micro "contrôle national des emplois" au premier degré ; ce n'est pas fait aujourd'hui ; c'est l'application Agape et les synthèses sont manuelles.

- ensuite, la généralisation du menu "paye" dans toutes les applications afin d'avoir la garantie d'une identité entre les informations traitées en gestion et en paye.

Par exemple aujourd'hui, vous pouvez avoir quelqu'un géré comme un ATOS sur le 31-90 et qui sera payé sur le 36-60. Il n'y a pas d'incohérence en tant que telle car les systèmes ne sont pas liés et peuvent se développer différemment. De même, les nomenclatures de catégories et d'individus ne sont pas identiques entre la gestion et la paye. Nous recevons une source d'information autonome en matière d'effectifs de la part de la comptabilité publique qui est la comptabilisation des personnels payés chaque mois, mais c'est inexploitable car les biais de gestion ne permettent pas de faire le rapprochement de la réalité et de cette comptabilisation.

Quand nous aurons systématiquement des applications informatiques intégrant le module paye, nous ne pourrons pas payer quelqu'un s'il n'est pas géré et nous aurons la même information d'un côté comme de l'autre. D'où une objectivité totale du système.

La troisième évolution est stratégique. C'est l'élargissement du dispositif à l'ensemble des chapitres assurant la rémunération de personnels sur emploi, afin d'avoir l'exhaustivité et donc l'étanchéité du système.

Ces évolutions exigent une réelle volonté politique de la part de l'ensemble des parties prenantes. Elles nécessitent aussi l'élaboration de procédures nouvelles et la construction d'outils informatiques adaptés.

Sur le plan de la démarche, la maîtrise d'une telle opération, complexe, passe par la constitution dès le premier trimestre 1999 (ce n'est pas encore mis en place mais ce le sera d'ici la fin du premier du trimestre) d'un groupe de pilotage réunissant les administrations centrales de l'éducation nationale et des finances, les services rectoraux et le réseau de contrôle central et régional.

Ce groupe tentera d'apporter des réponses de principe et des réponses pragmatiques qui se poseront au fur et à mesure que le système montrera ses difficultés et que l'on identifiera les problèmes.

M. Le Président - Merci Monsieur le contrôleur. Nous restons sans question. Pourriez-vous nous communiquer votre document ? Cela nous aidera.

M. Jacques Bachelin - Bien entendu.

M. Jean-Claude Carle, rapporteur adjoint - Je soupçonnais déjà la complexité, pour ne pas dire l'opacité du système, mais je ne croyais pas que c'était à ce niveau. Vous nous avez dit qu'il fallait améliorer la connaissance et la maîtrise des effectifs et vous nous donnez quelques pistes. Seulement, c'est difficile car on ne connaît pas les effectifs. Le système mis en place permettra-t-il, au moins tous les mois, de s'assurer de la conformité des décisions prises ? Cela permettra-t-il d'éviter les dérives ?

On ne pourra plus payer quelqu'un qui n'est pas géré, avez-vous dit. Cela veut-il dire qu'aujourd'hui, qu'on peut payer quelqu'un qui n'est pas géré ?

M. Le Président - Que veut dire "gérer quelqu'un" ?

M. Jacques Bachelin - Je parle de gérer dans les bases informatiques. Aujourd'hui, nous pouvons faire des payes manuelles, afin qu'une personne non intégrée dans le système puisse être payée, car elle est recrutée.

M. Jean-Claude Carle, rapporteur adjoint - Ce n'est pas dans le sens administratif ou hiérarchique du terme.

M. Jacques Bachelin - S'il y a cette coïncidence entre la gestion informatique et la paye, il y aura adéquation entre postes délégués et postes occupés et si l'on ne paye que les gens qui sont dans le système, on aura une identité entre les gens payés et ceux occupant des postes en conformité avec les postes délégués.

M. Jean-Claude Carle, rapporteur adjoint - Ce n'est pas le cas.

M. Jacques Bachelin - L'informatique n'est pas bouclée. Dans certaines académies, le module paye est associé au module de gestion, mais ce n'est pas généralisé.

M. Jean-Claude Carle, rapporteur adjoint - La déconcentration améliorera-t-elle le système ou le complexifiera-t-elle encore davantage ?

M. Jacques Bachelin - Je ne suis pas un spécialiste de la déconcentration. Il me semble que cela ne peut que favoriser les choses, dans la mesure où les dossiers individuels seront traités plus rapidement sans faire l'aller-retour avec l'administration centrale.

M. Jacques Legendre - Je ne suis pas sûr d'avoir tout compris, tant tout ceci est complexe. Si jusqu'ici c'était presque la nuit, vous avez à peu près achevé de mettre en place des procédures devant permettre d'y voir plus clair. Notre réflexion arrive donc un peu tard car les choses devraient être marquées par la clarté.

M. Jacques Bachelin - C'est un problème de temps. Je ne pense que ce dispositif de contrôle des emplois puisse être opérationnel dans sa réalité avant un certain temps.

M. Le Président - Pouvez-vous être plus précis ?

M. Jacques Bachelin - J'espère que fin 1999, nous pourrons faire fonctionner le premier volet de la comptabilisation des effectifs et l'agrégation de ces informations.

Ensuite, il faudra plusieurs années pour que le système soit totalement fiabilisé, étanche et que les contrôles financiers régionaux puissent pratiquer les contrôles et visas a priori sur les actes de gestion.

En effet, il faut former les contrôleurs financiers. Le contrôle des effectifs est beaucoup plus compliqué que celui des crédits. Des gens s'en vont, d'autres reviennent. Une vacance est une notion très fluctuante. Il faut des systèmes, des procédures, les faire fonctionner, c'est très délicat. Surtout, il ne faut pas bloquer le système.

M. Le Président - Ma remarque porte justement sur ce point. Supposons que votre système soit parfaitement transparent, aveuglant de clarté, ne risque-t-on pas de bloquer la machine ? Le recteur, qui doit faire face à des situations concrètes parfois délicates, aura-t-il les moyens d'en sortir ?

M. Jacques Bachelin - C'est une des questions fondamentales qu'il faut se poser, indépendamment de la construction technique du système.

S'il est constaté des surnombres dans une académie, par exemple, cela ne veut pas dire grand-chose en tant que tel car nous pouvons avoir des vacances dans l'académie voisine. En conséquence, il faut définir la notion de surnombre, probablement sur un plan national.

Le danger numéro un serait d'utiliser brutalement un système et d'avoir une vision très étriquée en faisant des refus de visas car il y aurait deux oreilles de plus. Si nous devions en arriver là, il faudrait s'arrêter tout de suite.

Le but du jeu n'est pas de limiter la capacité d'action du recteur. Si une classe n'a pas de professeur, il est évident que c'est une priorité pas rapport à autre chose. L'importance est de faire en sorte que cette situation soit connue et d'en tirer les conséquences. L'intérêt est d'avoir un retour et de savoir qu'à un certain moment, nous avons des surnombres justifiés par des besoins, bien évidemment.

Cependant, soit nous saurons si ces besoins auraient pu être résolus différemment, avec des moyens optimisés et le ministère aura alors la possibilité de se mobiliser d'une façon plus efficace ; soit nous saurons si ces moyens n'étaient pas suffisants.

M. Le Président - Votre dispositif peut avoir l'avantage de mieux informer le Parlement de la situation réelle et des besoins, quand il prend ses décisions budgétaires. Actuellement, les informations que nous avons ne sont pas d'une très grande précision.

M. Jacques Bachelin - L'intérêt du dispositif du contrôle des emplois est de donner des informations. C'est autre chose de savoir ce que l'on en fait après.

M. Jacques Legendre - Il me vient une idée quant à l'illustration que nous pourrions donner de notre rapport : il y a au Sénat un tableau où chacun sait que le nombre des pieds des soldats ne correspondent au nombre de ces soldats. C'est bien la situation de l'éducation nationale !

(Rires)

M. Le Président - Cela peut faire un titre. Merci.