C. L'AUGMENTATION PARADOXALE DE LA PART DES COLLECTIVITÉS LOCALES

Les troisièmes contrats de plan sont caractérisés par deux évolutions (cf. tableau ci-dessous) :

- la hausse des montants contractualisés par rapport au Produit intérieur brut, d'une part ;

- l'augmentation de la part des collectivités locales dans les engagements inscrits dans les contrats, d'autre part.

LES ENGAGEMENTS DE L'ETAT ET DES RÉGIONS
D'UNE GÉNÉRATION DE CONTRATS DE PLAN À L'AUTRE

 

1984-1988

1989-1993

1994-1998-1999


Engagements

milliards
de francs

en %

milliards
de francs

en %

milliards de francs

en %

Etat

41,87

60

56,59

54,3

77,34

52,1

Région

28,0

40

45,51

45,7

71,13

47,9

Total

69,87

 

104,10

 

148,47

 
 

1984-1988

1989-1993

1993-1998
(
troisièmes CPER sur 5 ans)

1993-1996
(
troisièmes CPER sur 6 ans)

Engagements annuels moyens ( milliards de francs )


13,0


20,8


29,7


24,7

En % du PIB de la première année du contrat


0,32 %


0,34 %


0,40 %


0,33 %

En milliards de francs constants 1980 (1)

9,5

11,6

14,7

12,2

Evolution en volume ( en %)

 

+ 23 %

+ 27 %

+ 5 %

(1) Pour la première année du contrat.

Source : INSEE, DATAR, Calculs du rapporteur.


• En premier lieu, on peut remarquer que l'augmentation des engagements initiaux de l'Etat et des Régions d'un contrat de plan à l'autre s'est accélérée entre la deuxième génération de contrats et la troisième génération (+27 % en volume).

• Les engagements annuels moyens des premiers contrats de plan (1984-1988) représentaient ainsi 0,32 % du PIB de 1984 ; les engagements annuels moyens des deuxièmes contrats (1989-1993) 0,34 % du PIB de 1989 et les engagements annuels moyens des troisièmes contrats de plan (1994-1998-1999) représentaient à l'origine 0,40 % du PIB de 1994 .

Cette évolution reflète l'extension du champ de la contractualisation.

Cependant, cet effet s'estompe si l'on tient compte du prolongement d'un an des troisièmes contrats décidé en 1996 : répartis sur 6 années, les engagements des troisièmes contrats sont stables en proportion du PIB.

En fait, si l'on tient également compte de ce qu'au contraire des générations précédentes, la troisième génération de contrat de plan n'a pas été entièrement exécutée , la part des contrats de plan dans le PIB s'inscrit en repli sur la période 1994-1998.

Combiné à l'extension du champ de la contractualisation, ce phénomène concourt à la dilution des contrats.

• Par ailleurs, la part des Régions dans les engagements financiers portés aux contrats de plan s'est accrue d'une génération à l'autre : de 40 % du total Etat + Régions pour la première génération de contrats, à 46 % pour la deuxième génération, puis à 48 % pour la troisième génération.

Parallèlement, la part des engagements des autres collectivités locales dans le cumul Etat + Régions + autres collectivités s'est également accrue lors des troisièmes contrats de plan.

Au total, la part de l'Etat dans les engagements contractualisés a donc connu une baisse continue d'un contrat de plan à l'autre, pour devenir minoritaire (entre 45 et 47 % selon les périmètres retenus).

• Comme le relève la Cour des Comptes 95( * ) , ce repli des engagements de l'Etat est " paradoxal, puisque les principales actions inscrites aux contrats de plan concernent des domaines qui sont de la responsabilité de ce dernier : les infrastructures de communications (surtout les routes nationales) et la formation-recherche (principalement universitaire) pour respectivement 62,7 milliards de francs et 33,0 milliards de francs, soit respectivement 42,4 % et 22,3 % des interventions cumulées de l'Etat et des Régions " (cf. le tableau et l'encadré ci-après, ainsi que le remarquable travail effectué par le Conseil régional de Poitou-Charentes reproduit en annexe 5).

CONTRATS DE PLAN 1994-1998
CRÉDITS PRÉVUS ÉTAT + RÉGION
(en millions de francs)

RÉGIONS

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

Alsace

1.645

884.9

234.8

439.5

1 513.9

213.9

79.0

55.5

156.0

51.6

124.7

1.7

3755,5

Aquitaine

2.843

999.5

318.1

1.386.1

1895.8

481.2

221.2

146.8

84.1

65.0

0.0

3.3

3601.1

Auvergne

1.317

465.2

99.0

765.7

1710.0

126.6

147.0

85.0

33.4

98.60

0.0

1.2

3531.7

Basse-Normandie

1.408

761.7

171.0

573.6

2348.5

120.5

175.0

68.0

41.0

87.9

0.0

0.0

4347.3

Bourgogne

1.622

1007.4

148.0

745.5

1003.8

212.6

299.5

56.03

61.5

97.2

0.0

3.1

3634.8

Bretagne

2.830

1438.8

355.1

1186.5

3600.7

156.1

744.2

409.5

156.0

154.0

0.0

6.0

8206.9

Centre

2.406

874.6

206.0

620.6

1670.8

361.9

178.0

156.8

47.0

74.4

0.0

2.5

4192.7

Champagne-Ardenne

1.353

749.8

211.3

407.1

1.362.9

195.9

102.0

27.5

35.9

24.1

17.8

0.0

3134.4

Corse

0.263

259.4

66.8

641.2

87.6

54.5

14.0

47.7

86.2

17.1

0.0

0.8

1275.4

Franche-Comté

1.113

655.4

152.5

519.0

1092.2

174.8

197.1

88.0

84.4

25.9

9.0

2.5

3001.0

Haute-Normandie

1.758

1215.0

157.0

441.6

1969.5

358.4

60.6

139.2

159.5

244.0

10.0

2.6

4757.4

Ile-de-France

10.902

3865.0

105.0

742.1

20615.0

7116.1

0.0

746.0

415.5

736.5

60.0

13.4

34414.6

Languedoc-Roussillon

2.182

1104.8

603.5

1255.0

1854.5

219.2

495.9

238.9

165.5

66.0

0.0

2.1

6005.4

Limousin

0.718

460.8

72.3

755.5

852.0

86.7

104.4

31.0

46.6

7.8

0.0

0.0

2417.1

Lorraine

2.294

2023.3

293.5

1215.8

2637.2

356.6

716.3

283.4

239.6

30.2

50.4

5.1

7851.7

Midi-Pyrénées

2.467

908.9

295.0

1671.0

2810.0

423.6

561.6

252.5

51.5

120.3

5.0

7.2

7106.6

Nord-Pas-de-Calais

3.984

2922.2

564.8

1858.8

4060.7

2327.6

85.0

342.9

342.2

714.0

77.5

10.0

13305.7

Pays de la Loire

3.117

1093.7

242.1

836.9

1991.5

308.6

151.0

46.4

136.5

278.5

0.0

3.0

5088.3

Picardie

1.848

1301.2

163.2

509.1

1946.2

337.5

200.2

174.0

95.0

135.0

20.0

2.6

4485.4

Poitou-Charentes

1.619

950.8

335.0

518.8

1778.1

169.1

206.6

52.8

155.0

96.8

0.0

29.2

4292.3

PACA

4.371

1497.2

342.3

1356.3

2347.5

1134.1

231.9

294.5

149.2

183.5

6.0

7.0

7549.6

Rhône-Alpes

5.480

1861.4

620.6

1123.5

3605.6

1539.5

279.9

469.0

109.5

162.0

0.0

6.0

9777.0

Métropole

57.530

27301.1

5757.1

19569.3

62754.2

16475.0

5250.8

4211.6

2851.8

3471.0

380.4

109.4

148131.8

Source : ARIC (Association régionale d'information des collectivités territoriales [Rennes]).




LES GRANDES PRIORITÉS DES TROISIÈMES CONTRATS DE PLAN ÉTAT-RÉGIONS

Domaine

Engagements cumulés de l'Etat et des Régions

(en milliards de francs)

(en % de leurs dotations totales)

Routes nationales

45

30 %

Formation

24

16 %

dont enseignement supérieur

17

11 %

Développement économique

18

12 %

Politique de la Ville

14,5

9 %

Agriculture

9

6 %

Actions sanitaires et sociales

4

3 %

Environnement

3,3

2 %

Développement culturel

2,5

2 %

Source : Région Lorraine.

N.B. Ces montants ne comprennent pas les contributions des autres collectivités publiques.

LES ENGAGEMENTS DE L'ETAT PAR MINISTÈRE, AU TITRE DES TROISIÈMES CONTRATS DE PLAN, SELON L'INSPECTION DES FINANCES

 

Ministère

Engagements de l'Etat

(en milliards de francs)

 
 

Equipement, Transports, Logement et Tourisme

38,9

 
 

Enseignement supérieur

13,1

 
 

Agriculture

7,8

 
 

FNADT

4,7

 
 

Industrie

4,3

 
 

Emploi-Formation

4,1

 
 

Ville

4,1

 
 

Outre Mer

3,6

 
 

Santé / Social

2,5

 
 

Education nationale

1,7

 
 

Culture

1,5

 
 

Environnement

1,5

 
 

Artisanat

0,37

 
 

Commerce extérieur

0,24

 
 

Jeunesse et Sports

0,14

 


Source : Inspection Générale des Finances, 1999.

LES PRIORITÉS RÉGIONALES

Région

Montant du contrat de plan (en millions de F)

Principales opérations inscrites
au contrat Etat-région

Alsace

5 508

Routes 25,2 %

enseignement supérieur et recherche 16,9 %

transports 6,6 %

équilibre des territoires 6 %

éducation, formation 5,5 %

Aquitaine

6 000

Routes et infrastructures 35 %

formation, enseignement supérieur 17,5 %

agriculture 17 %

Auvergne

2 606

Infrastructures routières 40 %

formations supérieures 10 %

Bourgogne

4 182

Infrastructures routières 35 %

enseignement supérieur 13,7 %

Bretagne

9 717

Infrastructures de communications 44,8 %

formation 19,2 %

Centre (*)

5 312

Grandes infrastructures 45 %

formation et recherche 23 %

développement économique 17 %

cadre de vie, environnement 15 %

Champagne-Ardenne

3 680

Routes 54 %

enseignement supérieur 10,5 %

compétitivité des entreprises 9,2 %

politique de la ville 5 %

Corse (hors programme opératoire intégré)

1 275

Agriculture 27 %

formation professionnelle 11 %

enseignement 9,2 %

PME-Artisanat 7 %

Franche-Comté

2 832

Infrastructures de communication 37 %

économie 36 %

enseignement supérieur et recherche 14 %

Ile-de-France

32 000

Transports 68,75 %

formation 10,93 %

Languedoc-Roussillon

5 721

Réseau routier 42 %

enseignement supérieur 14,3 %

filières agricoles et agro-alimentaires 14,3 %

Limousin

2 331

Infrastructures routières 43,7 %

agriculture, forêts, développement rural 19,3%

enseignement supérieur 8 %

Lorraine

9 400

Communications 37 %

enseignement supérieur 14 %

développement économique 8,7 %

emploi, formation 8,3 %

Midi-Pyrénées

7 161

Routes 39 %

activités économiques 23 %

recherche, formation 20 %

politiques territoriale et de massif 14 %

Nord-Pas-de-Calais

13 000

Transports et infrastructures 31,5 %

aménagement, villes, pays ruraux 14,5 %

action économique 10,6 %

formation supérieure 9,5 %

Basse-Normandie

5 286

Communications 64 %

formation et recherche 16 %

développement économique 11 %

aménagement du territoire 10 %

Haute-Normandie

5 000

Emploi, appareil productif, infrastructures 50%

formation, recherche 25 %

aménagement et solidarité 20 %

Pays de la Loire

6 100

Infrastructures 43,4 %

formation et emploi 19,6 %

développement industriel et recherche 18 %

cadre de vie 13 %

Picardie

5 672

Routes 24,6 %

voies ferrées 17,6 %

formation et enseignement supérieur 22,8 %

Poitou-Charentes

5 000

Infrastructures de transports 47,8 %

formation, emploi 31 %

monde rural 10,6 %

cohésion régionale 10,6 %

Provence-Alpes-Côte d'Azur

7 340

Infrastructures de communication 45 %

enseignement supérieur 12,6 %

politique de la ville 12,3 %

Rhône-Alpes

10 000

Transports et communications 30 %

politique de la ville 30 %

éducation, recherche 20 %

développement économique et emploi 15 %

Source : Le Moniteur du 18 février 1994, Conseil économique et social.

(*) Pour la région Centre, les données ont été communiquées par le CES régional du Centre.

De ce paradoxe, la Cour tire la conclusion suivante : " l'Etat, qui utilise la contractualisation pour faire cofinancer ses investissements, en tire un avantage certain " 96( * ) .

Inversement, au travers des contrats de plan, les Régions se sont très largement engagées au delà de leurs compétences , notamment en matière de routes nationales, d'enseignement supérieur, de recherche, de voies navigables, du volet social de la politique de la ville, d'actions en faveur des personnes âgées, etc.

Certes, certaines Régions avaient résolu, à l'instar de l'Auvergne, de " ne pas demander l'intervention de l'Etat sur des domaines que la décentralisation lui avait clairement confiés ", et il est souhaitable que les contrats de plan mettent en cohérence les interventions publiques sur des domaines de compétences partagés , mais les Régions ont parfois le sentiment que, grâce au déséquilibre de la négociation, la contractualisation sert à l'Etat de " système de défausse " pour certaines dépenses relevant de sa stricte compétence.

En effet, certaines Régions ont observé " une sollicitation forte de l'Etat pour cofinancer des opérations ne relevant pas de leurs compétences, même partagées, et inversement, une diminution des engagements de l'Etat pour des actions relevant pour partie de sa compétence (comme la formation professionnelle) ".

Cela contrevient clairement aux objectifs fixés par la lettre circulaire du Premier ministre en date du 28 juillet 1993, selon laquelle " l'enjeu est d'organiser la complémentarité de tous les acteurs concernés par un même objectif, chacun limitant le plus possible son intervention à son propre domaine de compétence ".

• Enfin, on peut souligner que la part des contrats de plan relative au " volet territorial " est demeurée modeste : environ 10 % des engagements contractualisés selon l'estimation du rapport de M. CHÉRÈQUE.

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