M. le président. Sur le texte proposé pour l'article L. 36-5 du code des postes et télécommunications, je suis saisi de deux amendements.
Par amendement n° 119, MM. Billard, Leyzour, Minetti et Ralite, les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de supprimer le second alinéa du texte présenté par l'article 6 pour l'article L. 36-5 du code des postes et télécommunications.
Par amendement n° 73, Mme Bardou, MM. Emin, Revol, Rigaudière et Moinard proposent de compléter le texte présenté par l'article 6 pour l'article L. 36-5 du code des postes et télécommunications par un alinéa ainsi rédigé :
« Elle veille à la prise en compte de l'intérêt des territoires et des utilisateurs dans l'accès aux services et aux équipements. »
La parole est à Mme Demessine, pour défendre l'amendement n° 119.
Mme Michelle Demessine. Cet amendement de suppression des dispositions du texte proposé pour l'article L. 36-5 du code des postes et télécommunications s'oppose à une disposition particulièrement originale et pour le moins surprenante du projet de loi.
En effet, ce texte prévoit que la nouvelle autorité de régulation des télécommunications serait invitée à veiller à l'application des textes relatifs au secteur concerné et à participer à la confrontation des législations au plan communautaire.
Pourquoi tant d'empressement à aboutir à une situation pour le moins originale, qui consiste à conférer aux cinq membres de ladite autorité un pouvoir qui est refusé aux membres de la représentation nationale, par exemple ?
Une partie de la réponse à cette question réside, bien entendu, dans le fait que l'ensemble des pays européens procèdent aujourd'hui à une importante déréglementation du secteur des télécommunications en vue d'offrir ce marché à tous ceux - ils sont de toute façon peu nombreux et ce sont souvent les mêmes - qui sont désireux de faire quelques affaires en ce domaine particulièrement rentable de l'économie.
La question est toutefois posée dans des termes différents par le simple fait suivant : l'examen attentif des conditions de prestation de services téléphoniques est sensiblement plus positif en France - cet élément est à porter au crédit de France Télécom - que celui qui porte sur les prestations fournies dans les pays ayant conduit, depuis plusieurs années, des politiques de libéralisation de cette activité.
L'adoption de ce projet de loi aura notamment deux conséquences : d'une part, une segmentation profonde des services téléphoniques, conduisant à une sensible majoration de la facture des particuliers par hausse de l'abonnement de base et accroissement du coût des communications locales ; d'autre part, un nouveau mouvement de baisse du coût des prestations, tant en durée qu'en coûts de connexion, favorable aux seules entreprises de dimension internationale.
On créera ainsi les conditions d'une téléphonie à deux vitesses, destinées à accompagner le mouvement de la mondialisation de l'économie, dont le seul objectif demeure la recherche de la rentabilité maximale du capital.
Que devient donc notre autorité de régulation des télécommunications dans tout cela ?
Fera-t-elle valoir l'aspiration légitime du public à bénéficier pleinement des nouvelles avancées technologiques, tant à l'échelon français qu'à l'échelon européen ? Jouera-t-elle plutôt sur l'instrumentalisation du marché des télécommunications dans la perspective du profit que peuvent en tirer quelques groupes structurés qui seraient, en quelque sorte, fatigués de payer la péréquation tarifaire ?
Dans le contexte actuel, nous penchons plutôt, aussi respectables et expérimentés que puissent être les futurs membres de l'ART, pour la seconde solution, d'autant que le secteur des télécommunications a déjà connu quelques évolutions dans la dernière période en matière de tarification des prestations de base ou de coût des liaisons avec l'étranger.
Nous irons encore plus loin dans ce domaine, nous situant ainsi exactement à l'opposé de la tradition française du service public qui, en la matière, n'a pourtant jamais fait la démonstration de son inefficacité sociale et économique, bien au contraire.
Sous le bénéfice de ces observations, je vous invite donc à adopter cet amendement n° 119.
M. le président. La parole est à Mme Bardou, pour défendre l'amendement n° 73.
Mme Janine Bardou. Cet amendement s'explique par son texte même.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 119 et 73 ?
M. Gérard Larcher, rapporteur. Nous sommes défavorables, pour des motifs déjà maintes fois expliqués, à toute réduction des compétences de l'autorité de régulation. Nous sommes donc opposés à l'amendement n° 119.
En ce qui concerne l'amendement n° 73, après un long débat, la commission s'en est remise à la sagesse du Sénat.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur ces deux amendements ?
M. François Fillon, ministre délégué. Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 119.
Pour ce qui est de l'amendement n° 73, madame Bardou, j'ai compris que je ne devais pas m'opposer à un amendement portant sur l'aménagement du territoire. Cependant, de mon point de vue, le dispositif que vous proposez n'aura aucun effet ; il risque même d'introduire une confusion dans le rôle de l'autorité de régulation.
Je m'en remets donc à la sagesse du Sénat.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 119, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 73, pour lequel la commission et le Gouvernement s'en remettent à la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, ainsi modifié, le texte proposé pour l'article L. 36-5 du code des postes et télécommunications.
(Ce texte est adopté.)

ARTICLE L. 36-6 DU CODE DES POSTES
ET TÉLÉCOMMUNICATIONS