M. le président. Par amendement n° 39, M. Sérusclat, Mmes Dieulangard et ben Guiga, MM. Dreyfus-Schmidt et Mazars et les membres du groupe socialiste proposent d'insérer, après l'article 20, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après le titre VIII du livre premier du code civil, il est créé un titre nouveau intitulé : "De la recherche des origines en matière familiale".
« II. - Dans le code civil, il est inséré, après l'article 370-2, trois articles ainsi rédigés :
« Art... - Il est instauré un conseil pour la recherche des origines en matière familiale.
« Le conseil mentionné au premier alinéa est une autorité administrative indépendante. Il est composé de onze membres répartis comme suit :
« - un député et un sénateur désignés respectivement par l'Assemblée nationale et le Sénat ;
« - un représentant de la fédération nationale des pupilles et anciens pupilles de l'Etat ;
« - un représentant des familles adoptives ;
« - un membre ou ancien membre du Conseil d'Etat élu par l'assemblée générale du Conseil d'Etat ;
« - un membre ou ancien membre de la Cour de cassation élu par l'assemblée générale de la Cour de cassation ;
« - un membre ou ancien membre de la commission d'accès aux documents administratifs ;
« - deux psychologues ou psychiatres nommés par le ministre chargé de la famille ;
« - deux assistants sociaux.
« Leur mandat est de cinq ans renouvelable une fois.
« Les dispositions prévues aux articles 226-13 et 226-14 du code pénal sont applicables aux membres du conseil pour la recherche des origines en matière familiale et aux personnes employées par ce conseil.
« Le conseil élit en son sein le président.
« Les conditions de désignation des membres du conseil et ses modalités de fonctionnement sont fixées par décret en Conseil d'Etat. »
« Art... - La demande de secret de l'identité du ou des parents au moment de la remise de l'enfant à l'aide sociale ou au moment de l'accouchement en application de l'article L. 341-1 du présent code doit être formulée expressément, signée du ou des demandeurs et mentionnée sur le procès-verbal de remise de l'enfant au service de l'aide sociale à l'enfance ou à l'un des organismes autorisés pour l'adoption ou le placement en vue de l'adoption.
« La ou les personnes qui remettent l'enfant sont invitées, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat, après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés, à donner tous renseignements relatifs à l'enfant et à ses origines.
« Les renseignements identifiants resteront secrets et ne pourront être transmis à l'enfant qu'en application de la procédure de recherche des origines prévue à l'article 370-5.
« Le procès-verbal de remise de l'enfant, la demande de secret de l'identité de la ou des personnes qui ont procédé à cette remise et tous les renseignements y afférent sont transmis au conseil pour la recherche des origines en matière familiale.
« Art... - Le conseil mentionné au présent titre conserve tout renseignement ou document relatif au secret de l'identité de la ou des personnes qui en ont fait la demande en remettant un enfant au service de l'aide sociale à l'enfance dans les conditions définies par le présent code.
« Il peut être saisi par l'enfant majeur concerné ou, à condition que l'enfant soit majeur, par le ou les parents qui ont demandé le secret.
« Le conseil apprécie la recevabilité de la demande au regard de la situation de la personne qui a introduit celle-ci.
« Les conditions de recevabilité de cette demande sont définies par décret en Conseil d'Etat.
« La décision du conseil est motivée.
« La demande peut porter sur la communication de renseignements remettant en cause le secret et sur la recherche de l'enfant ou du ou des parents concernés.
« Si la demande porte uniquement sur la communication des renseignements remettant en cause le secret, le conseil s'assure du consentement des personnes concernées. Il informe le demandeur du résultat de ses démarches.
« Si la demande porte sur la recherche de l'enfant ou du ou des parents concernés et qu'elle a été déclarée recevable, le conseil procède à toutes investigations nécessaires.
« Si aucune demande n'a été faite concernant un dossier dans un délai de soixante ans à compter de la transmission au conseil pour la recherche des origines en matière familiale, ledit dossier est transmis dans des conditions fixées par décret aux archives nationales.
« Si la ou les personnes faisant l'objet d'une recherche ont pu être retrouvées, le conseil pour la recherche des origines en matière familiale exerce un rôle de médiateur entre les deux parties concernées. Il respecte leur volonté et apprécie l'opportunité de leur transmettre leurs décisions respectives. Il s'assure de la possibilité de les faire bénéficier d'un accompagnement psychologique, si elles le souhaitent, et apporte son concours à leur rapprochement, s'il le juge opportun et selon des modalités laissées à sa libre appréciation. »
« III. - Les dépenses résultant de l'application des paragraphes I et II sont compensées, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits de consommation sur les tabacs visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Sérusclat.
M. Franck Sérusclat. Cet amendement est, pour nous, essentiel. En définitive, le vote du groupe socialiste sur ce texte dépendra du sort qui lui sera réservé.
Il s'agit d'insérer un article additionnel tendant à créer un conseil supérieur pour la recherche des origines en matière familiale. Ce conseil constituerait un élément intermédiaire entre l'enfant qui voudrait connaître ses origines et le ou les parents qui accepteraient de les faire connaître. Il jouerait le rôle de médiateur entre les deux parties concernées.
Je ne reviendrai pas sur le détail de ces dispositions ; elles ont fait l'objet d'un débat en première lecture, qui figure au Journal officiel .
Il s'agit, je le répète, d'un élément déterminant pour notre vote final.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Luc Dejoie, rapporteur. Ces dispositions avaient déjà été repoussées en première lecture, tant au Sénat qu'à l'Assemblée nationale, ce pour plusieurs raisons.
Tout d'abord, il n'apparaissait pas opportun de créer un conseil supplémentaire, avec tout ce que cela peut induire de lourdeurs de fonctionnement.
Ensuite, la notion de secret existe ; nous en avons déjà parlé à plusieurs reprises. Dès lors, pour quelle raison demanderait-on à un médiateur d'intervenir en la matière ? Si le secret a été demandé, il doit être préservé tant que celui qui l'a demandé n'a pas souhaité le lever.
L'amendement constitue un retour en arrière par rapport aux positions que le Parlement a adoptées dans ce domaine lors de la première lecture.
Par conséquent, comme en première lecture, la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Hervé Gaymard, secrétaire d'Etat. Défavorable.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 39.
M. Franck Sérusclat. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Sérusclat.
M. Franck Sérusclat. Je souhaiterais revenir sur la première réflexion de M. le rapporteur. Comme ce n'est pas vraiment un argument, on pourrait penser que, en définitive, la commission est favorable à ces mesures. (M. le rapporteur fait un signe de dénégation.) En effet, il s'agit simplement de la difficulté de réunir le conseil.
Nous allons créer un conseil pour l'informatique dans peu de temps. Nous en avons créé un pour le Conseil supérieur de l'audiovisuel, le CSA. Nous passons notre temps à en créer ! Le danger existe, effectivement, en particulier pour le législateur, de voir ces nombreux conseils prendre le pas, dans une certaine mesure, sur la réflexion des parlementaires. Mais tel n'est pas le cas !
Par conséquent, je souhaiterais que M. le rapporteur retire cet argument, qui n'est qu'un simple prétexte.
S'agissant du secret, nous sommes tout à fait favorables à la disposition qui permet, comme on dit, d'accoucher « sous X ». Toutefois, pour en rester au niveau du débat sur la sémantique engagé par notre collègue Mme Dusseau, le secret est fait pour être gardé ou pour être révélé un jour.
Par conséquent, si le médiateur est saisi par l'enfant, il peut très bien demander à la mère de se faire connaître et établir cette réciprocité.
Je regrette que ces deux prétextes empêchent la commission des lois d'émettre un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 39, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article additionnel avant l'article 27 ter AA