« Le Sénat,
« Vu l'article 88-4 de la Constitution,
« Vu la proposition de révision des perspectives financières présentée par la Commission au Parlement européen et au Conseil en application des paragraphes 11 et 12 de l'accord interinstitutionnel du 29 octobre 1993 sur la discipline budgétaire et l'amélioration de la procédure budgétaire SEC (96) 492 final,
« Se félicite de la transmission au Parlement, au titre de l'article 88-4 de la Constitution, du projet d'accord interinstitutionnel portant sur la révision des perspectives financières et demande au Gouvernement que toutes les propositions relatives à des accords interinstitutionnels soient désormais transmises au Parlement ;
« Considérant que la révision proposée par la Commission ne paraît pas entièrement conforme à l'esprit et à la lettre de l'accord interinstitutionnel du 29 octobre 1993 ;
« Considérant que la rigueur budgétaire que s'imposent actuellement les Etats membres devrait conduire la Commission à adopter le même comportement pour le budget des Communautés européennes et que la véritable économie conduirait à diminuer la contribution des Etats membres plutôt qu'à réorienter les crédits disponibles sous plafond vers d'autres dépenses communautaires ;
« Considérant que la Commission propose, sans relèvement du plafond des perspectives financières ni augmentation des crédits de paiement, de dégager 2,7 milliards d'écus de crédits d'engagement ;
« Considérant que ces crédits, qui correspondent aux dépenses entraînées par la proposition de la Commission, seraient dégagés par une reclassification des dépenses au sein des perspectives financières, reclassification qui aurait pour effet d'accroître les crédits disponibles pour les fonds structurels, les politiques internes, les actions extérieures et les dépenses administratives ;
« Considérant que les demandes de la Commission ne sont pas justifiées :
« - le financement du complément du 4e programme cadre de recherche est déjà assuré ;
« - une modification de l'ordre des priorités d'action dans le domaine de la politique extérieure de l'Union n'apparaît pas actuellement justifiée ;
« - la reconstitution de la réserve pour les initiatives communautaires ne s'impose pas dans l'immédiat ;
« - les mouvements de crédits entre la réserve pour aide d'urgence et le relèvement du plafond de la rubrique des actions extérieures ne sont pas acceptables dans leur principe ;
« - les dépenses immobilières du Parlement européen ne sauraient justifier une révision des perspectives financières ;
« - la priorité en faveur des réseaux transeuropéens peut être assurée dans le cadre budgétaire actuel ;
« Considérant que le redéploiement résultant de la sous-exécution de nombre de programmes communautaires présente de nombreux risques, tant du point de vue de la procédure budgétaire qu'au regard de l'utilisation prévisible des crédits de la ligne agricole ;
« Considérant notamment que le principe d'un redéploiement des dépenses obligatoires vers les dépenses non obligatoires ne doit pas être admis ;
« Considérant que la proposition entraînerait, du fait de l'annulation des économies possibles dans la ligne budgétaire agricole, un relèvement de 2,1 milliards de francs de la contribution française au budget communautaire ;
« Demande au Gouvernement de s'opposer fermement à la proposition de révision des perspectives financières présentée par la Commission ;
« Considérant, par ailleurs, que la gestion des finances publiques dans l'Union européenne devrait tenir compte des réalités économiques et financières des Etats membres et être cohérente avec les principes de la dépense communautaire ;
« Demande également au Gouvernement de promouvoir ces principes en étant vigilant devant les évolutions financières proposées par les instances communautaires et en recherchant les moyens permettant de garantir une gestion des finances publiques communautaires réaliste. »
Avant de mettre aux voix la résolution, je donne la parole à M. Genton pour explication de vote.
M. Jacques Genton. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je voterai, bien entendu, la proposition de résolution de la commission des finances, et j'approuve la déclaration de M. le rapporteur sur le projet de budget pour 1997.
Je me réjouis que la conférence des présidents ait décidé que cette proposition de résolution serait examinée en séance publique, afin de donner la solennité qui convient à cet important sujet.
Notre collègue M. Denis Badré a excellemment expliqué, dans son rapport et dans son intervention liminaire, les termes de cette proposition de résolution, qui, je le souligne au passage, a été soutenue par la délégation du Sénat pour l'Union européenne.
M. Denis Badré, rapporteur. Je suis confus de ne pas l'avoir rappelé.
M. Jacques Genton. Cela allait de soi, mon cher collègue, nous étions ensemble.
Je tiens, en cette circonstance, à exprimer mon inquiétude quant à la légitimité des accords interinstitutionnels qui ne sont pas prévus par les traités.
A ceux qui pourraient nous reprocher d'inviter le Gouvernement à s'opposer à la proposition de révision des perspectives financières présentée par la Commission, je répondrai, en reprenant les propos de M. le rapporteur : « Nous ne voulons pas que les institutions de la Communauté jouent contre l'Europe. » C'est, à mon avis, mes chers collègues, la meilleure conclusion. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, des Républicains et Indépendants et du Rassemblement pour la République.)
M. le président. La parole est à M. Hamel.
M. Emmanuel Hamel. Après les propos de M. Genton, dont je tiens à souligner la personnalité éminente et les responsabilités qu'il assume en tant que président de la délégation du Sénat pour l'Union européenne, j'aurais le devoir d'être très bref.
Je manquerai toutefois à ce devoir en exprimant publiquement une confidence. Ayant l'honneur d'être membre de la commission des finances, je dois faire part à la Haute assemblée du plaisir intense que nous avons éprouvé en écoutant les explications de notre rapporteur, M. Denis Badré.
Bien qu'il siège depuis peu de temps au sein de notre assemblée, il a déjà acquis une grande autorité et a fait preuve d'une grande connaissance des problèmes si délicats des finances communautaires. Voilà qui est véritablement le signe d'un immense talent. J'ose espérer que la République le reconnaîtra un jour en lui confiant des fonctions éminentes.
Son rapport est, bien évidemment, remarquable. Je tiens d'abord à le soutenir, ce qui, politiquement, n'est pas sans importance.
Nous avons des conceptions différentes de l'Europe. Les uns ne sont peut-être pas opposés à l'idée d'une Europe quasi fédérale. Les autres préféreraient que la France reste un Etat protégeant son territoire et coopérant avec d'autres pays européens.
Quelle que soit la sensibilité des membres de la commission des finances en ce domaine, tous sont convenus qu'ils pouvaient voter le rapport de M. Badré. Ce rapport contient en effet un certain nombre d'évidences.
Comme il le souligne dans la proposition de résolution, la révision des perspectives financières proposée par la Commission n'est conforme ni à l'esprit ni à la lettre de l'accord institutionnel du 29 octobre 1993. Comment construire l'Europe si la Commission ou le Conseil des ministres se mettent eux-mêmes en contradiction avec les textes déjà adoptés ?
Par ailleurs, il est incontestable, et M. Badré l'explique fort bien, que la demande de la Commission n'est pas justifiée. Il suffit de se reporter à son rapport pour en être convaincu.
Enfin, il affirme, et le groupe du Rassemblement pour la République partage ce sentiment, que « le principe d'un redéploiement des dépenses obligatoires vers les dépenses non obligatoires ne doit pas être admis », et nous sommes heureux, monsieur le ministre, que vous l'ayez confirmé.
En outre, en tant que parlementaires français, nous ne pouvons pas admettre une proposition qui aurait pour conséquence de relever la contribution française, qui est déjà très forte, au budget communautaire.
Ainsi, le groupe du Rassemblement pour la République demande au Gouvernement de s'opposer fermement à la proposition de révision des perspectives financières présentée par la Commission. Tel sera le sens de notre vote.
Je pourrais ajouter d'autres arguments si je n'étais pas pris par le temps et par l'obligation d'être concis. En effet, s'agissant de problèmes aussi importants, plus nos affirmations sont nettes, plus l'expression de notre volonté est concise et plus nous servons l'intérêt public et la construction de l'Europe. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix la résolution.
M. Alain Richard. Le groupe socialiste s'abstient.

(La résolution est adoptée.)
M. le président. En application de l'article 73 bis, alinéa 11, du règlement, la résolution que le Sénat vient d'adopter sera transmise au Gouvernement et à l'Assemblée nationale.

9