M. le président. « Art. 44. - Il est ouvert, à compter du 1er février 1997, dans les écritures du Trésor, un compte d'affectation spéciale n° 902-29 intitulé "Fonds pour le logement des personnes en difficulté". »
« Le ministre chargé du logement est l'ordonnateur principal de ce compte qui retrace :
« 1° En recettes :
« - le produit de la contribution prévue à l'article 302 bis ZC du code général des impôts, sur les logements locatifs qui entrent dans le champ d'application du supplément de loyer de solidarité prévu à l'article L. 441-3 du code de la construction et de l'habitation,
« - les versements du budget général de l'État,
« - les recettes diverses et accidentelles ;
« 2° En dépenses :
« - la participation de l'État aux fonds de solidarité pour le logement institués par la loi n° 90-449 du 31 mai 1990 visant à la mise en oeuvre du droit au logement,
« - la contribution de l'État au Fonds national de l'aide au logement pour l'aide aux associations logeant à titre temporaire des personnes défavorisées, prévue à l'article L. 851-1 du code de la sécurité sociale,
« - les restitutions de sommes indûment perçues,
« - les versements au budget général de l'État,
« - les dépenses diverses et accidentelles. »
Sur l'article, la parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, cet article 44 du projet de loi de finances consacre, si l'on peut dire, les conséquences de la discussion, en première partie, de l'article 11 qui consistait à modifier les modalités de perception de ce que l'on a appelé « supplément de loyer de solidarité » et son affectation au financement de l'aide aux plus mal logés et aux sans-logis.
Nous nous trouvons donc dans une situation que je qualifierai d'assez cocasse : le Gouvernement vient, en effet, de faire voter un projet de loi portant sur le pacte de relance pour la ville et il s'apprête à soumettre à l'approbation des deux assemblées un texte sur le renforcement de la cohésion sociale.
Par conséquent, on pourrait s'attendre à ce que le logement des plus démunis et l'action de l'Etat en faveur des mal logés bénéficient d'un soutien particulier, traduit en valorisation budgétaire. Seulement, chacun le mesure ici, il n'en est rien !
En effet, le chapitre budgétaire consacré à la construction de logements neufs est en baisse de 1,8 milliard de francs au titre de la dotation PLA-PALULOS, de 3,5 milliards de francs pour l'accession sociale, tandis que le financement par l'Etat du fonds de solidarité pour le logement est purement et simplement évacué au travers de l'ouverture du compte spécial 902-29 dont nous discutons précisément ici.
Pour aggraver le tout, la ligne budgétaire des prêts PAP est allégée de près de 1 milliard de francs en loi de finances rectificative ; nous examinerons cette question dans quelques jours.
De même que pour bien d'autres budgets, le carcan des obligations européennes et la soumission aux marchés financiers servent à justifier l'injustifiable.
Avec l'article 44, nous sommes même dans une situation assez étonnante.
Les locataires de logements sociaux à revenus moyens sont-ils responsables de la crise du logement dont souffrent parfois leurs propres enfants ou les personnes qui vivent dans la grande précarité ?
C'est pourtant cette impression qui devrait simplement découler du principe même de l'affectation du produit du supplément de loyer de solidarité au fonds de solidarité pour le logement.
Ainsi, certains locataires payeront deux fois : la première fois pour la part de leur loyer que leur bailleur retient pour provisionner les impayés de loyer éventuellement constatés ; la seconde fois pour la même chose au titre du supplément de loyer de solidarité.
Pourtant, je ne crois pas que l'on puisse en toute honnêteté intellectuelle incriminer des ménages qui disposent de revenus égaux à au moins 2,5 SMIC d'être responsables de la situation.
Si les loyers demeurent inaccessibles à de trop nombreuses familles, n'est-ce pas aussi parce que l'aide à la pierre à la construction neuve ne cesse de baisser et que le projet de budget pour 1997 consacre d'ailleurs ce mouvement ?
Si le marché n'est pas en situation d'offrir à certaines familles devant acquitter le surloyer des logements aussi confortables et au même prix que ceux qu'ils occupent, n'est-ce pas parce que l'on a laissé depuis dix ans, avec la loi Méhaignerie, le niveau des loyers déraper et progresser bien plus vite que les salaires, l'inflation et a fortiori l'indice du coût de la construction ?
La lutte contre la pauvreté et l'exclusion exigent d'autre moyens que les médiocres artifices utilisés dans ce projet de budget. C'est la raison pour laquelle nous ne voterons pas cet article 44.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ? ...
Je mets aux voix l'article 44.
M. Alain Richard. Le groupe socialiste vote contre.
M. Paul Loridant. Le groupe communiste républicain et citoyen vote également contre.

(L'article 44 est adopté.)

Article 45