M. le président. « Art. 4. - Le livre II du code du service national est ainsi modifié :
« I. - Le dernier alinéa du a de l'article L. 2 est supprimé.
« II. - Dans l'article L. 3 bis, les mots : "en France" sont remplacés par les mots : "sous le régime du code du service national français".
« III. - 1° Le premier alinéa de l'article L. 5 bis est ainsi rédigé :
« Un report supplémentaire d'une durée maximale de quatre années scolaires ou universitaires est accordé, sur leur demande, aux jeunes gens visés au 2° de l'article L. 5 qui justifient annuellement de la poursuite d'études ou de formation professionnelle dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat. » ;
« 2° Le dernier alinéa du même article est supprimé.
« IV. - Le dernier alinéa de l'article L. 9 est ainsi rédigé :
« Les jeunes gens qui justifient de la poursuite d'études en vue de l'obtention de diplômes correspondant aux emplois prévus ci-dessus bénéficient du report supplémentaire prévu à l'article L. 5 bis, même s'ils n'ont pas déposé leur demande avant le 1er octobre de l'année civile au cours de laquelle ils ont atteint l'âge de vingt-deux ans. »
« V. - 1° A la fin du troisième alinéa de l'article L. 6, les mots : "ainsi que le nombre des jeunes gens qui, au cours de ladite année, peuvent être admis au bénéfice des dispositions de l'article L. 9" sont supprimés ;
« 1° bis Dans l'article L. 11, les mots : « des articles L. 9 ou L. 10 » sont remplacés par les mots : « de l'article L. 10 » ;
« 1° ter Les articles L. 12 et L. 13 sont abrogés ;
« 2° Supprimé ;
« 3° Au premier alinéa de l'article L. 20, les mots : "des articles L. 9 et L. 10" sont remplacés par les mots : "de l'article L. 10".
« V bis . - L'article L. 30 est abrogé.
« VI. - 1° Après le premier alinéa de l'article L. 32, il est inséré deux alinéas ainsi rédigés :
« Sont également dispensés des obligations du service national actif, sur leur demande, les jeunes gens mariés dont l'épouse ne dispose pas de ressources suffisantes, ainsi que les jeunes gens qui ont la charge effective d'au moins un enfant, qu'il s'agisse d'un enfant légitime ou d'un enfant naturel reconnu.
« Peuvent aussi être dispensés des obligations du service actif les jeunes gens orphelins de père et de mère, sans aide possible de leur famille, dont l'incorporation entraînerait une situation sociale grave. » ;
« 2° Supprimé ;
« 3° Dans le quatrième alinéa du même article, les mots : "parents ou beaux-parents" sont remplacés par les mots : "ascendants ou beaux-parents" ;
« 4° Le cinquième alinéa du même article est ainsi rédigé :
« Peuvent, en outre, demander à être dispensés des obligations du service national actif les jeunes gens chefs d'une entreprise depuis un an au moins au moment du dépôt de la demande. » ;
« 5° Dans le dernier alinéa du même article, les mots : "le général commandant la division militaire" sont remplacés par les mots : "le général commandant la circonscription militaire de défense".
« VII. - Le premier et le deuxième alinéa de l'article L. 32 bis sont supprimés.
« VIII. - Après l'article L. 40, il est inséré un article L. 40-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 40-1 . - Les jeunes gens visés à l'article L. 17 qui, au moment de leur naturalisation, de leur réintégration ou de leur déclaration, ont satisfait à leurs obligations du service national à l'égard de leur Etat d'origine, dans les conditions prévues par la législation de cet Etat, sont considérés comme ayant satisfait aux obligations de service actif imposées par le présent code. »
« VIII bis - 1° L'article L. 66 est abrogé ;
« 2° Dans le cinquième alinéa de l'article L. 72 et dans le cinquième alinéa de l'article L. 94-9, les mots : "des articles L. 65 et L. 66" sont remplacés par les mots : "de l'article L. 65".
« IX. - L'article L. 71 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Toutefois, à titre temporaire et sous réserve des dispositions de l'article L. 6, le ministre chargé des armées peut mettre des appelés volontaires à disposition d'autres ministères par voie de protocole pour des missions d'utilité publique. »
« X. - Le 2° de l'article L. 75 est ainsi rédigé :
« 2° Par l'intermédiaire d'organismes publics ou privés fonctionnant dans les conditions prévues par le livre IX du code du travail et avec lesquels des conventions seraient conclues conformément au titre II de ce livre. »
« XI. - Après l'article L. 101, il est inséré un article L. 101-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 101-1 . - Les dispositions du premier alinéa de l'article L. 76 sont applicables aux jeunes gens affectés au service de l'aide technique ou au service de la coopération. »
« XII. - Après l'article L. 116-8, il est inséré un article L. 116-9 ainsi rédigé :
« Art. L. 116-9 . - En cas d'application du premier alinéa de l'article L. 76, le Gouvernement peut libérer par anticipation une fraction de contingent au cours des huit derniers mois du service actif. »
« XIII. - Supprimé. »
Par amendement n° 58, M. Vinçon, au nom de la commission, propose à la fin du premier alinéa du texte proposé par le paragraphe VI de l'article 4 pour être inséré après le premier alinéa de l'article L. 32 du code du service national, de supprimer les mots : « , qu'il s'agisse d'un enfant légitime ou d'un enfant naturel reconnu ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Serge Vinçon, rapporteur. Cet amendement vise à élargir et à simplifier la définition des chargés de famille ayant vocation à être dispensés du service national d'ici à la fin de la période de transition. Le présent amendement supprime la référence à l'origine de l'enfant dont le chargé de famille a la responsabilité, car les critères retenus par l'article L. 32 du code du service national ne permettent pas de répondre à toutes les situations.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Charles Millon, ministre de la défense. Permettez-moi, avant de donner mon avis sur cet amendement, de revenir sur l'article 4, qui est un article important, puisqu'il porte sur le mode de dispense durant la phase de transition. Il est utile de rappeler, en préalable à l'examen des amendements, ce que le Gouvernement a prévu pour tenir compte des situations les plus difficiles.
Je suis d'ores et déjà saisi par des parlementaires d'un certain nombre de demandes portant sur des situations difficiles. A cet égard, je tiens à insister sur le fait que, dès que ces dispositions seront votées par le Sénat, les jeunes qui bénéficiaient d'un report au-delà de vingt-quatre ans et qui, de ce fait, ne bénéficiaient pas des dispenses de droit commun - sauf cas d'une exceptionnelle gravité - pourront désormais en bénéficier et seront donc soumis à des règles moins exigentes.
Par ailleurs, je souligne que le régime des dispenses sera étendu aux jeunes gens mariés, sous condition de ressources de leur épouse, à ceux qui ont la charge effective d'au moins un enfant, aux orphelins ne recevant aucune aide de leur famille, aux jeunes gens dont l'incorporation aurait pour effet l'arrêt de l'exploitation familiale à caractère agricole, commercial ou artisanal, par suite du décès ou de l'incapacité de l'un de leurs grands-parents ; la dispense était jusqu'alors limitée aux parents et aux beaux-parents.
De plus, le régime de dispense sera également étendu aux jeunes chefs d'entreprise depuis un an au moins - jusque-là c'était deux ans - sans condition relative au nombre de salariés permanents.
Enfin, je voudrais aussi rappeler une disposition introduite par l'Assemblée nationale visant à garantir le maintien du lien avec l'employeur pendant toute la durée du service national.
Je souligne la responsabilité qui incombe au Gouvernement et au Parlement de garantir le déroulement de la phase de transition vers la professionnalisation des armées.
Vous savez, mesdames, messieurs les sénateurs, qu'il faut se prémunir contre le risque de désorganiser totalement les armées. Certains de nos voisins l'ont malheureusement vécu pour n'avoir pas su gérer cette phase de transition. C'est la raison pour laquelle je souhaite qu'il n'y ait pas un système de dispense trop large. En effet, dans le cas contraire, il ne serait plus possible de gérer la phase de transition, faute de disposer de ressources humaines pour faire face aux nécessités de la défense nationale.
En conséquence, le Gouvernement considère que les aménagements contenus dans le texte étaient nécessaires, mais qu'ils sont suffisants.
Je sais par ailleurs qu'un certain nombre de parlementaires souhaiteraient que les jeunes qui ont un contrat de travail à durée indéterminée puissent être dispensés du service national, afin de participer à la lutte contre le chômage des jeunes. Je précise qu'adopter une telle mesure serait une atteinte au principe d'égalité.
En effet, les jeunes qui auraient eu la chance d'avoir un contrat à durée indéterminée échapperaient au chômage et ne feraient pas leur service national et ceux qui, malheureusement, seraient au chômage, seraient obligés d'effectuer leur service national. L'inégalité serait flagrante, et il est totalement impossible pour le Gouvernement de retenir une telle proposition.
Toutefois, je le confirme, les services du ministère étudieront cas par cas les problèmes qui pourraient être soumis, non seulement par les parlementaires mais par des associations, et qui seraient des problèmes graves du point de vue tant familial, social que personnel. Je prends l'engagement devant le Sénat d'étudier avec attention mais aussi avec la plus grande mansuétude les cas qui pourront nous être soumis.
A titre indicatif, je précise que, depuis un an, il n'y a pas eu de fuite devant l'organisation du service national et que j'ai fait étudier par les services du ministère un certain nombre de cas précis qui ont permis des dispenses exceptionnelles, puisque cela fait partie des compétences du ministre, au-delà des décisions prises par les commissions départementales de dispense.
S'agissant de l'amendement n° 58, les explications apportées par M. le rapporteur sont suffisantes, et le Gouvernement y est favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 58, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 80, M. Vasselle propose de compléter in fine le premier alinéa du texte proposé par le VI de l'article 4 pour insérer deux alinéas après le premier alinéa de l'article L. 32 du code du service national par les mots : « ainsi que les jeunes justifiant d'un contrat de travail à durée indéterminée » et, en conséquence, de supprimer dans ce même alinéa les mots : « ainsi que ».
La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle. M. le ministre vient de répondre par avance sur cet amendement qui a pour objet de permettre d'exempter du service national un jeune qui bénéficierait d'un contrat à durée indéterminée.
Les uns et les autres, assez fréquemment, nous recevons la visite de jeunes qui sont appelés à effectuer leur service national, qui ont quitté la vie scolaire, qui ont entrepris des démarches pour trouver un emploi, qui reçoivent des offres d'emplois fermes de certaines entreprises.
Les chefs d'entreprise n'acceptent de les recruter à titre définitif que dans la mesure où ils sont assurés de pouvoir les garder. Aucun chef d'entreprise n'acceptera de recruter un jeune pour trois mois, sachant que ce dernier va le quitter pour une durée relativement longue avant de reprendre une activité professionnelle complète.
Le jeune perd donc son emploi, ce qui peut le mettre, lui-même ainsi que sa famille, dans une situation difficile.
Au moment où l'on cherche toutes les solutions qui favorisent l'intégration des jeunes dans la vie active et les aident à trouver une activité professionnelle, il m'apparaîtrait tout à fait incompréhensible que nous ne profitions pas d'un texte comme celui-ci pour prendre des mesures qui facilitent le recrutement des jeunes.
J'ai bien entendu l'objection formulée par M. le ministre : si nous prenions une mesure de cette nature, elle violerait le principe d'égalité, puisque ceux qui auraient la chance de trouver un emploi seraient dispensés de service national alors que ceux qui n'auraient pas cette chance effectueraient leur service national.
Mais, c'est une situation d'inégalité de fait. Que ce soit avant le service national ou après, des jeunes trouveront un emploi alors que d'autres, malheureusement, n'en trouveront pas.
A partir du moment où un jeune a la chance de trouver un emploi, pourquoi ne pas conforter cette chance en prenant une disposition de cette nature ?
Certes, M. le ministre nous a dit qu'il examinerait au cas par cas les situations que nous pourrions lui présenter, les uns et les autres.
L'amendement n° 72 rectifié bis de M. Goulet, que j'ai cosigné, permettra sans aucun doute de prendre en compte ce type de situations. C'est cependant un amendement de repli par rapport à l'amendement n° 80, que je préfère, quant à moi, espérant qu'il puisse être adopté par le Sénat malgré l'avis défavorable du Gouvernement.
A ce sujet, je serais heureux d'entendre non seulement le rapporteur mais également nos collègues s'ils ont un sentiment à exprimer.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Serge Vinçon, rapporteur. Notre commission considère que, jusqu'à la fin de la période de transition, il est de notre devoir d'aider M. le ministre à pourvoir aux besoins des armées et de continuer à les satisfaire.
M. Xavier de Villepin, président de la commission. Très bien !
M. Serge Vinçon, rapporteur. Par ailleurs, dispenser des obligations du service national actif ceux qui auraient un emploi permanent semble en contradiction avec le principe d'égalité. Nous reprenons ainsi à notre compte l'argumentation développée à l'instant par M. le ministre : effectivement, comment admettre que le jeune chômeur doive accomplir son service national précisément parce qu'il est sans emploi alors que celui qui aurait un emploi serait dispensé de cette obligation ?
Par ailleurs, l'Assemblée nationale a très opportunément modifié l'article 9 du projet de loi pour permettre que le contrat de travail ou d'apprentissage des jeunes gens incorporés soit suspendu pendant la durée du service national et que ces jeunes retrouvent leur emploi, ou un emploi équivalent assorti de la même rémunération, lors de leur libération.
Enfin, notre commission a adopté tout à l'heure un amendement modifiant les critères des dispenses pour motif social de manière à prendre en compte certaines situations particulièrement difficiles qui pourraient se poser à des jeunes gens incorporables et disposant d'un emploi.
Enfin, nous venons d'entendre très clairement M. le ministre expliquer que toute situation difficile serait examinée au cas par cas par ses services.
Je crois donc que nous répondons largement aux préoccupations de mon collègue M. Vasselle et je suis au regret d'émettre, au nom de la commission, un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Charles Millon, ministre de la défense. Monsieur Vasselle, notre souci est double. Il concerne d'abord la défense et l'armée.
Nous avons étudié les expériences étrangères, puisque la professionnalisation a déjà été mise en oeuvre aux Etats-Unis, en Grande-Bretagne, en Belgique et aux Pays-Bas. Nous avons examiné très précisément la professionnalisation dans ces quatre pays et nous nous sommes aperçus que, dans les pays qui n'ont pas pris les précautions suffisantes pour garder un flux régulier de ressources humaines afin d'alimenter les armées durant la période de transition, l'outil militaire s'est écroulé et qu'il a ensuite été quasiment impossible de le redresser pour mettre en oeuvre une armée professionnelle.
Tel est donc notre premier souci : permettre aux armées de disposer de ressources humaines suffisantes pour pouvoir passer la période de transition.
Je me permets d'insister sur cet aspect, car c'est en tant que ministre de la défense que je vous parle. Bien sûr, je l'ai déjà dit, les menaces, aujourd'hui, sont multiformes, pour reprendre une expression utilisée par un certain nombre de sénateurs. Mais nous devons faire face à des menaces militaires, et c'est pourquoi nous avons besoin d'une force armée. Plusieurs d'entre vous l'ont souligné avec force durant tout le débat. Croyez bien que je vous ai entendus, parce que j'étais déjà convaincu.
Le second argument concerne l'égalité. Les jeunes auxquels vous songez, monsieur Vasselle, sont déjà sursitaires. Aussi ont-ils déjà profité en quelque sorte d'un avantage législatif. La nation française leur a déjà donné la possibilité de reporter la date de leur service national, d'accomplir leurs études et d'obtenir une formation spécifique. Certains d'entre eux touveront donc relativement plus facilement un emploi que leurs camarades qui n'ont pas de qualification.
De surcroît, vous leur permettriez de ne pas effectuer leur service national. En effet, ils trouveront - je ne m'en fais pas pour eux - des employeurs conciliants qui mettront au point des contrats à durée indéterminée afin de leur éviter cette période qui troublerait leur vie personnelle, familiale ou professionnelle.
C'est la raison pour laquelle je vous demande, monsieur Vasselle, de retirer votre amendement, car il pose un problème d'égalité des citoyens devant la loi.
M. Xavier de Villepin, président de la commission. Très bien !
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 80.
M. Alain Vasselle. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle. J'ai bien écouté les arguments développés par M. le ministre pour m'inciter à retirer cet amendement. J'adhère complètement au premier argument qu'il a exposé.
Cela dit, si cette faculté entraînait un recrutement tel que la réforme serait mise en péril, on pourrait sérieusement se demander si le chômage constitue réellement un problème de fond. Ce type de solution suffirait-il à provoquer une embellie dans le recrutement des jeunes ?
Par ailleurs, je doute qu'un chef d'entreprise, pour des raisons de convenances personnelles, accepte de signer un contrat à durée indéterminée pour un jeune alors qu'il connaît les risques qu'il encourt s'il ne respecte pas les termes de ce contrat.
Mon rôle, en ma qualité de parlementaire de la majorité, n'est pas de mettre le Gouvernement en difficulté, mais je souhaite, monsieur le ministre, que vous me donniez quelques assurances.
Je suis donc prêt à retirer mon amendement pour me rallier à l'amendement n° 72 rectifié bis que nous allons examiner dans quelques instants, bien que j'ignore quel sort lui sera réservé, car il prend en compte, au moins pour partie, l'un des objectifs que je me suis assigné.
Certes, je préfère les termes « situation difficile » aux termes « situation sociale grave » car le degré de gravité sera soumis à appréciation. Mais peu importe !
Si vous acceptez, monsieur le ministre, que les situations qui vous seront signalées par les parlementaires soient examinées au cas par cas, je suis prêt, dans un souci de conciliation et de coopération positive, à me résigner et donc à me rallier définitivement à l'amendement n° 72 rectifié bis, mais donnez-moi tout de même cette assurance. Si vous le faites, vous pourrez considérer que l'amendement n° 80 est retiré.
M. Charles Millon, ministre de la défense. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Charles Millon, ministre de la défense. Monsieur Vasselle, je vais peut-être vous décevoir, mais je ne suis pas non plus favorable à l'amendement n° 72 rectifié bis pour une raison très simple : aujourd'hui, les commissions régionales de dispense disposent déjà de ce pouvoir. Si elles ne tenaient pas compte de la situation sociale, difficile ou grave, que traverse un jeune, les services de mon ministère sont habilités à accorder une dispense à ce dernier lorsque le cas leur est soumis par des parlementaires ou même par des associations.
Si je ne souhaite pas que cette disposition figure dans le texte, c'est tout simplement parce que je ne veux pas que cette exemption soit automatique et donc systématiquement demandée.
Par ailleurs, une situation sociale qui est grave à un moment donné peut progressivement s'améliorer au fil des mois. Nous risquons, si votre proposition était adoptée, monsieur Vasselle, de ne pas avoir d'effectifs suffisants pour faire face aux besoins des armées.
Telle est la raison pour laquelle je suis défavorable tant à l'amendement n° 80 qu'à l'amendement n° 72 rectifié bis , mais je prends l'engagement solennel - je ne peux pas dire mieux - d'examiner toutes les situations qui nous seront soumises pour que tous les jeunes qui se trouvent dans une situation grave fassent l'objet d'un traitement spécifique et puissent bénéficier d'une dispense si elle se justifie.
M. le président. L'amendement n° 80 est retiré.
Par amendement n° 72 rectifié bis , MM. Goulet, Courtois, Legendre, Vasselle, Bizet, Braye, les membres du groupe du Rassemblement pour la République et M. About proposent de rédiger comme suit le second alinéa du texte présenté par le 1° du paragraphe VI de l'article 4 pour être inséré après le premier alinéa de l'article L. 32 du code de service national :
« Peuvent aussi être dispensés des obligations du service actif les jeunes gens ne disposant d'aucune aide de leur famille, et dont l'incorporation entraînerait une situation sociale grave. »
La parole est à M. Goulet.
M. Daniel Goulet. J'étais prêt à me rallier aux arguments de M. le ministre, mais je ne puis souscrire à ceux qu'il vient d'exposer à l'instant. Je suis d'autant plus conforté dans mon attitude que M. Vasselle a retiré l'amendement n° 80 et que certains de mes collègues ont témoigné leur intérêt à l'amendement que j'ai l'honneur de proposer.
En effet, mes collègues MM. Courtois, Legendre, Vasselle, Bizet, Braye et les membres du RPR ainsi que M. About, lors d'une réunion de groupe mardi dernier, m'ont chargé de déposer cet amendement, qui vient en quelque sorte, monsieur le ministre, compléter le large éventail des cas de dispenses que vous avez défini tout à l'heure.
Vous avez pris l'engagement solennel d'examiner les situations qui vous seraient soumises. Certes, mais il n'est pas du tout certain que les commissions régionales tiennent compte de ces situations. Nous le savons par expérience lorsque nous avons à soutenir devant elles des demandes de dispense de ce type.
C'est la raison pour laquelle il est souhaitable que la disposition que je propose soit inscrite dans la loi.
Il s'agit tout simplement d'étendre les possibilités de dispense aux jeunes qui ne peuvent pas compter sur le soutien matériel de leurs parents et de leur famille, afin d'éviter qu'ils ne soient placés, du fait de leur incorporation, dans une situation financière très délicate, due notamment au développement du surendettement, les conduisant à l'exclusion sociale. Cet aspect social est un fait nouveau qui perturbe en quelque sorte la situation d'un certain nombre de jeunes.
Par conséquent, pendant cette période de transition, nous souhaitons, monsieur le ministre, que cette disposition s'applique.
M. Alain Vasselle. Très bien !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Serge Vinçon, rapporteur. Nous sommes très favorables à l'amendement n° 72 rectifié bis car il permettra d'apporter une solution à des situations sociales, qui sont, hélas ! courantes à notre époque et que l'incorporation pourrait aggraver.
Cet amendement tire les conséquences du fait que le critère d'orphelin de père et de mère ne suffit plus aujourd'hui pour définir la situation sociale grave, laquelle revêt des formes malheureusement très variées. Nous songeons effectivement au problème du surendettement auquel M. Goulet a fait allusion.
La commission est donc très favorable à cette petite ouverture du texte s'agissant d'un sujet social grave.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Charles Millon, ministre de la défense. J'ai déjà indiqué que le Gouvernement était défavorable à cet amendement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 72 rectifié bis , accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 74, MM. de Cuttoli, d'Ornano et Mme Brisepierre proposent d'insérer, après le paragraphe VII de l'article 4, un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... - 1° Après l'article L. 38 du code du service national, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :
« Art. L ... Un décret, pris après consultation du Conseil supérieur des Français de l'étranger ou de son bureau permanent dans l'intervalle des sessions du Conseil, déterminera les conditions d'application des articles L. 37 et L. 38. »
« 2° L'article 10 de la loi n° 73-625 du 10 juillet 1973 est abrogé. »
Cet amendement est-il soutenu ?...
M. Xavier de Villepin, président de la commission. La commission le reprend, monsieur le président.
M. le président. Il s'agit donc de l'amendement n° 74 rectifié.
Vous avez la parole, monsieur le président de la commission, pour le défendre.
M. Xavier de Villepin, président de la commission. La commission reprend en effet cet amendement déposé par nos collègues MM. de Cuttoli, d'Ornano et Mme Brisepierre, qui n'ont pu assisté à nos travaux ce matin, car ils participent à une réunion du Conseil supérieur des Français à l'étranger.
Il semble, en effet, opportun de consulter le Conseil supérieur des Français de l'étranger ou son bureau permanent dans l'intervalle des sessions plénières sur les modalités d'accomplissement du service national obligatoire par les Français de l'étranger jusqu'à la fin de la période de transition.
Cet amendement, monsieur le ministre, s'inscrit dans la même logique que celle qui sous-tendait l'amendement n° 73, qui a été voté hier, avec votre accord.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Charles Millon, ministre de la défense. Favorable.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 74 rectifié.
M. Jacques Habert. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Habert.
M. Jacques Habert. Je tiens à remercier la commission et son président d'avoir repris cet amendement et de l'avoir fait sien.
En effet, le projet de loi portant réforme du service national comporte une lacune importante dans la mesure où il ne précise pas ce que deviennent, dans la nouvelle organisation, les cas de dispense de service national pour les Français de l'étranger.
Les articles L. 37 et L. 38 du code du service national sont, à cet égard, extrêmement importants. L'article L. 37, notamment, précise que les jeunes Français qui vivent dans des pays très éloignés n'ont pas à revenir en France pour accomplir leur service militaire ; ils relèvent alors du centre de recrutement de Perpignan, et se trouvent dans une situation tout à fait régulière.
Le présent projet de loi, après l'adoption de cet amendement en son article 4, indiquera donc la marche à suivre pour les Français de l'extérieur dispensés du service militaire. Cet amendement, que nous vous invitons à voter, est donc important. Il complète très utilement le dispositif mis en place pour nos jeunes compatriotes de l'étranger.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 74 rectifié, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 83, MM. Estier, Delanoë, Rouvière, Mélenchon, Sérusclat et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent de compléter in fine l'article 4 par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... - Après l'article L. 116-8 du code du service national, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :
« Art. L... - Jusqu'au 1er janvier 2003, les frais d'hébergement et de restauration des appelés effectuant un service en tant qu'objecteur de conscience sont pris en charge par l'Etat. »
La parole est à Mme Dieulangard.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Par cet amendement, nous proposons de résoudre un problème à propos duquel nous avons tous été sollicités dans nos communes et dans nos départements. Il s'agit de remédier aux nouvelles dispositions financières qui ont été adoptées, dans la loi de finances pour 1997, en ce qui concerne le statut d'objecteur de conscience.
Nous proposons que soit inséré, après l'article L. 116-8 du code du service national, un article additionnel qui vise à faire prendre en charge par l'Etat, jusqu'au 1er janvier 2003, les frais d'hébergement et de restauration des appelés effectuant leur service en tant qu'objecteur de conscience.
Nous sommes très inquiets face à la situation des associations accueillant des objecteurs de conscience et en ce qui concerne les conditions d'exercice du droit à l'objection de conscience mises en danger par les modifications intervenues dans la loi de finances pour 1997.
Selon le nouveau dispositif s'appliquant aux appelés affectés à compter du 15 janvier 1997, les structures d'accueil devront désormais assurer l'hébergement et la restauration des objecteurs de conscience ou, dans l'hypothèse où une telle prestation ne pourrait pas être assurée, verser une indemnité mensuelle correspondante d'un montant de 1 700 francs.
De plus, si les dépenses de santé et d'habillement, l'allocation journalière ainsi que les frais de transport liés aux permissions restent à la charge de l'Etat, ces associations devront continuer à effectuer les avances de trésorerie et à en demander le remboursement. Si ces dispositions devaient être maintenues, les charges supplémentaires qu'elles entraînent pourraient interdire à de très nombreux organismes tout recours à un objecteur et affaiblir ainsi le tissu associatif, qui contribue pourtant avec succès à l'animation et à l'intégration sociale.
On peut donc craindre que les objecteurs de conscience nés avant le 1er janvier 1979, qui sont assujettis aux articles 1 à 159 du titre H du code du service national, ne trouvent pas d'organisme d'accueil.
On se trouverait devant la situation suivante : soit l'objection de conscience ne serait plus reconnue de fait ; soit on serait obligé d'exempter tous les objecteurs de conscience de service national.
Cet amendement vise donc à rétablir la situation antérieure afin que l'objection de conscience continue à être reconnue jusqu'en 2003 et que les objecteurs de conscience soient traités sur un pied d'égalité avec les autres appelés.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Serge Vinçon, rapporteur. La commission ne peut qu'émettre un avis défavorable, les prises en charge par les associations des frais relatifs à l'emploi des objecteurs de conscience résultant du projet de loi de finances pour 1997.
Par ailleurs, que le nombre d'objecteurs de conscience ira en diminuant pendant la période de transition. Il ne paraît donc pas anormal que les associations couvrent elles-mêmes ce genre de dépenses, de même que les collectivités locales financent déjà l'hébergement des « appelés-ville » et de certains policiers auxiliaires. (Applaudissements sur les travées du RPR et de l'Union centriste.)
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Charles Millon, ministre de la défense. Madame Dieulangard, les textes relatifs à l'objection de conscience ne disparaissent pas !
On me dit qu'il faut absolument conserver la législation favorable à l'objection de conscience. Mais, ainsi que je l'ai dit tout à l'heure, la conscription est maintenue, et l'appel sous les drapeaux est suspendu. En conséquence, les textes qui ont été votés sur l'objection de conscience vont être, eux aussi, suspendus...
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Mais les associations ?
M. Charles Millon, ministre de la défense. Je reviendrai plus tard sur les associations et je me livrerai alors à quelques réflexions de philosophie politique, car le sujet est intéressant.
Je le répète, l'objection de conscience n'est pas supprimée, les textes qui la régissent sont maintenus, et si, demain, par nécessité - ce que je pense improbable - un gouvernement était obligé de restaurer l'appel sous les drapeaux, les textes sur l'objection de conscience seraient immédiatement applicables de nouveau.
Vous souhaitez, dites-vous, madame Dieulangard, que l'objection de conscience soit reconnue jusqu'en 2003. Mais elle est maintenue.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Ce n'est pas l'objet de notre amendement.
M. Charles Millon, ministre de la défense. Par ailleurs, votre amendement vise à définir les conditions de rémunération des objecteurs de conscience qui relèvent de la compétence du ministre du travail et des affaires sociales. Il revient en fait à inscrire dans la loi des mesures qui relèvent de règlements d'application du code du service national. Il doit donc pour ce motif être rejeté, à double titre : sur la forme et sur le fond.
S'agissant de la forme, l'article L. 116-1 du code du service national prévoit, en effet, que les conditions d'affectation des objecteurs de conscience sont fixées par décret en Conseil d'Etat, en l'occurrence par le décret n° 84-234 du 29 mars 1984, aux articles R. 227 et suivants. Ce décret confie la gestion des objecteurs de conscience au ministre du travail et des affaires sociales, qui détermine, notamment, les conditions de leur prise en charge. La modification de ces conditions est donc du domaine réglementaire.
J'en viens au fond.
Une circulaire du ministre du travail et des affaires sociales prévoit que, dans le cas de la déconcentration de la gestion des objecteurs de conscience, le préfet du département rembourse aux organismes d'accueil, pour des dépenses estimées à 832 francs par mois et par objecteur, l'allocation journalière, les dépenses de santé, l'indemnité d'habillement et l'indemnité d'entretien. L'hébergement et la nourriture sont en principe assurés par l'organisme d'accueil qui prend toute mesure utile à cet effet.
Cette modification des conditions de prise en charge des objecteurs a été décidée dans le cadre de la loi de finances pour 1997. Elle ne remet pas en cause le principe de l'objection pendant toute la phase de transition.
Permettez-moi maintenant, mesdames, messieurs les sénateurs, d'aborder ce problème d'un côté un peu plus philosophique, voire polémique.
J'ai reçu au ministère certaines personnes qui sont venues me demander ce que les associations d'objection de conscience allaient faire, maintenant que l'objection de conscience n'avait plus de support juridique ! (Exclamations sur les travées de l'Union centriste et du RPR.)
C'est extraordinaire ! C'est comme si l'on me demandait le maintien de structures alors que l'objet de ces structures a disparu !
M. Josselin de Rohan. C'est la logique socialiste !
M. Charles Millon, ministre de la défense. Pour ma part, j'ai proposé aux associations qui s'occupent actuellement des objecteurs de conscience de se transformer pour pouvoir, à partir de 2003, accueillir des volontaires. Cela me paraît tout simple, puisque ces associations remplissent, la plupart du temps, des tâches qui sont proches de celles qui seront assignées au volontariat. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 83.
M. Jean Chérioux. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Chérioux.
M. Jean Chérioux. Je tiens à dire mon étonnement devant l'acharnement qui est mis à vouloir défendre l'objection de conscience alors qu'évidemment celle-ci n'a plus d'objet.
Par ailleurs, lorsqu'on a entendu les accents lyriques avec lesquels les orateurs du groupe socialiste ont parlé en faveur de l'armée et des liens qui doivent exister entre l'armée et la nation, on ne peut qu'être confondu par le double langage qu'ils tiennent. C'est une raison de plus pour que je ne vote pas cet amendement, qui me choque profondément. (Applaudissements sur les travées du RPR.)
M. Bertrand Delanoë. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Delanoë.
M. Bertrand Delanoë. Ne mélangeons pas tout ! La question qui est posée par cet amendement est celle du financement des associations qui accueilleront les objecteurs de conscience d'ici à 2003 alors qu'elles ont reçu une lettre leur signifiant que, à partir du 1er janvier 1997, le coût des objecteurs de conscience ne serait plus pris en compte. Il n'est donc pas question du lien armée-nation, monsieur Chérioux !
Je suis un peu étonné que, pour ce qui est du financement jusqu'en 2003, M. le ministre de la défense n'ait pas entendu l'argument de ma collègue Mme Dieulangard alors que sont concernées des associations humanitaires qui avaient hier toute sa sollicitude et qu'il ne s'agit que de 20 000 francs par an et par poste pour un très petit nombre de postes d'ici à 2003.
Ce n'est pas la peine de s'énerver pour cela !
M. Charles Millon, ministre de la défense. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Charles Millon, ministre de la défense. Personne ne s'énerve...
M. Jean Chérioux. C'est Mme Dieulangard qui est en train de s'énerver !
M. Charles Millon, ministre de la défense. Je ne vais pas redire ce que j'ai déjà dit plusieurs fois.
Si vous avez un certain nombre de cas particuliers à me soumettre, je les étudierai avec intérêt.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 83, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 4, modifié.

(L'article 4 est adopté.)

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