M. le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. Goulet pour explication de vote.
M. Daniel Goulet. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la discussion que nous venons d'avoir à l'occasion de l'examen du projet de loi portant réforme du service national a été très riche et rès dense, à l'image du projet de loi lui-même, mais grâce aussi à l'excellent travail du rapporteur, M. Serge Vinçon, qui s'est investi depuis longtemps déjà dans cet important dossier, sous la ferme mais ô combien aimable autorité du président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, M. de Villepin.
« Citoyenneté », « cohésion sociale », « esprit de défense » ont été les mots clés du débat, ce qui démontre une fois de plus l'importance de la réforme pour l'avenir de notre société.
Aujourd'hui plus que jamais, le groupe du RPR en est convaincu : le service national rénové sera conforme aux intérêts de la défense de la nation, conforme aux intérêts de la cohésion sociale, et conforme aux intérêts de la jeunesse ; en définitive, il sera conforme aux perspectives d'avenir de la nation telles que nous les concevons, aux côtés du Président de la République.
Le texte issu des travaux de la Haute Assemblée apporte un peu plus de souplesse au dispositif, puisqu'il évite de figer dans la loi certaines expérimentations concernant le rendez-vous citoyen. En outre, monsieur le ministre, vous avez déclaré au cours de la discussion que la loi pourrait être complétée et rectifiée, donc perfectionnée.
Il nous semble en effet qu'il faut attendre le résultat des premières expériences tant en ce qui concerne le suivi des jeunes en difficulté que le médiateur-citoyen - expériences dont l'initiative revient au secrétaire d'Etat à l'action humanitaire d'urgence, M. Xavier Emmanuelli - avant d'inscrire dans la loi ce dispositif, qui est très intéressant et correspond totalement à l'esprit de la réforme puisqu'il devrait favoriser la cohésion sociale.
Par ailleurs, le groupe du RPR, suivi en cela par la Haute Assemblée, a tenu à ce que soit prise en compte dès la période de transition la situation des jeunes menacés par l'exclusion sociale.
Enfin, nous avons souhaité que le pragmatisme et la modernité l'emportent sur la nostalgie du passé, tout en conservant bien sûr toute sa place au lien entre l'armée, la jeunesse et la nation ainsi qu'à l'esprit de défense du service national, conformément à l'un de nos grands principes républicains.
Les membres du groupe du RPR, conscients de réaliser un véritable choix politique, celui de la générosité citoyenne, en même temps que le choix de la responsabilité envers le pays et le peuple français, voteront ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. Joly.
M. Bernard Joly. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, à l'issue de ce débat, où mon vote traduira mon approbation d'une mutation nécessaire, je m'interroge néanmoins sur la substitution des missions du rendez-vous citoyen à celles du service national.
Jusqu'alors, les deux systèmes structurés dans lesquels les jeunes étaient appelés à évoluer étaient la scolarité et le temps passé sous les drapeaux.
Pour certains enfants, la découverte d'un milieu hiérarchisé, obéissant à des règles entraînant sanctions positives ou négatives, vient avec l'entrée en primaire ou en maternelle. La violence qui règne dans certains établissements relève d'un positionnement que des élèves sont incapables de trouver ailleurs, que ce soit dans des familles éclatées ou dans un réseau social inorganisé. L'école est un repère où la place de chacun est définie.
Leur seconde chance, à beaucoup d'égards, était le service national.
A nouveau, les choses étaient remises à plat. L'illettrisme identifié pouvait être combattu, des apprentissages divers étaient autorisés. Chacun d'entre nous connaît un jeune qui a réussi à passer son permis poids lourd et a ainsi assuré son insertion au retour dans la vie civile.
M. Emmanuel Hamel. Très bien !
M. Bernard Joly. En fait, là est bien le problème. La limite du RMI n'est pas le revenu distribué ; la pierre d'achoppement est constituée par l'insertion. Le service national impliquait une vie en collectivité, donc l'apprentissage d'une vie en société.
M. Emmanuel Hamel. Très bien !
M. Bernard Joly. L'interdépendance des groupes devient évidente dès lors que des menaces pèsent. Mais comment la rendre sensible en des temps où la solidarité a eu besoin d'être érigée en ministère ?
Je ne voudrais pas que certaines valeurs qui forment une identité ne se retrouvent pas dans les éléments constitutifs du citoyen de demain. (Applaudissements sur certaines travées du RDSE, du RPR, de l'Union centriste et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. Delanoë.
M. Bertrand Delanoë. Au terme de ce long et intéressant débat, je veux d'abord rendre hommage, une fois de plus, au président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées ainsi qu'à son rapporteur, M. Vinçon.
En effet, grâce à eux et pour ce qui les concernait, aussi bien en commission qu'en séance publique, malgré des convictions profondément différentes de part et d'autre, le débat a été de qualité : il n'y a pas eu de procès d'intention et les propos des uns et des autres n'ont pas été caricaturés. Précisément parce que nous avons des positions très différentes quant au fond, je tiens à saluer leur rôle dans ce débat et à les en remercier.
L'esprit partisan et le sectarisme ne s'en sont pas moins manifestés parfois, occultant sur certains points des débats qui auraient été importants. Je ne les reprendrai pas tous, mais je veux au moins insister sur l'un d'eux, qui concerne la défense du territoire.
S'agissant du plan Vigipirate, les informations qui nous ont été données s'entendaient avant la réduction de 36 % des effectifs de l'armée de terre et avant la suppression des appelés.
La question reste donc posée : comment s'appliquera le plan Vigipirate lorsqu'il y aura projection - puisque c'est à cette fin que notre armée est « retaillée » - comme par exemple pendant la guerre du Golfe, après la diminution des effectifs, en particulier de ceux de l'armée de terre, et la suppression des appelés ? Restent aussi posées les questions très pertinentes soulevées à propos du plan d'action « Gendarmerie 2002 » ?
Nous sommes appelés à en redébattre...
M. Charles Millon, ministre de la défense. Me permettez-vous de vous interrompre, monsieur le sénateur ?
M. Bertrand Delanoë. Bien entendu, monsieur le ministre : je ne suis pas sectaire, moi !
M. le président. La parole est à M. le ministre, avec l'autorisation de l'orateur.
M. Charles Millon, ministre de la défense. Je me contenterai pour répondre à vos questions, monsieur Delanoë, de rappeler deux chiffres.
Je l'ai déjà dit hier après-midi, l'armée française non professionnalisée - l'armée de conscription - compte aujourd'hui 550 000 hommes, chiffre auquel il convient d'ajouter 50 000 réservistes véritablement engagés, soit 600 000 hommes, effectif qui nous permet de mener des opérations, telles que Vigipirate.
Demain, l'armée professionnelle comptera 350 000 hommes, auxquels s'ajouteront une réserve de première catégorie de 100 000 hommes et une deuxième réserve de 200 000 hommes, soit 650 000 hommes au total. Cela signifie que les opérations telles que Vigipirate pourront être assurées avec une plus grande efficacité qu'aujourd'hui.
M. le président. Veuillez poursuivre, monsieur Delanoë.
M. Bertrand Delanoë. Nous en reparlerons. Les plus hautes autorités militaires nourrissent, elles, certaines inquiétudes, notamment à propos du plan d'action « Gendarmerie 2002 » que j'évoquais au moment où M. le ministre m'a interrompu. Je crois donc que, malgré les explications qui viennent de nous être données, la question reste posée, en particulier en cas de projection de nos forces. Mais nous aurons l'occasion d'en reparler.
Autre point sur lequel je souhaite revenir : la sécurité du continent européen. Hélas, les informations qui nous viennent d'Albanie démontrent que ce dernier n'est pas encore un continent de paix ; des menaces importantes subsistent dont nous devons nous préoccuper.
Enfin, pour terminer ce propos et suivant - une fois n'est pas coutume - l'exemple de M. le ministre, je veux rapporter moi aussi une anecdote personnelle.
M. Emmanuel Hamel. Avec émotion !
M. Bertrand Delanoë. Non, avec sérénité et gratitude, comme vous allez pouvoir le constater.
Voilà une vingtaine d'années, j'ai fait, comme la plupart des jeunes Français, mon service militaire. Lorsque j'y suis parti, sursitaire, j'étais déjà entré dans la vie active. Honnêtement, s'il n'avait pas été obligatoire, je n'y serais pas allé. Je l'ai fait parce que j'y étais contraint, et avec une certaine indifférence à l'égard du sentiment de défense.
Grâce à ces douze mois passés au service militaire - qui n'était certes pas dépourvu d'imperfections - j'ai rencontré non seulement des jeunes gens que je n'aurais peut-être pas côtoyés ailleurs, mais aussi et surtout des militaires de carrière qui m'ont beaucoup appris sur la défense, sur la nécessité de s'organiser pour la défense et la sécurité du pays. Surtout, je suis ressorti de ce service militaire avec un sentiment citoyen, un esprit de défense.
Je voudrais, par ces derniers mots, exprimer ma gratitude envers ces militaires de carrière et souhaiter sans aucune nostalgie, que dans quelques années les jeunes Français puissent faire part de la même expérience.
C'est donc en pensant à l'avenir que nous avons exprimé des convictions peut-être différentes, un vrai sentiment d'adhésion à la nécessité du lien armée-nation. (Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen. - M. Emmanuel Hamel applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Durand-Chastel.
M. Hubert Durand-Chastel. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je veux tout d'abord féliciter M. le rapporteur de l'excellent travail qu'il a réalisé, avec le président de la commission des affaires étrangères, sur le très bon projet de loi portant réforme du service national que nous a présenté M. le ministre.
Comme je l'ai dit lors de la discussion générale, les non-inscrits approuvent ce projet de loi, à une exception près cependant : je veux parler de l'article L. 121-7.
L'amendement n° 47 voté hier prévoit en effet que les activités offertes aux volontaires ne peuvent se substituer à des emplois permanents.
Si cette disposition est légitime en métropole pour empêcher les substitutions de volontaires à des employés « normaux », c'est-à-dire permanents, ce qui accroîtrait le chômage, il n'en va pas du tout de même à l'étranger.
En effet, de nombreux postes à l'étranger, notamment, pour ne citer que deux cas précis, les postes d'enseignants dans nos établissements d'enseignement français à l'étranger et les postes d'auxiliaires des comités consulaires pour l'emploi et la formation à l'étranger, seraient supprimés. Ainsi, on aboutirait pour l'emploi au contraire du résultat recherché !
Ayant donc voté hier contre l'amendement n° 47, les trois sénateurs des Français de l'étranger non inscrits s'abstiendront de voter le projet de loi en son état actuel, bien qu'ils l'approuvent par ailleurs complètement.
M. le président. La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle. J'ai tenté de suivre aussi fidèlement que possible l'examen de l'ensemble des dispositions de ce texte. Lors de la discussion de l'article 1er, j'ai eu l'occasion d'exprimer mon sentiment sur l'une des ses pierres angulaires : le rendez-vous citoyen.
A cette occasion, j'ai posé deux questions. Je n'ai pas entendu, pas plus lors de la discussion de l'article 1er que lors de celle des articles suivants, des réponses de nature à apaiser complètement les inquiétudes qui étaient les miennes, même si M. le ministre vient d'apporter à l'instant, en interrompant M. Delanoë, un des éléments de réponse que j'attendais.
En ce qui me concerne, je regrette que nous n'ayons pas examiné simultanément le texte relatif aux réservistes qui viendra en discussion plus tard. Or, il est bien évident que la réforme que nous engageons est en tout. Aussi ne pourrons-nous apprécier à leur juste mesure les conséquences de la réforme que nous souhaitons engager en la matière que lorsque nous aurons examiné les autres textes de loi et que l'ensemble de la réforme concernant l'armée aura été menée à son terme.
Cela étant, pour ce qui est du présent projet de loi, j'approuve globalement l'objectif que s'est fixé le Gouvernement. Cependant, certains points d'ombre ne me semblent pas avoir été éclaircis.
Je m'inquiète notamment de l'absence de formation militaire pour les jeunes. Comment réagira-t-on en cas de conflit ? Le risque est certes devenu pratiquement inexistant, mais, si un conflit se produit, parviendra-t-on à mobiliser ceux qui en venant rejoindre les professionnels et les réservistes permettraient d'assurer une véritable défense et la sécurité de notre territoire ?
Enfin, je voudrais appeler votre attention, monsieur le ministre, sur les dispositions de l'article L. 122-4 concernant la fonction publique.
Je crois savoir que votre collègue M. Perben et ses collaborateurs se sont interrogés sur la pertinence de l'introduction de cet article dans le projet de loi. Vous ne l'avez emporté qu'à l'issue d'une concertation interministérielle, mais cet article ne manquera pas moins de poser des problèmes dans la fonction publique territoriale.
L'objectif, tout à fait louable, est de permettre à ceux qui auront suivi dans le cadre de leur service volontaire une formation les menant dans la gendarmerie, dans un corps de sapeurs-pompiers professionnels, ou encore dans un service de sécurité, d'entrer par un concours spécifique dans la fonction publique d'Etat.
Encore eût-il fallu, puisque c'est l'objectif que se fixe le Gouvernement, que des précisions soient apportées au texte. En effet, si l'on prévoit des concours spécifiques, on va mettre en difficulté la réforme sur la fonction publique territoriale, que le Parlement vient d'adopter. J'ose espérer que nous pourrons, au cours de la navette, apporter les améliorations nécessaires.
Dans ces conditions, je m'abstiendrai lors du vote de ce projet de loi, en attendant de pouvoir me prononcer définitivement pour ou contre au terme de la deuxième lecture.
M. le président. La parole est à M. About.
M. Nicolas About. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je voudrais d'abord remercier et féliciter de son travail M. le rapporteur, ainsi que l'ensemble de la commission et M. de Villepin. C'est un bon travail qui appuie l'excellent travail de M. le ministre. Je voudrais, à mon tour, remercier M. le ministre de la tâche qu'il a accomplie depuis de nombreux mois pour assurer la transformation indispensable de notre défense et de nos armées.
On peut regarder vers le passé et se dire que c'était mieux avant, les risques nous garantissaient une armée telle qu'on la concevait. Cependant, les risques ont changé. Les propositions qui sont les vôtres, monsieur le ministre, sont adaptées aux risques nouveaux.
Le présent projet de loi va dans le sens des textes qui sont engagés depuis plusieurs mois et il ne constitue donc qu'un élément du dispositif nécessaire. Nous avons approuvé les pas précédents. Le texte tel qu'il résulte des travaux du Sénat me semble aller dans le bon sens.
C'est d'abord le recensement. Nous avons vu dans quelles conditions il était garanti. C'est aussi le rendez-vous citoyen. Je veux insister de nouveau sur le fait que l'ensemble des jeunes doivent participer à ce rendez-vous et qu'il ne doit pas y avoir d'échappatoire.
A travers le dispositif de sanctions à l'égard de ceux qui n'accompliraient pas ce rendez-vous citoyen, nous exprimons la volonté de voir l'ensemble des jeunes passer dans ce moule, que certains voudraient plus rigide, avec leurs sanctions, positives et négatives, que donnait, dans le passé, le service militaire.
En tout cas, ce rendez-vous entre la nation et ses jeunes me paraît important, dans l'intérêt non seulement des jeunes, mais aussi de la nation. Celle-ci doit connaître ses jeunes et ces derniers doivent aussi, à l'occasion d'un rendez-vous de ce type, découvrir des éléments importants. On a parlé, à juste titre, de l'esprit de défense. Nous avons aussi intérêt à placer ces jeunes dans des conditions dans lesquelles ils pourront être aidés.
Monsieur le ministre, les membres du groupe des Républicains et Indépendants voteront ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Hamel.
M. Emmanuel Hamel. Je regrette en conscience de devoir faire cette explication de vote.
A en croire M. le ministre, ce texte serait bienfaisant pour la cohésion nationale, efficace pour la défense et la sécurité de la nation vis-à-vis tant des périls extérieurs que des menaces internes.
Je ne partage pas ce sentiment. Ce texte ne me paraît pas faire face aux dangers susceptibles de peser sur nous. Il me semble dériver d'une analyse que je crois inexacte des menaces extérieures et des changements intervenus dans la situation internationale.
C'est la raison pour laquelle, en conscience, je ne peux le voter, et je voterai même contre.
M. Xavier de Villepin, président de la commission. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Xavier de Villepin, président de la commission. Je voudrais remercier tous les membres de notre assemblée qui ont participé à ces débats car, quel que soit leur vote, ils les ont enrichis.
Monsieur le ministre, je voudrais d'abord vous exprimer ma reconnaissance et, si vous me le permettez, vous témoigner mon amitié. Votre courage, votre enthousiasme et votre fidélité au Président de la République recueillent un très large assentiment au sein de la commission et de notre assemblée. (M. Gournac fait un signe d'assentiment.)
Nous nous sommes opposés sur quelques amendements, et nous nous retrouverons, bien sûr, dans les débats qui suivront. Si nous l'avons fait, c'est non pas par souci de « personnalisation sénatoriale », mais pour exprimer le point de vue de notre commission sur le long terme, qui nécessite une réflexion sur le rendez-vous citoyen et sur les différentes formes de volontariat. Vous le savez, nous souhaitons que l'expérimentation trouve toute sa place dans ces domaines.
Je voudrais remercier tout particulièrement M. le rapporteur. Nous travaillons depuis longtemps ensemble sur le sujet. J'ai pour lui une très grande estime et beaucoup d'amitié.
Je remercie aussi les administrateurs du Sénat, qui sont toujours profondément dans l'ombre de ce travail. Qu'ils sachent combien j'apprécie leur modestie, leur indépendance d'esprit et leur efficacité.
M. Bertrand Delanoë. Très bien !
M. Xavier de Villepin, président de la commission. Merci à l'ensemble du personnel qui, pendant ces trois jours de débat, a beaucoup travaillé.
Enfin, je m'adresserai aux membres de l'opposition. C'est une longue tradition de notre commission que de vous écouter avec respect, mes chers collègues, et j'ai été touché par ce que vous avez dit.
M. le ministre a eu raison de souligner qu'il existe un consensus profond dans notre pays sur les questions militaires. Mes chers collègues, vous avez eu raison de rappeler l'importance du lien entre la nation et notre armée, et je suis convaincu, je vous le dis très simplement, que nous devrons travailler ensemble, pour trouver de nouvelles formules au fil du temps, quand nous aurons réalisé cet élément essentiel du futur, je veux parler de la professionnalisation.
Monsieur le ministre, vous nous avez invités à participer aux prochains rendez-vous citoyen. Nous irons avec vous, car nous devons pouvoir tous nous exprimer, sans aucune exception.
Au moment où vous allez exprimer votre vote, mes chers collègues, permettez-moi de vous demander simplement de penser à l'armée du futur. C'est vraiment à elle que nous devons penser en nous prononçant. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Charles Millon, ministre de la défense. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Charles Millon, ministre de la défense. Monsieur de Villepin, permettez-moi, à mon tour, de vous remercier de la qualité des travaux que vous avez présidés. La commission a en effet effectué un travail tout à fait remarquable, qui a été ensuite synthétisé dans un rapport brillant de M. Serge Vinçon. Je vous remercie, monsieur de Villepin et vous aussi, monsieur Vinçon, non seulement de votre compétence et vos connaissances, mais aussi et surtout de votre capacité à porter un débat de cette importance.
Je remercie tous les sénateurs qui ont bien voulu participer au débat, quels que soient leur opinion, leurs options et le vote qu'ils vont émettre.
Il s'agit d'un débat difficile, mais essentiel.
C'est un débat difficile parce que nous avons tous une histoire, faite, pour certains, de souvenirs et, pour d'autres, d'espoirs déçus.
C'est un débat essentiel parce qu'il est fondamental. Au cours du débat, nous avons abordé des questions qui touchent aux fondements de notre République, de notre défense et de notre cohésion nationale et sociale.
Certaines dates ont été rappelées et je veux les souligner : l'an II et ses volontaires ; 1905, année de l'instauration de la conscription. Nous pourrons, je l'espère, y ajouter 1997, avec la mise en place du volontariat, la définition d'une nouvelle citoyenneté et l'émergence d'un renforcement du lien entre l'armée et la nation.
Permettez-moi, mesdames, messieurs les sénateurs, de vous remercier de ne pas avoir choisi la voie de la facilité, la voie du conformisme ou la voie de la nostalgie, mais d'avoir opté pour la voie du renouveau, la voie de l'avenir.
Après le vote de la loi de programmation militaire, dans laquelle a été décidé le passage de l'armée de conscription à l'armée professionnelle, il aurait été possible de supprimer purement et simplement le service national. Je l'ai dit au cours du débat et je me permets de le répéter : c'était la voie de la facilité. Vous ne l'avez pas choisie et je vous en remercie.
Vous auriez pu choisir la voie du conformisme, c'est-à-dire la voie de ceux qui ont peur du changement, qui ne résistent pas à la tentation du conservatisme et qui s'enferment dans les habitudes. Or, vous avez choisi d'analyser la situation présente, les nouveaux risques, les nouvelles menaces. Vous avez préféré analyser les évolutions de la société pour construire, au cours de ce débat, une nouvelle approche de la citoyenneté, du lien armée-nation et de la défense.
Nous sommes tous riches de souvenirs ; M. Delanoë l'a rappelé tout à l'heure, comme moi-même d'ailleurs. Pour autant, vous n'avez pas choisi la voie de la nostalgie, car le débat que nous allons clore dans quelques instants - momentanément - est fondamental. En effet, il permettra, par le projet de loi qui, je l'espère, sera voté, d'insuffler un esprit de défense à nos institutions de défense. Il n'y a pas de système de défense qui vaille sans esprit de défense. L'histoire est pleine de ces institutions de défense, de ces armées modèles qui ont été poussées à la défaite, qui sont allées droit à la catastrophe car le pays avait omis d'insuffler l'esprit de défense à la société tout entière.
A travers ce projet de loi, nous voulons précisément insuffler un esprit de défense à l'ensemble de la société. Je l'ai dit et je le répète, pour avoir le goût de défendre sa patrie, il faut l'aimer, et pour cela il faut pouvoir s'engager volontairement, s'engager au service de tous, et notamment des plus faibles.
Or, ce que nous vous proposons à travers le rendez-vous citoyen et à travers le volontariat, ce n'est rien d'autre.
Ce rendez-vous citoyen est une conjugaison, peut-être un peu savante, un peu novatrice, entre l'obligation et le volontariat.
Lors du rendez-vous citoyen, tous les jeunes Français, quels que soient leur origine, leur profession et leur statut, se rencontreront durant cinq jours pour se reconnaître par leur appartenance à une nation et, si besoin est, reconnaître cette appartenance. Je l'ai déjà dit à plusieurs reprises, le rendez-vous citoyen n'est pas un événement inopiné dans la vie d'un jeune Français, c'est une confirmation, au sens propre du terme, de l'appartenance à une communauté nationale, confirmation du contrat qui existe entre chaque jeune Français et la nation.
Le volontariat me paraît essentiel et même très important, compte tenu de l'évolution des idées, des moeurs et des habitudes. Il me semble primordial de revenir aux fondements mêmes de notre République.
Hier, un certain nombre d'orateurs ont évoqué l'armée des va-nu-pieds, les résistants afghans, les hommes qui, ici et là dans le monde, se sont levés pour défendre la liberté, la fraternité et l'égalité. Nous avons tous en tête les événements qui ont marqué la France sans doute pour des siècles : je pense notamment, à cet égard, à la guerre de 1939-1945 au cours de laquelle des volontaires se sont levés pour défendre l'honneur de la France et les principes républicains de liberté, de fraternité et d'égalité.
Rien ne vaut l'engagement volontaire pour défendre ce que l'on aime ! C'est la raison pour laquelle le Gouvernement espère recueillir votre approbation sur le projet de loi visant à instituer dans la loi française le volontariat.
Nous n'espérons qu'une chose : que, demain, se lèvent partout en France les volontaires de la République qui seront garants non seulement des institutions de défense, mais également de l'esprit de défense, non seulement de la cohésion sociale, mais également de la communauté nationale.
Je vous remercie, mesdames, messieurs les sénateurs, d'avoir participé à ce débat, et je souhaite qu'ensemble nous puissions construire cet édifice législatif tant nécessaire à la défense de notre pays. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.

(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.) M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 111:

Nombre de votants 317
Nombre de suffrages exprimés 311
Majorité absolue des suffrages 156
Pour l'adoption 215
Contre 96

Le Sénat a adopté. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Mes chers collègues, l'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.
La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à onze heures trente-cinq, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. René Monory.)