M. le président. Sur le texte proposé pour l'article 131-36-2 du code pénal, je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 9 est présenté par M. Jolibois, au nom de la commission des lois.
L'amendement n° 60 est déposé par M. Hyest.
Tous deux tendent, dans la première phrase du deuxième alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article 131-36-2 du code pénal, à supprimer le mot : « double ».
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 9.
M. Charles Jolibois, rapporteur. Cet amendement a pour objet de supprimer l'obligation de la double expertise médicale, qui paraît inutile à la commission. En effet, une deuxième expertise pourra toujours être ordonnée lorsque l'appréciation d'un autre expert sera jugée nécessaire !
Au demeurant, il faut tenir compte des difficultés qu'entraînerait la mise en oeuvre de ce dispositif qui, en tout cas au début, sera assez complexe à appliquer.
M. le président. La parole est à M. Hyest, pour défendre l'amendement n° 60.
M. Jean-Jacques Hyest. Cet amendement a le même objet que celui qui vient d'être défendu par M. le rapporteur.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Le Gouvernement est favorable à ces deux amendements : une double expertise est inutile et nous pouvons nous en tenir à l'avis d'un seul expert.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 9 et 60, acceptés par le Gouvernement.

(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. Par amendement n° 107 rectifié, MM. Huriet et Jean-Louis Lorrain proposent, dans la seconde phrase du deuxième alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article 131-36-2 du code pénal de remplacer les mots : « qu'aucun traitement ne pourra être entrepris sans son consentement, » par les mots : « de son droit à refuser le traitement, ».
La parole est à M. Huriet.
M. Claude Huriet. Dans le cadre d'un protocole thérapeutique, le consentement d'un patient est considéré comme valable lorsque celui-ci a pu effectuer son choix de manière « libre et éclairée ».
Tel n'est pas à l'évidence le cas dans ce projet de loi, puisque le refus du condamné est automatiquement assorti d'une peine privative de liberté pour une période maximale de cinq ans.
Il s'agit non pas de revenir sur le principe proposé dans le dispositif, mais de constater que l'expression « consentement du condamné » est inappropriée dans le cadre de la procédure mise en place. Les conditions dans lesquelles le consentement du condamné est recueilli empêchent de savoir s'il s'est prononcé en faisant usage de son libre arbitre ou si, au contraire, il a agi pour éviter une incarcération.
Dans l'acception qui prévaut d'un point de vue éthique, le consentement devrait être libre et éclairé et l'on pourrait douter de la liberté d'un consentement qui, en cas de refus, aurait pour conséquence une incarcération.
C'est pourquoi nous proposons de préciser que le président du tribunal avertit le condamné de son « droit à refuser » le traitement qui lui est proposé, mais que ce refus entraînera l'application de la peine de prison.
La formulation retenue dans cet amendement est analogue à celle de l'actuel article 131-8 du nouveau code pénal, relatif au travail d'intérêt général, en vertu duquel « le président du tribunal, avant le prononcé du jugement, informe le prévenu de son droit à refuser l'accomplissement d'un travail d'intérêt général et reçoit sa réponse ».
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Charles Jolibois, rapporteur. Je me suis déjà exprimé sur les relations entre éthique médicale et déontologie. Il me paraît nécessaire de conserver une forme de contrainte, que j'ai appelée « ombrelle pénale », pour le suivi socio-judiciaire et pour l'injonction médicale.
Selon la rédaction du projet de loi, qui convient à la commission, la personne qui refuse le suivi socio-judiciaire pourra être condamnée à une peine d'emprisonnement par le juge de l'application des peines.
Cela étant, nous sommes sur la même longueur d'ondes que les rédacteurs de l'amendement n° 107 rectifié : au fond, nous voulons imposer le respect de principes identiques. Mais nous considérons que la formulation du projet de loi est plus proche de la réalité que le condamné va être appelé à vivre. Ainsi, on lui demandera son consentement, mais il saura qu'un refus le conduirait en prison.
Peut-être est-il plus diplomatique d'agir ainsi plutôt que de lui rappeler son droit à refuser le traitement, car le droit au refus, au sens très large du terme, ne peut en tout état de cause concerner qu'une personne qui jouit d'une totale liberté et non pas un condamné placé sous suivi socio-judiciaire.
C'est pourquoi la commission souhaite conserver le texte original du projet du Gouvernement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Monsieur Huriet, je comprends le sens de votre amendement : vous voulez remplacer la notion de « consentement du condamné » par la notion de « droit à refuser un traitement ».
Nous sommes d'accord sur l'objectif avec M. le rapporteur : les soins ne peuvent pas être effectués sans l'accord de la personne et cette dernière a, par conséquent, le droit de les refuser.
Je ne sais pas si la notion de « droit » est meilleure que la notion de « consentement ». Comme je n'en suis pas persuadée, je m'en remets à la sagesse du Sénat.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 107 rectifié.
M. Claude Huriet. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Huriet.
M. Claude Huriet. Comme vient de l'indiquer Mme le garde des sceaux, nous sommes d'accord sur l'objectif. Mais je considère - et je ne suis pas seul, d'ailleurs, à être de cet avis - que le terme même de « consentement » suppose la liberté de consentir.
Généralement, on associe les termes « libre et éclairé » au consentement. La notion même de consentement suppose donc la liberté. Par conséquent, à partir du moment où le condamné ne jouit pas de sa liberté, le terme de consentement ne paraît pas adapté.
Ce n'est pas une question de purisme, mais c'est la signification profonde du consentement qui est en jeu dans ce petit débat auquel M. le rapporteur a bien voulu se prêter. J'interviens donc à nouveau, en appréciant que Mme le ministre s'en remette à la sagesse du Sénat, pour demander que cet amendement, qui ne remet pas fondamentalement en cause le dispositif, soit adopté par notre assemblée.
M. Philippe de Bourgoing. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. de Bourgoing.
M. Philippe de Bourgoing. Je crois que nous sommes tous d'accord sur le principe des soins, et nous espérons tous que ceux-ci seront efficaces.
Dans cette optique, la formule retenue par la commission me paraît plus incitative que l'usage d'un droit, et c'est pourquoi je voterai dans le sens qu'elle préconise.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Dreyfus-Schmidt.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Nous sommes là dans un débat sémantique, car, dans la pratique, le président du tribunal sera amené à dire au condamné qu'il a le droit de ne pas accepter d'être soigné, mais qu'il en subira les conséquences.
Certes, on aurait pu ajouter les mots « libre et éclairé » après le mot « consentement ». Cela aurait permis de rappeler au condamné qu'aucun traitement ne pourra être entrepris contre sa volonté.
Cela étant, je crois cette précision sans grande importance. Toutefois, si notre collègue Claude Huriet y tient vraiment, nous pouvons l'insérer dans le texte.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 107 rectifié, repoussé par la commission et pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, modifié, le texte proposé pour l'article 131-36-2 du code pénal.

(Ce texte est adopté.)

ARTICLES 131-36-3, 131-36-4 ET 131-36-4-1
DU CODE PÉNAL