SÉANCE DU 14 JANVIER 1998
M. le président.
Par amendement n° 114, MM. Duffour, Pagès, Derian, Mme Beaudeau, M. Bécart,
Mmes Bidard-Reydet, Borvo, MM. Fischer, Lefebvre, Mme Luc, MM. Minetti, Ralite,
Renar, Mme Terrade et M. Vergès proposent d'insérer, avant l'article 1er, un
article additionnel ainsi rédigé :
« Avant l'article 21-7 du code civil, il est inséré un article ainsi rédigé
:
«
Art... - L'enfant mineur né en France de parents étrangers acquiert
la nationalité française par déclaration faite en son nom par son représentant
légal s'il a sa résidence en France et s'il a eu en France une résidence
continue ou discontinue d'au moins cinq années. »
La parole est à M. Duffour.
M. Michel Duffour.
Lors de mon intervention dans la discussion générale, j'ai expliqué pourquoi
le groupe communiste républicain et citoyen tenait particulièrement à cet
amendement, et nous n'avons pas été les seuls, sur les travées de la gauche
plurielle, à nous exprimer dans ce sens.
Il me paraît en effet opportun d'aller au bout de la logique de la présente
loi en revenant à cette disposition de la loi de 1973.
Comme nous l'avons dit, l'intégration est une marque de confiance. C'est en
même temps un combat. Attendre jusqu'à dix-huit ans, ou même, puisque le projet
de loi le permet, jusqu'à seize ans, voire jusqu'à treize ans, est inutile
lorsque l'enfant a la chance d'être né dans une famille qui souhaite une
intégration pleine et entière et veut que son enfant devienne français.
Nous souhaitons donc que l'automaticité de l'acquisition de la nationalité à
dix-huit ans soit assortie, à titre complémentaire, de la possibilité pour les
parents résidant en France depuis cinq ans, de manière continue ou discontinue,
de faire une déclaration à la naissance de leur enfant. Mme la ministre l'a
rappelé, le choix de l'enfant doit - c'est évident - être pris en compte, mais
que sa famille puisse faire un choix dès le départ est fondamental.
Courrait-on ainsi le risque, évoqué par certains, de voir des parents faire
une telle déclaration avec une autre idée, un autre projet, à savoir contourner
la loi ? L'amendement n° 114 vise les parents, étrangers certes, mais résidant
en France, de manière continue ou discontinue, depuis au moins cinq années, ce
qui, me semble-t-il, fait tomber cet argument.
Nous espérons donc que l'avis de Mme la ministre sera favorable.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Christian Bonnet,
rapporteur. La commission a émis un avis défavorable, et ce pour trois
raisons.
Première raison, s'étant prononcée contre la possibilité d'acquérir la
nationalité à l'âge de treize ans, elle ne va pas admettre une telle
possibilité à la naissance.
Deuxième raison, que la demande soit formulée par le « représentant légal » ne
lui paraît pas convenir.
Enfin, troisième raison, admettre comme condition suffisante une résidence
discontinue lui convient moins encore.
Son avis est donc pleinement défavorable !
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou,
garde des sceaux. J'ai déjà dit hier les raisons pour lesquelles le
Gouvernement n'avait pas adopté la façon de voir des auteurs de l'amendement n°
114, non s'en s'être longuement interrogé d'ailleurs, car il s'agit d'une
disposition essentielle de la loi de 1973.
J'ai évoqué la nécessité d'éviter les fraudes. M. Duffour estime que la
condition de la résidence en limite voire en supprime la possibilité.
Peut-être, mais j'ai évoqué aussi la nécessité de privilégier la manifestation
de la volonté de l'enfant, et c'est là une raison qui me paraît tout à fait
déterminante pour ne pas admettre l'acquisition de la nationalité à sa
naissance.
En outre, l'inconvénient de ne pas pouvoir être Français avant l'âge de treize
ans est, me semble-t-il, contrebalancé par ce titre d'identité que nous
souhaitons créer et qui manifestera de la façon la plus officielle la vocation
de l'enfant à être Français et fera, par conséquent, la preuve de sa situation
particulière.
J'ajoute enfin un argument que je n'ai pas développé hier : dans le système de
la loi de 1973, lorsque les parents demandaient dès sa naissance la nationalité
française pour leur enfant, celui-ci ne pouvait plus la récuser à sa majorité
en raison du temps écoulé.
Dès lors que nous ne souhaitons pas que des enfants deviennent Français sans
le vouloir, c'est là un élément très important, je dois le dire, pour écarter
la solution qui, en effet, avait été retenue dans la loi de 1973.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 114.
M. Robert Badinter.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Badinter.
M. Robert Badinter.
Monsieur le président, madame le garde des sceaux, mes chers collègues, il
s'agit là d'une question importante et sur laquelle nous sommes, à titre
individuel, nombreux au sein du groupe socialiste à ne pas partager le point de
vue du Gouvernement ; nous partageons encore moins, je dois le dire, celui qui
a été exposé il y a un instant par M. le rapporteur.
Nous sommes tous d'accord pour dire que l'objectif recherché dans la loi est
l'intégration, et ce dans les meilleures conditions possibles, de ces enfants
qui sont nés et ont grandi sur le sol français et qui sont voués, pour leur
quasi-totalité, à être Français.
Pendant des décennies, des parents étrangers, qui savaient que leurs enfants
seraient Français, avaient le droit - et ils l'ont largement exercé - de
déclarer dès leur naissance leurs enfants nés sur le territoire français,
eux-mêmes y étant établis, et régulièrement établis, comme Français.
L'avantage de cette procédure en termes d'intégration est considérable pour
une raison simple et décisive à mes yeux. En effet, elle permet à l'enfant, et
plus tard à l'adulte et au Français qu'il sera, d'avoir le sentiment d'avoir
été Français dès l'origine.
Il n'y a plus dès lors le moindre risque de dissociation entre deux
nationalités successives que nous évoquions hier, dissociation qui est vécue
parfois très difficilement par des personnes naturalisées, puisque, dès la
naissance, de par la volonté de ses parents étrangers établis sur le territoire
français et non encore naturalisés, l'enfant sera Français.
C'est cette faculté, qui a été exercée pendant des décennies par des
générations d'immigrés vivant notre territoire et sachant que leur enfant
demeurerait sur le sol français, qu'il faut rétablir, conformément, me
semble-t-il, à la vision républicaine.
Madame le ministre - vous connaissez d'ailleurs très bien mon sentiment sur ce
point - les objections que l'on invoque sont tout à fait mineures au regard de
cet impératif, qui appelle de notre part un choix décisif.
Je laisse de côté l'obsession de telle ou telle fraude. Qu'est-elle à côté de
l'intérêt pour nous tous d'avoir des enfants qui se sentent Français dès
l'origine ?
Mais je vais plus loin : même en ce qui concerne le droit de l'enfant à
choisir sa nationalité, rien n'est plus facile que de le respecter en
inscrivant dans la loi que, si par impossible il le désire, il pourra
parfaitement décliner la nationalité française à sa majorité. S'il veut aller
chercher son destin ailleurs, libre à lui de le faire !
Il me paraît donc très important que nous rétablissions le dispositif qui a si
longtemps été celui de la République. C'est l'intérêt de tous et, permettez-moi
de le dire d'une façon très forte, c'est d'abord l'intérêt de l'enfant.
C'est la raison pour laquelle, à titre personnel, je voterai l'amendement
présenté par le groupe communiste républicain et citoyen.
M. Jacques Larché,
président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du
suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Je demande
la parole.
M. le président.
La parole est à M. le président de la commission des lois.
M. Jacques Larché,
président de la commission des lois. La disposition extrêmement
importante qui nous occupe s'inscrit, je le reconnais, dans la logique de la
conception qu'ont certains de l'attribution de la nationalité.
Après vous, monsieur Badinter, je formulerai deux observations, l'une qui
constitue un retour en arrière, l'autre qui est liée à votre propos.
En premier lieu, jusqu'en 1973, date du premier choc pétrolier, le problème
des flux migratoires ne se posait pas dans les mêmes termes qu'aujourd'hui.
Nous n'avions pris aucune mesure restrictive tendant à freiner le mouvement de
l'immigration.
En second lieu - et je reviens maintenant à votre propos, mon cher collègue,
car je ne l'ai pas fait sur l'instant - vous avez présenté de manière un peu
outrancière la question que, selon vous, nous voudrions poser aux jeunes
immigrés au moment où il leur est possible de devenir français.
Nous ne leur disons pas : vous êtes des étrangers. Nous nous adressons à leur
dignité et à leur volonté, et nous leur demandons : voulez-vous être Français ?
C'est tout a fait différent et c'est parfaitement honorable !
Quoi qu'il en soit, mes chers collègues, l'amendement n° 114 nous offre une
expression extrêmement intéressante de la pluralité de la majorité, pluralité
qui est d'ailleurs tout à son honneur.
Nous, sénateurs de l'opposition, nous sommes tous hostiles à ce projet de loi.
Cependant il sera voté, nous le savons. Je me demande donc, mes chers
collègues, si compte tenu des divergences intellectuelles extrêmement
intéressantes au sein de la majorité, minoritaire ici - elle se plaint
d'ailleurs que, de par notre poids, nous empêchions souvent son expression - il
ne serait pas opportun que nous ne participions pas au vote sur l'amendement n°
114.
Nous sommes, bien sûr, contre cet amendement, mais laissons la « majorité
minoritaire » prendre la décision qui lui incombe, étant entendu, bien
évidemment, que, le moment venu, les choses seront rétablies.
C'est une suggestion que je me permets de formuler, car nous serons alors
parfaitement éclairés quant à la pluralité de la majorité, ce qui est un aspect
intéressant, et sur la volonté de certains d'aller jusqu'au bout d'une certaine
logique.
Mme Joëlle Dusseau.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à Mme Dusseau.
Mme Joëlle Dusseau.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je voterai cet
amendement.
La loi de 1973 avait accentué la volonté républicaine d'intégration qui
caractérisait la législation de la France en matière de naturalisation et de
nationalité depuis cent ans.
En 1993, il y a eu une véritable rupture, mais, pendant la campagne électorale
qui a précédé les dernières élections législatives, des promesses ont été
faites, madame la ministre, et des personnes fortement attachées aux principes
des droits de l'homme les ont crues.
Je ne veux pas dire par là qu'il faut légiférer en fonction des promesses. Il
faut aussi légiférer en fonction de principes, et je crois justement que, sur
ce point, le Gouvernement renonce à des principes qui devraient être
fondamentalement les siens et à des idées qui devraient être fondamentalement
les siennes.
M. Jacques Larché nous a répété ce qu'avait déjà dit M. le rapporteur : en
1973, la crise n'était pas là, aujourd'hui elle s'est installée ; en 1973,
l'immigration était différente de celle d'aujourd'hui et je ne reprendrai pas
les propos qu'il a tenus à cet égard !
M. Jacques Larché,
président de la commission des lois. Je n'ai pas dit qu'elle était
différente, j'ai dit qu'il y avait une immigration qui n'était pas
contrôlée.
Mme Joëlle Dusseau.
C'est vrai, veuillez m'excuser, monsieur le président de la commission. J'ai
fait l'amalgame entre vos propos et ceux de M. le rapporteur, et j'ai
inexactement cité les paroles de l'un ou de l'autre.
Néanmoins, je ne crois pas qu'il faille encore aggraver la situation, souvent
déjà très difficile, des enfants d'immigrés en France en leur faisant
connaître, pendant les dix-huit ans qu'ils passeront en France avant d'avoir
atteint l'âge de la majorité, une situation de non-nationalité.
Plus exactement, ils auront la nationalité de leurs parents, alors qu'elle ne
correspond pour eux à aucune réalité géographique et, souvent, à aucune réalité
linguistique ou culturelle. Ils ne sont plus du pays de leurs parents, ils sont
en fait de chez nous. Aussi, en refusant à leurs parents le droit de dire : «
oui, nos enfants sont nés en France, ils resteront en France, nous le savons
bien, et ils sont Français », nous frappons ces jeunes du sceau de l'altérité.
Cela me paraît constituer une erreur grave, d'autant plus grave au moment où
s'accentuent le racisme et l'exclusion.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à Mme Cerisier-ben Guiga.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga.
Je voterai, moi aussi, à titre personnel, cet amendement. En effet, je faisais
partie de ceux qui pensaient qu'il aurait été bon, en raison de ce que sont
aujourd'hui les populations étrangères installées en France, d'en revenir à une
disposition qui, contrairement à ce que vous disiez, monsieur le président
Larché, remonte non pas à 1973 mais à 1889, et qui a donc été en vigueur
pendant plus de cent ans.
En 1889, il s'agissait de permettre aux étrangers d'acquérir le plus
rapidement possible la nationalité française de manière à s'intégrer à titre
individuel au plus vite et d'éviter que ne se constituent « des nations
étrangères au sein de la nation », pour reprendre l'expression d'un
parlementaire de l'époque. Il s'agissait aussi de les amener à remplir tous
leurs devoirs, y compris au regard du service militaire. On sait, en effet,
que, dans les départements frontaliers, en particulier dans le nord de la
France, des étrangers installés depuis plusieurs générations bénéficiaient, de
fait, d'une exemption de service militaire, ce qui était mal perçu par la
population française, et on le comprend.
Aujourd'hui, il ne faut pas dire que ces jeunes n'ont pas de nationalité avant
d'obtenir la nationalité française. Pour leur malheur, ils ont des nationalités
qui suscitent le plus de réactions de rejet et de mépris de la partie de la
population française qui cède à des pulsions xénophobes. Cette partie de la
population française, qui n'est certes pas majoritaire, représente tout de
même, semble-t-il, plus de 30 %.
Pour ces enfants, ce n'est pas facile tous les jours. Ils ont une certaine
difficulté à reconnaître qu'ils sont étrangers et appartiennent à des
nationalités qu'on ne perçoit pas bien et qui subissent des ostracismes. Je
pense, par exemple, à une actrice, Isabelle Adjani. Celle-ci n'a dit son
origine algérienne que tardivement, ce qui signifie bien que cela lui posait un
problème personnel. Sans la mettre en cause, c'est significatif, puisqu'elle a
mis dix ans à le faire savoir.
M. Jean Chérioux.
C'est dramatique !
Mme Monique Cerisier-ben Guiga.
Il est dramatique que des jeunes d'origine étrangère soient dans une espèce de
clandestinité vis-à-vis de leur nationalité d'origine, non de leur propre chef,
mais parce que la société française telle qu'elle fonctionne aujourd'hui le
leur impose.
M. Michel Caldaguès.
C'est de la paranoïa !
Mme Monique Cerisier-ben Guiga.
C'est pourquoi je considère que lorsque les parents conscients demandent que
leurs enfants soient français le plus tôt possible, c'est une bonne chose. Je
regrette qu'on ne l'ai pas fait. Aussi, je voterai l'amendement du groupe
communiste républicain et citoyen.
M. Philippe de Gaulle.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. de Gaulle.
M. Philippe de Gaulle.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je voudrais
simplement faire remarquer que la nationalité n'a pas seulement une valeur
nationale ; elle a aussi une valeur internationale.
Dernièrement, j'ai beaucoup entendu parler de 1945 et de 1973, mais nullement
de ce qui s'est passé entre-temps. Je tiens à faire observer que l'origine des
demandeurs de nationalité n'est pas indifférente. N'oublions pas que cela
ressortit d'un principe international de réciprocité.
Lors de l'entretien qui a eu lieu au château de Champs-sur-Marne, le 13 mars
1964 - des procès-verbaux en témoignent - soit à peu près deux ans après
l'indépendance de l'Algérie, entre le général de Gaulle et Ben Bella, ce
dernier a déclaré que les enfants nés en Algérie de parents étrangers pouvaient
devenir algériens par une demande de naturalisation, les parents étrangers
étant notamment les Français nés en Algérie avant l'indépendance. Cette
disposition est toujours en vigueur. Le général de Gaulle a répondu qu'il en
était de même pour les Algériens nés en France après l'évacuation de Mers
el-Kébir en 1965. Dans un cas comme dans l'autre, c'est la demande de
nationalité de l'intéressé, formulée à l'âge conscient, qui est déterminante
pour l'acquisition de celle-ci. Je ne peux donc voter l'amendement n° 114, qui
tend à conférer, dès la naissance, la nationalité française à un enfant né en
France de parents étrangers.
M. Dominique Braye.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Braye.
M. Dominique Braye.
Je regrette que le débat ait quelque peu dévié.
Quelle que soit la travée sur laquelle nous siégeons, nous sommes imprégnés
d'un certain humanisme et très attachés à l'intégration. Cependant, nous
n'avons manifestement pas tous la même vision de cette question.
En l'occurrence, il existe deux approches : d'un côté, l'approche des penseurs
et des intellectuels, si j'ose dire, et, de l'autre, l'approche de ceux qui
vivent au quotidien ces problèmes sur le terrain.
(Protestations sur les
travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et
citoyen.) En effet, en tant que président du district urbain de
Mantes-la-Jolie, je suis confronté à ces problèmes chaque jour.
Mes chers collègues, vous parlez de xénophobie et de racisme. J'ai le regret
de vous dire que cette xénophobie et ce racisme proviennent, en grande partie,
de ce que tous nos compatriotes nous reprochent, à savoir le laxisme, le manque
de fermeté et de détermination. C'est aussi cela qui fait monter la xénophobie,
le racisme et le parti que nous combattons tous. Sur le terrain, c'est ce que
nous ressentons.
La France est une terre d'accueil. Monsieur Badinter, il convient de dire à
ces personnes d'origine étrangère : « Vous êtes en France, dans un pays qui est
peut-être le seul à proposer l'acquisition de la nationalité dans des
conditions aussi faciles. Souhaitez-vous devenir français ? » Ne transformons
pas le débat !
(Protestations sur les travées socialistes.)
Non, nous ne les montrons pas du doigt comme des étrangers ! Nous sommes l'un
des seuls pays qui leur proposent de devenir français dans des conditions aussi
faciles.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Le seul !
(Sourires.)
M. Michel Duffour.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Duffour.
M. Michel Duffour.
Je voudrais rassurer M. le président Larché : la majorité plurielle dans le
pays, minorité au Sénat, se porte bien.
Malgré nos différences de vues avec Mme le garde des sceaux, nous partageons
ses soucis et notre démarche globale est identique. Nous avons simplement une
approche différente. Je considère qu'il faut aller jusqu'au bout d'une logique.
Cette marque de confiance est nécessaire, et elle place ce combat de
l'intégration sur un terrain offensif.
Je souhaiterais dire au précédent orateur qu'il n'est pas sérieux de parler de
ceux qui seraient sur le terrain et de ceux qui n'y seraient pas. Je suis
sénateur des Hauts-de-Seine, élu de la ville de Nanterre. Nous n'allons pas
comparer nos situations respectives. Les exemples sont suffisamment nombreux
pour montrer que certains, à gauche, ont une vision offensive et de combat pour
aboutir à une solution positive. Votre démarche paraît bien frileuse.
L'amendement que nous proposons est très précis. J'apprécie les arguments
forts qui ont été avancés par mon collègue Robert Badinter. Ils montrent que,
en l'occurrence, nous avons affaire à une situation grave, importante pour
l'avenir.
Pour éviter toute confusion éventuelle, et comme me l'a fait observer mon
collègue Dreyfus-Schmidt, il convient de modifier cet amendement afin de
préciser qu'il s'agit de l'enfant mineur né en France de parents étrangers «
établis régulièrement en France ».
M. Jean-Jacques Hyest.
Tout de même !
M. Michel Duffour.
Cela était déjà dit, mais nous le répétons afin que la rédaction ne donne pas
lieu à extrapolation. Nous vous demandons, mes chers collègues, de voter cet
amendement et nous espérons que Mme la ministre nous entendra.
M. le président.
Je suis donc saisi d'un amendement n° 114 rectifié, présenté par MM. Duffour,
Pagès, Dérian, Mme Beaudeau, M. Bécart, Mmes Bidard-Reydet, Borvo, MM. Fischer,
Lefebvre, Mme Luc, MM. Minetti, Ralite, Renar, Mme Terrade et M. Vergès, et
tendant, avant l'article 1er, à insérer un article additionnel ainsi rédigé
:
« Avant l'article 21-7 du code civil, il est inséré un article ainsi rédigé
:
«
Art. ... - L'enfant mineur, né en France de parents étrangers établis
régulièrement en France acquiert la nationalité française par déclaration faite
en son nom par son représentant légal, s'il a sa résidence en France et s'il a
eu en France une résidence continue ou discontinue d'au moins cinq années. »
Je vais mettre aux voix cet amendement.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Dreyfus-Schmidt.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Je voudrais louer la fertilité d'esprit, que chacun connaît, du président
Larché. Ce débat n'a pas fini de nous réserver des rebondissements. On se
souvient de ce qui s'est passé en décembre dernier. Un certain nombre d'entre
nous se rappellent même que M. Jacques Larché a proposé à M. le président
d'interrompre la séance parce qu'il avait entendu, à deux reprises, prononcer
le mot « forfaiture ».
M. Jacques Larché,
président de la commission des lois. Moi, jamais !
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Si, monsieur Jacques Larché, vous avez dit : « Voilà deux fois que j'entends
prononcer le mot "forfaiture" ». Je sollicite une suspension de
séance, afin que vous tiriez les conséquences de tels propos. » Voilà
exactement ce que vous avez dit !
M. Jacques Larché,
président de la commission des lois. Après tout, j'avais raison !
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Ce n'était pas grave. Il s'agissait d'un rebondissement de plus, qui faisait
gagner un peu de temps...
Ensuite, la commission des lois a proposé la suppression de tous les articles
du texte. Maintenant, vous dites, avec votre machiavélisme habituel
(Protestations sur les travées du RPR et des Républicains et
Indépendants),...
M. Jean Chérioux.
Respectez vos collègues, ils vous respectent !
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
C'est un compliment,...
M. Dominique Braye.
Ah bon !
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
... et je suis sûr que M. le président de la commission l'entend comme tel.
M. Michel Caldaguès.
De la part d'un vice-président du Sénat, ce n'est pas heureux !
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Si le terme vous choque, je peux vous en proposer un autre : par exemple, la
fertilité de son esprit, déjà évoquée tout à l'heure.
M. Jean-Jacques Hyest.
C'est mieux !
M. Henri de Raincourt.
Sa finesse !
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Aujourd'hui, il se dit que, après tout, si le texte repartait du Sénat modifié
par de nombreux amendements proposés par les groupes de la majorité plurielle,
il faudrait voir ce que cela donnerait.
M. Jacques Larché,
président de la commission des lois. Eh oui !
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Je dirai simplement que nous ne sommes pas dupes et que nous avons
parfaitement compris sa pensée.
M. Jean Delaneau.
Nous avons eu trois semaines pour réfléchir !
M. Claude Estier.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Estier.
M. Claude Estier.
Avant que le Sénat passe au vote de cet amendement, je demande, au nom de mon
groupe, une suspension de séance de quelques minutes.
(Rires sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président.
Le Sénat va bien sûr accéder à votre demande.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix heures trente, est reprise à onze
heures.)