SÉANCE DU 28 JANVIER 1998
M. le président.
« Art. 7. _ L'article 16 de la même ordonnance est ainsi rédigé :
«
Art. 16. _ La carte de résident est valable dix ans. Sous réserve des
dispositions de l'article 15
bis et de l'article 18, elle est renouvelée
de plein droit. »
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Par amendement n° 10, M. Masson, au nom de la commission des lois, propose de
supprimer cet article.
Par amendement n° 86, MM. Duffour, Pagès, Dérian, Mme Beaudeau, M. Bécart,
Mmes Bidard-Reydet, Borvo, MM. Fischer, Lefebvre, Mme Luc, MM. Minetti, Ralite,
Renar, Mme Terrade et M. Vergès proposent de compléter
in fine le texte
présenté par l'article 7 pour l'article 16 de la même ordonnance, par les mots
: « dans les six mois précédant son expiration ».
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 10.
M. Paul Masson,
rapporteur. Il s'agit de modifier l'article 16 de l'ordonnance de
1945.
Le Gouvernement propose de supprimer la condition d'entrée régulière pour un
renouvellement de plein droit de la carte de résident.
Je rappelle que le Sénat a longuement débattu sur ce point lors de l'examen de
la loi Debré. Nous avions alors estimé que le renouvellement de plein droit de
la carte de résident devait être subordonné à la condition - c'est le bon sens
- que l'étranger ait sa résidence habituelle en France au moment de la demande
de renouvellement. Monsieur le ministre, vous êtes, à juste titre, très
favorable au bon sens. En l'occurrence, nous sommes en plein dans le bon
sens.
Or, le Gouvernement considère qu'il est nécessaire de supprimer la condition
d'entrée régulière pour le renouvellement de plein droit de la carte de
résident.
Cet article 7 nous semble malvenu et c'est pourquoi nous vous proposons, mes
chers collègues, de le supprimer.
M. le président.
La parole est à Mme Borvo, pour défendre l'amendement n° 86.
Mme Nicole Borvo.
Cet amendement a pour unique objet de simplifier les démarches des détenteurs
d'une carte de résident lorsqu'ils demandent le renouvellement de cette
dernière.
En effet, dans la pratique, des difficultés sont rencontrées par ces personnes
: le délai d'attente entre l'expiration du titre de séjour et son
renouvellement entraîne parfois une rupture dans le séjour régulier des
détenteurs de la carte de résident, ce qui est préjudiciable, d'autant que ces
personnes vivent sur notre territoire depuis dix ans, qu'elles ont vocation à y
demeurer durablement et que leur titre est renouvelé de plein droit.
Aussi, en proposant, par voie d'amendement, que le renouvellement puisse
intervenir dans les six mois qui précèdent l'expiration du titre, nous
contribuerons à résoudre les éventuels problèmes.
A l'Assemblée nationale, lors de la discussion d'un amendement identique, vous
avez répondu, monsieur le ministre, que cette question relevait de la voie
réglementaire. J'ose donc espérer que vous allez renouveler votre engagement à
cet égard et que des mesures seront effectivement prises.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 86 ?
M. Paul Masson,
rapporteur. Il est évidemment défavorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 10 et 86 ?
M. Jean-Pierre Chevènement,
ministre de l'intérieur. Je pense que nous allons nous accorder, puisque
nous sommes tous dotés de ce bon sens dont Descartes disait qu'il est « la
chose du monde la mieux partagée ».
Je ferai simplement observer à M. le rapporteur que le but du Gouvernement -
mais il le sait - est de stabiliser et d'intégrer, s'ils le souhaitent, les
étrangers en situation régulière.
Quel sens a la condition d'entrée régulière pour un étranger qui bénéficie
déjà d'une carte de résident de dix ans ?
Par ailleurs, un étranger titulaire d'une telle carte peut séjourner trois ans
hors de France sans que cette carte soit périmée. On conçoit donc difficilement
qu'un étranger soit tenu de résider en France au moment où il sollicite le
renouvellement de sa carte tout en ayant la possibilité de demeurer pendant une
longue période dans un autre pays sans pour autant en perdre le bénéfice. Je
réponds par là même à Mme Borvo.
L'amendement n° 10 ne paraît donc pas judicieux dans la mesure où l'article 7
vise simplement à supprimer une disposition qui est source de complications
dans les préfectures.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 10.
M. Alain Vasselle.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle.
L'article 7 vise à modifier l'article 16 de l'ordonnance du 2 novembre 1945
qui concerne les conditions de renouvellement de la carte de résident et celles
de son retrait.
La loi du 24 avril 1997 avait complété l'article 16 de l'ordonnance de 1945 en
subordonnant le renouvellement de plein droit à la justification d'une
résidence habituelle en France au moment de la demande. Il s'agissait -
permettez-moi de le rappeler - d'éviter qu'un étranger puisse se voir
renouveler automatiquement son titre de séjour alors qu'il ne réside plus dans
notre pays.
Cette disposition ne s'oppose pas bien entendu au renouvellement de la carte
de résident de l'étranger momentanément hors de France. Elle vise seulement à
permettre à l'administration de porter une appréciation sur la demande
présentée. Il est tout de même légitime que l'administration française conserve
la possibilité d'examiner les demandes de renouvellement d'un titre de séjour
de longue durée, surtout si l'étranger ne réside pas en France. Il serait
inconcevable, pour ne pas dire choquant, d'accorder un droit à renouvellement
automatique d'une carte de résident à un étranger ne résidant plus sur notre
territoire au moment de sa demande.
Le groupe du RPR votera donc l'amendement de suppression de cet article,
proposé par M. le rapporteur, au nom de la commission des lois, afin de
préserver les pouvoirs d'appréciation de l'Etat.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Il faudra donc que l'étranger revienne spécialement en France pour faire sa
demande !
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 10, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 7 est supprimé, et l'amendement n° 86 n'a plus
d'objet.
Demande de réserve