M. le président. La parole est à M. Poncelet.
M. Christian Poncelet. Monsieur le secrétaire d'Etat au budget, le 9 décembre dernier, en clôture de la discussion budgétaire pour l'exercice 1998, j'ai pris le pari - cela figure au Journal officiel - que vous effectueriez une régulation budgétaire avant quelques semaines. Vous m'avez alors répondu : « comme nous avons fait un budget sincère, nous n'aurons pas à faire des corrections dès que le Parlement souverain se sera prononcé ».
Eh bien, j'ai malheureusement gagné mon pari, et je vous en remercie immédiatement, monsieur le secrétaire d'Etat ! (Sourires.)
En effet, le premier arrêté d'annulation de crédits a été signé dès le 16 janvier. Je le regrette d'autant plus qu'il supprime des crédits d'investissement à hauteur de 2,2 milliards de francs en autorisations de programme ainsi que certains crédits consacrés à la sécurité et à la justice, secteurs que le Sénat avait voulu « sanctuariser » - nous ne voulions point que l'on touchât à ces crédits -...
M. Alain Gournac. Absolument !
M. Christian Poncelet. ... et qu'il ampute même de 300 millions de francs - c'est beaucoup plus grave - les crédits d'investissement de la défense nationale, qui avaient déjà été particulièrement amaigris dans le budget de 1998.
Un sénateur du RPR. Eh oui !
M. Christian Poncelet. Ma question est donc double.
Quand seront publiés les prochains arrêtés d'annulation ? En effet, si je fais les comptes, de nombreuses dépenses supplémentaires non budgétées sont déjà - permettez-moi cette expression - dans les « tuyaux » : revalorisation des minima sociaux, renégociation des prêts PAP, aides au secteur automobile, régularisation des sans-papiers, sans oublier le coût du projet de loi sur les trente-cinq heures et du projet de loi sur les exclusions, qui a été, à mon sens, sous-estimé dans la loi de finances initiale. Et nous avons appris ce matin - je ne plaiderai pas sur le fond - qu'un accord a été signé avec les syndicats de la fonction publique - tout au moins avec une grande majorité d'entre eux - revalorisant de 1,3 le point d'indice de la fonction publique, soit une incidence de 8 milliards de francs alors que le budget initial ne prévoyait à cette fin que 3 milliards de francs.
Le Gouvernement peut-il prendre l'engagement que toutes ces actions seront financées par redéploiement des dépenses de fonctionnement - je dis bien « de fonctionnement » - et, par conséquent, qu'il prend dès maintenant l'engagement de s'interdire d'envisager la moindre hausse des prélèvements obligatoires, c'est-à-dire la moindre hausse d'impôt ? (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Marcel Charmant. Que ne l'avez-vous dit à Juppé !
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat au budget. Monsieur Poncelet, je me réjouis de poursuivre aujourd'hui avec vous le débat que nous avons eu en fin d'année. Nous avions alors fait un pari que je n'ai pas perdu : nous avons établi un budget sincère, contrairement à nos prédécesseurs (Protestations sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.), qui avaient grossièrement sous-estimé les recettes fiscales. Dans ces conditions, nous n'avons pas à faire de corrections.
Vous évoquez la décision que le Gouvernement a prise le 16 janvier.
De quoi s'agit-il ? Face aux manifestations de chômeurs en détresse, le Gouvernement a fait en sorte...
M. Alain Gournac. D'envoyer les CRS !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. ... que des cellules d'urgence soient mises en place, et il a débloqué un milliard de francs pour que les chômeurs et les familles en grande difficulté puissent bénéficier de secours immédiats.
Mme Hélène Luc. Très bien !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Nous avons dû, dans ces conditions, prendre un décret d'avance, ce qui me paraît orthodoxe.
Nous avions alors le choix entre trois solutions.
La première solution consistait à compenser ce milliard de francs d'économies. Le Gouvernement a retenu cette première solution, qui me paraît constituer un acte de bonne gestion.
M. Christian Poncelet. Pas sur l'investissement !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Si vous rejetez cette première solution, monsieur Poncelet, c'est que vous êtes partisan des deux autres.
La deuxième solution consistait à accroître le déficit, et je pense pas que le président de la commission des finances du Sénat puisse accepter une telle hypothèse.
La troisième solution consistait à créer un impôt « détresse » pour venir en aide aux chômeurs en difficulté. Je ne pense pas non plus que ce soit la solution que vous préconisiez, monsieur Poncelet !
Il me semble donc que le Gouvernement a su apporter une réponse rapide, concrète et équilibrée à ces chômeurs.
Dans un second temps, Mme Join-Lambert a été chargée d'une mission importante sur le terrain. Lorsqu'elle aura remis son rapport, le Gouvernement prendra des décisions en matière de minima sociaux et il continuera, dans le domaine budgétaire, à se comporter avec la sincérité et le souci des économies qui l'ont caractérisé jusqu'à présent.
Nous aurons, j'en suis sûr, l'occasion d'en reparler, monsieur Poncelet, avec courtoisie, sincérité et efficacité. (Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Christian Poncelet. Il ne faut pas faire d'économies sur l'investissement !

DÉTENTION PROVISOIRE ET SECRET DE L'INSTRUCTION