DÉPÔT DE QUESTIONS ORALES AVEC DÉBAT

M. le président. J'informe le Sénat que j'ai été saisi des questions orales avec débat suivantes :
I. - M. Ivan Renar attire l'attention de Mme le ministre de la culture et de la communication sur les conséquences qu'aurait pour des pans entiers de notre économie la signature de l'Accord multilatéral sur l'investissement, l'AMI.
D'ores et déjà, et pour ce qui concerne la politique culturelle de notre pays, des centaines d'artistes, producteurs, réalisateurs, auteurs, acteurs... se mobilisent contre un accord qui fait de la culture une marchandise « ordinaire » livrée aux seuls impératifs de la loi du marché et du capitalisme.
En effet, l'AMI est bien un mur juridique mondial dressé contre tout ce qui pourrait entraver la rentabilité financière.
La chape de plomb et le silence qui recouvrent les négociations autour de cet accord dont les conséquences sont aussi contreversées inquiètent les acteurs de la politique culturelle de notre pays et au-delà.
Aussi, afin de porter ce débat auprès de notre Haute Assemblée et d'associer le Parlement aux négociations en cours, il lui demande les mesures qu'elle entend prendre afin de faire prévaloir une position originale auprès de nos différents partenaires lors des négociations de cet accord.
Il lui demande, en outre, de tout mettre en oeuvre afin d'exclure l'ensemble de l'activité culturelle du champ d'application de cet accord multilatéral sur l'investissement (n° 1).
II. - M. Adrien Gouteyron attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur la constance avec laquelle les instances de négociations économiques et commerciales internationales s'entêtent à ignorer la spécificité des biens, des industries ou des investissements culturels, qui ne sauraient être soumis aux seules lois du marché. Alors que les négociations du cycle de l'Uruguay qui ont abouti en avril 1994 à la signature des accords de Marrakech n'avaient que très tardivement admis ce qu'il est convenu d'appeler « l'exception culturelle », on doit en effet constater aujourd'hui que le projet d'accord multilatéral sur l'investissement, AMI, négocié depuis 1995 dans le cadre de l'OCDE, remet en cause tant les principes du droit de propriété littéraire et artistique que les politiques nationale et européenne de soutien à la création, en particulier dans les domaines cinématographique et audiovisuel.
Il attire également son attention sur le fait qu'une information complète de la représentation nationale sur les enjeux et le déroulement de telles négociations constitue sans doute, pour le Gouvernement, le meilleur moyen de s'assurer de son soutien et de celui de l'opinion dans la défense des intérêts nationaux, et il lui demande d'informer le Sénat sur la position du gouvernement français dans la négociation de l'AMI, ainsi que sur les chances que cette négociation aboutisse à un accord acceptable par la France et par tous les pays soucieux de défendre l'avenir de leur langue et de leur culture (n° 2).
III. - M. Pierre Lefebvre attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur les dangers que recouvre, pour la France, la signature de l'Accord multilatéral sur l'investissement, l'AMI.
L'ignorance dans laquelle sont maintenus les citoyens, les salariés, les élus depuis plus de deux ans révèle les intentions néfastes de ce projet. C'est pourquoi notre Parlement est aujourd'hui en droit de demander au gouvernement français des éclaircissements sur la teneur des négociations en cours.
Malgré la rétention manifeste d'informations, il apparaît clairement que l'AMI vise essentiellement à accorder des droits supplémentaires aux investisseurs étrangers là où les Etats n'auraient que des devoirs.
Qu'en est-il du droit de poursuivre un Etat devant une juridiction internationale dans le cas où une multinationale s'estime lésée par les actions de celui-ci ou par la législation en vigueur sur ce territoire ?
Qu'en est-il du droit de compensation dans l'hypothèse d'événements relevant de l'ordre public et démocratique tels que la grève ou la manifestation ?
Qu'en est-il, enfin, du droit des capitalistes étrangers de ne pas se soumettre aux normes sociales ou environnementales dès lors qu'elles constituent un frein à la rentabilité de leurs investissements ?
Il lui demande de s'exprimer sur ces questions qui mettent gravement en cause la souveraineté nationale.
Il lui demande, en outre, de préciser la position de la France et de ne pas apposer la signature de notre pays dans le cas où cet accord contreviendrait aux principes fondamentaux de notre Constitution et de la démocratie (n° 3).
Conformément aux articles 79 et 80 du règlement, ces questions orales avec débat ont été communiquées au Gouvernement et la fixation de la date de la discussion aura lieu ultérieurement.

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