M. le président. « Art. 7. _ I. _ Au sixième alinéa de l'article L. 212-4-3 du code du travail, les mots : "ou une convention ou un accord d'entreprise ou d'établissement" sont supprimés.
« I bis. _ Avant le dernier alinéa du même article, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque, pendant une période de douze semaines consécutives, l'horaire moyen réellement effectué par un salarié a dépassé de deux heures au moins par semaine, ou de l'équivalent mensuel ou annuel de cette durée, l'horaire prévu dans son contrat, celui-ci est modifié, sous réserve d'un préavis de sept jours et sauf opposition du salarié intéressé, en ajoutant à l'horaire antérieurement fixé la différence entre cet horaire et l'horaire moyen réellement effectué. »
« I ter. _ Dans le dernier alinéa du même article, les mots : ", ou convention ou accord d'entreprise ou d'établissement" sont supprimés.
« II. _ Le même article est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les horaires de travail des salariés à temps partiel ne peuvent comporter, au cours d'une même journée, plus d'une interruption d'activité ou une interruption supérieure à deux heures, que si une convention ou un accord collectif de branche étendu le prévoit soit expressément, soit en définissant les plages horaires pendant lesquelles les salariés doivent exercer leur activité et leur répartition dans la journée de travail, moyennant des contreparties spécifiques et en tenant compte des exigences propres à l'activité exercée. »
« III. _ Les dispositions du II du présent article sont applicables à compter du 1er janvier 1999.
« IV. _ Un décret en Conseil d'Etat fixe les sanctions dont sont assorties les infractions aux articles L. 212-4-2 à L. 212-4-7 du code du travail. »
Par amendement n° 8 rectifié, M. Souvet, au nom de la commission, propose de supprimer les paragraphes I, I bis et I ter de cet article.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Louis Souvet, rapporteur. L'article 7, par une modification de l'article L. 212-4-3 du code du travail, vise à davantage encadrer le temps partiel, d'une part, en limitant ou en rigidifiant le recours aux heures complémentaires, d'autre part, en limitant la flexibilité que peut rapporter le recours à ce type de contrat.
Cet article durcissant systématiquement le régime du travail à temps partiel, alors qu'il semble opportun de le développer, la commission vous propose de supprimer ces dispositions, à l'exception des paragraphes II et III.
Le paragraphe II exclut la possibilité d'une interruption supérieure à deux heures, sauf si un accord de branche prévoit des interruptions plus longues. Cette disposition a le mérite de favoriser le dialogue social au sein de l'entreprise.
Quant au paragraphe III, il fixe la date d'application du paragraphe II au 30 juin 1999, au lieu du 1er janvier, date prévue par le texte actuel, afin de faciliter les négociations.
La commission vous propose donc, mes chers collègues, plusieurs amendements en ce sens. Vous l'aurez compris, mes explications valent donc également pour les amendements n°s 63 et 64.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Il est aujourd'hui nécessaire, notamment pour ce qui concerne les heures complémentaires, de fixer des règles qui soient plus protectrices pour les salariés. Je rappelle qu'aujourd'hui 45 % des salariés employés à temps partiel dans le secteur privé déclarent souhaiter travailler davantage, à condition, bien évidemment, que cela soit prévu au contrat et qu'ils puissent en être prévenus à l'avance, ce qui n'est pas la pratique actuelle.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur l'amendement n° 8 rectifié et j'indique par avance qu'il en sera de même sur les amendements n°s 63 et 64.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 8 rectifié.
M. Guy Fischer. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. Dans le droit-fil de sa position sur la rédaction de l'article 6 du présent projet de loi, la commission des affaires sociales nous propose de procéder à la rectification - je serais tenté de dire à la mutilation - des dispositions de l'article 7.
Cette position illustre d'ailleurs la conception même que la majorité sénatoriale se fait de la négociation collective.
Manifestement, elle préfère la négociation menée au niveau de l'entreprise et, en tout cas sur ces domaines, en vue sans doute, au nom d'une adaptabilité des pratiques aux situations micro-économiques, de faire en sorte que le droit du travail applicable en matière de travail à temps partiel soit littéralement réduit à néant.
Elle n'ose pas pencher totalement pour des accords dérogatoires signés par des organisations syndicales qui, parfois, n'en sont pas vraiment, mais il y a là un pas que d'autres n'hésitent en aucun cas à franchir.
Tout au plus laisse-t-elle dans le texte de l'article 7 les dispositions relatives aux interruptions de service, de loin les mesures qui perturbent le plus les salariés et qui illustrent, en fait, la réalité de ce que recouvre bien souvent le travail à temps partiel, c'est-à-dire le recours à des horaires décalés.
Elle n'en propose pas moins d'en repousser la mise en oeuvre.
Vous comprendrez aisément que, dans ce contexte, nous ne souhaitions pas une telle modification du texte du projet de loi.
Nous ne sommes pas étonnés de la position de la commission des affaires sociales.
S'opposer à toute mesure qui modifie la règle du jeu en matière de travail à temps partiel procède de cette orientation fondamentale et quasi lancinante de la recherche de toujours plus de profits en pressant toujours plus sur les salaires.
Nous ne voterons donc pas cet amendement.
Mme Dinah Derycke. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Derycke.
Mme Dinah Derycke. Dans la droite ligne de notre position précédente, nous ne voterons pas cet amendement n° 8 rectifié ; il en ira de même des amendements n°s 63 et 64.
Je ne reviendrai pas sur la situation scandaleuse, que nous connaissons tous, en matière de temps partiel dans certaines branches, dont les femmes sont d'ailleurs particulièrement victimes. Je songe, dans ma région, à ces salariées du secteur du commerce embauchées à mi-temps, voire moins, alors que rien ne le justifie dans l'organisation du travail. Souvent d'ailleurs, l'employeur choisit les jeunes femmes concernées dans des communes assez éloignées du lieu de travail, de façon qu'elles soient encore plus fragilisées.
Je ne reviendrai pas non plus sur certaines entreprises de vente par correspondance qui embauchent des personnes pour travailler quelques semaines chaque année. Cela dure pendant dix ou quinze ans ; si la personne concernée refuse une seule fois de se libérer pour les vingt, trente ou quarante heures qu'elle doit accomplir chaque année, elle est alors rayée définitivement de la liste.
De telles situations scandaleuses, nous en connaissons tous ; elles sont vécues quotidiennement par des millions de femmes, qui ne sont pas considérées comme étant au chômage puisqu'elles travaillent à temps partiel quelques heures.
Il est regrettable que vous proposiez de reporter de six mois l'application de la mesure. Il est en effet urgent de permettre à ces salariés d'avoir une vie normale et d'imposer - en l'occurrence, le terme est pleinement justifié - aux employeurs le respect de conditions de travail correctes.
Par ailleurs, nous ne voyons pas ce qui justifierait que le temps de travail des salariés à temps partiel ne soit pas mesuré selon les mêmes critères que celui des salariés qui travaillent à temps plein. Il doit y avoir égalité de traitement en la matière. Lorsque le temps de travail d'un salarié dépasse pendant une durée de douze semaines, soit trois mois, la durée indiquée au contrat, cette durée est à l'évidence inexacte : le contrat doit donc être requalifié. Nous savons combien l'inexactitude en ce domaine peut générer de fraudes qui sont préjudiciables aux finances publiques et aux ressources des organismes sociaux.
Pour l'ensemble de ces raisons, nous voterons donc contre les amendements n°s 8 rectifié, 63 et 64.
M. Louis Souvet, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Louis Souvet, rapporteur. Il est des propos que je ne peux laisser passer. La majorité sénatoriale préfère la négociation au niveau de l'entreprise, avez-vous dit, monsieur Fischer. A deux reprises au cours de cet après-midi, j'ai précisé, au contraire, que je préférais la négociation au niveau des branches. Vous ne l'avez pas relevé. Ce n'est pas très convenable car vous savez bien que ce que vous dites n'est pas vrai. Alors pourquoi le dites-vous ?
Par ailleurs, je veux préciser à Mme Derycke qu'il y aura toujours des personnes qui abuseront dans un sens ou dans un autre. Mais il existe tout de même une organisation du travail. Quelle que soit l'entreprise, il y a des représentants du personnel, des délégués du personnel et, à la périphérie, des inspecteurs du travail. Certaines personnes peuvent effectivement tricher mais on peut toujours les ramener dans le droit chemin. Faut-il le prévoir dans la loi ou faut-il en laisser l'initiative au niveau du secteur dans lequel on travaille, c'est-à-dire au niveau où doivent effectivement jouer les responsabilités ? En un mot, doit-on bloquer les choses au niveau de la loi ou doit-on les laisser se dérouler normalement ?
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 8 rectifié, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Toujours sur l'article 7, je suis maintenant saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Tous deux sont présentés par MM. Gournac et Courtois.
L'amendement n° 27 tend à supprimer le paragraphe II de l'article 7.
L'amendement n° 28 a pour objet, dans le texte proposé par le paragraphe II de l'article 7, après les mots : « de branche étendu », d'insérer les mots : « ou un accord d'entreprise ».
Ces amendements sont-ils soutenus ?...
Je suis maintenant saisi de deux amendements, présentés par M. Souvet, au nom de la commission.
L'amendement n° 63 a pour objet, dans le paragraphe III de l'article 7, de remplacer les mots : « 1er janvier » par les mots : « 30 juin ».
L'amendement n° 64 tend à supprimer le paragraphe IV de l'article 7.
Ces amendements ont déjà été défendus et le Gouvernement leur a donné un avis défavorable.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 63, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 64, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 7, modifié.

(L'article 7 est adopté.)

Article 7 bis