M. le président. La parole est à M. Dufaut.
M. Alain Dufaut. Monsieur le président, madame, messieurs les ministres, mes chers collègues, ma question s'adressait à M. le ministre de l'intérieur.
La politique du Gouvernement en matière d'immigration nous préoccupe au plus haut point.
L'Assemblée nationale vient, en effet, en nouvelle lecture, d'adopter le projet de loi relatif à l'entrée et au séjour des étrangers en France et n'a - hélas ! - retenu aucune des propositions du Sénat.
M. Alain Gournac. Hélas !
M. Alain Dufaut. Par ce texte, le Gouvernement accorde de manière automatique des droits aux étrangers, adopte une conception extensive du regroupement familial, bref, incite en fait les ressortissants des pays les plus démunis à une immigration massive en France.
Par ce texte, il rend, en outre, encore plus aléatoire l'intégration des étrangers à la communauté française, et nous le déplorons.
Mais cela ne semble pas lui suffire.
Le Gouvernement a décidé, dès sa constitution, une nouvelle régularisation massive des sans-papiers. Cela a entraîné 179 118 demandes de régularisation. C'est le chiffre officiel annoncé, à la date du 31 janvier 1998, par le ministère de l'intérieur.
Or 25 000 demandes de régularisation ont déjà été rejetées et, sur ce nombre, seulement 32 étrangers déboutés de leur demande de régularisation ont effectivement quitté le territoire national en application d'une procédure d'aide au retour.
M. Alain Gournac. Eh oui !
M. Alain Dufaut. Ce chiffre a été communiqué le 26 février dernier à la commission d'enquête sénatoriale par le directeur de l'OMI, l'office des migrations internationales, M. André Nutte. Il n'est donc sujet à aucune polémique, à aucune contestation.
On me permettra de m'étonner de la faiblesse de ce nombre.
Ma question est donc simple. Le 22 février, à l'Assemblée nationale, M. Chevènement répondait sur ce sujet à Jacques Kossowski : « L'ensemble des dossiers aura été "éclusé"... le 30 avril 1998. » Comment va-t-on, d'ici à la fin avril, c'est-à-dire dans un peu moins de deux mois, éloigner du territoire national, selon la procédure précitée, les 24 968 étrangers déboutés de leur demande ? (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Daniel Vaillant, ministre des relations avec le Parlement. Monsieur le sénateur, les étrangers qui ne sont pas régularisés sont invités à quitter la France et se voient proposer l'aide à la réinsertion, qui, aux termes de la circulaire interministérielle du 19 janvier 1998, comprend les prestations suivantes : un ou plusieurs entretiens à l'OMI ; une allocation de 4 500 francs par adulte et 900 francs par enfant ; la prise en charge des bagages ; la prise en charge des frais de voyage ; une assistance administrative pour les démarches à accomplir ; une aide aux personnes dans le pays de retour, pour la réinstallation ; une aide d'urgence et un suivi social ; éventuellement, un soutien aux micro-projets économiques.
Parmi les personnes concernées, celles qui acceptent d'entrer dans ce dispositif disposent d'un délai de trois mois à compter de la notification du refus ou de la publication de la circulaire précitée pour retourner dans leur pays d'origine.
Celles qui n'opteront pas pour cette aide à la réinsertion feront l'objet d'un arrêté préfectoral de reconduite à la frontière. Dès lors qu'ils feront l'objet d'un contrôle, les intéressés pourront être placés en rétention administrative et reconduits effectivement dans leur pays.
Cependant, il est évident que ces opérations de reconduite ne pourront qu'être progressives. En effet, quelque 150 000 demandeurs étaient présents sur notre territoire depuis plusieurs années, monsieur le sénateur, sans avoir fait l'objet d'une reconduite effective, alors même que les ministres de l'intérieur successifs multipliaient les déclarations, voire les gesticulations (Applaudissements sur les travées socialistes) , sans parvenir à reconduire effectivement plus de 12 500 personnes par an.
Le Gouvernement s'est attelé à réunir les conditions d'une meilleure application de la loi, c'est-à-dire plus efficace et plus humaine.
Le texte voté en nouvelle lecture par l'Assemblée nationale, dit « loi RESEDA », et qui fera l'objet d'une nouvelle lecture au Sénat début avril, augmentera la durée de la rétention administrative...
M. Jean Chérioux. De deux jours !
M. Daniel Vaillant, ministre des relations avec le Parlement. Certes ; mais, avec vous, c'était dix jours !
M. Jean Chérioux. Ce n'était pas moi !
M. Daniel Vaillant, ministre des relations avec le Parlement. Si vous n'êtes pas solidaire du gouvernement précédent, c'est votre problème, monsieur Chérioux !
La loi RESEDA, disais-je, augmentera la durée de la rétention administrative tout en garantissant un meilleur respect des droits des retenus.
Elle assure, par ailleurs, les conditions d'une reconduite effective des étrangers condamnés. Le ministre de l'intérieur vient de se voir remettre un rapport de l'inspection générale de l'administration sur les centres de rétention administrative et prendra prochainement des mesures destinées à rendre ce dispositif plus efficace.
Enfin, comme vous le savez, le Premier ministre a affirmé, à Bamako, son refus des opérations humiliantes de reconduite groupée du type « charter », sous l'oeil des caméras de télévision.
Cette position, appréciée en Afrique, devrait faciliter la délivrance de laissez-passer par les autorités des pays concernés et, donc, rendre la reconduite plus effective.
Je vous donne une garantie : ce gouvernement sera, en cette matière, à la fois plus efficace, plus ferme et plus humain que le gouvernement précédent. (Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur certaines travées du groupe communiste républicain et citoyen.)

MAINTIEN D'UN PARC LOCATIF INTERMÉDIAIRE À PARIS