M. le président. Par amendement n° 8, M. Souvet, au nom de la commission, propose d'insérer, après l'article 4 ter, un article additionnel ainsi rédigé :
« Les dispositions des articles 4 bis et 4 ter s'appliquent aux salariés de droit privé entrant dans le champ d'application de la directive 93/104/CE du 23 novembre 1993 concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Louis Souvet, rapporteur. Cet amendement, qui a été adopté par la commission des affaires culturelles de l'Assemblée nationale, n'a pas été appelé en séance publique. Il a pour objet d'exclure le secteur des transports routiers du champ d'application de l'article 4 bis relatif à la définition de la durée du travail effectif et de l'article 4 ter concernant le repos quotidien.
Comme le déclarait hier soir encore Mme le ministre lors de son audition par la commission des affaires sociales pour la présentation du plan national pour l'emploi, les conditions de travail des transporteurs routiers doivent être fixées à l'échelon européen.
La commission vous demande donc, mes chers collègues, d'adopter cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Il est vrai que la Commission et le Conseil se sont engagés, lors de l'adoption de la directive de 1993, à examiner les conditions dans lesquelles les salariés des transports pourraient bénéficier des mesures mises en place par la directive.
Actuellement, un certain nombre de règlements relatifs aux repos et aux pauses dans les transports routiers sont déjà applicables. Des négociations sont également en cours pour aboutir à des définitions spécifiques.
On peut effectivement se poser la question de savoir si les transports routiers ne devraient pas être définis à l'échelon européen, notamment par une négociation collective, ce qui permettrait une meilleure application de la durée du travail dans ce secteur. Chacun sait que les camions traversent l'ensemble de nos pays.
Aussi, sur cet amendement, le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 8.
M. Guy Fischer. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. L'amendement présenté par M. le rapporteur, au nom de la commission des affaires sociales, introduit une restriction non négligeable à la portée des articles 4 bis et 4 ter .
Concrètement, il nous est proposé d'exclure du champ d'application de la définition du temps de travail et des principes qui régissent les repos compensatoires et les temps de pause les salariés visés à l'article 17 de la directive européenne de 1993 relative au temps de travail.
Que l'on se comprenne bien ! Les salariés du secteur des transports ne sont pas les seuls visés. Je suis persuadé que ce détail n'avait pas échappé à M. le rapporteur, qui justifiait pourtant son amendement par la prise en compte nécessaire de la spécificité du secteur des transports routiers.
Sont aussi exclus, les cadres, les salariés du tourisme, de l'agriculture, les personnels soignants, soit des millions de salariés.
Nous refusons catégoriquement de souscrire à une telle démarche, qui, de dérogation en dérogation, viderait votre loi, madame la ministre, de toute sa substance.
De plus, je trouve que cet amendement ressemble fort à une proposition du CNPF, qui, pour rendre la loi sur les 35 heures « moins inacceptable », demandait au Gouvernement d'exclure du champ d'application de la loi les secteurs de l'hôtellerie - restauration et des transports.
A l'Assemblée nationale, les députés du groupe communiste se sont félicités du retrait d'un amendement similaire. A mon tour, au sein de la Haute Assemblée, je tiens à réaffirmer notre opposition à toute tentative d'adoption d'une telle disposition.
Le groupe communiste républicain et citoyen est tout à fait conscient des contraintes et des spécificités attachées à chaque profession et des différences à l'intérieur d'un même secteur, par exemple entre les travailleurs mobiles et non mobiles des transports routiers.
Mais nous sommes également attachés à procurer toujours plus de protection aux salariés, l'harmonisation des normes européennes devant se faire, à notre sens, vers le haut.
Pour information, je vous indique que, le 26 mars dernier, le Comité économique et social européen a adopté un avis sur le Livre blanc des secteurs et activités exclus de la directive sur le temps de travail, directive à laquelle vous faites référence et qui risque d'être frappée de caducité !
Le comité constate que, en 1993, un certain nombre de travailleurs, notamment non mobiles, avaient été exclus sans aucune raison objective et il préconise leur intégration dans le champ d'application de la directive.
Pour toutes les raisons évoquées précédemment, le groupe communiste républicain et citoyen votera contre l'amendement de la commission.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Je souhaite apporter à M. Fischer quelques précisions.
Si l'amendement se réfère au champ d'application de la directive du 23 novembre 1993, il n'est pas dans l'intention de son auteur - du moins ne l'ai-je pas compris ainsi - d'exclure l'ensemble des secteurs qui figurent à l'article 17 de la directive, lequel prévoit des dérogations pour toutes sortes de domaines, tels l'agriculture, le tourisme, les services postaux, la presse, la radio et même les communautés religieuses.
Il s'agit, me semble-t-il, d'exclure essentiellement les transports aériens, ferroviaires, routiers, maritimes, fluviaux et lacustres, qui figurent à l'article 1er parce qu'il y a substitution de règlements.
Il est donc question non pas d'exclure définitivement ces secteurs de la réglementation sur la durée du travail, mais de leur appliquer des réglementations spécifiques. Il ne s'agit en aucun cas - mais peut-être faut-il le préciser si cela donne lieu à une telle interprétation - de toucher l'ensemble des secteurs cités à l'article 17 et qui, je le répète, n'existent pas à l'article 1er.
Peut-être devrions-nous étudier une rédaction qui corresponde mieux à votre souci, qui est d'ailleurs le nôtre.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?..
Je mets aux voix l'amendement n° 8, pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 4 ter .

Article 5