M. le président. « Art. 37. _ L'article 3 de la loi n° 70-575 du 3 juillet 1970 portant réforme du régime des poudres et substances explosives est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« La propriété des actifs de la société mentionnée à l'alinéa précédent qui sont nécessaires à la production et la vente des poudres et de substances explosives destinées à des fins militaires peut être transférée au secteur privé conformément aux dispositions de la loi n° 86-912 du 6 août 1986 relative aux modalités des privatisations. »
Par amendement n° 109, Mme Beaudeau, M. Lefebvre et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de supprimer cet article.
La parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau. L'article 37, que nous proposons de supprimer, prévoit la privatisation de la Société nationale des poudres et explosifs, la SNPE.
Cette société réalise un chiffre d'affaires important, de l'ordre de 5 milliards de francs, pour un bénéfice net d'environ 50 millions de francs.
La section « poudres et explosifs militaires » de la SNPE est, quant à elle, déficitaire. Cependant, n'est-ce pas la vocation d'une société publique d'assurer la péréquation financière entre les activités excédentaires et déficitaires ?
Selon l'exposé des motifs de l'article 37, il s'agirait, en l'occurrence, d'un regroupement des activités de la SNPE et de la société britannique Royal Ordnance au sein d'une société commune de droit privé.
Le flou le plus complet règne sur les modalités de mise en place de cette société franco-britannique, malgré la réponse qu'a faite M. le ministre de la défense à nos collègues du groupe communiste de l'Assemblée nationale.
En effet, quelle garantie avons-nous que cette association ne s'accompagnera pas, à terme, de restructurations au sein des établissements nationaux ? A titre d'exemple, sur le site d'Angoulême - notre collègue M. Arnaud a évoqué sa situation dans la discussion générale - qui a connu cinq plans successifs, les conditions de travail des salariés sont désastreuses et des bâtiments sont appelés à disparaître rapidement.
Face à cela, le gouvernement précédent avait envisagé de compléter la liste des entreprises privatisables avec la SNPE et le GIAT, le groupement industriel des armements terrestres.
Force est de constater que ce processus se poursuit aujourd'hui malgré le changement de majorité !
Les salariés de la SNPE sont désabusés. Ils subissent les conséquences des abandons de notre indépendance nationale en matière de poudres et explosifs et, plus largement, de notre système de défense.
Une autre voie est possible, dans le cadre actuel d'une société d'Etat à 100 %, en s'appuyant sur des accords de coopération plutôt qu'en transférant des actifs au secteur privé.
Telle est la raison pour laquelle nous proposons de supprimer l'article 37.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je tiens à préciser, madame Beaudeau, qu'est seulement concerné le secteur des poudres et explosifs à des fins militaires, qui représente moins de 10 % du chiffre d'affaires de la SNPE. On ne peut donc pas parler de privatisation en la matière.
Depuis 1989, les dépenses en la matière ont diminué. Il faut donc favoriser des coopérations industrielles pour maintenir l'emploi, notamment en Charente, point sur lequel, après MM. Arnaud et Raffarin, vous avez justement insisté.
Ce qui est prévu, c'est un rapprochement entre la SNPE, pour ce qui est du secteur particulier que j'ai évoqué, et l'entreprise Royal Ordnance au sein d'une société commune dont la SNPE partagerait le contrôle.
Cette coopération internationale est une façon - la bonne, me semble-t-il - de préserver une activité industrielle importante.
En conséquence, je vous demande, madame Beaudeau, de bien vouloir retirer l'amendement.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 109.
M. Philippe Arnaud. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Arnaud.
M. Philippe Arnaud. Monsieur le secrétaire d'Etat, comme je l'ai dit hier, je voterai contre l'article 37, bien que, sur le fond, j'approuve les modalités permettant à la SNPE de conclure une alliance industrielle avec Royal Ordnance.
Je constate en effet que l'Etat patron, puisqu'il est aujourd'hui le seul actionnaire de la SNPE, n'assume pas ses responsabilités et qu'en l'espèce il montre, pour le moins, le mauvais exemple aux industriels privés.
Voici ce qu'on lit dans les rapports successifs : « Ce rapprochement doit permettre de consolider les emplois existants. » J'approuve, bien sûr, cet objectif.
Mais on lit ensuite que « la SNPE et British Aerospace étant convenues de n'apporter à l'entreprise commune que les moyens dont le maintien en exploitation est prévu, chaque société mère fera son affaire de la fermeture des ateliers qui ne seront plus exploités ».
Je vous rappelle, monsieur le secrétaire d'Etat, que la société mère, pour ce qui nous concerne, c'est la SNPE, dont le seul actionnaire, et donc le patron, est l'Etat.
Enfin, dans un autre rapport, le ministre de la défense précise que l'alliance modifierait la répartition de l'activité entre les trois sites français, celui d'Angoulême, qui est le plus dépendant des marchés de l'armement, étant privé d'une partie de ses activités à partir de 1999.
Or, l'Etat n'accompagne pas cette restructuration. Il ne prévoit rien pour la reconversion des établissements condamnés, comme celui d'Angoulême.
Les dispositions nécessaires auraient dû être prises avant la conclusion de l'alliance. Ce qui se passe est inadmissible ; c'est en tout cas suffisant pour justifier mon vote défavorable.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 109, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 37.

(L'article 37 est adopté.)

Article 38