M. le président. « Art. 39. _ I. _ La puissance administrative des voitures particulières est calculée selon la formule suivante :

« Dans cette formule :
« _ PA désigne la puissance administrative exprimée en chevaux-vapeur, arrondie à l'entier le plus proche ;
« _ P et CO2 désignent respectivement la puissance réelle du moteur exprimée en kilowatts et les émissions de dioxyde de carbone exprimées en grammes par kilomètre. Ces deux paramètres sont mesurés conformément aux procédures prévues pour la réception communautaire des voitures particulières définies par les articles R. 109-3 à R. 109-9 du code de la route.
« Pour les voitures particulières qui fonctionnent alternativement au moyen de supercarburants et de gaz de pétrole liquéfié, la puissance administrative est calculée sur la base d'un fonctionnement au gaz de pétroleliquéfié.
« II. _ La puissance fiscale des voitures particulières, exprimée en chevaux-vapeur, est égale à la puissance administrative définie au I.
« III. _ Les dispositions des I et II se substituent aux dispositions de l'article 35 de la loi de finances rectificative pour 1993 (n° 93-859 du 22 juin 1993) pour les voitures particulières mises en circulation pour la première fois à compter du 1er juillet 1998 sur le territoire métropolitain et dans les départements d'outre-mer, ainsi que pour celles qui y sont immatriculées après avoir fait l'objet d'une mise en circulation pour la première fois à compter de la même date dans un Etat membre de la Communauté européenne ou dans un pays tiers appartenant à l'Espace économique européen. »
Par amendement n° 164, MM. Peyronnet, Régnault, Angels, Mme Bergé-Lavigne, MM. Charasse, Haut, Lise, Massion, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent de remplacer les quatre premiers alinéas du I de cet article par cinq alinéas ainsi rédigés :

« La puissance administrative des voitures particulières est calculée selon la formule suivante :

CO2

P¹,6


- 1,160 - V









PA =

+


+ MAX



45

40


20





(



)




« Dans cette formule :
« - PA désigne la puissance administrative exprimée en chevaux-vapeur, arrondie à l'entier le plus proche ;
« - V désigne la vitesse de pointe du véhicule ; »
La parole est à M. Peyronnet.
M. Jean-Claude Peyronnet. Je voudrais, d'abord remercier le Gouvernement, et en particulier M. le secrétaire d'Etat au budget, d'avoir tenu la promesse qu'il nous avait faite à l'automne de présenter un nouveau mode de calcul de la puissance fiscale.
Cette modification est nécessaire parce que le mode de calcul actuel ne correspond plus du tout aux réalités. L'introduction de nouveaux paramètres comme le dioxyde de carbone et la puissance réelle des véhicules, calculée en kilowatts, est tout à fait intéressante. Elle est cependant, à nos yeux, insuffisante.
Nous proposons l'introduction d'un troisième paramètre : la vitesse maximale du véhicule. Il s'agit d'augmenter la puissance fiscale des véhicules d'un cheval fiscal par tranche de 20 kilomètres à l'heure au-dessus de 160 kilomètres à l'heure.
Prenons l'exemple d'une voiture roulant à 200 kilomètres à l'heure.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Il ne faut pas rouler à une telle vitesse !
M. Jean-Claude Peyronnet. Non ce n'est pas bien, mais il s'agit ici de la vitesse maximale annoncée par le constructeur !
Dans le cas d'un tel véhicule, nous proposons donc d'ajouter deux chevaux fiscaux. Cela inciterait d'ailleurs les constructeurs à ne pas mettre sur le marché des véhicules susceptibles de rouler trop vite.
En revanche, la puissance fiscale des véhicules dont la vitesse de pointe est inférieure ou égale à 140 kilomètres par heure serait diminuée d'un cheval fiscal, ce qui aurait l'avantage de favoriser les petites voitures.
Pour les véhicules se situant entre ces deux tranches, les choses resteraient à peu près en l'état, compte tenu des règles d'arrondissement.
La formule peut paraître complexe, mais le principe est, en réalité, très simple.
Nous avons déposé cet amendement parce que le texte du Gouvernement nous semble présenter quatre lacunes, donc quatre défauts qu'il nous faut corriger.
Premièrement, il ne change rien ou presque, et c'est le principal reproche que l'on peut lui faire. En effet, les données chiffrées macroéconomiques figurant dans le rapport qui a été présenté devant les commissions des finances des deux assemblées sont fausses, car elles s'appuient sur la situation ancienne, le rapport de l'Assemblée nationale l'a bien montré. D'ailleurs, lorsque l'on fait le calcul par gamme, que ce soit Renault ou Volkswagen, on constate que peu de véhicules changeraient de tranche : on passe bien de 5 à 6 ou à 7 chevaux, mais on reste toujours dans la même tranche ! Il y a donc, de ce point de vue, peu de changements à attendre.
Deuxièmement, des effets pervers sont à craindre. En effet, au-delà de 10 chevaux et plus encore de 14 chevaux, la puissance administrative des véhicules à essence baisse. J'ai fait les calculs pour mon propre département : 39,7 % des véhicules à essence de plus de 14 chevaux et 44,9 % de plus de 10 chevaux voient leur puissance administrative baisser grâce à ce nouveau calcul. Tel n'était pas l'objet de ce dispositif.
Troisièmement, l'introduction de ce nouveau paramètre, à savoir la vitesse maximale, permet de sauvegarder la matière imposable et donc d'apaiser en partie l'inquiétude de M. le rapporteur.
La prise en compte des émissions de CO2 va permettre de réduire la cylindrée des véhicules. Ainsi, les turbodiesels à injection directe qui viennent d'apparaître chez tous les constructeurs polluent moitié moins que les autres, ce qui entraînera très rapidement une baisse de la matière imposable.
Non seulement, donc, le nouveau mode de calcul, s'il n'est pas modifié, entraînera peu de transfert des véhicules d'une tranche à l'autre, mais encore il va se traduire par une diminution de la matière imposable.
Quatrièmement, la mesure que je propose aurait l'avantage d'être en cohérence complète avec l'action de M. Gayssot, qui tend à réduire le nombre de morts sur les routes.
C'est pourquoi nous vous proposons l'introduction d'un troisième paramètre, à savoir la vitesse maximale des véhicules.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur. Il a semblé à la commission des finances que le lien entre puissance réelle maximale et vitesse de pointe avait déjà été pris en compte à l'article 39. Nous n'avons pas procédé à des simulations, nous n'en n'avons eu ni le temps ni les moyens. La commission est donc très réservée à l'égard de cette proposition et souhaite connaître l'avis du Gouvernement. Si celui-ci n'était pas favorable, elle émettrait elle-même un avis défavorable.
M. le président. Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. L'amendement présenté par M. Peyronnet va dans une bonne direction, puisqu'il tend à prolonger la loi sur la sécurité routière que M. Gayssot a présentée devant la Haute Assemblée. Cela dit, je pense qu'il va au-delà du raisonnable car, à partir du moment où l'on prend en compte la vitesse maximale, on majore la puissance fiscale d'une grande proportion de véhicules qui seront non plus à 7 mais à 8 chevaux fiscaux. Cela pourrait se traduire par un doublement du montant de la vignette, soit, pour un produit qui, je le rappelle, s'élève à 14 milliards de francs, 5 milliards de francs supplémentaires une fois que le parc aura été renouvelé !
Monsieur Peyronnet, votre intention est tout à fait louable, mais le Gouvernement entend, par l'article 39, mieux prendre en compte l'environnement et son texte est plus équilibré que le vôtre. J'espère donc que, compte tenu de ces explications, vous voudrez bien retirer votre amendement.
M. le président. Monsieur Peyronnet, l'amendement n° 164 est-il maintenu ?
M. Jean-Claude Peyronnet. Oui, monsieur le président, je le maintiens pour le principe, car j'ai bien compris qu'il ne serait pas adopté.
Mais je pose la question : qui dirige ce pays ?
M. Michel Charasse. La question est éternelle !
M. Jean-Claude Peyronnet. Elle n'en est pas moins intéressante pour autant !
J'ai remis des documents depuis un mois aux services du ministre, leur demandant qu'ils procèdent à des simulations. Il y a trois jours, on m'a dit que l'on n'en avait pas eu le temps.
Le ministre est entouré de personnes très compétentes, mais aussi de gens très suffisants, qui ont la science infuse et qui, par leur inertie délibérée, bloquent les décisions du Gouvernement et du Parlement. Voilà, monsieur le président, pourquoi je maintiens cet amendement.
M. le président. Mon cher collègue, la séance des questions d'actualité au Gouvernement vous permet de vous adresser directement à qui de droit...
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. J'essaierai de m'armer du sang-froid dont a fait preuve M. Peyronnet pour lui répondre que le Gouvernement a transmis à la commission des finances des simulations tout à fait complètes sur l'effet du changement de mode du calcul de la puissance administrative.
Cela étant, je suppose que votre appréciation, monsieur Peyronnet, a dépassé quelque peu votre pensée.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 164.
M. Joël Bourdin. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Bourdin.
M. Joël Bourdin. Permettez-moi simplement une observation de forme. En effet, l'amendement tel qu'il est rédigé ne me semble pas correct. La formule mathématique qui y figure est fausse : P¹,6/40 n'est pas équivalent à (P/40)¹,6 !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. On voit qu'il y a un polytechnicien dans la salle ! (Sourires.)
M. François Lesein. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Lesein.
M. François Lesein. La question me semble aujourd'hui un peu hors de saison, car elle relève du budget primitif. Dans la mesure où elle intéresse beaucoup de monde, elle ne saurait être ainsi traitée « au coin du bois », à l'occasion d'un DDOEF. La procédure m'étonne donc un peu.
Notre collègue, professeur, je suppose, conteste la formule proposée. Il ne nous donne pas de détail, mais quand on lit autant de plus, de moins, de mises en facteur commun et de mises en puissance dans un amendement, faux nous dit-on, on peut en effet s'inquiéter.
Mais là n'est pas le point le plus inquiétant. Je suis défavorable à cet amendement, car j'y trouve des mentions aberrantes. Comment, en effet, oser écrire que des véhicules peuvent rouler à plus de 160 kilomètres à l'heure, alors que c'est interdit ?
M. Jean-Claude Peyronnet. Il s'agit de la vitesse maximale du véhicule !
M. François Lesein. Quand bien même !
Quant à « tempérer sérieusement l'apologie de la vitesse dans les publicités ou les publireportages », puisque c'est ce qui semble empêcher de dormir notre collègue, il faudrait aussi que les autres constructeurs européens soient concernés !
M. le président. Mon cher collègue, je souhaiterais que l'on s'en tienne à l'amendement lui-même.
M. François Lesein. Je voudrais tout de même rappeler que l'injection directe sur les véhicules à moteur Diesel permettait de rouler à plus de deux cents kilomètres à l'heure !
Monsieur le secrétaire d'Etat, pouvez-vous nous assurer que les 5 milliards de francs supplémentaires seront bien reversés au fonds spécial d'investissement routier ? Peut-être, à cette condition, pourrions nous le voter, mais, s'ils sont affectés au Trésor, comme je le suppose, cela me paraît anormal.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 164, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 205, M. Lambert, au nom de la commission des finances, propose de compléter in fine l'article 39 par un paragraphe ainsi rédigé :
« IV. - Les pertes de produit fiscal résultant, le cas échéant, pour les départements et les régions de l'application du présent article sont compensées chaque année en application du deuxième alinéa de l'article 1614-5 du code général des collectivités territoriales.
« Les conditions de cette compensation sont définies à l'occasion de la plus prochaine loi de finances. »
La parole est à M. Lambert, rapporteur.
M. Alain Lambert, rapporteur. Tout d'abord, je remercie le Gouvernement d'avoir transmis en effet l'étude commandée au sujet de cette question de puissance fiscale. Je dois dire, pour que les choses soient claires, que ce document est arrivé entre les mains du rapporteur au moment où il rapportait devant la commission des finances l'article actuellement en discussion.
Monsieur le secrétaire d'Etat, des premières analyses que j'ai pu effectuer, il ressort quelques écarts, certes peu considérables, mais qui suscitent l'inquiétude de certains de nos collègues face à ce nouveau mécanisme.
Je vous propose un amendement en quelque sorte d'appel, que je retirerais si du moins vous n'apaisiez pas les angoisses qui ont pu se manifester.
Le président Poncelet, qui est le gardien, sinon de la Constitution, en tout cas du code général des collectivités territoriales, dont il se sépare aussi peu que des Evangiles (Sourires), nous rappelle que l'article 1614-5 de ce code prévoit la compensation intégrale des pertes de produit fiscal qui résulteraient de la modification en cause.
Monsieur le secrétaire d'Etat, cette interprétation est-elle la bonne ? Dans l'affirmative, cela pourrait me permettre - mais je parle sous le contrôle de M. le président Poncelet - de retirer cet amendement.
M. Christian Poncelet, président de la commission des finances. Très bien !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je parle sous le regard attentif de M. le président de la commission des finances et de M. le rapporteur ! (Sourires.)
C'est un fait que l'article 1614-5 du code général des collectivités territoriales prévoit, en tout état de cause, une compensation si elle apparaît nécessaire.
Les premières estimations qui ont été faites tendent à montrer que les pertes de recettes, qui seront très faibles, ne concerneront qu'un très petit nombre de départements. Par ailleurs, ces pertes seront étalées dans le temps, puisque l'application de la nouvelle formule se fera au fur et à mesure du renouvellement du parc automobile. Compte tenu de ces éclaircissements, M. le rapporteur pourrait, me semble-t-il, retirer son amendement.
M. Christian Poncelet, président de la commission des finances. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Christian Poncelet, président de la commission des finances. Monsieur le secrétaire d'Etat, confirmez-vous que la compensation sera intégrale, comme le prévoit l'article 1614-5 du code général des collectivités territoriales ?
M. Michel Charasse. Il faut qu'elle soit intégrale.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement appliquera la loi, en ce domaine, comme dans les autres.
M. Michel Charasse. La loi est la loi !
M. Christian Poncelet, président de la commission des finances. Compte tenu de la réponse très précise que vient de me donner M. le secrétaire d'Etat, et sachant désormais que les pertes occasionnées par une modification de l'assiette d'imposition d'une ressource des collectivités territoriales, même si celles-ci sont faibles, seront intégralement compensées, je retire l'amendement.
M. le président. L'amendement n° 205 est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 39.

(L'article 39 est adopté.)

Article additionnel après l'article 39