M. le président. Par amendement n° 49 rectifié, MM. Gouteyron et Laffitte, au nom de la commission des affaires culturelles, proposent d'insérer, avant l'article 42 A, un article additionnel ainsi rédigé :
« Il est inséré après l'article 25 de la loi n° 82-610 du 15 juillet 1982 d'orientation et de programmation pour la recherche et le développement technologique de la France deux articles nouveaux ainsi rédigés :
« Art. 25-1. - Les fonctionnaires civils des services publics définis à l'article 14 peuvent être autorisés à participer, en qualité d'associé d'administrateur ou de dirigeant, à la création d'une entreprise dont l'objet est d'assurer, en exécution d'un contrat conclu avec une personne publique, la valorisation des travaux de recherche qu'ils ont réalisés dans l'exercice de leurs fonctions.
« L'autorisation doit être demandée préalablement à la négociation du contrat prévu au premier alinéa et au plus tard trois mois avant l'immatriculation de l'entreprise au registre du commerce et des sociétés. Le fonctionnaire intéressé ne peut participer à l'élaboration ni à la passation du contrat pour le compte de la personne publique avec laquelle il est conclu.
« L'autorisation est accordée, après avis de la commission prévue par l'article 87 de la loi n° 93-122 du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques, pour une période d'un an renouvelable quatre fois.
« A compter de la date d'effet de l'autorisation, l'intéressé est soit détaché dans l'entreprise, soit mis à disposition de celle-ci ou d'un organisme qui concourt à la valorisation de la recherche. Il cesse toute activité au sein du service public de la recherche.
« Au terme de l'autorisation, le fonctionnaire peut :
« - être, à sa demande, placé en position de disponibilité ou radié des cadres s'il souhaite conserver des intérêts dans l'entreprise ;
« - être réintégré au sein de son corps d'origine. Dans ce cas, il cède ses droits sociaux et met fin à sa collaboration avec l'entreprise dans un délai de six mois. Il peut toutefois être autorisé à apporter son concours scientifique à l'entreprise et à conserver une participation dans le capital de celle-ci dans les conditions prévues à l'article 25-2.
« L'autorisation peut être retirée ou non renouvelée si les conditions qui ont permis sa délivrance ne sont plus remplies. Dans ce cas, le fonctionnaire ne peut poursuivre son activité dans l'entreprise que dans les conditions prévues à l'article 72 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat. S'il ne peut conserver d'intérêts dans l'entreprise, il dispose du délai prévu au septième alinéa pour y renoncer.
« Un décret en Conseil d'Etat définit les modalités d'application du présent article. Il précise les conditions d'octroi, de renouvellement et de retrait de l'autorisation, qui ne peut porter atteinte aux intérêts matériels et moraux du service public de la recherche. Il fixe également les conditions dans lesquelles la commission mentionnée au troisième alinéa est tenue informée, pendant la durée de l'autorisation et durant cinq ans à compter de son expiration ou de son retrait, des contrats et conventions conclus entre l'entreprise et le service public de la recherche.
« Art. 25-2. - Les fonctionnaires civils visés à l'article 25-1 peuvent être autorisés à apporter leur concours scientifique à une entreprise qui assure, en exécution d'un contrat conclu avec une personne publique, la valorisation des travaux de recherche qu'ils ont réalisés dans l'exercice de leurs fonctions.
« Les conditions dans lesquelles le fonctionnaire intéressé apporte son concours scientifique à l'entreprise sont définies par une convention conclue entre l'entreprise et la personne publique visées au premier alinéa. Elles doivent être compatibles avec le plein exercice par le fonctionnaire de son emploi public.
« Le fonctionnaire peut également être autorisé à prendre une participation dans le capital social de l'entreprise, dans la limite de 10 % de celui-ci. Lorsque plusieurs fonctionnaires relevant de la personne publique visée au premier alinéa apportent leur concours scientifique à l'entreprise, la totalité des participations qu'ils détiennent dans son capital ne peut excéder 30 % de celui-ci.
« Le fonctionnaire ne peut participer à l'élaboration ni à la passation des contrats et conventions conclus entre l'entreprise et le service public de la recherche. Il ne peut, au sein de l'entreprise, exercer des fonctions d'administrateur ou de dirigeant ni être placé dans une situation hiérarchique.
« L'autorisation est délivrée après avis de la commission mentionnée au troisième alinéa de l'article 25-1. Elle est retirée si les conditions qui avaient permis sa délivrance ne sont plus remplies ou si le fonctionnaire méconnaît les dispositions du présent article. En cas de retrait de l'autorisation, le fonctionnaire dispose d'un délai de six mois pour céder ses droits sociaux. Il ne peut poursuivre son activité au sein de l'entreprise que dans les conditions mentionnées à l'avant-dernier alinéa de l'article 25-1.
« Un décret en Conseil d'Etat définit les modalités d'application du présent article. Ce décret précise les conditions d'octroi et de retrait de l'autorisation, qui ne peut porter atteinte aux intérêts matériels et moraux du service public de la recherche. Il fixe les conditions dans lesquelles l'autorité dont relève le fonctionnaire est tenue informée des revenus qu'il perçoit à raison de sa participation au capital de l'entreprise, des cessions de titres auxquelles il procéde ainsi que des compléments de rémunération prévus, le cas échéant, par la convention visée au deuxième alinéa. Il détermine également les modalités selon lesquelles la commission mentionnée au troisième alinéa de l'article 25-1 est tenue informée des contrats et conventions conclus entre l'entreprise et le service public de la recherche. »
Cet amendement est affecté d'un sous-amendement n° 216, présenté par MM. Lesein et Joly, et tendant :
I. - Dans la première phrase du troisième alinéa du texte proposé par l'amendement n° 49 rectifié pour l'article 25-2 à insérer dans la loi n° 82-610 du 15 juillet 1982 d'orientation et de programmation pour la recherche et le développement technologique de la France, à remplacer le pourcentage : « 10 % », par le pourcentage : « 25 % ».
II. - A supprimer la seconde phrase du même alinéa.
La parole est à M. Laffitte, pour présenter l'amendement n° 49 rectifié.
M. Pierre Laffitte, au nom de la commission des affaires culturelles. Nombreux sont les membres du Sénat qui, depuis une quinzaine d'années, s'intéressent à la nouvelle donne que constituent le développement économique fondé sur l'innovation, la création d'entreprises par les chercheurs et le financement de ces entreprises.
C'est maintenant un sujet d'actualité, et je salue d'ailleurs les initiatives actuelles du Gouvernement, tout en regrettant que, depuis près de quinze ans, nombre de nos propres initiatives n'aient pu aboutir. Au fil des gouvernements successifs, les ministres chargés du budget ont souvent été réservés sur l'innovation et les risques que celle-ci impliquait. Quant aux ministres chargés de l'innovation, de la recherche ou de l'industrie, ils ont eu une action souvent peu précise en la matière.
Parmi les divers amendements que je présente successivement, celui-ci rejoint, sur bien des points, les conclusions du rapport Guillaume et des débats sur l'innovation qui se sont tenus dans les régions françaises et qui vont se poursuivre, mardi prochain, à La Villette.
La valorisation des résultats de la recherche et l'une des missions assignées par la loi aux organismes de recherche et aux établissements d'enseignement supérieur.
Dans la plupart des pays, cela se traduit, pratiquement, par la création d'entreprise de haute technologie par des personnels émanant des organismes de recherche.
Il convient d'ailleurs de souligner qu'en la matière la loi française est beaucoup moins favorable aux inventeurs et aux innovateurs que celles de nos concurrents. Ainsi, en Allemagne, la propriété industrielle revient totalement et exclusivement aux inventeurs, alors que, chez nous, ceux-ci doivent passer par le canal soit des organismes de recherche, soit des entreprises. Dans ce domaine aussi, il y aura donc des modifications à apporter.
En l'instant, ce qui est important, c'est la possibilité donnée à des fonctionnaires, dans un cadre assez strict, qui correspond d'ailleurs à ce qui avait été prévu dans le projet de loi portant diverses dispositions d'ordre économique et financier voté en 1997, de participer à la création d'entreprises. A cet effet, il convient de compléter la loi du 15 juillet 1982 par des articles nouveaux.
L'article 25-1 précise les conditions de la participation, en qualité d'associé, d'un fonctionnaire appartenant au service public de la recherche à la création d'une entreprise ayant pour objet la valorisation des travaux qu'il a effectués dans le cadre de ses fonctions.
L'article 25-2 ouvre la possibilité au fonctionnaire, en dehors du cas où il participe à la création d'une entreprise, d'apporter son concours scientifique à une telle entreprise, dès lors qu'il excède le champ des consultations et des expertises couvertes par le décret-loi du 29 octobre 1936.
J'ajoute que cela permettrait à nombre d'entreprises d'être créées dans le respect de la légalité la plus totale, ce qui, à l'heure actuelle, n'est vrai qu'à moitié. Quand les fonctionnaires ne vont pas carrément créer leur entreprise hors du territoire français, ce qui n'est pas ce qu'il y a de mieux pour le création d'emplois en France !
Enfin, cela correspond à un désir profond tant de l'ensemble de la communauté scientifique que, me semble-t-il, des ministères de la recherche et de l'industrie, ainsi que de leurs responsables respectifs, MM. Claude Allègre, et Dominique Strauss-Kahn.
M. le président. La parole est à M. Lesein, pour défendre le sous-amendement n° 216.
M. François Lesein. Nous souhaitons modifier le premier pourcentage dans le texte proposé pour l'article 25-2.
En effet, le taux de 10 % semble trop faible au regard de l'importance du concours scientifique dont l'entreprise peut parfois bénéficier.
Par ailleurs, limiter à 30 % la part du capital social que pourraient détenir les intéressés reviendrait indirectement à limiter le nombre de fonctionnaires désireux d'apporter leur concours, ce que nous ne souhaitons pas.
Enfin, dans les deux cas de figure, la fixation d'un plafond trop bas risquerait, nous semble-t-il, d'entraîner le recours à des prête-noms, ce qui n'est jamais souhaitable dans une telle opération.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement et sur le sous-amendement ?
M. Alain Lambert, rapporteur. La valorisation de la recherche est l'une des conditions de l'amélioration de la compétitivité de nos entreprises. Cet amendement y participe en mettant en place un dispositif équilibré, respectueux des règles déontologiques qui sont applicables dans la fonction publique et qui s'inspirent, d'ailleurs, de la proposition de loi déjà déposée sur ce sujet, par notre excellent collègue, M. Laffitte.
Pour toutes ces raisons, la commission a émis un avis favorable sur l'amendement.
S'agissant du sous-amendement n° 216, la commission n'a pas pu statuer. Cela étant, je suis à peu près convaincu qu'elle n'aurait pas émis un avis favorable, estimant sans doute que le pourcentage proposé était trop élevé.
J'ajoute que le pourcentage de 10 % est celui qui figurait dans le projet de loi portant diverses dispositions d'ordre économique et financier de l'an dernier.
J'invite donc le Sénat, dans sa sagesse, à repousser le sous-amendement, à moins, bien sûr, que son auteur ne le retire.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. S'agissant de l'amendement, que M. Laffitte a présenté avec sa grande connaissance du sujet, l'objectif est évidemment louable puisqu'il s'agit de renforcer l'innovation dans notre économie, de renforcer les transferts de connaissances et de créativité du secteur public de la recherche vers le monde de la production.
Le rapport confié par le Gouvernement à M. Henri Guillaume a montré qu'il existe un décalage trop important entre le niveau de notre potentiel scientifique, d'une part, et sa traduction en termes d'industrie, d'économie et d'emploi, d'autre part.
C'est pourquoi, pour atteindre l'objectif qui nous est commun, M. le Premier ministre a décidé d'engager une action ambitieuse destinée à améliorer la coopération entre le monde de la recherche et celui de l'entreprise, à favoriser la création et le développement d'entreprises innovantes et à accroître l'efficacité de l'action publique en ce domaine.
Le 12 mai prochain se tiendront les assises de l'innovation. Le Gouvernement annoncera, alors, des mesures fortes allant dans ce sens, et notamment en faveur de l'essaimage des chercheurs, qui est l'objet de l'amendement n° 49 rectifié.
D'ores et déjà, je peux dire que l'esprit des deux articles qui sont examinés aujourd'hui sera préservé, et même enrichi, dans un projet de loi que déposera le Gouvernement.
Je vous demande donc, monsieur Laffitte, parce que votre démarche s'inscrit dans le sens d'une initiative qui va se préciser la semaine prochaine, de bien vouloir retirer l'amendement.
Quant au sous-amendement, je souhaite qu'il connaisse le même sort que l'amendement. En effet, comme l'a dit M. le rapporteur, le seuil de 25 % est peut-être un peu risqué.
En fait, l'important, c'est que l'appel de MM. Laffitte et Lesein ait été entendu par le Gouvernement, comme ils le verront la semaine prochaine.
M. le président. Je vais mettre aux voix le sous-amendement n° 216.
M. François Lesein. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Lesein.
M. François Lesein. J'ai bien entendu les explications tant de M. le rapporteur que de M. le secrétaire d'Etat. Ne voulant pas perturber les discussions et l'étude en cours de ce dossier, je retire volontiers le sous-amendement.
M. le président. Le sous-amendement n° 216 est retiré.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 49 rectifié.
M. Pierre Laffitte, au nom de la commission des affaires culturelles. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Laffitte.
M. Pierre Laffitte, au nom de la commission des affaires culturelles. Monsieur le secrétaire d'Etat, je suis au regret de vous dire que je ne retire pas l'amendement, étant entendu que je ne me formaliserai pas si, au cours de la navette ou en commission mixte paritaire, le Gouvernement en demande la suppression pour une raison de cohérence.
En effet, j'ai malheureusement l'impression que, sur ce thème, depuis plus de quinze ans - il en ira de même pour certains de mes amendements ultérieurs - nous sommes en train de faire du sur-place.
Je ne soupçonne pas le moins du monde le Gouvernement de vouloir faire, sur ce point, du sur-place, puisque j'ai salué son initiative consistant à faire des assises de la recherche dans les régions puis à Paris.
Je souhaite toutefois que le Sénat, qui avait participé, en 1997, à l'élaboration du projet de loi portant diverses dispositions d'ordre économique et financier - j'étais moi-même intervenu à plusieurs reprises auprès de M. d'Aubert et, auparavant, de M. Fillion - puisse tout de même, en l'occurrence, avoir la priorité.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 49 rectifié, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 5 rectifié, M. Laffitte propose d'insérer, avant l'article 42 A, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 163 octodecies du code général des impôts est rétabli dans la rédaction suivante :
« Art. 163 octodecies. - Toute personne physique qui, soit directement, soit par l'intermédiaire d'un groupement d'intérêt économique ou d'un fonds spécifique agréé, procède à l'acquisition de parts sociales d'une société ayant pour objet la valorisation de recherches ou le développement de produits, procédés ou services innovants, peut déduire de son revenu imposable, à concurrence de 20 %, le montant des acquisitions effectivement réalisées, dans la limite de 200 000 francs par an pour une personne célibataire, veuve ou divorcée et de 400 000 francs par an s'il s'agit d'un couple marié.
« Le bénéfice de cette déductibilité d'impôt est subordonné à la double condition que cette acquisition soit réalisée en vue de la constitution de la société et que soit joint à la déclaration des revenus un titre de participation signé par le ou les bénéficiaires, justifiant de la réalité de l'acquisition des parts sociales et contresigné par le directeur régional de l'Agence nationale pour la valorisation de la recherche et le directeur régional de l'industrie et de la recherche.
« En cas de cession de tout ou partie des parts sociales dans les cinq ans de leur acquisition, le montant des sommes déduites est ajouté au revenu net global de l'année de la cession.
« Un décret pris en Conseil d'Etat fixe les modalités d'application du présent article, notamment les obligations déclaratives. »
« II. - La perte de ressources résultant du I ci-dessus est compensée par le relèvement à due concurrence des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Laffitte.
M. Pierre Laffitte. Cet amendement vise à permettre à la France de se doter d'un système d'incitation pour que les particuliers, de même qu'ils investissent dans des sociétés financières de création audiovisuelle, puissent investir dans des entreprises innovantes.
Cette disposition, que je me contente de reprendre, a déjà été présentée au Sénat, notamment, avec beaucoup de chaleur, par le président de la commission des affaires culturelles de l'époque, Maurice Schumann ; elle a même été adoptée à plusieurs reprises. Une proposition de loi allant en ce sens avait également été présentée.
Il s'agit, en réalité, de faire en sorte que l'innovation technologique, qui est aujourd'hui le fer de lance de la dynamique, puisse bénéficier de l'apport par une personne physique à la fois d'un capital de proximité, mais aussi, outre cet aspect financier, d'une contribution personnelle à la gestion et au développement de l'entreprise. Aux Etats-Unis, ce type de financement, qui peut représenter 50 % du capital nécessaire, a permis la création d'entreprises nouvelles et un redéploiement considérable de l'industrie américaine, notamment en Californie. On appelle cela le business angels .
Un système similaire existait en Europe voilà un siècle, mais il s'est peu à peu érodé, notamment à cause d'une fiscalité devenue très lourde.
Une incitation fiscale de nature à relancer l'économie, à créer des richesses et des emplois non seulement directs mais surtout induits m'apparaît donc essentielle.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur. La philosophie de cet amendement est très sympathique, et la commission sait à quel point M. Laffitte fait progresser les esprits en ce domaine.
Toutefois, la déduction proposée est, d'abord, quelque peu redondante avec des dispositifs fiscaux déjà en vigueur, ensuite d'une application pratique peu aisée. En particulier, le pouvoir d'agrément, tel qu'il est conféré, sans aucun encadrement législatif, soulèverait des problèmes.
M. Laffitte pose opportunément la question ; je lui recommande, après avoir entendu l'avis du Gouvernement, de retirer son amendement. A défaut, l'avis de la commission serait défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je plaiderai dans le même sens que la commission auprès de M. Laffitte. L'intention est bonne, d'ailleurs des mesures individuelles vont déjà dans le sens souhaité par M. Laffitte : réduction d'impôt pour souscription au capital de sociétés non cotées ainsi qu'aux fonds communs de placement dans l'innovation, déduction des pertes en capital, sans oublier des dispositions importantes en faveur de l'innovation - bons de souscription, notamment - qui figurent dans la loi de finances de 1998.
Le Gouvernement éprouve une certaine réticence s'agissant d'investissement direct sans aucun garde-fou. Le recours à des professionnels lui paraît souhaitable pour obtenir un meilleur résultat.
L'intention, à l'évidence, est excellente, mais les modalités méritent d'être davantage approfondies. Je suggère donc à M. Laffitte de bien vouloir retirer son amendement.
M. le président. Monsieur Laffitte, votre amendement est-il maintenu ?
M. Pierre Laffitte. Compte tenu de l'avis défavorable et du Gouvernement et de la commission, je me demande si je ne devrais pas retirer cet amendement...
Je comprends mal la réticence de M. le secrétaire d'Etat vis-à-vis de l'investissement direct. Il est prouvé que seul l'investissement direct permet de lancer rapidement des sociétés d'innovation.
Je souhaite qu'à l'occasion des assises de l'innovation le problème des business angels, c'est-à-dire des personnes qui s'impliquent personnellement dans la dynamique d'une opération, soit examiné avec une grande attention.
Je prendrai simplement un exemple, celui de la société Réalise, récemment implantée à Sofia Antipolis par des personnes qui dépendent de l'INRA, l'Institut national de la recherche agronomique, d'une part, et de Canal Plus, d'autre part. Cette société, qui sera probablement à même de créer des centaines, voire des milliers d'emplois dans quelques années, a pu être lancée dans de bonnes conditions grâce à deux business angels, dont l'un est allemand et l'autre américain.
A l'évidence, si nous voulons que ce type d'initiative se développe sur notre territoire, il faut absolument trouver une formule de nature à encourager l'investissement direct des particuliers concernés et motivés par la création d'une entreprise innovante.
Cela étant, je retire mon amendement en espérant, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous voudrez bien examiner, lors des assises de l'innovation, la possibilité de reprendre une proposition comparable.
M. le président. L'amendement n° 5 rectifié est retiré.
Par amendement n° 54 rectifié, MM. Laffitte et Trégouët proposent d'insérer, avant l'article 42 A, un article additionnel ainsi rédigé :
« Au chapitre IV du livre 1er de la loi n° 66-537 du 24 juillet 1966 précitée, il est insérée une section IX bis ainsi rédigée :
« Section IX bis . Sociétés anonymes à partenariat évolutif.
« Art. 250-1. - La société anonyme à partenariat évolutif est une société anonyme qui facilite la valorisation des apports en industrie dans le cadre d'un pacte d'actionnaires.
« Ses titres ne peuvent être admis aux négociations sur un marché réglementé, sauf à provoquer la disparition de son caractère de partenariat évolutif.
« Les articles 70 à 72 de la présente loi, ainsi que les dispositions relatives aux sociétés anonymes lui sont applicables, s'il n'en est disposé autrement par la présente section.
« Art. 250-2. - Les apports en industrie, librement évalués par les groupes d'actionnaires comportent deux parts. La première concourt à la formation du capital social. La seconde donne lieu à l'attribution de titres d'apport ouvrant droit au partage des bénéfices et de l'actif net, répartis entre apporteurs en industrie dans le cadre d'un pacte d'actionnaires. Les droits de vote conférés aux titres d'apports sont proportionnels à leur valeur.
« Art. 250-3. - Parallèlement à l'établissement des statuts, les associés dressent un projet d'entreprise et un plan de valorisation des apports en industrie. L'objet de ces documents est de définir, au regard de l'adéquation des réalisations au projet d'entreprise, l'évolution des rapports entre actionnaires, lorsqu'il est procédé à une augmentation de capital avec apport financier et valorisation simultanée de l'apport en industrie.
« Art. 250-4. - Une assemblée générale extraordinaire dite de valorisation, constate, avant l'augmentation de capital, la conformité des résultats de la société au plan de valorisation. Elle élabore, dans le cas contraire, un nouveau plan de valorisation. »
La parole est à M. Laffitte.
M. Pierre Laffitte. Cet amendement correspond lui aussi à une proposition de loi déposée depuis plusieurs années, et visant à créer une société à partenariat évolutif.
Dans une telle société, un pacte d'actionnaires est passé entre l'apporteur de capitaux et l'apporteur d'idées, et une clause prévoit qu'il peut y avoir éventuellement une revalorisation de l'apport initial.
Un apport initial est évalué par des financiers à la valeur qu'ils considèrent la plus probable. Or l'apporteur d'idées peut avoir une opinion différente, et c'est fréquent. S'il s'avère que ce dernier a raison, je considère que l'on doit pouvoir réévaluer l'apport initial. Je vous renvoie à l'exemple de la société Réalise.
En l'état actuel du droit, le commisaire aux apports ne peut pas trouver de formules appropriées. Pourtant, une formule de ce genre inciterait les sociétés qui veulent se revaloriser à rester en France au lieu de s'expatrier aux Etats-Unis où la procédure est beaucoup plus facile.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur. La commission des finances a été fort impressionnée par la créativité de notre collègue M. Laffitte qui, dans un domaine extérieur aux nouvelles technologies, celui du droit, nous soumet une proposition tout à fait intéressante.
J'avoue que l'heure tardive a empêché la commission des finances d'apprécier toute la portée juridique de la proposition. Elle conçoit parfaitement que l'idée contenue dans l'amendement mérite d'être développée en séance publique.
Il serait néanmoins sage que M. Laffitte accepte de retirer son amendement et de suivre un cheminement plus naturel qui l'amènerait à être discuté devant la commission des lois à l'occasion d'un prochain texte.
La commission des finances suggère donc le retrait de cet amendement. A défaut, elle émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. M. Laffitte propose une vraie révolution puisque son amendement contredit la deuxième directive sur la société anonyme qui interdit de considérer un apport en industrie comme un élément de capital. Il contredit également le code civil. A défaut d'être intangibles, ces textes constituent quand même des monuments qu'il convient de manier avec une certaine prudence.
Le dispositif des plans d'options, de souscription ou d'achat d'actions que le Gouvernement a fait figurer dans le projet de loi pour 1998 n'atteint certes pas complètement l'objectif que vous poursuivez, monsieur le sénateur. Il n'en demeure pas moins qu'il va dans le sens que vous souhaitez sur un terrain sûr du point de vue juridique. C'est pourquoi il me semble, monsieur Laffitte, que vous pourriez retirer votre amendement.
M. le président. Monsieur Laffitte, votre amendement est-il maintenu ?
M. Pierre Laffitte. Devant les positions convergentes et nullement surprenantes de la commission et du Gouvernement, qu'il me soit simplement permis de souligner que nous entrons dans une nouvelle ère, où le code des sociétés et les structures correspondantes du code civil se devront d'évoluer. C'est dans cette optique que mon collègue Trégouët et moi-même avions décidé de déposer cet amendement, étant entendu que nous avons également déposé une proposition de loi dont la commission des lois du Sénat sera saisi.
Cela dit, je retire notre amendement.
M. le président. L'amendement n° 54 rectifié est retiré.
Je suis maintenant saisi de trois amendements.
Les amendements n°s 140 à 142 sont présentés par MM. Pluchet, Barraux, Bourdin, César, Émorine, François, Huchon, Mathieu et Pourchet.
L'amendement n° 140 vise à insérer, avant l'article 42 A un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le troisième alinéa du paragraphe I de l'article 72 D du code général des impôts est complété in fine par les mots suivants : "ou pour l'acquisition de parts sociales de sociétés coopératives agricoles reçues par les articles L. 521-1 à L. 526-2 du code rural."
« II. - Les pertes de recettes éventuelles résultant pour l'Etat de l'application du I sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
L'amendement n° 141 tend à insérer, avant l'article 42 A un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le 3 de l'article 158 du code général des impôts est complété par un 7° ainsi rédigé :
« 7° Revenus correspondants aux redistributions de dividendes d'actions émises en France ou de produits de parts de sociétés à responsabilité limitée soumises à l'impôt sur les sociétés qui sont reçus par les sociétés coopératives agricoles et leurs unions dans les conditions prévues à l'article L. 523-5-1 du code rural. Toutefois, cet abattement ne s'applique pas lorsque les redistributions sont encaissées par des associés qui détiennent, directement ou indirectement, plus de 35 % du capital de la société distributrice des dividences ou produits. »
« II. - Les dispositions du I s'appliquent à compter de l'imposition des revenus de 1999.
« III. - Les pertes de recettes éventuelles résultant pour l'Etat de l'application du I et du II sont compensées a due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Enfin, l'amendement n° 142 a pour objet d'insérer, avant l'article 42 A, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - A l'article 730 bis du code général des impôts, les mots : "groupements agricoles d'exploitation en commun et d'exploitations agricoles à responsabilité limitée mentionnées au 5° de l'article 8" sont remplacés par les mots : "sociétés civiles à objet agricole".
« II. - Les pertes de recettes éventuelles résultant pour l'Etat de l'application du I sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Bourdin, pour présenter l'amendement n° 140.
M. Joël Bourdin. Il s'agit d'étendre aux parts sociales de coopératives la déduction des sommes consacrées à l'acquisition et à la création d'immobilisations nécessaires à l'acquisition de stock ou de produits animaux.
Actuellement, l'article 72 D du code général des impôts permet aux exploitants agricoles de déduire de leur bénéfice, dans certaines limites, des sommes consacrées à l'acquisition et à la création d'immobilisations nécessaires à l'acquisition de stock ou de produits d'animaux. Il apparaît souhaitable que les investissements réalisés par tous les exploitants agricoles pour l'exercice de leur activité soient mis à parité, que ces investissements soient réalisés dans le cadre de l'exploitation ou collectivement par l'intermédiaire de coopératives.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur. Cette question est assez lancinante en effet. Elle a été posée plusieurs fois et sans doute faudra-t-il qu'il y soit répondu après une étude approfondie. Le temps qui a été imparti à la commission des finances pour le faire et à votre serviteur, pour être franc, ne leur a pas permis d'en achever l'examen.
Aussi demanderai-je à son auteur, M. Bourdin, de bien vouloir retirer cet amendement après qu'il nous l'a ainsi présenté. D'ailleurs, il aura un bon rendez-vous : la loi d'orientation agricole nous est annoncée et je suis convaincu qu'il prendra une part active à sa discussion. En sa qualité de rapporteur spécial de la commission des finances pour le budget de l'agriculture, il ne manquera sans doute pas de suivre ce débat avec attention.
Je lui propose donc, pour une bonne élaboration législative, de retirer son amendement et de le présenter à une autre occasion.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je partage l'avis de M. le rapporteur.
M. le président. Monsieur Bourdin, votre amendement est-il maintenu ?
M. Joël Bourdin. Je suis convaincu par M. le rapporteur, comme je l'avais d'ailleurs été en commission des finances. Nous aurons effectivement l'occasion, dans très peu de temps, de reprendre ce débat lors de la discussion du projet de loi d'orientation agricole.
Je vais plus loin, monsieur le président, et je retire non seulement l'amendement n° 140 mais également les amendements n°s 141 et 142, en espérant avoir été entendu.
M. Alain Lambert, rapporteur. Très bien !
M. le président. Les amendements n°s 140, 141 et 142 sont retirés.
Par amendement n° 182, MM. Massion, Régnault, Mme Bergé-Lavigne, MM. Angels, Charasse, Haut, Lise, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, avant l'article 42 A, un article additionnel rédigé comme suit :
« Dans le I de l'article 87 de la loi n° 96-314 du 12 avril 1996 portant diverses dispositions d'ordre économique et financier, après les mots : "en force de chose jugée", sont insérés les mots : "ainsi que les actions en justice engagées avant l'entrée en vigueur de la loi n° 96-314 du 12 avril 1996 por- tant diverses dispositions d'ordre économique et financier". »
La parole est à M. Massion.
M. Marc Massion. La loi n° 96-314 du 12 avril 1996 a validé le comportement de quelques établissements de crédit qui n'avaient pas respecté les dispositions de la loi Scrivener relatives aux modalités d'information des emprunteurs.
Or, certaines personnes, de condition généralement modeste, avaient pu engager une procédure pour faire valoir leurs droits, au demeurant reconnus dans deux affaires soumises à la Cour de cassation. Cependant, le législateur a cru devoir étendre la validation aux contentieux qui, à la date de publication de la loi, n'étaient pas encore allés jusqu'à leur terme.
Saisi par les sénateurs socialistes, le Conseil constitutionnel, justifiant sa décision par la nécessité de protéger la situation financière des établissements bancaires, a certes déclaré conforme à la Constitution les dispositions de l'article 87 de la loi du 12 avril 1996.
On relève cependant que la validation est contraire aux engagements internationaux de la France, notamment aux dispositions de la Convention européenne des droits de l'homme qui affirme le droit de tout citoyen à un procès équitable. Or le Conseil constitutionnel ne contrôle pas la conformité de la loi aux engagements internationaux de la France.
La correction ainsi apportée à la loi de validation de 1996 par cet amendement ne met nullement en péril la situation des établissements de crédit puisqu'elle est, par définition, limitée aux quelques personnes qui avaient engagé une action contentieuse au moment de la publication de cette loi.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur. Il ne paraît pas opportun à la commission de revenir sur cette question.
Chacun sait dans quelles conditions s'est opérée la validation de ces offres de prêts, qui étaient controversées : le Conseil constitutionnel a été saisi et il a validé le texte adopté par le Parlement.
La commission des finances ne peut donc qu'être défavorable à l'amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Cette précision, qui est certes bienvenue en équité, apparaît cependant bien tardive, puisqu'elle est apportée plus de deux ans après l'entrée en vigueur de la loi du 12 avril 1996.
De plus, elle comporte l'inconvénient de modifier une nouvelle fois des règles juridiques applicables aux emprunteurs en créant des régimes distincts selon la date d'ouverture et selon le degré d'avancement des actions contentieuses, ce qui risque de faire naître une inégalité entre les emprunteurs.
Le Gouvernement est donc quelque peu hésitant sur cet amendement, et il s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 182, repoussé par la commission et pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 183, MM. Massion, Régnault, Mme Bergé-Lavigne, MM. Angels, Charasse, Haut, Lise, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, avant l'article 42 A, un article additionnel rédigé comme suit :
« Dans le premier alinéa du 2° de l'article 83 du code général des impôts, après les mots : "et de prévoyance complémentaires" sont insérés les mots : "y compris au titre des contrats collectifs de retraite pour lesquels le bénéfice de la rente servie au salarié est subordonné à une condition d'ancienneté et de présence, lors de la liquidation de celle-ci, dans l'entreprise". »
La parole est à M. Massion.
M. Marc Massion. Notre groupe y présente cet amendement depuis plusieurs années. Il attache en effet la plus grande importance au toilettage de tous les dispositifs ouvrant des niches sociales, notamment en faveur des revenus très élevés.
Souhaiter, comme on nous l'a suggéré à plusieurs reprises, que cet amendement soit examiné lors de la discussion d'un projet de loi concernant l'épargne retraite n'est pas, à nos yeux, une réponse satisfaisante. Nous attendons donc des éclaircissements de la part du Gouvernement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur. Ce n'est le moment ni de fragiliser les régimes de retraite complémentaire, ni de faire perdre du temps au Sénat, je me bornerai donc à dire que la commission des finances est défavorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. L'avis du Gouvernement est simple. Il est identique à celui qu'il a déjà émis lors de la discussion du projet de loi de finances pour 1998.
Le régime fiscal des cotisations versées au régime de retraite à prestations définies, spécialement les régimes dits « chapeaux », relèvent non pas de la modification des textes existants, mais de leur interprétation.
Par ailleurs, le Gouvernement donnera prochainement son point de vue sur la loi du 25 mars 1997 relative au fonds de pension. Il soumettra alors aux parlementaires de véritables propositions qui consolident les régimes de répartition et qui apportent des possibilités complémentaires aux retraités.
Peut-être pourra-t-on discuter de votre amendement à cette occasion, monsieur Massion. Mais, pour l'heure, je souhaite son retrait.
M. le président. L'amendement n° 183 est-il maintenu, monsieur Massion ?
M. Marc Massion. Compte tenu des dernières indications de M. le secrétaire d'Etat, je retire cet amendement, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 183 est retiré.
Par amendement n° 184, présenté par MM. Massion, Régnault, Mme Bergé-Lavigne, MM. Angels, Charasse Haut, Lise, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, avant l'article 42 A, un article additionnel rédigé comme suit :
« Il est inséré dans le code des assurances, après l'article L. 132-7 un nouvel article ainsi rédigé :
« Art... - Par dérogation aux dispositions de l'article précédent, toute clause d'un contrat d'assurance de groupe à adhésion obligatoire qui écarte du bénéfice de l'assurance l'assuré qui se suicide est nulle et de nul effet. »
La parole est à M. Massion.
M. Marc Massion. L'article L. 132-7 du code des assurances déclare nulle l'assurance en cas de décès si l'assuré se donne volontairement et consciemment la mort au cours des deux premières années du contrat.
Par cet amendement, il est proposé de déroger aux dispositions de cet article pour les assurés qui bénéficient d'une couverture décès à adhésion obligatoire mise en place par un employeur au profit de tout ou partie de ses salariés, lesquels, en ce cas, ne peuvent exercer aucun choix individuel.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur. Une telle clause, qui est légitime dans un contrat individuel, perd de sa pertinence dans un contrat de groupe à adhésion obligatoire. C'est ce qui a conduit la commission des finances à s'en remettre, sans grand enthousiasme d'ailleurs, à la sagesse du Sénat.
Mais peut-être le Gouvernement incitera-t-il notre collègue - ce serait le mieux - à retirer son amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Sur cette question, qui est douloureuse pour de nombreuses familles, M. Dominique Strauss-Kahn s'est engagé, en première lecture devant l'Assemblée nationale, à revoir la législation relative à l'exclusion du suicide des contrats d'assurance décès, afin de répondre aux préoccupations que vous avez exprimées et qui reflètent la détresse de certaines familles.
Des contacts ont été pris avec les assureurs et l'on peut envisager une telle modification du code des assurances en deuxième lecture.
Puisque votre appel a été entendu, monsieur Massion, je vous suggère de retirer votre amendement.
M. le président. Monsieur Massion, votre amendement est-il maintenu ?
M. Marc Massion. Je réponds à la sollicitation de M. le secrétaire d'Etat et, compte tenu de ses explications, je retire l'amendement.
M. le président. L'amendement n° 184 est retiré.
Par amendement n° 185, MM. Massion et Régnault, Mme Bergé-Lavigne, MM. Angels, Charasse, Haut, Lise, Miquel, Moreigne, Sergent, les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, avant l'article 42 A, un article additionnel rédigé comme suit :
« I. - Il est inséré dans le code des assurances, après l'article L. 322-2-3, un nouvel article ainsi rédigé :
« Art... - A la clôture de chaque exercice, le conseil d'administration ou le directoire établit un rapport de solvabilité écrit. Ce rapport expose les conditions dans lesquelles l'entreprise garantit, par la constitution des provisions techniques suffisantes dont les modalités de calcul et les hypothèses retenues sont explicitées et justifiées, les engagements qu'elle prend à l'égard des assurés, rappelle les orientations définies en matière de placements, présente et analyse les résultats obtenus et indique si la marge de solvabilité est constituée conformément à la réglementation applicable. Le rapport de solvabilité contient obligatoirement une analyse des conditions dans lesquelles l'entreprise est en mesure, à moyen et long terme, de faire face à l'ensemble de ses engagements.
« Les dispositions de la loi n° 66-537 du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales relatives au rapport de gestion mentionné à l'article 340 de ladite loi sont applicables au rapport de solvabilité. »
« II. - Il est inséré dans le code de la sécurité sociale, après l'article L. 931-13, un nouvel article ainsi rédigé :
« Art... - Les dispositions de l'article L. 322-2-4 du code des assurances sont applicables aux institutions de prévoyance. »
La parole est à M. Massion.
M. Marc Massion. Actuellement, les entreprises d'assurance sont soumises, en ce qui concerne le contrôle interne de leurs opérations, aux dispositions de droit commun applicables aux sociétés commerciales en vertu de la loi de 1966. Il n'est en aucune manière tenu compte des particularités de leurs activités, qui reposent sur une inversion du cycle de production. Quelques exemples récents ont montré que la solvabilité des entreprises d'assurance pouvait, immédiatement ou à plus long terme, être gravement altérée et conduire à une mise en cause grave des droits de leurs assurés.
L'une des réponses à ce problème consiste à assurer un contrôle permanent d'une activité préalable et relativement réglementée. C'est, bien évidemment, la mission principale dévolue à la commission de contrôle des assurances. Rien ne justifie, cependant, que l'on se prive du moyen de renforcer les contrôles internes que peuvent mettre en oeuvre par elles-mêmes les entreprises d'assurance.
Au demeurant, les directives « assurance » exigent que de telles procédures soient prévues dans la réglementation des différents Etats membres.
Dans ces conditions, il est nécessaire que, parallèlement au rapport de gestion établi par le conseil d'administration et examiné par le ou les commissaires aux comptes de l'entreprise, soit établi un rapport de solvabilité qui analyse en profondeur la situation de l'entreprise d'assurance au regard de sa solvabilité.
Je pense, monsieur le secrétaire d'Etat, que cet amendement peut utilement contribuer à compléter le dispositif du fonds de garantie auquel travaille actuellement le Gouvernement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur. Favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Comme l'a dit M. Massion, le Gouvernement travaille. D'ici à l'été, nous devrions avoir obtenu des résultats s'agissant de l'amélioration de l'information que les entreprises d'assurance doivent produire afin de renforcer la transparence vis-à-vis des assurés.
Je m'en remets donc sur ce point à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 185, accepté par la commission et pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant l'article 42 A.
Par amendement n° 186, MM. Massion, Régnault, Mme Bergé-Lavigne, MM. Angels, Charasse, Haut, Lise, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, avant l'article 42 A, un article additionnel rédigé comme suit :
« L'article 15 de la loi n° 89-1009 du 31 décembre 1989 renforçant les garanties offertes aux personnes assurées contre certains risques est complété par la phrase suivante :
« Ce rapport présente en termes clairs et précis la méthodologie et les bases techniques de chacune des catégories de provisions constituées par l'organisme assureur et comporte la justification de leur caractère prudent. »
La parole est à M. Massion.
M. Marc Massion. La loi Evin du 31 décembre 1989 a obligé les différents organismes assureurs à remettre chaque année un rapport annuel sur les comptes du contrat souscrit par l'entreprise souscriptrice d'un contrat de prévoyance complémentaire.
Ces dispositions portent essentiellement sur les résultats annuels des opérations et fournissent à l'entreprise un certain nombre d'informations sur les cotisations encaissées, les prestations versées, le nombre de salariés couverts, etc.
L'entrée en vigueur des troisièmes directives relatives à l'assurance conduit à procéder à une mise à jour de ce texte afin d'y inclure quelques informations sur les provisions constituées par l'organisme assureur afin de couvrir les engagements qu'il a pris vis-à-vis de l'entreprise et des assurés. L'article 18 de la directive n° 92-96 du 10 novembre 1992 prévoit, en effet, que l'organisme assureur doit fournir les bases et les méthodes utilisées pour l'évaluation des provisions constituées. Le présent amendement vise à mettre à jour la loi Evin sur ce point.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur. Favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 186, accepté par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant l'article 42 A.
Par amendement n° 187, MM. Massion, Régnault, Mme Bergé-Lavigne, MM. Angels, Charasse, Haut, Lise, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, avant l'article 42 A, un article additionnel rédigé comme suit :
« I. - Il est ajouté après l'article 15 de la loi n° 89-1009 du 31 décembre 1989 renforçant les garanties offertes aux personnes assurées contre certains risques un nouvel article ainsi rédigé :
« Art... - Pour les opérations collectives, les contrats ou conventions relatifs à la mise en oeuvre des garanties mentionnées à l'article L. 911-2 du code de la sécurité sociale comportent obligatoirement une clause définissant les modalités et délais selon lesquels l'organisme assureur peut, en cas de résiliation du contrat ou de la convention, transférer vers un autre organisme assureur agréé pour pratiquer les mêmes opérations, l'intégralité des provisions techniques et réserves garantissant les engagements pris à l'égard des assurés ».
« II. - Les contrats ou conventions souscrits antérieurement à la date de publication de la présente loi devront, s'il y a lieu, être rendus conformes aux dispositions de l'article 15-2 de la loi n° 89-1009 du 31 décembre 1989 précitée, avant le 31 décembre 1998. »
La parole est à M. Massion.
M. Marc Massion. En cas de changement d'organisme assureur, les prestations dont le service doit être poursuivi - indemnités journalières complémentaires, rentes d'invalidité, rentes de conjoint survivant, pensions de retraite supplémentaire - sont, au choix de l'entreprise, versées soit par l'organisme assureur quitté, soit par le nouvel organisme assureur, soit par les deux organismes assureurs - prestations au niveau qu'elles avaient atteint à la date de résiliation par l'organisme assureur quitté et revalorisations futures par le nouvel organisme assureur.
Le transfert des provisions, lorsqu'il est prévu, se heurte au principe selon lequel on ne peut imposer à un créancier un autre débiteur que celui qu'il a choisi en vertu de l'article 1275 du code civil. Il est donc nécessaire que cette possibilité de transfert des provisions garantissant les engagements pris vis-à-vis des assurés soit rendue possible dès lors que les parties contactantes - c'est-à-dire l'entreprise et l'organisme assureur - l'ont prévue lors de la souscription du contrat.
Les contrats ou conventions existants devront, si nécessaire, être rendus conformes à ces dispositions avant le 31 décembre 1998.
Il s'agit, par cet amendement, de conforter les garanties dont les assurés sont en droit de bénéficier.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement émet, lui aussi, un avis défavorable, parce que le dépôt de cet amendement lui semble être quelque peu hâtif.
Il faudrait qu'une étude soit menée par le ministère chargé des affaires sociales, par la Chancellerie, ainsi que par le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie.
Nous allons procéder à cette étude. Votre appel est donc entendu, monsieur Massion, et je vous prie de retirer votre amendement.
M. le président. L'amendement n° 187 est-il maintenu ?
M. Marc Massion. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 187 est retiré.

Articles 42 A et 42