Séance du 8 juillet 1998







M. le président. « Art. 79 bis. - I. - Le Conseil de l'emploi, des revenus et de la cohésion sociale est chargé de contribuer à la connaissance des revenus, des inégalités sociales et des liens entre l'emploi, les revenus et la cohésion sociale.
« Il se substitue au Conseil supérieur de l'emploi, des revenus et des coûts institué par l'article 78 de la loi n° 93-1313 du 20 décembre 1993 quinquennale relative au travail, à l'emploi et à la formation professionnelle.
« II. - Un décret en Conseil d'Etat détermine les modalités d'organisation et de fonctionnement du conseil institué au I.
« III. - L'article 78 de la loi n° 93-1313 du 20 décembre 1993 précitée est abrogé à la date de publication du décret mentionné au II. »
Par amendement n° 42, M. Seillier, au nom de la commission, propose de supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier, rapporteur. La commission propose de supprimer l'article 79 bis, qui crée un Conseil de l'emploi, des revenus et de la cohésion sociale.
M. Le Garrec a indiqué en séance publique à l'Assemblée nationale qu'il s'agissait de rétablir le Centre d'étude des revenus et des coûts, qui avait été supprimé par la loi quinquennale du 20 décembre 1993.
Ce nouvel article 79 bis est sans relation directe avec aucune des dispositions du projet de loi et il est donc susceptible d'être frappé par la nouvelle jurisprudence du Conseil constitutionnel qui proscrit le dépôt de ce type d'amendement en nouvelle lecture après une commission mixte paritaire.
Le nouveau CERC - qui, au demeurant, n'a pas vocation à traiter uniquement de la cohésion sociale - risque donc d'être annulé par le Conseil constitutionnel.
Il importe donc tout particulièrement de valoriser l'Observatoire, prévu à l'article 80 ci-dessous. L'Assemblée nationale, du fait de la création du CERC, a fait passer le rattachement de cet Observatoire du niveau du Premier ministre à celui du ministère des affaires sociales. Si l'on suivait cette logique, on risquerait fort de se trouver avec une situation fâcheuse en l'absence d'organismes au niveau du Premier ministre.
C'est pourquoi votre commission vous propose de supprimer cet article 79 bis, qui n'a pas sa place dans le projet de loi, et de replacer l'Observatoire auprès du Premier ministre, comme cela est prévu à l'article 80.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Marylise Lebranchu, secrétaire d'Etat. Monsieur le rapporteur, vous ne serez pas étonné que le Gouvernement soit défavorable à votre amendement. En effet, le rétablissement du CERC correspond à l'une des propositions du rapport Join-Lambert.
Le CERC n'a pas été introduit dès l'origine dans le présent projet de loi, car le Gouvernement voulait soumettre cette proposition à la consultation des partenaires sociaux. C'est aujourd'hui chose faite. Ces derniers ont souhaité voir évoluer les missions du CERC dans le sens proposé aujourd'hui par le Gouvernement. C'est pourquoi ce dernier est tant attaché à cet article.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 42.
Mme Dinah Derycke. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Derycke.
Mme Dinah Derycke. Nous voterons contre cet amendement.
Dans le passé, avant sa suppression par la loi quinquennale de 1993, le CERC a largement contribué à la connaissance de la progression des inégalités dans notre pays.
M. Balladur a voulu, en 1993, casser le thermomètre. Il n'est pas pour autant parvenu à endiguer la montée de l'exclusion ni même à en dissimuler la réalité, puisque nous sommes là aujourd'hui, et ce n'est pas la première fois, à en discuter.
Le CERC est un instrument précieux de mesure des conséquences des évolutions économiques que connaît notre pays sur sa réalité sociale. Nous ne devons pas, nous ne pouvons pas, dirais-je même, nous en priver.
J'ajoute que, de 1993 à 1998, nous avons bénéficié des travaux du CERC-Association, qui regroupe les chercheurs de l'ancien CERC. Ces travaux ont contribué de manière non négligeable à enrichir notre réflexion.
C'est un motif supplémentaire pour rendre à ces chercheurs une structure adaptée à la qualité de leurs recherches.
Tout à l'heure, dans la discussion générale, j'avais insisté aussi sur le fait que le titre et les missions mêmes de ce conseil prouvaient bien qu'il avait toute sa pertinence dans le projet de loi sur l'exclusion.
M. Jean-Pierre Fourcade, président de la commission. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean-Pierre Fourcade, président de la commission. On croirait, en écoutant les débats parlementaires et en voyant l'évolution de nos institutions, que nous avons tellement de mal à lutter contre le chômage ou l'exclusion que nous essayons de multiplier les organismes. Nous avons l'INSEE, le Conseil économique et social et une série d'institutions qui, en général, ne se réunissent pas.
Cette idée de rétablir le CERC au seul motif qu'il a été supprimé par la loi quinquennale de 1993 me paraît risible dans la situation actuelle.
C'est la raison pour laquelle je soutiens l'amendement de la commission et j'invite le Gouvernement à faire la liste de tous les organismes inutiles, qui sont innombrables, qui font des études, permettent de faire fonctionner un certain nombre de machines et publient des rapports...
M. Jean Delaneau. Il y a des économies à faire !
M. Jean-Pierre Fourcade, président de la commission. ... que personne ne lit. Par conséquent, cette solution est sage.
Il vaudrait mieux rendre au Conseil économique et social sa vraie vocation afin qu'il redevienne un endroit où les partenaires sociaux qui y siègent de manière organique peuvent commander un certain nombre d'études plutôt que de multiplier tous ces organismes croupions. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants, de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Mme Marylise Lebranchu, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Marylise Lebranchu, secrétaire d'Etat. Je me permets de prendre la parole après M. Fourcade pour lui rappeler que le CERC se substitue au Conseil supérieur de l'emploi, des revenus et des coûts, institué par l'article 78 de la loi du 20 décembre 1993. Nous n'avons donc rien supprimé ; nous n'avons pas non plus chargé, monsieur le président de la commission !
M. Jean-Pierre Fourcade, président de la commission. Mais, moi, je suis partisan de supprimer les deux !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 42, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 79 bis est supprimé.

Article 80