Séance du 17 novembre 1998







M. le président. « Art. 24. - I. - L'article L. 162-16-1 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :
« Art. L. 162-16-1 . - Le prix de vente au public de chacun des médicaments mentionnés au premier alinéa de l'article L. 162-17 est fixé par convention entre l'entreprise exploitant le médicament et le Comité économique du médicament conformément à l'article L. 162-17-4 ou, à défaut, par arrêté des ministres chargés de la sécurité sociale, de la santé et de l'économie, après avis du comité. La fixation de ce prix tient compte principalement de l'amélioration du service médical rendu apportée par le médicament, des prix des médicaments à même visée thérapeutique, des volumes de vente prévus ou constatés ainsi que des conditions prévisibles et réelles d'utilisation du médicament.
« Ce prix comprend les marges prévues par l'arrêté interministériel mentionné à l'article L. 162-38 ainsi que les taxes en vigueur.
« Un décret en Conseil d'Etat détermine les conditions d'application du présent article, et notamment les procédures et délais de fixation des prix.
« Sont constatées et poursuivies dans les conditions fixées par le titre VI de l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence, les infractions aux conventions et arrêtés mentionnés ci dessus. »
« II. - L'article L. 162-17-4 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :
« Art. L. 162-17-4 . - En application des orientations qu'il reçoit annuellement des ministres compétents, le Comité économique du médicament peut conclure avec des entreprises ou groupes d'entreprises des conventions d'une durée maximum de quatre années relatives à un ou à des médicaments visés au premier alinéa de l'article L. 162-17. Ces conventions déterminent les relations entre le comité et chaque entreprise, et notamment :
« 1° Le prix de ces médicaments et, le cas échéant, l'évolution de ces prix, notamment en fonction des volumes de vente ;
« 2° Le cas échéant, les remises prévues en application de l'article L. 162-18 ;
« 3° Les engagements de l'entreprise visant à la maîtrise de sa politique de promotion permettant d'assurer le bon usage du médicament ainsi que le respect des volumes de vente précités.
« Le Comité économique du médicament assure un suivi périodique des dépenses de médicaments visés au premier alinéa de l'article L. 162-17 en vue de constater l'évolution de ces dépenses par rapport à l'objectif national de dépenses d'assurance maladie mentionné à l'article L.O. 111-3.
« Ce suivi comporte au moins deux constats à l'issue des quatre et huit premiers mois de l'année.
« Lorsque, à l'occasion de ce suivi, le comité constate que l'évolution des dépenses de médicaments n'est pas compatible avec le respect de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie, il détermine les mesures de nature à permettre de le respecter. Dans ce cas, le Comité économique du médicament peut demander la modification des prix des médicaments fixés par convention ; en cas de refus de l'entreprise concernée de conclure un avenant permettant de rendre la convention compatible avec le respect de l'objectif précité, le comité peut résilier la convention.
« Lorsqu'une mesure d'interdiction de publicité à été prononcée par l'Agence du médicament dans les conditions prévues par l'article L. 551-6 du code de la santé publique et les textes pris pour son application, le Comité économique du médicament peut demander, par avenant, la modification des prix des spécialités faisant l'objet de la publicité interdite. Si, pour quelque cause que ce soit, un tel avenant n'a pas été conclu dans le délai d'un mois suivant la publication de l'interdiction au Journal officiel, ces prix sont fixés par arrêté des ministres chargés de la sécurité sociale, de la santé et de l'économie. La modification des prix ainsi décidée ne peut entraîner une dépense supplémentaire pour l'assurance maladie.
« Lorsque la mesure d'interdiction mentionnée à l'alinéa précédent porte sur une spécialité dont le prix n'est pas fixé par une convention passée avec le Comité économique du médicament, le comité propose à l'entreprise qui exploite cette spécialité d'en fixer le prix par une convention spéciale. A défaut de conclusion d'une telle convention dans le mois suivant la publication de l'interdiction au Journal officiel, le prix est fixé par arrêté des ministres visés à l'alinéa précédent. La modification du prix ainsi décidée ne peut entraîner une dépense supplémentaire pour l'assurance maladie.
« Les modalités d'application du présent article, et notamment les conditions de révision et de résiliation des conventions, sont définies par décret en Conseil d'Etat. »
Par amendement n° 24, M. Descours, au nom de la commission des affaires sociales, propose, après le quatrième alinéa (3°) du texte présenté par le II de cet article pour l'article L. 162-17-4 du code de la sécurité sociale, d'insérer un alinéa ainsi rédigé :
« 4° Les sanctions conventionnelles applicables en cas de non-respect des engagements mentionnés au 3°. »
La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours, rapporteur de la commission des affaires sociales, pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, nous allons témoigner au début de cette matinée de notre attachement à la politique conventionnelle relative au médicament. Pour que cette politique soit crédible, il importe qu'interviennent des santions conventionnelles lorsque les engagements mentionnés dans la convention ne sont pas respectés.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat à la santé. Monsieur le rapporteur, le Gouvernement est favorable à cet amendement et note que vous appuyez la politique conventionnelle, y compris les sanctions.
La maîtrise des dépenses de promotion est un axe majeur de la politique du Gouvernement relative au médicament.
Plus de 11 milliards de francs sont consacrés à la pression publicitaire, qui continue d'augmenter, à raison de 2,8 % en 1997. C'est trente fois plus que le budget consacré par les pouvoirs publics et par les professionnels à la formation médicale continue.
Je partage donc le souci qui inspire la proposition de la commission. Il me paraît en effet légitime que le non-respect éventuel des engagements collectifs relatifs aux dépenses de promotion ne reste pas sans conséquence.
M. Charles Descours, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours, rapporteur. Je me réjouis que le Gouvernement défende la politique conventionnelle. J'espère qu'il continuera à le faire jusqu'au terme de l'examen de nos amendements. (Sourires.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 24, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 25, M. Descours, au nom de la commission des affaires sociales, propose de remplacer les cinquième, sixième et septième alinéas du texte présenté par le II de l'article 24 pour l'article L. 162-17-4 du code de la sécurité sociale par deux alinéas ainsi rédigés :
« Chaque année, les ministres chargés de la sécurité sociale et du budget déterminent, par arrêté dans les quinze jours suivant la publication de la loi de financement de la sécurité sociale, l'objectif national d'évolution des dépenses pharmaceutiques.
« Compte tenu de cet objectif et en vue de satisfaire sa réalisation, le Comité économique du médicament propose, le cas échéant, aux entreprises ayant conclu une convention de conclure un avenant annuel ajustant les dispositions qu'elle prévoit. En cas de refus de l'entreprise, le comité peut résilier la convention. »
La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours, rapporteur. Nous sommes quelque peu surpris parce que le texte du projet de loi prévoit que l'évolution globale des dépenses pharmaceutiques devra être inférieure ou égale à la progression de l'ONDAM - objectif national de dépenses d'assurance maladie - voté annuellement par le Parlement.
Cette conception méconnaît les intérêts de la santé des Français, notamment l'apparition éventuelle de médicaments nouveaux pour lutter contre les grands fléaux, en particulier le cancer. Cette conception méconnaît aussi l'esprit des ordonnances portant réforme de la sécurité sociale.
En effet, en instituant un objectif global d'évolution des dépenses d'assurance maladie, la réforme dite Juppé n'impliquait pas que les dépenses de chaque médecin, de chaque pharmacien, de chaque hôpital, de chaque clinique ou de chaque laboratoire progressent à un rythme uniforme. Hier soir, lors de l'examen de l'article 21 visant à instituer des sanctions, Mme Aubry a d'ailleurs longuement expliqué qu'il était hors de question que l'on personnalise l'évolution des dépenses de santé médecin par médecin. Par conséquent, je suis surpris que l'on n'agisse pas de même pour la pharmacie.
Je rappelle que la réforme avait pour objet d'encadrer une évolution globale, à charge pour les pouvoirs publics, les caisses et les professionnels de fixer, en fonction de critères de santé publique, des taux d'évolution spécifiques pour chaque secteur. C'est d'ailleurs ce qui se fait, puisque l'on distingue les hôpitaux et la médecine ambulatoire. Hier, Mme Aubry a dit qu'elle n'était pas hostile à fixer un ONDAM par spécialité.
Il est donc anormal de supprimer toute évaluation annuelle des besoins de la population dans le seul domaine pharmaceutique et de décréter par avance que l'objectif des dépenses de médicaments devra être inférieur ou égal à l'ONDAM.
La commission propose que, comme pour les autres postes et à la suite des discussions que nous avons eues hier soir, un objectif de dépenses soit fixé par le Gouvernement en fonction de l'ONDAM. En effet, si l'objectif était inférieur ou égal à l'ONDAM, cela constituerait une discrimination pour l'industrie pharmaceutique, dont on ne voit pas bien la justification.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement n'est pas favorable à la détermination d'un objectif spécifique aux dépenses de médicaments. Cela impliquerait de revoir toute l'architecture des objectifs au sein de l'ONDAM, puisque les dépenses de médicaments sont incluses dans l'objectif des dépenses de soins de ville ainsi que dans la dotation globale hospitalière pour les médicaments consommés à l'hôpital.
Il me paraît, au contraire, opportun de conserver des marges de fongibilité à l'intérieur de l'objectif des soins de ville, notamment pour conserver son rôle et sa portée actuelle à la négociation conventionnelle, à laquelle vous venez de faire allusion, monsieur le rapporteur, entre les médecins libéraux et la CNAMTS, la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés, négociation qui, je le rappelle, porte à la fois sur les honoraires et sur les prescriptions, en évitant qu'un élément important de cette négociation soit ainsi imposé de l'extérieur aux parties à la convention.
J'ajoute que la définition d'un objectif spécifique opposable à l'industrie pharmaceutique pourrait conduire à déresponsabiliser les médecins sur la maîtrise de leurs prescriptions, alors qu'ils sont en première ligne.
A cette occasion, je souhaite préciser que la régulation des dépenses de médicaments par rapport à l'ONDAM est tout à fait compatible avec le financement de l'innovation à laquelle je suis très attaché, car des économies importantes - là est peut-être l'essentiel de mon propos - sont possibles. C'est l'objet même de notre politique. Nous voulons diminuer les volumes de ventes, en particulier dans les classes pour lesquelles l'Observatoire national des prescriptions a mis en évidence une surconsommation en France, nuisible pour la santé publique. Le développement des génériques est également susceptible de nous faire économiser chaque année 4 milliards de francs, peut-être plus si nous nous y prenons bien.
Enfin, la réévaluation des conditions de prise en charge des classes médicamenteuses en fonction du service médical rendu constitue le troisième volet des mesures structurelles que nous avons mis en place. Pour les seules classes des vasodilatateurs et des veinotoniques, qui représentent des dépenses supérieures à celles qui sont consacrées à l'asthme et au diabète réunis, plusieurs milliards de francs d'économies sont possibles là encore.
Vous souhaitez revenir sur les dipositions que nous avons voulu introduire pour permettre à la négociation conventionnelle de participer au mécanisme de redressement en cas de dérapage de ces dépenses médicamenteuses. Cela ne me paraît pas cohérent de votre part. Vous ne pouvez nous accuser de tuer la politique conventionnelle et, dans le même temps, supprimer les outils nécessaires à sa crédibilité, en particulier la pression sur les dépenses médicamenteuses, sauf si vous ne croyez pas à la nécessité de faire participer l'industrie à la régulation des dépenses, mais je sais que telle n'est pas votre pensée.
Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 25, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 24, modifié.

(L'article 24 est adopté.)

Article 25