Séance du 24 novembre 1998







M. le président. Par amendement n° I-62, MM. Hérisson, Laffitte, Gérard Larcher et Trucy proposent d'insérer après l'article 29, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - A compter du 1er janvier 1999, France Télécom est assujettie dans les conditions de droit commun aux impositions directes locales perçues au profit des collectivités locales, des établissements et organismes divers.
« II. - Les pertes de recettes sont compensées à due concurrence par un relèvement des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Hérisson.
M. Pierre Hérisson. Tous les élus locaux demandent depuis plusieurs années que France Télécom soit assujettie au droit commun de la fiscalité directe locale.
Le régime dérogatoire dont bénéficie cette entreprise à l'égard de la taxe professionnelle et des taxes foncières n'a plus aujourd'hui sa justification. En effet, pendant de nombreuses années, son statut d'entreprise publique notamment, à permis de faire valoir son particularisme.
Aujourd'hui, il s'agit d'une société anonyme de droit commun en concurrence, depuis la loi de 1996, avec d'autres entreprises de droit commun. Il y a d'ailleurs une sorte de distorsion de concurrence avec les autres entreprises qui, elles, s'acquittent normalement de la taxe professionnelle dans les communes d'implantation ou sur le territoire de certaines communautés de communes à fiscalité propre.
Bien sûr, nous proposons de compenser le manque à gagner pour l'Etat par un relèvement de la taxe visée aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Je demande donc au Sénat de bien vouloir prendre en considération cet amendement, que j'ai eu l'honneur de présenter, mais qui est cosigné par MM. Laffitte, Gérard Larcher et Trucy.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Comme l'ont souligné les auteurs de l'amendement, il importe de traiter ce problème de la taxe professionnelle de France Télécom ; on ne peut laisser les choses en l'état. D'ailleurs l'entreprise elle-même, le redevable, demande une évolution de son régime fiscal. (M. le secrétaire d'Etat marque son étonnement.)
Oui, monsieur le secrétaire d'Etat, j'ai eu l'occasion d'auditionner, en tant que rapporteur d'une proposition de loi sur ce sujet, les représentants de la direction de France Télécom, et c'est bien ce qu'ils m'ont dit.
Lors du comité des finances locales du 17 novembre dernier, un représentant du Gouvernement a tenu des propos laissant entendre que le statu quo pourrait évoluer d'ici peu. Cela non plus, je ne l'ai pas inventé !
Mais faut-il passer immédiatement au droit commun ? Faut-il mettre en place un régime transitoire en attendant que, grâce au développement de l'intercommunalité, l'ensemble des communes bénéficient d'implantations de France Télécom sur le territoire du groupement auquel elles appartiennent ? Ce sont des questions, parmi d'autres, que nous incite à poser le dépôt de cet amendement.
Nos collègues ont raison de s'adresser au Gouvernement au travers de cet amendement d'appel. Ils sont toutefois bien conscients que celui-ci ne peut pas être adopté dans la première partie du projet de loi de finances puisque son coût est de l'ordre de 5 milliards de francs. Nous sortirions des limites de l'épure.
Je leur propose donc que nous reprenions ce débat lors de l'examen de la seconde partie du projet de loi de finances et que le Sénat marque par un vote sur un texte sa volonté de progresser dans la solution de ce problème.
On ne peut pas laisser les choses en l'état ; le statu quo n'est plus supportable.
Nous aurons à examiner la proposition de loi cosignée par M. Delevoye et un grand nombre de nos collègues. Il appartient donc au Sénat de bien poser les termes de ce débat et de faire évoluer les choses en ce domaine.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. L'avis du Gouvernement est défavorable, et ce pour deux raisons.
En 1990, quand le statut de France Télécom a été modifié, il a été décidé que les taxes locales que devrait acquitter France Télécom iraient au budget de l'Etat. Il n'y a donc aucune distorsion de concurrence par rapport à d'autres sociétés puisque, de toute façon, les taxes sont versées - il est vrai, au budget de l'Etat - à la place de la contribution forfaitaire qui existait antérieurement.
La première raison de mon avis défavorable à l'amendement n° I-62 est donc son coût de 4,5 milliards de francs, de nature à remettre en cause l'équilibre du budget dont nous débattons.
La seconde raison de mon opposition tient au fait que l'Etat n'a pas tout gardé pour lui. Il a consacré une bonne partie du produit de ces taxes au financement de la dotation de compensation de la taxe professionnelle : France Télécom, par le truchement de l'Etat, alimente à hauteur de 1,7 milliard de francs le fonds précité.
Les établissements de France Télécom, loin d'être répartis de façon uniforme sur notre territoire, sont plutôt concentrés là où les usagers sont les plus nombreux, donc dans les grandes villes. Si on adoptait votre amendement, monsieur Hérisson, les grandes villes où sont implantées d'importantes structures de France Télécom profiteraient certes de ressources supplémentaires, mais au détriment des communes sensibles, des communes rurales, qui perdraient la contribution que leur verse, à hauteur de l'apport de France Télécom, le fonds national de péréquation.
Pour ces deux raisons, le Gouvernement ne peut accepter cet amendement.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° I-62.
M. Pierre Hérisson. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Hérisson.
M. Pierre Hérisson. J'ai bien noté la proposition de M. le rapporteur général mais, avant de lui répondre, je voudrais d'abord m'adresser à M. le secrétaire d'Etat.
Le premier argument qu'il a développé dans son exposé est un peu choquant pour un sénateur qui représente les collectivités locales...
M. Michel Mercier. La nation !
M. Pierre Hérisson. La nation, bien sûr, mais aussi les collectivités locales. Le Sénat n'est-il pas le Grand conseil des communes de France ?
Vous l'avez rappelé, monsieur le secrétaire d'Etat, c'est un accord entre l'Etat et France Télécom qui a décidé de l'affectation d'un impôt local. Cela mérite d'être souligné, car je ne suis pas sûr que ce soit un bon exemple en matière de décentralisation.
Votre second argument est fondé sur le fait que France Télécom abonde par le biais de l'Etat le fonds de compensation de la taxe professionnelle à hauteur de 1,7 milliard de francs.
Je vous rappelle que pour 1998 France Télécom devra s'acquitter de 5,6 milliards de francs de taxe professionnelle. Le différentiel est donc de plus de 3 milliards de francs.
En outre, depuis 1996, France Télécom est devenue une société anonyme de droit commun, évolution que vous n'avez pas relevée, d'ailleurs et qui est pourtant fondamentale.
Tous les arguments fondés sur l'affectation des fonds ne règlent en rien un problème de droit.
Il y a distorsion de concurrence en termes d'implantation sur le territoire dans la mesure où des sociétés autres que France Télécom qui s'installeront sur le territoire de certaines communes acquitteront une taxe professionnelle. Peu importe que ces communes se trouvent en milieu rural ou en milieu urbain. Le problème n'est pas là. Si France Télécom implante des établissements, par exemple pour développer son réseau hertzien, les communes rurales ou les petites communes seraient en droit de bénéficier d'un minimum de taxe professionnelle. Or ce n'est pas le cas.
M. Michel Sergent. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Sergent.
M. Michel Sergent. Une fois n'est pas coutume, je rejoindrai en partie M. le rapporteur général pour dire que la taxe professionnelle et la taxe foncière de France Télécom étant des impôts locaux, elles doivent revenir aux collectivités locales.
Maintenant, attribuer cette fiscalité selon les règles du droit commun entraînerait probablement de profondes inégalités de ressources entre collectivités, entre celles qui ont un établissement sur leur territoire - M. le secrétaire d'Etat l'a relevé - et celles qui n'en ont pas. Nous préférerions que les recettes de fiscalité locale de France Télécom servent à la péréquation.
De plus, dans la loi portant application du pacte de relance pour la ville, si les exonérations de taxe foncière et les exonérations de taxe professionnelle pour les créations d'activités sont à la charge de l'Etat, le gouvernement précédent s'est défaussé sur le fonds national de péréquation de la taxe professionnelle des exonérations de taxe professionnelle pour les entreprises existantes jusqu'à concurrence de l'excédent annuel de fiscalité de La Poste et de France Télécom. J'ajouterai que cette manne est encore utilisée pour compenser une partie du coût de la DCTP.
Pour ces deux raisons, il nous apparaît prématuré de remettre dans le droit commun dès le 1er janvier 1999 la fiscalité locale de France Télécom.
Mes chers collègues, il nous faut encore réfléchir sur cette question, avant d'en envisager toutes les conséquences, et peut-être la réexaminer en seconde partie du projet de loi. Aujourd'hui, le groupe socialiste ne votera pas cet amendement tel qu'il est rédigé d'autant que d'autres intervenants arrivent sur le marché, comme l'a indiqué le signataire de l'amendement. France Télécom est une entreprise de droit commun, mais il existe également d'autres entreprises. Il faut approfondir la réflexion avant de prendre une décision qui pourrait être intéressante pour les collectivités locales.
M. Jacques Oudin. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Oudin.
M. Jacques Oudin. Tout a été dit, et je voterai l'amendement n° I-62.
Premièrement, il n'est pas normal que des taxes locales soient versées à l'Etat. Par principe même, elles doivent revenir aux collectivités locales.
Deuxièmement, France Télécom est une entreprise de droit commun, donc soumise à la concurrence. Le secteur des télécommunications a été ouvert complètement à la concurrence et voilà une entreprise qui bénéficie d'un régime totalement dérogatoire !
Troisièmement, je ne suis pas certain qu'au regard des règles européennes nous soyons exactement dans l'orthodoxie.
Pour ces raisons, je rejoins parfaitement l'analyse de M. le rapporteur général et, en termes d'appel, je voterai cet amendement.
M. Paul Loridant. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Loridant.
M. Paul Loridant. Je veux d'abord apporter une rectification sur un point que personne n'a soulevé.
Certes, monsieur le secrétaire d'Etat, il existe un accord entre France Télécom et l'Etat, mais il résulte d'une loi. A cette époque, votre prédécesseur, à votre banc, s'appelait Michel Charasse, et j'étais intervenu pour m'opposer aux propositions qu'il présentait au nom du Gouvernement...
M. Michel Mercier. Il a beaucoup péché !
M. Paul Loridant. Monsieur le secrétaire d'Etat, je me permets de vous dire que vous défendez une thèse perdue, pour la simple et bonne raison qu'aujourd'hui, dans la mesure où France Télécom est une entreprise de droit commun, du fait de la dérégulation du marché des télécommunications - personnellement je m'y étais opposé - elle doit impérativement pour sa survie - j'insiste - être assujettie aux mêmes règles que les autres sociétés de son secteur.
Sinon, que se passera-t-il ? C'est très simple, monsieur le secrétaire d'Etat.
Je prends l'exemple d'une commune de la banlieue parisienne où se trouve une zone d'activité très pointue, disons la commune des Ulis. (Sourires.) Des entreprises de télécommunications, Bouygues ou SFR, veulent à tout prix desservir cette zone. Dès lors qu'il y a dérégulation, elles viendront s'y installer. Pour quels motifs le maire de la commune s'y opposerait-il dans la mesure où ces entreprises paieront une taxe professionnelle ? Dès lors qu'on est entré dans le jeu de la dérégulation et du tout marché, il faut aller jusqu'au bout de la logique !
Bien, évidemment Bouygues et SFR ont eu l'autorisation du conseil municipal unanime pour installer un réseau câblé desservant cette zone d'activité !
A nos amis de France Télécom qui souhaitaient eux aussi développer leurs structures, nous avons répondu qu'ils ne nous intéressaient pas, car ils ne payaient pas de taxe professionnelle à la commune !
Alors, monsieur le secrétaire d'Etat, je tiens à vous dire que la thèse que vous défendez est totalement perdue, dès lors que le Gouvernement et les pouvoirs publics ont décidé de déréguler le marché des télécommunications.
M. Michel Charasse. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Charasse.
M. Michel Charasse. Avec mes amis nous ne voterons pas l'amendement n° I-62.
Mais, puisque M. Loridant a amicalement rappelé le passé, je souhaite appeler l'attention du Sénat sur un point particulier d'histoire qui ne me paraît pas négligeable.
Lorsque le Parlement à voté la loi transformant le statut de France Télécom, en 1990, je crois,...
M. Michel Mercier. En 1995 !
M. Michel Charasse. A l'origine, c'était en 1990 !
M. Pierre Hérisson. En 1990 et en 1995 !
M. Michel Charasse. Je m'excuse, je suis concerné par ce qui s'est fait en 1990 !
M. Michel Mercier. M. Charasse n'a rien fait en 1996 !
M. Michel Charasse. ... je me suis trouvé dans la situation suivante - l'Etat et le Gouvernement se sont trouvés dans la situation suivante.
M. Jean Chérioux. L'Etat, c'est moi !
M. Michel Charasse. France Télécom sous son ancien statut n'était pas imposable aux impôts locaux et, subitement, il ou elle l'est devenu. La question s'est naturellement posée de savoir s'il fallait appliquer ou pas le droit commun.
Mes chers collègues, je me souviens parfaitement qu'à l'époque le débat a moins porté sur la question de savoir s'il fallait tomber dans le droit commun que sur la question de savoir s'il était normal et juste que les collectivités ayant la chance d'avoir sur leur territoire le siège d'une importante installation de France Télécom perçoivent seules cette nouvelle rente qui leur arrivait sans qu'elles aient rien fait ou demandé !
On m'a alors demandé la péréquation. Mais nous n'avons pas trouvé à l'époque, ni même dans le cadre des discussions que nous avons eues avec l'association des maires de France ni avec d'autres grandes associations d'élus, le meilleur moyen pour faire cette péréquation.
Nous avons donc décidé de verser ces sommes au fonds de péréquation de la taxe professionnelle, c'est-à-dire que nous faisons aujourd'hui la péréquation de ces recettes via le fonds de péréquation de la taxe professionnelle.
Le fait de voter aujourd'hui le retour pur et simple au droit commun, cela veut dire qu'il n'y aura plus de péréquation de la ressource. Mais on ne peut pas passer son temps, dans les grandes associations d'élus, à demander haut et fort la péréquation, à faire en sorte qu'il n'y ait pas de nouvelle rente de situation et sortir d'un système qui, pour le moment, qu'on le veuille ou non, assure une certaine péréquation, objectif que poursuivent l'ensemble des grandes associations d'élus.
Monsieur le président, dans cette affaire, je ne me renie pas. Je suis toujours favorable à la péréquation. Je constate simplement qu'actuellement, avec les impôts locaux de France Télécom, elle se fait.
C'est la raison pour laquelle je ne peux accepter qu'on en sorte et qu'on prenne au fond un chemin inverse de celui vers lequel nous allons les uns et les autres, notamment avec l'intercommunalité, c'est-à-dire une plus grande péréquation et une plus grande solidarité. Voilà la raison pour laquelle nous ne voterons pas l'amendement n° I-62.
M. le président. J'ai écouté avec une grande attention M. Charasse. Nous avons débattu du texte dont il parlait le 2 juillet 1990 ; je m'en souviens bien, car j'en étais le rapporteur.
M. Michel Charasse. Et quel rapporteur !
M. le président. Monsieur Hérisson, l'amendement n° I-62 est-il maintenu ?
M. Pierre Hérisson. Je ne partage pas du tout les arguments de M. Charasse, à moins que l'on n'instaure une péréquation des 5,6 milliards de francs de taxe professionnelle de France Télécom.
De plus, nous ne débattons pas, aujourd'hui, de la péréquation de la taxe professionnelle.
J'ai entendu avec attention la proposition de M. le rapporteur général ; il m'a promis également que, si cet amendement était présenté en seconde partie du projet de loi de finances, il le soutiendrait.
Dans ces conditions, je retire cet amendement de la première partie du projet de loi de finances pour le redéposer dans la seconde partie.
M. le président. L'amendement n° I-62 est retiré.
Par amendement n° I-61, M. Michel Mercier propose d'insérer, après l'article 29, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le troisième alinéa du 3° de l'article L. 5211-36 du code général des collectivités territoriales est ainsi rédigé :
« Lorsqu'un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre opte pour les dispositions de l'article 1609 nonies B ou 1609 nonies C du code général des impôts, il est assuré chaque année de percevoir une attribution au moins égale à celle qu'il a perçue l'année précédent celle du changement de catégorie d'établissements à fiscalité propre, augmentée comme la dotation forfaitaire prévue à l'article L. 2334-7. »
« II. - Les pertes de recettes résultant pour l'Etat de l'instauration d'une garantie pérenne du montant de la dotation globale de fonctionnement versée aux établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre les années suivant leur changement de catégorie d'établissements à fiscalité propre, sont compensées, à due concurrence, par la majoration des droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Michel Mercier.
M. Michel Mercier. Le Gouvernement incite les collectivités locales qui se sont regroupées dans des EPCI, les établissements publics de coopération intercommunale à choisir la taxe professionnelle comme unique ressource sur le territoire de l'établissement public.
Malheureusement, lorsque de telles décisions sont prises par les groupements, elles ont pour conséquence la plupart du temps d'entraîner, pour eux, une diminution très importante de la dotation globale de fonctionnement pour des raisons qui tiennent plus à la statistique qu'à la volonté ou du législateur ou du Gouvernement.
L'amendement que je présente a donc pour objet d'empêcher ces chutes de dotation globale de fonctionnement pour les groupements de communes qui choisissent la taxe professionnelle unique.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Comme le remarque notre collègue, il est paradoxal que les établissements optant pour un régime que tout le monde cherche à encourager soient « récompensés » par une baisse de leur dotation globale de fonctionnement ; c'est bien de cela qu'il s'agit.
Monsieur le secrétaire d'Etat, nous souhaiterions connaître votre position sur ce sujet : oui ou non, les structures intercommunales pourront-elles être amenées à subir une baisse du montant de leur dotation globale de fonctionnement en adoptant la taxe professionnelle unique ? C'est la question qui est posée par cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. M. Mercier a évoqué le fait que, dans certaines conditions, la dotation globale de fonctionnement versée à un établissement public de coopération intercommunale pourrait diminuer.
Le Gouvernement, qui est très attentif au développement de l'intercommunalité, abordera ce point particulier lors de l'examen du projet de loi sur l'intercommunalité, qui a déjà été soumis au conseil des ministres et qui sera examiné par le Parlement au début de l'an prochain. Un peu de patience donc, monsieur Mercier !
Maintenant que vous êtes rassuré, monsieur le sénateur, je suis sûr que vous allez retirer votre amendement.
M. le président. Monsieur Michel Mercier, l'amendement n° I-61 est-il maintenu ?
M. Michel Mercier. Monsieur le secrétaire d'Etat, je ne vous ferai pas de procès d'intention. Vous me dites que la question sera réglée dans le projet de loi que M. Chevènement doit soutenir devant le Parlement. Je vous fais confiance, mais l'ensemble des membres de la Haute Assemblée sera vigilant. Si, par malheur, ce point faisait l'objet d'un oubli, nous reprendrions l'amendement. Mais je suis sûr que vous tiendrez votre engagement.
M. le président. L'amendement n° I-61 est retiré.
Par amendement n° I-131, Mme Beaudeau, MM. Loridant, Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 29, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - La seconde phrase du second alinéa de l'article L. 1613-2 du code général des collectivités territoriales est abrogée.
« II. - Les taux d'imposition des deux dernières tranches du barème de l'impôt sur le revenu sont relevés à due concurrence des pertes de recettes résultant du I. »
La parole est à M. Loridant.
M. Paul Loridant. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, cet amendement vise à proscrire l'utilisation, par l'Etat, de la dotation de compensation de taxe professionnelle comme variable d'ajustement.
La DCTP, instituée par l'article 6 de la loi de finances pour 1987, était destinée à compenser les pertes de recettes de la taxe professionnelle résultant des mesures législatives d'allégement.
La DCTP se compose de la compensation de l'abattement de 16 % des bases de la taxe professionnelle, de la compensation du plafonnement des taux de la taxe professionnelle et de celle qui est liée à la réduction de la part salariale dans les bases.
Or, force est de constater aujourd'hui, et chaque année le confirme, que la DCTP est loin de compenser intégralement les recettes des collectivités locales. D'autant plus que des transferts de charges ne cessent de s'opérer.
De 1993 à 1998, la dotation de compensation de la taxe professionnelle a baissé de 26 %. Elle est passée de 18,85 milliards de francs à 13,94 milliards de francs.
Ce qui est annoncé pour 1999 se traduit par une nouvelle baisse de 11,12 % pour les communes, soit une nouvelle amputation de 1,5 milliard de francs, sauf pour les communes éligibles à la dotation de solidarité urbaine qui, elles, enregistrent une perte moindre, de 7,4 %.
Cette réduction est d'autant plus importante que nous sommes dans un contexte de retour de la croissance.
L'indexation de la DCTP de 1998 sur l'évolution des recettes fiscales nettes de l'Etat, en augmentation de 5,88 %, aurait conduit à accorder une dotation de 14,34 milliards de francs, soit 2,3 millions de francs supplémentaires, en 1999.
Notre amendement a donc pour objet de ne plus permettre à l'Etat d'utiliser la DCTP comme variable d'ajustement dans la loi de finances et donc de cristalliser au niveau actuel cette dotation en faveur des collectivités territoriales.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La question posée à travers cet amendement est assurément une question de fond.
Est-il normal que les collectivités territoriales puissent être pénalisées dans le calcul de la DGF, dans les mécanismes de régularisation, si les prévisions de croissance du Gouvernement ont été trop optimistes et ne se réalisent pas ?
A mon sens, cette question de fond devra être évoquée devant le comité des finances locales lorsque celui-ci sera saisi de la réforme de la dotation globale de fonctionnement. Mais, dans l'immédiat, sachant que le gage prévu par M. Loridant et ses collègues n'est pas acceptable aux yeux de la majorité de la commission, il serait souhaitable que cet amendement soit retiré, sinon la commission y serait défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Mon avis est similaire à celui de M. le rapporteur général.
Au demeurant, il est difficile de supprimer une régularisation lorsqu'elle est négative et de la conserver lorsqu'elle est positive. Il y a là une sorte de dissymétrie qui n'est pas dans la nature budgétaire. Par conséquent, j'invite M. Loridant à retirer cet amendement n° I-131.
M. le président. Monsieur Loridant, l'amendement n° I-131 est-il maintenu ?
M. Paul Loridant. Monsieur le secrétaire d'Etat, j'ai bien entendu votre appel. Mais reconnaissez avec moi que cette dotation de compensation de taxe professionnelle doit faire l'objet d'un débat puisque, entre-temps, des entreprises se sont établies dans les diverses communes et que, évidemment, l'abattement de 16 % pour les investissements n'est plus pris en compte.
On a ainsi cristallisé une situation à un moment, et cette dotation est appelée à disparaître progressivement.
Cela étant, ayant entendu votre appel, monsieur le secrétaire d'Etat, et sachant que cette question fera l'objet d'un débat plus général, j'accepte de retirer mon amendement.
M. Jacques Chaumont. Très bien !
M. le président. L'amendement n° I-131 est retiré.
Par amendement n° I-130, Mme Beaudeau, MM. Loridant, Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 29, un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article L. 2531-14 du code général des collectivités territoriales est ainsi rédigé :
« Art. L. 2531-14-I. - Bénéficient d'une attribution du fonds destinée à tenir compte de l'insuffisance de ressources fiscales au regard des charges particulièrement élevées qu'elles supportent :
« 1° Les cent premières communes de 10 000 habitants et plus classées en fonction d'un indice synthétique de ressources et de charges défini au II ci-après ;
« 2° Le premier dixième des communes dont la population est comprise entre 5 000 et 9 999 habitants classées en fonction d'un indice synthétique de ressources et de charges défini au III ci-après.
« Les communes soumises à un prélèvement en faveur du fonds ne peuvent bénéficier de ses attributions.
« II. - L'indice synthétique de ressources et de charges mentionné au I pour les communes de 10 000 habitants et plus est constitué :
« 1° Du rapport entre le potentiel fiscal par habitant des communes de 10 000 habitants et plus de la région d'Ile-de-France et le potentiel fiscal par habitant de la commune, tel que défini à l'article L. 2334-4.
« 2° Du rapport entre la proportion de logements sociaux, tels qu'ils sont définis à l'article L. 2334-17 dans le total des logements de la commune et la proportion de logements sociaux dans le total des logements des communes de 10 000 habitants et plus de la région d'Ile-de-France.
« 3° Du rapport entre la moyenne communale par logement des bénéficiaires d'aides au logement, telles qu'elles sont définies à l'article L. 2334-17, de leur conjoint et des personnes à charge vivant habituellement dans leur foyer et cette même moyenne constatée dans l'ensemble des communes de 10 000 habitants et plus de la région d'Ile-de-France ;
« 4° Du rapport entre le revenu moyen par habitant des communes de 10 000 habitants et plus de la région d'Ile-de-France et le revenu de la commune, calculé en prenant en compte la population qui résulte des recensements généraux ou complémentaires.
« Le revenu pris en compte pour l'application de l'alinéa précédent est le dernier revenu imposable connu.
« L'indice synthétique de ressources et de charges est obtenu par l'addition des rapports visés aux 1°, 2°, 3° et 4°, en pondérant le premier par 45 %, le deuxième par 15 %, le troisième par 30 % et le quatrième par 10 %. Toutefois, chacun des pourcentages de pondération peut être majoré ou minoré pour l'ensemble des communes bénéficiaires d'au plus cinq points par le comité institué à l'article L. 2531-12 du code général des collectivités territoriales.
« Les communes de 10 000 habitants et plus de la région d'Ile-de-France sont classées en fonction de la valeur décroissante de leur indice synthétique.
« III. - Les dispositions du II s'appliquent pour le calcul de l'indice synthétique de ressources et de charges mentionné au I pour les communes de 5 000 à 9 999 habitants, sous réserve de la substitution des moyennes constatées en Ile-de-France pour ces communes aux moyennes constatées pour les communes de 10 000 habitants et plus.
« Les communes de la région d'Ile-de-France dont la population est comprise entre 5 000 et 9 999 habitants sont classées en fonction de la valeur décroissante de leur indice synthétique.
« IV. - L'attribution revenant à chaque commune éligible est égale au produit de sa population par la valeur de l'indice qui lui est attribué et par celle de son effort fiscal dans la limite de 1,3.
« V. - Les communes mentionnées au I perçoivent au moins 90 % en 1996 et 80 % à partir de 1997, de l'attribution qui leur a été, le cas échéant, versée en 1995. Ces pourcentages sont, le cas échéant, réduits à la proportion de baisse globale du fonds.
« Les communes qui cessent d'être éligibles au fonds perçoivent, à titre de garantie non renouvelable, une attribution égale à la moitié de celle qu'elles avaient perçue l'année précédente.
« Les sommes nécessaires au financement des garanties mentionnées aux deux précédents alinéas sont obtenues chaque année par le report à due concurrence de tout ou partie de l'annuité prévue à l'article 16 de la loi n° 91-429 du 13 mai 1991 instituant une dotation de solidarité urbaine et un fonds de solidarité des communes de la région d'Ile-de-France, réformant la dotation globale de fonctionnement des communes et des départements et modifiant le code des communes. »
La parole est à M. Loridant.
M. Paul Loridant. Cet amendement vise à appliquer à la répartition des dotations du fonds de solidarité des communes de la région d'Ile-de-France le même principe que celui qui est retenu pour la dotation de solidarité urbaine.
Nous savons que la répartition retenue en 1996 pour la DSU obéit à un système accepté par tous, et plus favorable aux communes. Il tient mieux compte de la réalité économique et sociale du terrain. C'est la raison pour laquelle nous proposons de l'appliquer au fonds de solidarité des communes de la région d'Ile-de-France.
S'agissant de la contribution au fonds de solidarité de la région d'Ile-de-France, le seul critère retenu est celui du potentiel fiscal. Or, la situation concrète de certaines communes montre que l'on ne peut pas s'en tenir à ce seul critère.
A titre d'exemples, imaginons une commune dans laquelle 35 % des logements seraient des logements sociaux et 15 % de la population active sans emploi, pourrait-on parler de ville « riche » parce qu'elle aurait un potentiel fiscal élevé ? A l'évidence, elle aurait des problèmes sociaux lourds à traiter.
En outre, notre proposition revêt une grande importance au regard de la stabilité des budgets communaux. Si elle était adoptée, elle mettrait fin aux effets de seuil, souvent très prononcés, que connaît la dotation du fonds de solidarité des communes de la région d'Ile-de-France. En effet, à la différence de la dotation de solidarité urbaine, pour laquelle les variations sont maintenant beaucoup plus prévisibles et légères, le dispositif du fonds de solidarité des communes de la région d'Ile-de-France est tel qu'il suffit qu'une commune dépasse les 80 % du potentiel fiscal moyen d'Ile-de-France de quelques francs par habitant pour qu'elle perde une dotation qui peut représenter 3 % à 5 % de ses recettes de fonctionnement.
Notre amendement vise donc à retenir comme indice synthétique le potentiel fiscal par habitant, la proportion de logements sociaux, le nombre de bénéficiaires d'aides au logement et le revenu moyen par habitant.
Si la question de l'alignement du fonds de solidarité des communes de la région d'Ile-de-France sur la dotation de solidarité urbaine pouvait être réglée à l'occasion de l'examen de ce projet de loi de finances, ce serait incontestablement une bonne nouvelle pour les élus locaux de la région d'Ile-de-France.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. C'est un sujet complexe. Sans doute serait-il utile de disposer de quelques simulations, mais il nous serait encore plus utile de disposer de votre avis, monsieur le secrétaire d'Etat. (Sourires.)
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Mon avis, c'est que cet amendement est un cavalier budgétaire qui tombe sous le coup de l'article 1er de l'ordonnance portant loi organique : il ne revient pas aux lois de finances de répartir les produits du fonds de solidarité de la région d'Ile-de-France.
Au demeurant, M. Loridant a raison de soulever cette question. Mais c'est dans le projet de loi sur l'intercommunalité, dont j'ai déjà parlé, que devra être traitée traitée la réforme du fonds de solidarité de la région d'Ile-de-France.
M. le président. Monsieur le rapporteur général, pouvez-vous maintenant donner l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission des finances souhaite également le retrait de cet amendement, ce sujet pouvant être abordé lors de la discussion du projet de loi sur l'intercommunalité.
M. le président. Monsieur Loridant, l'amendement n° I-130 est-il maintenu ?
M. Paul Loridant. Monsieur le président, j'ai bien entendu, et l'appel de M. le secrétaire d'Etat et celui de la commission. J'ai bien compris qu'il serait plus opportun que cet amendement soit discuté à l'occasion de la discussion du projet de loi sur l'intercommunalité. Je le retire donc, mais je maintiens que le sujet est important.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Bien sûr !
M. le président. L'amendement n° I-130 est retiré.
Par amendement n° I-128, Mme Beaudeau, MM. Loridant, Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 29, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Dans le premier alinéa de l'article 1390 du code général des impôts, après les mots : "code de sécurité sociale" sont insérés les mots : "les bénéficiaires du revenu minimum d'insertion prévu à l'article 2 de la loi n° 88-1088 du 1er décembre 1988 relative au revenu minimum d'insertion, les bénéficiaires de l'allocation solidarité spécifique mentionnée à l'article L. 351-10 du code du travail."
« II. - Le taux prévu à l'article 978 du code général des impôts est relevé à due concurrence des pertes de recettes résultant du I. »
La parole est à M. Loridant.
M. Paul Loridant. Depuis plusieurs années, la taxe d'habitation fait l'objet de dégrèvements, tout à fait justifiés au demeurant, en raison de la charge qu'elle représente pour les contribuables les plus modestes.
Or, la taxe sur le foncier bâti pèse aussi sur les contribuables modestes. Les assujettis à cette taxe sont certes propriétaires, mais il n'en demeure pas moins que certains d'entre eux n'ont comme seule ressource qu'un minimum social.
C'est pourquoi nous proposons d'élargir les dispositions de l'article 1390 du code général des impôts, qui prévoit déjà l'exonération de la taxe foncière sur les propriétés bâties pour les bénéficiaires du minimum vieillesse.
Notre amendement prévoit d'exonérer également de la taxe foncière sur les propriétés bâties les bénéficiaires du RMI, de l'allocation de solidarité spécifique et de l'allocation de parent isolé.
Le nombre de ces bénéficiaires, qui éprouvent de grandes difficultés à acquitter cette taxe foncière, ne devrait pas être très important. C'est pourquoi nous souhaitons que ces derniers soient exonérés au même titre que pour la taxe d'habitation.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet amendement est intéressant. Il est à noter que le dispositif de la taxe d'habitation dont bénéficient certains redevables très modestes n'a aucune espèce de raison de ne pas s'appliquer à la taxe foncière sur les propriétés bâties.
Ce matin, ou hier, M. Lambert évoquait l'attitude à adopter à l'égard de la propriété. Nous trouvons là une bonne illustration du respect qu'il faut avoir pour les personnes très modestes qui occupent un logement dont elles sont propriétaires.
Il n'y a pas de raison que l'on ne transpose pas à la taxe foncière sur les propriétés bâties le dispositif établi en matière de taxe d'habitation qui existe en faveur des RMIstes bénéficiaires de l'allocation de solidarité spécifique.
A partir de ce préjugé favorable, la commission souhaite entendre le Gouvernement.
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. La propriété est qualifiée de « sacrée » dans la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen !
M. le président. Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. L'impôt foncier, dit taxe foncière sur les propriétés bâties, est un impôt sur la propriété.
Certains propriétaires peuvent, c'est vrai, disposer d'un revenu très faible et être bénéficiaires, par exemple, du revenu minimum d'insertion ou de l'allocation de solidarité spécifique. Il convient donc, là encore de concilier les principes et l'humanité.
Le principe est que les impôts sur la propriété ne soient pas dépendants du revenu des propriétaires.
J'en viens à l'aspect humanitaire. Certaines personnes - cela peut se produire, et vous avez raison d'insister sur ce point - quoique propriétaires, disposent de revenus très peu élevés. Elles peuvent présenter une demande gracieuse d'annulation ou de report de l'impôt foncier. Les services des impôts examinent alors avec bienveillance ce type de demandes.
La réponse à votre question - puisqu'il s'agit non pas de la taxe d'habitation, qui est une sorte d'impôt sur le revenu, mais de l'impôt foncier, qui est un impôt sur le patrimoine - relève plus d'un examen au cas par cas que d'une disposition générale telle que vous la présentez.
Si cette disposition générale était adoptée par le Parlement, elle devrait faire l'objet d'une compensation par l'Etat. Je rappelle, sans trop y insister puisqu'il s'agit de personnes bénéficiaires du RMI, que le coût pour l'Etat des exonérations de taxes foncières s'élève déjà à 1 300 millions de francs. Cet argument financier, sans être majeur, n'est donc pas négligeable.
Monsieur Loridant, très sincèrement, votre question, qui porte non pas sur l'ensemble des titulaires du revenu minimum d'insertion, mais sur une minorité d'entre eux, relève plus d'un examen au cas par cas que d'une disposition générale. J'espère qu'ayant entendu ces explications vous accepterez de retirer cet amendement. A défaut, j'en demanderai le rejet.
M. le président. Quel est maintenant l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Avant de donner un avis définitif, je souhaite savoir si nos collègues maintiennent le gage tel qu'il figure dans le texte de cet amendement.
M. Paul Loridant. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Loridant.
M. Paul Loridant. Nous sommes d'accord avec l'analyse de M. le secrétaire d'Etat. Il ne s'agit effectivement que de quelques cas spécifiques.
S'agissant précisément d'un nombre extrêmement restreint de personnes propriétaires de leur logement et percevant des minima sociaux, je pense que cet amendement pourrait être adopté, d'autant que son coût me paraît tout à fait dérisoire.
Quant au gage, monsieur le président, je suis prêt à rectifier cet amendement pour compenser la mesure, disons par une taxe sur le tabac (Sourires), espérant ainsi répondre au souhait de la commission !
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° I-128 rectifié présenté par Mme Beaudeau, MM. Loridant, Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen et tendant à insérer, après l'article 29, un article additionnel ainsi rédigé.
« I. - Dans le premier alinéa de l'article 1390 du code général des impôts, après les mots : "code de sécurité sociale" sont insérés les mots : "les bénéficiaires du revenu minimum d'insertion prévu à l'article 2 de la loi n° 88-1088 du 1er décembre 1988 relative au revenu minimum d'insertion, les bénéficiaires de l'allocation solidarité spécifique mentionnée à l'article L. 351-10 du code du travail". »
« II. - Les pertes de recettes pour l'Etat résultant du I sont compensées par un relèvement à due concurrence des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Quel est l'avis de la commission sur cet amendement rectifié ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Avis favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-128 rectifié, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 29.
Par amendement n° I-72, M. Oudin propose d'insérer, après l'article 29, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Dans le second alinéa de l'article 1393 du code général des impôts, après les mots : ", les salines et marais salants", sont insérés les mots : "non exploités à titre individuel,".
« II. - Les pertes de ressources pour les collectivités locales résultant de l'application du I ci-dessus sont compensées à due concurrence par une augmentation de la dotation globale de fonctionnement.
« III. - Les pertes de ressources pour l'Etat sont compensées à due concurrence par une majoration des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Oudin.
M. Jacques Oudin. Il s'agit là d'un amendement totalement écologique. Il a en effet pour objet de permettre la restauration de zones humides délaissées, où la culture séculaire du sel était faite par des sauniers ou des paludiers - leur nom varie selon la région d'exploitation. Des marais ont ainsi disparu, sont tombés en déshérence, et les espaces ne sont plus entretenus.
Certaines collectivités, certains professionnels souhaitent préserver ces zones - je pense à celles de Guérande, de l'île de Noirmoutier, de l'île de Ré - et relancer la culture ancestrale du sel pratiquée, je le précise, à titre individuel. En aucun cas, en effet, l'amendement n° I-72 ne vise les cultures industrielles faites mécaniquement dans les grandes salines du sud de la France.
Il s'agit donc bien de favoriser la remise en état d'anciens marais salants qui, après une quasi-disparition, connaissent une certaine renaissance, renaissance toutefois ralentie par des blocages, lesquels tiennent essentiellement au fait que les propriétaires, à cause de contraintes du droit rural, n'acceptent pas de donner leurs marais en location.
Ce problème peut être résolu par cet amendement, dont l'objet est donc d'inciter les propriétaires à permettre à des exploitants de remettre en état leurs anciens marais, ce qui nécessite parfois un an, deux ans ou trois ans de travail.
La mesure que je préconise consisterait à exonérer les propriétaires de taxe foncière sur les propriétés non bâties pour une période déterminée, celle de la durée du bail, soit neuf ans.
L'intérêt de redonner à ces anciens marais leur vocation première est double : d'abord pour la renaissance de ces zones, grâce à la production de sel, et, ensuite, pour la remise au travail de populations parfois quelque peu marginales.
Avec l'amendement n° I.-128 rectifié, on vient d'autoriser l'exonération de la taxe foncière sur les propriétés bâties pour les personnes ayant de bas revenus. Il s'agit d'une mesure d'intérêt tout à fait comparable, dans la mesure où les personnes concernées ont, elles aussi, peu de revenus, et, je le répète, d'une mesure tout à fait écologique.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission a été sensible aux arguments de notre collègue M. Oudin et, sans avoir une connaissance très approfondie de ce sujet, elle a éprouvé de la sympathie pour une telle initiative et a donc émis un avis favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. L'avis du Gouvernement est défavorable. Cela ne signifie pas que le sel de Guérande, par exemple, ne mérite pas l'attention de la collectivité nationale ! Mais pourquoi prendre des mesures particulières pour les salines et les marais salants, monsieur Oudin, et pas pour les étangs, les tourbières ou tous ces sites très intéressants dont notre pays est heureusement si riche ?
Chacun, au sein de la Haute Assemblée, souhaite simplifier l'impôt. Or, le fait d'ajouter des exceptions au gré des amendements ne nous conduit pas dans cette direction !
J'ajoute, monsieur Oudin, que les parts régionales et départementales de la taxe foncière sur les propriétés non bâties ont été supprimées depuis 1983, bonne mesure que l'on peut mettre au crédit du gouvernement précédent. Il ne reste, depuis 1996, que la part revenant aux communes et aux groupements de communes.
En outre, je vous rappelle l'adoption d'une mesure, à mon avis au moins aussi sympathique, sinon plus que celle que vous proposez monsieur Oudin : il s'agit du dégrèvement de la taxe foncière sur les propriétés non bâties pour les jeunes agriculteurs qui s'installent. Il y a là, me semble-t-il, une démarche qui me semble positive.
M. Michel Charasse. A la charge des collectivités locales !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. A la charge des collectivités locales, comme le dit très bien M. Charasse.
Je ne suis donc pas favorable, au nom du Gouvernement, à un échenillage des exceptions et, malgré l'estime que j'ai pour vous, monsieur Oudin, et tout l'intérêt que je porte aux salines et aux marais salants, je ne suis pas favorable à cet amendement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-72, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 29.
Par amendement n° I-129, Mme Beaudeau, MM. Loridant, Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 29, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Dans la première phrase du premier alinéa de l'article 1414 C du code général des impôts, le taux : "3,4 %" est remplacé par le taux "2 %".
« II. - Les taux applicables aux deux dernières tranches du tarif de l'impôt de solidarité sur la fortune sont augmentés à due concurrence des pertes de recettes résultant du I. »
La parole est à M. Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Ce n'est pas la première fois que nous proposons une telle mesure.
Cet amendement tend à réduire les contraintes fiscales qui pèsent sur les ménages. Il fait varier le taux du plafonnement des revenus des ménages au-delà duquel les ménages sont dégrevés d'office.
Actuellement, le taux retenu est de 3,4 %. Nous proposons de le réduire à 2 %. Cette mesure aboutirait à augmenter le nombre de personnes qui bénéficieraient d'une réduction d'impôt ; elle concernerait de 200 000 à 300 000 ménages ayant des revenus modestes à moyens.
Nous savons, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous nous proposez de mettre en place la réforme des bases cadastrales dans le courant du premier semestre 1999.
Nous nous réjouissons que cette réforme soit repoussée afin de permettre aux élus locaux de connaître toutes les répercussions et les transferts de charges entre contribuables.
Malgré cela, le niveau atteint par la fiscalité des ménages nécessite que soient prises rapidement des mesures en faveur des familles aux revenus modestes. Il est donc urgent, selon nous, de réformer la taxe d'habitation, un des impôts les plus injustes, car il ne prend quasiment pas en compte le revenu des ménages.
Le groupe communiste républicain et citoyen souhaite que la réflexion sur la réforme des bases cadastrales soit couplée de dispositions favorables aux familles à revenus modestes, notamment, comme nous le proposons dans notre amendement, des mesures qui permettent de tenir compte, dans le calcul de la taxe d'habitation, du revenu des contribuables.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission n'est pas favorable à cet amendement, car elle craint que ses incidences financières ne soient très lourdes et que l'on ne déséquilibre de façon significative les recettes de taxe d'habitation de nombreuses collectivités.
En outre, nous sommes hostiles au gage qui a été prévu.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. M. Foucaud sait bien - il l'a rappelé - que l'article 26 de la loi de finances pour 1998 a relevé le niveau de revenus permettant d'obtenir un dégrèvement partiel de la taxe d'habitation. Actuellement, les contribuables qui ont un revenu mensuel de l'ordre de 12 000 francs pour une personne seule et de 17 000 francs pour un couple marié peuvent bénéficier de ce dispositif.
L'amendement que vous proposez, monsieur Foucaud, a un coût de 1,6 milliard de francs, ce qui n'est pas négligeable. Il faut choisir entre les différentes priorités !
Par ailleurs, vous avez appelé de nos voeux une réforme de la taxe d'habitation. La mise à jour des bases, qui sera engagée par le Gouvernement et qui sera soumise au Parlement l'an prochain, ira tout à fait dans le sens que vous souhaitez.
Il me semble que la taxe d'habitation se rapproche déjà sensiblement, depuis juin 1997, des perspectives que vous avez à cet égard.
Dans ces conditions, je vous invite à retirer votre amendement. Il s'agit d'un amendement d'appel et l'appel a été entendu par le Gouvernement.
M. le président. Monsieur Foucaud, l'amendement n° I-129 est-il maintenu ?
M. Thierry Foucaud. Puisque l'appel a été entendu et que va intervenir la réforme de la taxe d'habitation, comme nous le souhaitions, je retire cet amendement.
M. le président. L'amendement n° I-129 est retiré.
Par amendement n° I-135, Mme Beaudeau, MM. Loridant, Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 29, un article additionnel ainsi rédigé :
« Le deuxième alinéa du b) du 1 du I de l'article 1636 B sexies du code général des impôts est ainsi rédigé :
« Ne peut, par rapport à l'année précédente, être augmenté dans une proportion supérieure au taux national moyen de la taxe professionnelle ; »
La parole est à M. Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Cet amendement tend à autoriser les collectivités territoriales à augmenter le taux de la taxe professionnelle à concurrence du taux national moyen, sans pour autant augmenter les autres impôts locaux.
Actuellement, l'article 1636 B sexies du code général des impôts pose le principe de la liaison des taux des impôts locaux. Il s'agit, en effet, d'encadrer les taux de progression des taux, de créer une forme de solidarité dans leurs évolutions futures et de soumettre la taxe professionnelle à un plafonnement différent de celui des impôts payés par les ménages.
Cela pose un problème. En effet, alors que l'on assiste depuis plusieurs années à un report des contributions des entreprises sur les contributions des ménages en matière d'impôts locaux, il nous semble nécessaire de permettre aux élus locaux qui le souhaitent de rétablir, dans une juste mesure, l'équilibre.
Cette règle ne permet pas, actuellement, aux nouveaux élus de changer radicalement de politique.
Prenons le cas d'une commune dont les taux sont de 4 % pour la taxe professionnelle et de 16 % pour la taxe d'habitation. Un changement de majorité intervient. La nouvelle municipalité veut répondre aux besoins de la population. A cet effet, elle doit dégager de nouvelles recettes. Les dotations de l'Etat sont stables ; il lui faut donc se retourner vers les contribuables locaux.
Mais la commune se trouve ici bloquée par les dispositions de l'article 1636 B sexies , qui la contraignent à augmenter proportionnellement les quatre taxes locales, alors que les taux de base - 4 % pour la taxe professionnelle et 16 % pour la taxe d'habitation - sont loin de l'équité.
Les élus communistes républicains et citoyens, et bien d'autres élus locaux, dénoncent cette règle.
L'objet de notre amendement est donc de permettre une augmentation du taux de la taxe professionnelle dans la limite du taux moyen national, sans influer sur le taux des autres impôts locaux.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Notre collègue pose la question bien connue, et légitime, de la déliaison partielle de la taxe professionnelle par rapport aux autres impôts locaux. Cependant, il l'envisage uniquement à la hausse. En fait, nous pourrions également poser le problème de la déliaison à la baisse, car cette question surgira de plus en plus souvent au sein des intercommunalités qui ne disposent que de la seule taxe professionnelle comme ressources. Dans ce cas, en effet, quand les communes membres diminuent les taxes sur les ménages, le groupement subit cette décision des communes et se trouve contraint de diminuer dans les mêmes proportions sa seule ressource, la taxe professionnelle. Il peut alors y avoir des problèmes d'incompatibilité et d'ajustement particulièrement difficiles.
Je suggère donc que l'on reprenne l'examen de l'ensemble de ces questions complexes lors de la discussion, devant le Parlement, du projet de loi sur l'intercommunalité.
Il ne semble pas, au demeurant, que le dispositif proposé par nos collègues du groupe communiste républicain et citoyen soit pleinement opérationnel. C'est pourquoi je souhaite que cet amendement soit retiré.
M. Michel Charasse. Il n'est pas gagé !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je ne suis pas favorable à cet amendement.
En dehors du fait que les mesures proposées pourraient se traduire par des contributions accrues pour l'Etat en raison de la règle du plafonnement, la question de l'absence de gage pourrait être posée, comme vient de l'évoquer M. Charasse.
Mais cet avis défavorable est principalement motivé par la raison suivante : lorsque le législateur a créé, en 1980, cette liaison des taux à la hausse, son souci était d'éviter que certaines collectivités - certaines ont des raisons légitimes de le faire, vous l'avez dit, mais d'autres en ont peut-être moins - ne majorent le taux de taxe professionnelle jusqu'à des niveaux tels qu'ils deviennent dissuasifs pour le maintien de l'emploi qui est présent dans ces communes, a fortiori pour l'augmentation de l'emploi.
Par conséquent, la liaison des taux à la hausse est une règle prudentielle à laquelle il ne me paraît pas opportun de déroger. Je vous suggère donc, monsieur Foucaud, de bien vouloir retirer cet amendement. A défaut, j'en demanderais le rejet.
M. le président. Monsieur Foucaud, l'amendement n° I-135 est-il maintenu ?
M. Thierry Foucaud. Oui, monsieur le président.
M. Michel Charasse. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Charasse.
M. Michel Charasse. L'amendement n'est pas gagé, monsieur le président. Par conséquent, j'invoque l'article 40.
M. le président. Monsieur le rapporteur général, l'article 40 de la Constitution est-il applicable ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il n'est pas applicable, monsieur le président.
M. le président. Dans ces conditions, je vais mettre aux voix l'amendement n° I-135.
M. Michel Charasse. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Charasse.
M. Michel Charasse. Monsieur le président, l'article 40 est applicable - je prie M. le rapporteur général de m'excuser de le contrarier - pour la raison suivante : dans la mesure où il y a déliaison des taux et donc hausse des taux, automatiquement augmentent la taxe professionnelle et les versements de l'Etat pour la prise en charge des dégrèvements et du plafonnement de la valeur ajoutée, sans parler de la baisse de l'impôt sur les sociétés et de l'impôt sur les BIC, les bénéfices industriels et commerciaux.
Je ne vois donc pas comment l'article 40 ne serait pas applicable puisqu'il n'y a pas de gage au profit de l'Etat.
M. le président. L'avis de la commission des finances ne peut faire l'objet d'une discussion, monsieur Charasse !
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-135, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° I-127, Mme Beaudeau, MM. Loridant, Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 29, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - La dernière phrase du premier alinéa de l'article L. 134-1 du code de la sécurité sociale est abrogée.
« II. - L'impôt sur les sociétés est relevé à due concurrence des pertes résultant du I. »
La parole est à M. Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Cet amendement vise à revenir sur une disposition instaurée par l'article 78 de la loi de finances pour 1986. Cet article autorise des ponctions dans les caisses de la CNRACL, la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales, au titre de la compensation et de la surcompensation.
Entre 1985 et 1997, la CNRACL a contribué, à hauteur de 83,5 milliards de francs, au rétablissement de l'équilibre des régimes spéciaux déficitaires, leur consacrant ainsi plus de 16 milliards de francs de ses ressources annuelles.
Cet amendement pourrait être qualifié d'« amendement AMF ». M. Delevoye pourrait remercier les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen de la constance et de la ténacité dont ils font preuve pour faire connaître à la Haute Assemblée les inquiétudes et les doléances des élus locaux.
Si l'une de ces doléances fait l'unanimité, c'est bien celle de l'arrêt de la surcompensation au titre de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales.
Si nous nous réjouissons que la cotisation employeur à la CNRACL ne soit pas augmentée en 1999, nous souhaitons que le problème global de la solidarité entre régimes spéciaux soit réglé et considérons qu'il ne revient pas au contribuable local de financer des régimes spéciaux de retraite, lesquels relèvent, à l'évidence, de la solidarité nationale.
Vous le savez, l'Etat a fermé les mines, réduit le nombre de cheminots et fait payer la note aux collectivités locales, ce qui est tout simplement honteux.
Depuis 1995, la caisse est en déficit. Rien d'étonnant ! Nous ne sommes pas dupes : sans le mécanisme de compensation, la CNRACL serait largement bénéficiaire.
En 1997, le gouvernement Juppé a effectué un prélèvement de 4,5 milliards de francs dans les réserves disponibles des allocations temporaires d'invalidité des agents des collectivités locales. Ce prélèvement a permis d'équilibrer la caisse et d'éviter un nouveau relèvement de trois à quatre points du taux de cotisation employeur.
Les prévisions évaluaient le déficit pour 1998 à près de 3 milliards de francs. Les réserves du fonds des allocations temporaires d'invalidité des agents des collectivités locales n'étant pas inépuisables, l'avenir de la CNRACL reste en suspens.
Pour 1999, la contribution dont cette caisse devrait s'acquitter la contraindrait à recourir à l'emprunt pour le paiement des pensions de ses ressortissants si le calendrier de versement des acomptes de compensation devait être respecté.
Pourtant, la CNRACL bénéficie d'un bon équilibre démographique, avec 1,6 million de cotisants pour 57 500 retraités.
La CNRACL ne peut tenir plus longtemps le rôle pivot qui lui a été dévolu dans le financement des régimes spéciaux, en particulier de ceux qui, ayant un effectif cotisant en voie d'extinction, doivent relever de la solidarité nationale.
Telles sont les raisons qui incitent notre groupe à vous proposer de supprimer les dispositions qui autorisent la surcompensation.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission considère que cette question aurait été beaucoup plus à sa place dans le cadre de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Il est difficile, à ce stade du débat, de traiter, de manière précise, de ce sujet. C'est pourquoi elle émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement émet également un avis défavorable sur cet amendement, mais pour deux autres raisons.
Tout d'abord, il considère qu'il n'est pas absurde que des régimes spéciaux de retraite des agents des collectivités locales et de la fonction publique hospitalière qui ont une démographie favorable - cela a longtemps été le cas, mais ce ne sera pas éternel ! - exercent une sorte de solidarité à l'égard d'autres régimes spéciaux - ceux des mineurs, des cheminots - dont la démographie est défavorable.
Ensuite, le Premier ministre a confié au commissaire général au Plan, vous le savez, le soin non pas de traiter de tel ou tel régime spécial, comme cela avait été fait dans le passé, mais d'étudier la façon dont nous pourrons sauvegarder les régimes de répartition face au choc démographique que nous subirons en l'an 2005, lorsque les générations nées après la guerre partiront à la retraite.
Je crois très sincèrement que l'avenir de la CNRACL devrait être considéré à la lumière du rapport exhaustif qu'établira le commissaire général au Plan.
Pour ces deux raisons - d'abord le fait que le principe d'une compensation entre régimes spéciaux ne me choque pas a priori, ensuite le fait qu'un chantier d'ensemble soit ouvert, dont nous devrions avoir le résultat au mois de mars - j'émets un avis défavorable sur cet amendement. J'ajoute que son coût n'est que de 9,1 milliards de francs.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° I-127.
M. Jean Delaneau. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Delaneau.
M. Jean Delaneau. J'ai bien écouté à la fois les arguments de notre collègue M. Foucaud et la réponse de M. le secrétaire d'Etat sur un problème qui préoccupe tout particulièrement la commission des affaires sociales et que nous avions déjà évoqué à l'occasion de la discussion du projet de loi relatif au financement de la sécurité sociale.
M. Foucaud dit vrai : en ce qui concerne les prélèvements de compensation et de surcompensation sur la CNRACL, nous arrivons aux limites de l'acceptable.
Certes, l'augmentation de la cotisation est stoppée depuis un an et, en 1999, il n'y aura pas de nouvelle hausse. Cependant, monsieur le secrétaire d'Etat, quand bien même, d'ici à 2005, le rapport que doit remettre le commissaire général au Plan permettrait de régler le problème, la date limite est, pour ce qui nous intéresse, l'an 2002. Bien sûr, la CNRACL se porte bien ; mais peut-on continuer à prélever des sommes aussi importantes - vous les évaluez à 9,1 milliards de francs - alors que le Gouvernement est amené à autoriser la caisse à contracter des emprunts pour précisément pouvoir payer ces surcompensations ? Il y a là quelque chose qui ne va pas.
Monsieur le secrétaire d'Etat, en 2002, le CNRACL ne pourra plus payer ses propres retraites si l'on continue à opérer de tels prélèvements. Je tenais à vous alerter sur ce problème, que nous avons signalé également à Mme Aubry. Il est urgent de trouver d'autres modes de financement, sinon la caisse ne tiendra pas.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-127, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article 19