Séance du 2 décembre 1998
M. le président.
« Art. 21. - I. - L'article L. 162-5 du code de la sécurité sociale est
complété par un 11° ainsi rédigé :
« 11° Les dispositions permettant aux parties à la convention d'assurer un
suivi périodique des dépenses médicales et de prendre toutes mesures, notamment
d'ajustement des tarifs mentionnés à l'article L. 162-5-2, de nature à
permettre le respect des objectifs prévus au même article ; ».
« II. - L'article L. 162-5-2 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé
:
«
Art. L. 162-5-2. - I. - Chaque année, compte tenu de l'objectif des
dépenses de soins de ville, une annexe à la ou aux conventions prévues à
l'article L. 162-5 fixe, pour les médecins généralistes conventionnés, d'une
part, pour les médecins spécialistes conventionnés, d'autre part, l'objectif
des dépenses d'honoraires, de rémunérations, de frais accessoires et de
prescription. Cet objectif, dénommé « objectif des dépenses médicales »,
s'applique à compter du 1er janvier de l'année civile concernée. Il porte sur
les dépenses remboursables par les régimes d'assurance maladie, maternité,
invalidité et accidents du travail et permet d'établir le montant prévisionnel
des dépenses médicales.
« L'annexe annuelle fixe également la décomposition de ce montant en :
« 1° Un montant prévisionnel des dépenses d'honoraires, rémunérations et frais
accessoires des médecins ;
« 2° Un montant prévisionnel des dépenses de prescription des médecins, établi
notamment au vu des orientations relatives au médicament.
« L'annexe annuelle détermine, en outre, dans des limites définies par décret,
l'écart entre le montant prévisionnel des dépenses médicales et le montant
constaté à partir duquel il est fait application des dispositions des IV et V
du présent article ou des II, III et IV de l'article L. 162-5-3.
«
II. - L'annexe annuelle fixe les tarifs des honoraires, rémunérations
et frais accessoires dus aux médecins par les assurés sociaux en dehors des cas
de dépassement autorisés par la ou les conventions.
« L'objectif des dépenses médicales peut comprendre une provision pour
revalorisation d'honoraires. Une revalorisation d'honoraires ne peut être
accordée si elle n'a été préalablement provisionnée.
«
III.- L'annexe annuelle établit le montant constaté des dépenses
médicales des médecins conventionnés nécessaire à la mise en oeuvre des
dispositions des IV et V du présent article et de l'article L. 162-5-3. Ce
montant est arrêté par les parties à la convention, dans les conditions prévues
par l'avenant annuel à la convention d'objectifs et de gestion mentionné à
l'article L. 227-1, et après avis du secrétaire général permanent de la
commission des comptes de la sécurité sociale prévue à l'article L. 114-1.
«
IV. - Lorsque le montant constaté des dépenses médicales de l'année
est inférieur à l'objectif mentionné au I, la différence est versée à un fonds
de régulation, selon des modalités de calcul et dans les limites déterminées
par décret en Conseil d'Etat, en fonction des dépenses constatées d'une part
sur les honoraires, rémunérations et frais accessoires et d'autre part sur les
prescriptions, et dans la limite du montant de la provision prévue au II.
«
V. - Au vu du constat mentionné au III, l'annexe annuelle détermine
:
«
a) La part des sommes versées au fonds de régulation affectées au
financement des actions non reconductibles de modernisation du système de
soins, et notamment des actions mentionnées au 12° de l'article L. 162-5 ;
«
b) Les honoraires, rémunérations et frais accessoires des médecins
dont les tarifs seront revalorisés, ainsi que le niveau et la date d'effet de
ces revalorisations, à concurrence du montant global résultant de l'application
du IV.
«
VI. - La charge des sommes versées au fonds de régulation est
répartie entre les régimes d'assurance maladie qui financent le régime des
praticiens et auxiliaires médicaux conventionnés prévu à l'article L. 722-4
selon les modalités fixées au titre du même exercice pour l'application du
quatrième alinéa de l'article L. 722-4. »
« III. - L'article L. 162-5-3 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé
:
«
Art. L. 162-5-3. - I. - Les parties à la convention effectuent le
suivi des dépenses médicales prévu au 11° de l'article L. 162-5 au moins deux
fois dans l'année, une première fois au vu des résultats des quatre premiers
mois de l'année, et une seconde fois au vu des résultats des huit premiers mois
de l'année. Lorsqu'elles constatent que l'évolution de ces dépenses n'est pas
compatible avec le respect de l'objectif fixé en application de l'article L.
162-5-2, elles déterminent les mesures de toute nature propres à garantir son
respect, sans que soit remis en cause le niveau de la prise en charge de la
dépense des soins par l'assurance maladie. Les mesures prises peuvent comporter
notamment des actions d'information des médecins, de promotion des références
médicales opposables et des recommandations de bonne pratique, d'évaluation des
pratiques ou, le cas échéant, des ajustements des tarifs pour une période
déterminée qui, sous réserve des dispositions du III de l'article L. 162-5-8,
ne saurait aller au-delà du 31 décembre de l'année en cours. Les parties à la
convention peuvent en outre proposer à l'Etat des mesures d'adaptation de la
nomenclature. L'ensemble des mesures prévues par cet alinéa peut être adapté
par spécialité médicale, notamment en fonction des évolutions constatées des
dépenses.
« Les nouveaux tarifs établis en application de l'alinéa précédent sont mis en
oeuvre par voie d'avenant à l'annexe annuelle prévue à l'article L. 162-5-2,
transmis au plus tard respectivement les 30 juin et 30 octobre pour
approbation. En l'absence de notification d'une opposition d'un des ministres
compétents à l'avenant dans le délai de quinze jours après sa transmission par
la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés, l'avenant
est réputé approuvé.
« A défaut de constat établi ou de mesures proposées par les parties
conventionnelles, la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs
salariés ou une autre caisse nationale signataire de la convention mentionnée à
l'article L. 162-5 peut proposer, lorsque le montant des dépenses réalisées
n'est manifestement pas de nature à permettre le respect de l'objectif des
dépenses médicales, au plus tard respectivement les 15 juillet et 15 novembre,
à l'Etat de modifier, par arrêté interministériel pris au plus tard
respectivement les 31 juillet et 30 novembre, les tarifs mentionnés au premier
alinéa et leur durée d'application.
« Lorsqu'il apparaît que les mesures proposées au titre des trois alinéas
précédents ne sont manifestement pas de nature à permettre le respect de
l'objectif des dépenses médicales, un arrêté interministériel fixe, au plus
tard respectivement les 31 juillet et 30 novembre, après avis de la Caisse
nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés, les tarifs
mentionnés au premier alinéa et leur durée d'application.
«
II. - En cas de non-respect de l'objectif des dépenses médicales par
les médecins généralistes ou par les médecins spécialistes, les médecins
conventionnés généralistes ou spécialistes sont redevables d'une contribution
conventionnelle.
« Un décret en Conseil d'Etat détermine les conditions dans lesquelles le
montant exigible de l'ensemble des médecins conventionnés, généralistes ou
spécialistes qui ne peut excéder le montant global du dépassement constaté, est
calculé en fonction des honoraires perçus et des prescriptions réalisées.
« Les sommes affectées au fonds de régulation, à l'exception de la part
mentionnée au
a du V de l'article L. 162-5-2, sont, sans préjudice de
l'application des III et IV du présent article, imputées sur la somme ainsi
calculée.
« L'annexe annuelle prévue à l'article L. 162-5-2 fixe le montant global mis à
la charge de l'ensemble des médecins conventionnés généralistes ou
spécialistes.
«
III. - La somme exigible est mise à la charge des médecins
conventionnés dans les conditions ci-après.
« La contribution conventionnelle est due par l'ensemble des médecins
généralistes ou spécialistes adhérents à la convention ou au règlement
conventionnel minimal prévu à l'article L. 162-5-9.
« La charge de cette contribution est répartie entre les médecins
conventionnés en fonction des revenus au sens de l'article L. 131-6 qu'ils ont
tirés de leurs activités professionnelles définies à l'article L. 722-1 au
cours de l'année pour laquelle le dépassement est constaté.
« Les médecins qui, au 31 décembre de l'année pour laquelle le dépassement est
constaté, justifient, depuis la date de leur première installation à titre
libéral, d'un nombre d'années d'exercice libéral au plus égal à sept ans, sont
exonérés de cette contribution. Toutefois, la ou les conventions prévues à
l'article L. 162-5 peuvent déterminer un plafond des revenus au sens de
l'alinéa précédent au-delà duquel ils ne peuvent bénéficier de cette
exonération.
« Le taux de la contribution conventionnelle est fixé par arrêté, au plus tard
le 31 juillet de l'année civile suivant celle pour laquelle le dépassement est
constaté, de telle façon que le produit global de la contribution représente
une somme égale à celle définie au dernier alinéa du II du présent article.
« La ou les conventions prévues à l'article L. 162-5 peuvent déterminer les
conditions dans lesquelles le taux de cette contribution est modulé en fonction
du niveau des revenus et du choix du médecin d'appliquer des honoraires
différents de ceux fixés par la convention, sous la réserve que le montant
global de cette contribution soit inchangé.
« Le montant de la contribution due par chaque médecin fait l'objet d'un
abattement forfaitaire déterminé par décret en Conseil d'état.
« La contribution conventionnelle est déductible du bénéfice imposable.
«
IV. - La contribution conventionnelle est recouvrée et contrôlée par
les organismes chargés du recouvrement des cotisations de sécurité sociale du
régime général, selon les règles et sous les garanties et sanctions applicables
au recouvrement des cotisations personnelles d'allocations familiales des
employeurs et travailleurs indépendants.
« Les modalités de versement de la contribution sont fixées par décret. Elles
peuvent prévoir le versement d'un acompte calculé, à titre provisionnel, sur la
base des revenus afférents à l'avant-dernière année, ou, le cas échéant, sur la
base de revenus forfaitaires définis par décret.
« Le produit de la contribution conventionnelle est réparti entre les
différents régimes d'assurance maladie qui financent le régime des praticiens
et auxiliaires médicaux conventionnés prévu à l'article L. 722-4 selon les
modalités fixées au titre du même exercice pour l'application du quatrième
alinéa de l'article L. 722-4. »
«
IV. - L'article L. 162-5-4 du code de la sécurité sociale est ainsi
rédigé :
«
Art. L. 162-5-4. - En cas de non-paiement, total ou partiel, par le
médecin, du montant de la contribution conventionnelle prévue à l'article L.
162-5-3 dans le délai de deux mois après sa date limite de paiement, les
organismes chargés du recouvrement des cotisations de sécurité sociale du
régime général en informent, dans les deux mois qui suivent, la caisse primaire
d'assurance maladie. Celle-ci peut, après que ce médecin a été mis en mesure de
présenter ses observations, le placer hors de la convention ou du règlement
conventionnel minimal, pour une durée de un à six mois. La caisse peut tenir
compte, pour établir la durée du déconventionnement, du montant de la
contribution conventionnelle. Les litiges relatifs à cette décision sont de la
compétence des tribunaux administratifs. »
Par amendement n° 27, M. Descours, au nom de la commission des affaires
sociales, propose de rédiger comme suit cet article :
« I. - Le paragraphe I de l'article L. 162-5-2 du code de la sécurité sociale
est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Elle met en place les instruments de maîtrise médicalisée de nature à
favoriser le respect de l'objectif prévisionnel d'évolution des dépenses par
l'ensemble des médecins conventionnés. »
« II. - L'article L. 162-5-3 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé
:
«
Art. L. 162-5-3. - I. - Lorsque, à l'occasion de l'analyse annuelle
des résultats de l'exercice, les parties conventionnelles constatent un
dépassement de l'objectif prévisionnel, elles recensent les postes de dépenses
concernés et arrêtent, dans l'annexe annuelle mentionnée à l'article L.
162-5-2, la liste des contrats locaux d'objectifs et de moyens applicables à
ces postes pour l'année suivante.
« Avant le 1er mars de l'exercice suivant, les contrats locaux d'objectifs et
de moyens conclus dans chaque circonscription de caisse par les représentants
des parties conventionnelles fixent, pour chacun de ces postes, l'objectif
d'activité à ne pas dépasser par chaque médecin conventionné au cours dudit
exercice en fonction :
« 1° Du respect des objectifs mentionnés aux troisième (1°) et quatrième (2°)
alinéas de l'article L. 162-5-2 ;
« 2° De l'évolution du niveau relatif et des caractéristiques de l'activité du
médecin, notamment en ce qui concerne ses prescriptions ;
« 3° Des évaluations réalisées par l'union des médecins exerçant à titre
libéral et mentionnées à l'article 8 de la loi n° 93-8 du 4 janvier 1993 ;
« 4° Des actions de formation médicale continue visées à l'article L. 367-2
;
« 5° De l'importance des dépassements d'honoraires ;
« 6° Du respect des références médicales opposables.
« Chaque médecin est informé, dans un délai de huit jours, des éléments
établis dans le contrat local d'objectifs et de moyens.
« En fin d'exercice, la progression moyenne de l'activité du médecin constatée
au cours de cet exercice et du précédent est comparée à celle de l'objectif
prévisionnel d'évolution des dépenses médicales au titre de ces deux exercices.
En cas de dépassement, le médecin est redevable, selon des modalités
déterminées par décret, de l'intégralité du dépassement.
«
II. - Un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions dans
lesquelles, en l'absence de dispositions conventionnelles prévues par le I
ci-dessus ou en cas de carence des parties à la convention, les organismes du
régime général de l'assurance maladie mettent en oeuvre les dispositions
prévues par le présent article. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Charles Descours,
rapporteur. Cet amendement constitue un des principaux points de
difficulté dans la discussion de ce projet de loi.
Le premier concernait, je le rappelle, le fonds de réserve, le deuxième, la
politique familiale, et voici le troisième ; il s'agit de ce qu'on appelle
pudiquement, en langage technocratique, le mécanisme de régulation des dépenses
reposant sur la mise en oeuvre de lettres clés flottantes et de sanctions
collectives. En tout cas, c'est ainsi que le système a été perçu par les
médecins.
Avec ces sanctions collectives, on est arrivé à un véritable butoir. C'était
vrai sous le gouvernement Juppé, c'est vrai sous le gouvernement Jospin. Il
faut en sortir !
La commission avait proposé, en première lecture, de substituer à ce
dispositif de régulation comptable des dépenses un mécanisme de maîtrise
médicalisée et individualisée, compatible avec le respect, à la fois de la
qualité des soins et des objectifs de dépenses définis à la suite du vote
annuel du Parlement.
L'Assemblée nationale n'a pas souhaité retenir ce dispositif. Elle a préféré
suivre le Gouvernement, qui semble s'être souvenu, à la suite de l'exposé des
arguments de la Haute Assemblée, de l'existence d'instruments de maîtrise
médicalisée des dépenses.
Conscient que l'institution du mécanisme des lettres-clés flottantes - même si
cette expression ne figure pas dans le projet de loi, madame la ministre -
était légitimement mal perçue par les médecins, le Gouvernement a procédé à une
espèce de dissimulation - moyennement habile - de cette institution par un
artifice de rédaction.
Aux termes du texte adopté par les députés en nouvelle lecture, en effet, les
partenaires conventionnels ou le Gouvernement pourront décider, en cours
d'année, en cas de dérapage des dépenses, toutes mesures de nature à garantir
le respect de l'objectif, et notamment « des actions d'information des
médecins, de promotion des références médicales opposables et des
recommandations de bonne pratique ou, le cas échéant, des ajustements de tarifs
».
Lorsqu'on parle d'ajustements de tarifs en médecine, il s'agit, je le répète,
de la lettre C, de la lettre K, de la lettre Z, etc. Par conséquent, ce sont
bien des lettres clés flottantes.
Afin de prendre en considération les revendications d'un syndicat de médecins
spécialistes, le Gouvernement a souhaité préciser que l'ensemble de ces mesures
pourrait être « adapté par spécialité médicale ». On comprend bien le désir du
Gouvernement de trouver quelqu'un pour signer une convention pour les
spécialistes. Mais cette précision n'apporte pas grand-chose, étant entendu que
l'une des caractéristiques majeures d'un dispositif de lettres clés flottantes
est de pouvoir être adapté par spécialité. Elle ne saurait donc être comprise
comme autorisant la fixation possible d'un objectif de dépenses par spécialité,
qui est reconnue aux partenaires conventionnels dans le droit en vigueur, comme
dans le texte adopté par le Sénat, qui ne l'a pas modifié sur ce point.
L'autre modification introduite par l'Assemblée nationale par rapport au texte
qu'elle a adopté en première lecture, elle aussi sur l'initiative du
Gouvernement, revêt une portée qui nous paraît symbolique. Elle consiste, en
effet, à prévoir que la contribution versée, en fin d'année, par les médecins «
fera l'objet d'un abattement forfaitaire déterminé par décret en Conseil d'Etat
».
Cette précision revêt une portée d'autant plus limitée que le texte initial du
projet de loi prévoyait déjà qu'« un décret en Conseil d'Etat détermine les
conditions dans lesquelles le montant exigible de l'ensemble des médecins
conventionnés... est calculé en fonction des honoraires perçus et des
prescriptions réalisées ».
Par conséquent, selon cette rédaction, même légèrement modifiée en nouvelle
lecture à l'Assemblée nationale par le Gouvernement, les médecins restent
soumis aux lettres clés flottantes et aux reversements. Ils pourront se
demander si, de surcroît, le Gouvernement ne les considère pas comme un peu
naïfs.
Dans ces conditions, je vous propose de rétablir le texte tel que nous
l'avions voté en première lecture. Il faut vraiment sortir des sanctions
collectives. Je rappelle que
errare humanum est, perseverare diabolicum
!
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité. Monsieur le rapporteur, vous ne
faites peur qu'à vous-même, car personne, y compris les syndicats de médecins,
n'a eu cette lecture du texte.
(M. le rapporteur s'exclame.)
Heureusement, les mots ont un sens ! Le mécanisme des lettres clés flottantes
- vous y êtes défavorable, mais le Gouvernement l'est également - entraînerait
une augmentation ou une diminution du prix du montant des lettres clés en
fonction de l'évolution des dépenses. Il s'agirait d'ajustements totalement
automatiques. Ce serait une aberration, je vous le concède. Nous n'avons donc
jamais pensé instaurer un tel mécanisme ! D'ailleurs, aucune organisation de
médecins n'a pensé que nous le ferions.
En revanche, nous avons dit qu'en présence de dérapages exceptionnels et en
l'absence d'accord conventionnel pour pouvoir y remédier, il était possible que
le Gouvernement modifie les lettres clés. Cette faculté a toujours existé, je
tiens à vous le rappeler, y compris avec les ordonnances Juppé. Vous ne vous
êtes jamais privés de cette possibilité ! Nous avons souhaité l'exprimer très
clairement dans la loi au moyen de l'adverbe « notamment », qui montrait bien
que cette modification n'était pas automatique, qu'il s'agissait d'une mesure
parmi d'autres.
Pour répondre à votre souhait - essentiellement au vôtre, d'ailleurs, monsieur
le rapporteur, car personne d'autre n'avait les mêmes craintes - nous avons
intégré dans le texte - mais je le regrette, puisque cela ne suffit pas à vous
convaincre, à moins que vous ne fassiez semblant de ne pas être convaincu - les
mesures que vous proposiez, assorties des indications orales que j'avais
données : lorsqu'il y aura dépassement, nous prendrons toutes les mesures
utiles pour « rentrer dans les clous », à savoir information des médecins,
références mieux appliquées, évaluation des pratiques et, dans des cas que
j'espère exceptionnels - peut-être ne se produiront-ils jamais ! - une
évolution des lettres clés.
Par conséquent, je croyais vous faire plaisir, monsieur le rapporteur. Je suis
désolée que cette rédaction, qui reprenait quasi intégralement ce que vous
aviez souhaité, ne vous donne toujours pas satisfaction. Décidément, il vous en
faut vraiment beaucoup ! Mais, heureusement, les syndicats de médecins, eux,
ont bien compris.
Aussi, je suis évidemment défavorable à votre amendement.
M. Charles Descours,
rapporteur. Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Charles Descours,
rapporteur. Je souhaite tout de même rassurer Mme la ministre : depuis
que j'ai déposé cet amendement, j'ai reçu un certain nombre de félicitations de
syndicats de médecins, ce qui ne m'était pas arrivé depuis longtemps !
Par ailleurs, vous avez décidé de ponctionner 450 millions de francs aux
radiologues en juillet 1998, en faisant baisser de 13 % leur lettre clé.
Maintenant que ces 450 millions de francs sont récupérés, allez-vous augmenter
la lettre clé tout de suite ? Telle est la question que m'ont posée les
radiologues.
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité. Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à Mme le ministre.
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité. M. le rapporteur a fait
l'exacte démonstration de ce que je viens de dire : si nous avons pu, au mois
de juillet, baisser la lettre clé des radiologues, c'est que cela était rendu
possible par les ordonnances Juppé, sans quoi nous n'aurions pas pu le
faire.
M. Charles Descours,
rapporteur. Je ne suis pas contre !
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité. Par conséquent, prévoir dans la
loi que le Gouvernement peut, dans des cas exceptionnels, baisser les lettres
clés n'est pas une innovation.
Nous rendrons peut-être publiques, dans quelques jours, les dépenses exactes
des spécialistes cette année. Vous verrez que les radiologues ont une part
majeure dans les dépassements actuels.
M. Charles Descours,
rapporteur. Je sais !
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité. On ne peut pas à la fois prôner
la rigueur et accepter qu'une profession qui, à elle seule, compte pour moitié
dans les dépassements des honoraires n'accomplisse aucun effort.
D'ailleurs, si je n'avais pas pris cette mesure, vous me l'auriez reproché
!
Maintenant, la porte est ouverte ! Nous pouvons discuter avec les radiologues.
Nous pouvons voir avec eux comment mettre en place d'autres pratiques : que
l'auto-prescription n'entraîne pas systématiquement - pour certains - un
scanner quand on fait une radio, que nous puissions mieux travailler au
forfait, comme c'est le cas dans d'autres pays, bref, que nous évoluions vers
des pratiques beaucoup plus modernes.
Mon bureau est ouvert ; celui de Bernard Kouchner l'est aussi. Nous
discuterons avec les radiologues dès qu'ils accepteront de le faire. Mais nous
ne pouvons pas admettre que l'ensemble des spécialistes, notamment ceux qui
respectent totalement les règles fixées par le Parlement - je pense, par
exemple, aux pédiatres - paient pour ceux qui n'acceptent pas de rentrer dans
cette logique, alors même que la sécurité sociale solvabilise leurs clients.
(Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 27, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 21 est ainsi rédigé.
Article 22