Séance du 6 décembre 1998







M. le président. « Titre III : 94 188 268 francs. »
Par amendement n° II-30, M. Marini, au nom de la commission des finances, propose de réduire ces crédits de 13 178 620 francs.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, il s'agit d'un modeste amendement.
C'est le dernier de la série, monsieur le ministre ! Nous achevons donc avec vous cet exercice quelque peu astreignant, mais tout à fait passionnant.
La commission des finances, dans le cadre du budget alternatif qu'elle a conçu, vous demande un petit effort sur le titre III, à savoir une réduction de l'ordre de 13 millions de francs, qui s'applique à un total de l'ordre de 580 millions de francs.
Il convient de rappeler que, dans l'épure que vous nous avez présentée, les crédits dont il s'agit progressent de 29 millions de francs. Ils resteront donc en inflexion positive dans l'hypothèse où notre réduction serait appliquée.
De plus, nous avons veillé à ce que vous puissiez honorer l'accord salarial dans la fonction publique, qui nécessite 10 millions de surcoût sur ce titre III.
Mes chers collègues, il s'agissait là - mais je ne m'attarderai pas sur ce sujet que vous connaissez déjà fort bien les uns et les autres - des quelques éléments d'explication que je pouvais vous donner.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Monsieur le président, l'avis du Gouvernement est défavorable pour une raison simple : je regrette que mon budget ne soit pas un peu plus important, notamment pour ce qui a trait à la formation et à la sécurité ; si l'on me propose de réduire les crédits, je ne peux pas l'accepter.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° II-30.
Mme Odette Terrade. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à Mme Terrade.
Mme Odette Terrade. L'amendement n° II-30 de M. Marini et de la commission des finances, dans la logique des amendements déposés et votés par la droite sénatoriale depuis le début de l'examen de la deuxième partie de cette loi de finances, vise à soustraire plus de 13 millions de francs des crédits du titre III alloués au budget de la mer.
Cette réduction affecterait non seulement les rémunérations du personnel, mais aussi les retraites des marins, sacrifiés sur l'autel de la rigueur budgétaire que défend la majorité sénatoriale.
Les moyens de fonctionnement des écoles nationales de la marine marchande seraient lésés, de même que les opérations d'entretien du littoral et de lutte contre la pollution des hydrocarbures.
Je doute que les populations vivant près du littoral - certaines ont connu des drames écologiques, notamment celui de l' Amoco Cadiz - comprennent cette obstination de la droite à préférer le corsetage budgétaire à la sécurité du littoral, d'autant qu'un littoral protégé ne peut que favoriser le flux touristique et donc conforter notre excédent économique.
Ainsi, en réduisant les crédits, la droite menace le devenir de notre économie, plus particulièrement de notre économie littorale.
C'est la raison pour laquelle le groupe communiste républicain et citoyen votera contre cet amendement.
M. Henri Weber. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Weber.
M. Henri Weber. Le groupe socialiste votera également contre cet amendement, pour les mêmes raisons.
Si l'on considère les coupes claires qui nous sont suggérées depuis maintenant deux semaines,...
M. Philippe Marini, rapporteur général. On aboutit à 14 milliards de francs !
M. Henri Weber ... on voit clairement la configuration du budget auquel notre pays a échappé. Il faudra la rendre publique.
Il y a, d'une part, les déclarations que font les membres de la majorité sénatoriale à la tribune, certains regrettant la timidité du ministre sur certains titres et, d'autre part, le couperet du 1 %, qui s'applique automatiquement, sans que l'on nous précise les chapitres visés.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Si !
M. Henri Weber. La somme de toutes ces réductions laisse apparaître une vision assez inquiétante pour nos concitoyens. Nous la rendrons largement publique, pour qu'ils sachent à quel budget ils ont échappé !
M. Jean-Pierre Fourcade. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Fourcade.
M. Jean-Pierre Fourcade. Je comprends que M. le ministre s'inquiète de la réduction de ses crédits.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. D'autant qu'ils ne sont pas assez élevés !
M. Jean-Pierre Fourcade. Mais, monsieur le ministre, permettez-moi de faire deux observations.
Tout d'abord, le déficit prévisionnel du budget de l'Etat pour 1999 a été arrêté à 2,7 % du PIB. Ce n'est que grâce à l'effort d'économie demandé aux collectivités locales et à la sécurité sociale - et encore peut-on en douter - que ce déficit sera ramené à 2,3 %.
Tout le monde s'accorde aujourd'hui à reconnaître que les hypothèses économiques de croissance sur lesquelles s'appuient le projet de budget et la prévision de déficit risquent de ne pas être atteintes.
Par conséquent, monsieur le ministre, si ce n'est pas le Sénat qui réduit vos crédits, je peux vous annoncer que vous serez victime, dès le mois de janvier, d'un décret d'économies venant du ministère des finances.
Nous, nous sommes cohérents. Nous estimons que la masse budgétaire, dans une période économique difficile, alors qu'une crise s'annonce - il suffit de voir ce qui se passe aux Etats-Unis et en Grande-Bretagne - doit être légèrement réduite afin que le déficit de l'Etat n'excède pas ce qui a été prévu par le traité de Maastricht.
C'est la raison pour laquelle, tout en regrettant que l'on réduise les crédits portant sur des mesures qui vous tiennent à coeur, je voterai cet amendement, comme j'ai voté le précédent, car nous essayons d'élaborer un budget réaliste.
Je conseille vivement à mes collègues socialistes et communistes de diffuser largement le travail du Sénat : chacun pourra ainsi constater que les économies réalisées par la Haute Assemblée aujourd'hui sont inférieures à celles que sera obligé de faire le Gouvernement dans deux mois. (Applaudissements sur les travées du RPR et de l'Union centriste.)
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Monsieur Fourcade, je vois que votre souci n'est donc plus seulement de réduire les dépenses de fonctionnement de mon ministère, mais aussi de réduire plus globalement le budget de l'Etat. La majorité sénatoriale sort ainsi de la logique qui a prévalu l'an passé. Elle voulait alors réduire les dépenses de fonctionnement parce qu'on dépensait trop.
Cette année, vous vous placez sur un autre terrain. C'est intéressant à savoir.
Vous nous dites : la croissance risque de ne pas être aussi élevée que ce qui avait été prévu et, de toute façon, même si vous ne nous voulez pas réduire les crédits de 1 %, vous y serez obligé.
Eh bien ! figurez-vous que je n'ai pas envie de sombrer dans ce fatalisme.
Pour cela, il faut commencer par ne pas accepter une vision économique pessimiste de déclin ou de déflation. Au contraire, il faut tout faire pour établir un budget réaliste qui permette de maintenir et l'emploi et la croissance. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur les travées socialistes.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-30, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, modifiés par cet amendement et par l'amendement n° II-27 rectifié, précédemment adopté par le Sénat, les crédits figurant au titre III.

(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président. « Titre IV : 2 699 901 146 francs.