Séance du 7 décembre 1998







M. le président. « Art. 64 B. _ I. _ Le code général des impôts est ainsi modifié :
« 1° Le 1 du II de l'article 163 tervicies est ainsi rédigé :
« 1. Les investissements mentionnés au I et dont le montant total par programme est supérieur à 2 000 000 francs ne peuvent ouvrir droit à déduction que s'ils ont reçu un agrément préalable du ministre chargé du budget dans les conditions prévues aux deuxième et troisième alinéas du III de l'article 217 undecies . » ;
« 2° Le premier alinéa du III de l'article 217 undecies est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Il en est de même des autres investissements et souscriptions au capital mentionnés au I, au II et au II ter, réalisés à compter du 1er janvier 1999 lorsque leur montant excède par programme 2 000 000 francs. »
« II. _ Les dispositions des 1° et 2° du I s'appliquent pour les investissements réalisés à compter du 1er janvier 1999 à l'exception des immeubles ayant fait l'objet avant cette date d'une déclaration d'ouverture de chantier à la mairie de la commune et des biens meubles corporels commandés, mais non encore livrés à cette date, si la commande a été accompagnée du versement d'acomptes égaux à 50 % au moins de leur prix. »
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° II-106, M. Marini, au nom de la commission des finances, propose :
A. - Avant le 1° du I de cet article, d'insérer un alinéa ainsi rédigé :
« ...° Le premier alinéa du I de l'article 163 tervicies est complété par les mots : "ou d'une concession de travaux publics". »
B. - Pour compenser la perte de recettes résultant du A ci-dessus, de compléter in fine cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... La perte de recettes résultant pour l'Etat de l'extension de la possibilité de déduction du montant des investissements du revenu ou du résultat imposable aux concessions de travaux publics est compensée par la majoration, à due concurrence, des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Par amendement n° II-79, M. Flosse propose, avant le 1° du I de l'article 64 B, d'ajouter un alinéa ainsi rédigé :
« ...° Le premier alinéa du I de l'article 163 tervicies est complété par les mots : "ou d'une concession de travaux publics". »
Cet amendement a été retiré.
La parole est à M. le rapporteur général, pour défendre l'amendement n° II-106.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Nous sommes toujours, mes chers collègues, dans le domaine de la loi Pons, dont il s'agit de préciser un élément.
La loi prévoit que les investissements nécessaires à l'exploitation d'une concession de service public local à caractère industriel et commercial sont déductibles du revenu ou du résultat imposable.
Or une jurisprudence du Conseil d'Etat ne considère pas les concessions d'ouvrage comme des services publics industriels et commerciaux. Pourtant, le système de la concession permet de faire financer efficacement la mise à niveau de certaines infrastructures dans les départements et territoires d'outre-mer par les usagers et non par les contribuables.
Il est donc souhaitable d'encourager ce procédé et de faire entrer les travaux dont il s'agit dans le champ de la loi Pons.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Cet amendement est soit sans portée, soit vraiment inacceptable.
Il est sans portée lorsqu'il s'agit de concessions de travaux publics pour la construction des ouvrages nécessaires à l'exploitation du service puisque ces ouvrages sont déjà éligibles au régime de défiscalisation si toutes les autres conditions sont réunies. La question ne se pose donc pas.
En revanche, s'il s'agit de défiscaliser des infrastructures réalisées dans le cadre de concessions de service public administratif, telles que des autoroutes à péage, cela revient à faire financer par le contribuable privé des investissements qui constituent le coeur de la prérogative publique en matière d'investissement sans aucune garantie quant à la réalité des recettes liées à l'exploitation.
Cette analyse a d'ailleurs été confirmée par un grand cabinet d'audit et de conseil qui a travaillé sur cette question à la demande de la fédération des entreprises des départements d'outre-mer.
Dans ces conditions, sans même évoquer le coût budgétaire élevé de la mesure, le Gouvernement émet un avis défavorable.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. J'ai bien noté que la réponse de M. le ministre avait une facette positive et une autre, sur le fond, qui l'était moins.
Compte tenu du fait qu'il convient sans doute d'étudier cette question un peu plus dans le détail, je crois préférable de retirer l'amendement, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° II-106 est retiré.
Par amendement n° II-107, M. Marini, au nom de la commission des finances, propose de compléter le 1° du I de l'article 64 B par un alinéa ainsi rédigé :
« ...° Le deuxième et le troisième alinéa du I de l'article 217 undecies du code général des impôts sont supprimés. »
La parole est à M. le rapporteur général. M. Philippe Marini. Cet amendement et le suivant reflètent les mêmes préoccupations.
Le texte adopté par l'Assemblée nationale remplace le système de l'accord préalable du secrétaire d'Etat au budget à la réalisation de certains investissements par le système plus formel de l'agrément.
Le texte actuel de l'article 64 B supprime la référence à l'accord préalable s'agissant des investissements dont le montant est déductible de l'impôt sur le revenu, mais il oublie de supprimer cette même référence pour les investissements dont le montant est déductible de l'impôt sur les sociétés. Je crois, monsieur le secrétaire d'Etat, qu'il faut réparer cet oubli, afin de ne pas laisser subsister une disposition imparfaite dans le code général des impôts.
Voilà pourquoi je qualifie cet amendement d'amendement de conséquence par rapport au texte voté à l'Assemblée nationale.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. En réalité, cet amendement me semble inutile, car la procédure d'autorisation préalable que l'on propose de supprimer ne pourra plus être mise en oeuvre, compte tenu de l'extension du champ d'application de l'agrément qui a été votée par l'Assemblée nationale.
La suppression de cette procédure d'autorisation préalable s'effectuera par décret de codification dans le code général des impôts.
Autrement dit, tout cela peut se faire sans recourir à la procédure solennelle d'un amendement du rapporteur de la commission des finances du Sénat.
Je demande donc le retrait de l'amendement, faute de quoi l'avis du Gouvernement sera défavorable.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Pour des raisons d'ordre juridique, je ne peux absolument pas souscrire à la réponse que vient de faire M. le secrétaire d'Etat.
Sur le fond nous sommes d'accord, je l'ai bien compris. Cela étant, le Gouvernement nous dit que la disposition devenue inutile dans le code général des impôts sera supprimée par un texte réglementaire au titre de la codification. Quant à la commission, elle demande qu'un amendement soit voté, comme il est logique que nous le fassions à l'instant même, pour rectifier le texte de loi.
Il faut remettre la codification à sa place, monsieur le secrétaire d'Etat. C'est une question de principe dont nous discutons souvent. La codification est à droit constant, et c'est le législateur qui fait le droit. Par conséquent, c'est au législateur qu'il appartient de corriger l'imperfection résultant d'une incohérence de texte, et ce n'est qu'une fois que celle-ci est corrigée que le texte est incorporé dans le code correspondant au titre de la codification à droit constant.
M. Michel Charasse. C'est exact !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je me dois donc de maintenir cet amendement pour des raisons de principes juridiques.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-107, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° II-108, M. Marini, au nom de la commission des finances, propose de compléter le 1° du I de l'article 64 B par un alinéa ainsi rédigé :
« ... ° Le deuxième et le troisième alinéa du II de l'article 217 undecies du code général des impôts sont supprimés. »
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet amendement, je l'ai dit, a le même objet que le précédent. Il tire la conséquence des votes intervenus à l'Assemblée nationale.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Même commentaire que précédemment.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-108, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° II-109, M. Marini, au nom de la commission des finances, propose :
I. - De compléter le I de l'article 64 B par deux alinéas ainsi rédigés :
« ... ° Le début de la première phrase du deuxième alinéa du III de l'article 217 undecies est ainsi rédigé :
« L'agrément est accordé,... (le reste sans changement). »
II. - Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, de compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
« La perte de recettes résultant pour l'Etat de la création d'une compétence liée pour l'administration est compensée par la majoration, à due concurrence, des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Le code général des impôts subordonne la délivrance de l'agrément prévu par la loi Pons à des conditions particulièrement strictes.
En effet, les investissements dont le montant peut être déduit du revenu ou du résultat imposable doivent être conformes à plusieurs critères : présenter un intérêt économique, être favorables à l'emploi, s'intégrer dans la politique d'aménagement du territoire et garantir la protection des investisseurs et des tiers.
Un investisseur dont le projet répondrait à ces quatre critères est, me semble-t-il, en droit d'attendre que l'agrément lui soit automatiquement accordé. C'est l'objet de cet amendement.
Je souligne, monsieur le secrétaire d'Etat, qu'un amendement de même nature a été adopté sur l'initiative de la commission des finances du Sénat, sur proposition du rapporteur général, M. Alain Lambert, à l'article 77 du projet de loi portant diverses dispositions d'ordre économique et financier de cette année.
Vous aviez alors donné un avis favorable à la transformation d'une compétence facultative du secrétaire d'Etat au budget en compétence liée ; j'espère qu'il vous sera possible de réitérer cet avis favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Sur cet amendement qui me paraît surtout rédactionnel, je m'en remets à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-109, pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° II-110, M. Marini, au nom de la commission des finances, propose :
A. - De compléter l'article 64 B par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... Le I de l'article 163 tervicies du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Pour l'application de la déduction prévue au premier alinéa, les exonérations fiscales accordées par les collectivités territoriales des départements et territoires mentionnés au premier alinéa ne sont pas considérées comme des subventions publiques. »
B. - Pour compenser la perte de recettes résultant du A ci-dessus, de compléter l'article 64 B par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... La perte de recettes résultant pour l'Etat de l'interdiction de considérer les exonérations fiscales consenties par les collectivités territoriales des départements et territoires d'outre-mer comme des subventions publiques est compensée par la majoration, à due concurrence, des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Par amendement n° II-80 rectifié, M. Flosse propose de compléter l'article 64 B par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... Pour l'application des dispositions du I de l'article 163 tervicies du code général des impôts, le terme de subvention publique ne s'applique pas au bénéfice des exonérations fiscales accordées par les collectivités d'outre-mer pour inciter au développement des investissements. »
Cet amendement a été retiré.
La parole est à M. le rapporteur général, pour présenter l'amendement n° II-110.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Par-delà même l'outre-mer, cet amendement porte sur un point de principe non négligeable du droit fiscal.
Il tend à remédier à l'interprétation - à notre sens, extensive - de la notion de subvention publique telle qu'elle est donnée par l'administration fiscale.
La loi Pons, pour revenir à elle, prévoit que les contribuables peuvent déduire de leur revenu net global une somme égale au montant des investissements diminuée du montant des subventions publiques reçues.
Le secrétariat d'Etat au budget, en l'absence de circulaire sur ce point, me semble-t-il, a déjà considéré, en matière d'hôtellerie notamment, que les exonérations fiscales consenties aux entreprises par les collectivités territoriales d'outre-mer étaient assimilables à des subventions publiques. Par conséquent, les investisseurs doivent réduire d'autant le montant déductible de leur impôt sur le revenu.
De ce fait, certaines collectivités territoriales, qu'il s'agisse de territoires bénéficiant d'une certaine autonomie fiscale, comme la Polynésie, ou de territoires plus proches du droit commun fiscal de la République, peuvent, dans le cadre de leurs compétences, accorder, à leur niveau, des exonérations, des incitations supplémentaires à l'investissement qui, paradoxalement, viennent atténuer l'impact de la défiscalisation permise par la loi Pons.
Nous souhaitons donc, monsieur le secrétaire d'Etat, qu'il y ait complémentarité et non concurrence entre les dispositifs d'incitation à l'investissement productif outre-mer.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Là, c'est non plus la rédaction mais le fond qui est en cause puisque l'amendement vise non pas à préciser la loi existante mais à la modifier, monsieur le rapporteur général.
On s'en souvient, l'an dernier, le législateur a voulu réduire la base défiscalisable des investisseurs du montant des subventions publiques, que ces subventions soient fiscales ou budgétaires, afin d'éviter qu'il n'y ait des aides qui se superposent.
Si vous réintroduisez les subventions publiques dans la base défiscalisable, vous revenez - c'est votre droit de le proposer ! - sur une partie de la réforme qui avait été faite l'an dernier.
Vous comprendrez que le Gouvernement, fidèle aux décisions prises par le législateur l'an dernier, s'y oppose.
J'ajoute qu'au demeurant l'amendement ne semble pas gagé. Mais je ne veux pas insister sur ce point.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-110, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 64 B, modifié.

(L'article 64 B est adopté.)

Article 64 C