Séance du 14 décembre 1998
M. le président.
Je suis saisi de trois amendements présentés par Mme Beaudeau, MM. Loridant et
Foucaud, les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 34 tend à insérer, avant l'article 14, un article additionnel
ainsi rédigé :
« I. - A la fin de la première phrase de l'article 1414
bis du code
général des impôts, la somme "1 500 francs" est remplacée par la somme "1 200
francs".
« II. - Les droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts
sont relevés à due concurrence. »
L'amendement n° 35 vise à insérer, avant l'article 14, un article additionnel
ainsi rédigé :
« I. - A la fin du premier alinéa de l'article 1414 A du code général des
impôts, la somme : "1 563 francs" est remplacée par la somme : "1 500
francs".
« II. - Les droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts
sont relevés à due concurrence. »
L'amendement n° 36 a pour objet d'insérer, avant l'article 14, un article
additionnel ainsi rédigé :
« I. - Dans la première phrase du premier alinéa de l'article 1414 C du code
général des impôts, le pourcentage : "3,4 %" est remplacé par le pourcentage :
"3 %" ».
« II. - Dans la deuxième phrase du même alinéa, le pourcentage : "50 %" est
remplacé par le pourcentage : "60 %".
« III. - Les droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des
impôts sont relevés à due concurrence des I et II ci-dessus. »
La parole est à M. Foucaud, pour défendre ces trois amendements.
M. Thierry Foucaud.
Les amendements n°s 34, 35 et 36 visent à réduire la pression fiscale pesant
sur les ménages à revenus modestes et très modestes. Cet impôt ne prend que
très partiellement en compte le revenu des ménages dans son calcul.
Depuis plus de trente ans, vous le savez, des mécanismes ont été mis en place
afin d'alléger les contributions en matière de taxe d'habitation. C'est le cas
notamment de la loi de finances pour 1998 qui a permis à de nouveaux
bénéficiaires de disposer des dégrèvements d'office de taxe d'habitation.
Malgré ces mesures, la charge de cet impôt local est un poids énorme pour les
familles.
Monsieur le secrétaire d'Etat, monsieur le rapporteur général, vous n'avez pas
été favorables à une réduction du taux de 3,4 % à 2 % lors du débat sur le
projet de loi de finances pour 1999.
Cependant, eu égard à l'énorme charge que représente la taxe d'habitation pour
les ménages et aux difficultés grandissantes de ceux-ci à faire face à la
crise, notre groupe ne peut se résigner à attendre la réforme de la taxe
d'habitation. D'autant plus qu'il semble qu'elle ne serait pas souhaitée par
l'ensemble du Gouvernement et que la date de sa présentation est reléguée à une
session ultérieure. C'est pourquoi nous vous proposons à nouveau des mesures en
faveur des ménages à revenus modestes.
Ainsi, en fixant le seuil prévu à l'article 1414
bis du code général
des impôts à 1 200 francs au lieu de 1 500 francs et celui qui est prévu à
l'article 1414 A du même code à 1 500 francs au lieu de 2 131 francs, nous
permettons à un certain nombre de familles d'économiser quelques centaines de
francs par an.
Ces deux amendements ont donc une répercussion immédiate sur le pouvoir
d'achat de nombreux ménages. Leur incidence financière est faible par rapport
au produit total généré par la taxe d'habitation.
Quant à l'amendement n° 36, nous le proposons régulièrement. Il vise à moduler
à la baisse le taux de prise en compte des revenus pour le calcul de la taxe
d'habitation. Nous retenons le taux de 3 % au lieu de 3,4 % afin de tenir
compte, monsieur le secrétaire d'Etat, monsieur le rapporteur général, des
griefs que vous formuliez, lors des débats sur la première partie du projet de
loi de finances.
Augmenter un tant soit peu la prise en compte des revenus dans le calcul de la
taxe d'habitation humanise cet impôt local, tout en le réconciliant avec le
principe de contribution commune « également répartie entre tous les citoyens,
en raison de leurs facultés », posé par l'article XIII de la Déclaration des
droits de l'homme et du citoyen.
La réduction de la charge de la taxe d'habitation pour les ménages modestes,
voire très modestes, est une mesure de justice sociale, que nous souhaitons
voir adoptée.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 34, 35 et 36 ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général. Parmi les motivations qui ont été exprimées par M.
Foucaud, il en est une qui serait susceptible de nous faire réfléchir. Il
s'agit du retard pris dans la mise en oeuvre de la révision des bases
locatives.
Mon cher collègue, j'ai été de ceux qui se sont réjouis de constater que le
Gouvernement devenait raisonnable sur ce sujet et remettait son ouvrage sur le
métier. En effet, le dispositif de révision est susceptible d'engendrer des
conséquences difficiles à maîtriser dans certaines communes, et il est clair
que de nombreuses simulations sont encore nécessaires.
Si l'on envisage - et je comprends que c'est là le souci de notre collègue M.
Foucaud - le report de la réforme de la taxe d'habitation à une date un peu
plus lointaine, alors les préoccupations du groupe communiste républicain et
citoyen paraissent justifiées et légitimes, au moins dans leur principe.
Je pense donc que M. Foucaud s'incrit dans cette hypothèse ou alors je n'ai
pas compris l'objet de ses amendements.
En tout état de cause, la commission des finances souhaiterait, avant de se
prononcer, connaître l'avis du Gouvernement, en particulier sur l'amendement n°
34. Je compléterai mes appréciations après l'avoir entendu.
M. le président.
Quel est donc l'avis du Gouvernement sur ces trois amendements ?
M. Christian Sautter,
secrétaire d'Etat. M. Foucaud reprend une idée apparue l'an dernier, qui
tendait à prendre en compte la situation des familles en difficulté pour le
paiement de la taxe d'habitation. Je rappelle à la Haute Assemblée que c'est la
loi de finances pour 1996, que la Haute Assemblée avait adoptée, qui avait
considérablement durci les conditions pour bénéficier d'un dégrèvement de la
taxe d'habitation.
L'article 27 de la loi de finances pour 1998 prévoyait un dégrèvement
important, même s'il peut être jugé insuffisant, auquel la nouvelle majorité et
toutes ses composantes n'étaient pas étrangères. Vous proposez donc, par
l'amendement que vous avez déposé, de faire, un an après, un nouveau pas dans
cette voie.
Le Gouvernement, en la matière, entend en rester au dispositif prévu en 1998,
parce qu'il est important même s'il est insuffisant, mais surtout parce que,
contrairement aux insinuations courtoises de M. le rapporteur général, nous
avons, d'une part, l'ambition de réformer les bases de la fiscalité directe
locale et, d'autre part, l'intention de réviser les valeurs locatives qui
permettent de calculer la taxe d'habitation mais aussi d'autres impôts locaux,
comme les impôts fonciers, voire la taxe professionnelle.
Si certaines familles doivent actuellement acquitter une taxe d'habitation qui
est très lourde à supporter pour elles, c'est parce que les valeurs locatives
du logement dans lequel elles vivent sont celles de 1971, qui ont été
grosso
modo revalorisées d'année en année en fonction de la hausse des prix. Or,
nous le savons tous, la valeur de nombre de ces logements sociaux n'a pas suivi
l'évolution du coût de la vie. De nombreuses familles qui vivent donc dans des
logements sociaux paient une taxe d'habitation excessive, tout simplement parce
que les bases sur lesquelles elle est calculée ne correspondent plus à la
réalité.
La priorité du Gouvernement - et je réponds par là non seulement à M. Foucaud,
mais aussi à M. Marini - est non pas de maintenir un système vieilli et
injuste, mais de passer à des bases plus actuelles, celles de 1990, peut-être
corrigées à la marge.
Pourquoi une telle disposition ne figure-t-elle pas dans le projet de loi de
finances rectificative dont nous débattons ? Tout simplement parce qu'il s'agit
d'un dispositif important qui ferait l'objet d'une trentaine d'articles. Il
aurait été donc difficile de les examiner dans les temps qui nous sont
impartis.
M. Philippe Marini,
rapporteur général. Nous ne sommes pas pressés !
M. Christian Sautter,
secrétaire d'Etat. En effet n'oublions pas que, s'agissant du collectif
budgétaire, des délais constitutionnels sont prévus.
M. Philippe Marini
rapporteur général. Sur cette réforme, nous ne sommes pas pressés.
M. Christian Sautter,
secrétaire d'Etat. Je n'en suis pas surpris car les bénéficiaires de
cette réforme sont les familles les plus modestes...
(Protestations sur les
travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union
centriste.)
M. Michel Charasse.
Ça, c'est vrai !
M. Christian Sautter,
secrétaire d'Etat. ... qui vivent dans des logements locatifs dont la
valeur est actuellement surestimée !
Comme cette réforme doit bien évidemment se faire à ressources constantes pour
les communes, les départements et les régions, si les familles modestes voient
leur taxe d'habitation diminuer, d'autres familles la verront augmenter. Et
votre réaction, monsieur le rapporteur général, montre que vous avez très bien
compris le sens de la réforme que nous prévoyons d'engager.
Cela dit, il faut procéder à des simulations pour voir comment cette réforme
s'appliquerait dans un certain nombre de communes et de départements.
L'orientation du Gouvernement est claire : nous réviserons les bases locatives
parce que, dans leur ensemble, les logements sociaux, publics ou privés, en
tireront un avantage. Voilà qui permettra de répondre à l'appel lancé par M.
Foucaud. D'autres devront payer un peu plus. Il est normal, que chacun paie la
taxe d'habitation et l'impôt foncier en fonction de ses facultés.
Par conséquent, monsieur Foucaud, j'ai bien compris l'objet des trois
amendements que vous avez déposés. Je les considère comme un appel que vous
lancez pour que nous menions activement, mais tout en prenant certaines
précautions, cette réforme des bases locatives.
Nous saurons faire en sorte que cette réforme profite aux habitants des
logements modestes sans provoquer des hausses d'impôts locaux trop importantes
pour ceux qui auraient à les subir.
Ayant compris la préoccupation qui sous-tend vos amendements, je vous demande
donc, monsieur Foucaud, de les retirer, sinon je serais obligé de dire que le
Gouvernement en reste au dispositif inscrit dans la loi de finances pour
1998.
M. le président.
Quel est, dans ces conditions, l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général. J'ai bien entendu la position du Gouvernement. Pour
sa part, la commission a envisagé de s'en remettre à la sagesse du Sénat sur
l'amendement n° 34 et elle a émis un avis défavorable sur les amendements n°s
35 et 36.
Toutefois, s'agissant de la réforme des bases locatives, vos propos, monsieur
le secrétaire d'Etat, sont de portée très générale.
En effet, sur le terrain, on s'aperçoit que les choses sont sensiblement moins
simples et je voudrais, à ce sujet, vous donner une indication.
Comme nous le savons, le produit des impôts locaux ne variera pas en fonction
de la réforme que vous envisagez, puisqu'il s'agit d'un impôt de
répartition.
Vous savez également, monsieur le secrétaire d'Etat, que, parmi les familles
les plus modestes, nombreuses sont celles qui bénéficient d'abattements à la
charge de l'Etat, ces abattements atténuant très fortement - Dieu merci ! - le
poids de la taxe d'habitation qu'elles doivent acquitter.
Or, si votre réforme, telle que vous l'avez exposée, entrait en vigueur, il
est bien possible que, dans de nombreux cas, la diminution des valeurs
locatives se traduise par une baisse non pas de la cotisation d'impôts, mais
simplement de l'abattement à la charge de l'Etat et que, de ce fait, seul ce
dernier soit gagnant et non pas le contribuable modeste.
Monsieur le secrétaire d'Etat, bien des simulations portant sur des communes
qui comportent de nombreux logements sociaux peuvent susciter inquiétudes. D'un
côté, les ménages plus modestes ne ressentiront pas nécessairement toutes les
conséquences positives de la réforme et, de l'autre, ceux qui peuvent payer,
comme vous dites, verront leurs cotisations sensiblement majorées. Par
conséquent, tous les contribuables seront perdants ou très légèrement
gagnants.
Le vrai gagnant sera l'Etat, puisqu'il récupérera la contrepartie des
abattements qu'il n'aura plus à offrir aux contribuables les plus
défavorisés.
Il est difficile, ce soir, d'entrer dans le détail de points aussi complexes.
Des instances sont spécialisées en ce domaine. Ainsi, le Comité des finances
locales a mené des travaux très intéressants sur le sujet. Par ces souhaits, il
a d'ailleurs bien encadré la réforme éventuelle, car celle-ci ne peut entrer en
oeuvre trop rapidement ni avoir un impact trop brutal sur les cotisations
versées par les contribuables.
Je me permets d'exprimer le souhait que l'on poursuive les études, avec calme
et méthode, en prenant le temps nécessaire, en effectuant toutes les
simulations indispensables. En effet, il n'est pas à exclure que même certains
de vos amis viennent vous voir lorsqu'ils auront en main les conditions
effectives d'une éventuelle réforme, pour vous montrer le préjudice qui peut en
résulter pour nombre de catégories sociales.
Les choses sont nettement moins simples que ce que vous avez bien voulu nous
dire tout à l'heure.
M. Christian Sautter,
secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Sautter,
secrétaire d'Etat. Monsieur Marini, vous développez l'adage : « Pas de
réforme, bonne réforme », qui, malheureusement, est assez fréquent.
Vous avez cité le Comité des finances locales. Ce comité, qui mérite le
respect de la Haute Assemblée et du Gouvernement, a travaillé sur cette
réforme. Contrairement à ce que j'ai perçu à travers vos propos, monsieur le
rapporteur général, le comité, lui, n'est pas animé par la volonté, subtile, de
faire en sorte que cette réforme ne soit jamais mise en oeuvre. En 1996, il a
cherché les conditions permettant de mettre en oeuvre cette réforme, qui va
dans le sens de la justice.
Pour ma part, je m'inscris dans la trace du Comité des finances locales, au
sein duquel siègent des élus parfaitement respectables et proches du terrain,
plutôt que dans l'optique qui est la vôtre et qui consiste à dire : le plus
tard sera le mieux.
Nous aurons l'occasion d'en parler de nouveau l'an prochain. J'ai
effectivement tenu des propos généraux car le sujet est compliqué, mais il a
été étudié dans un esprit constructif par le Comité des finances locales. C'est
ce même esprit qui anime le Gouvernement dans sa volonté de réformer des bases
vieillies et injustes en matière d'impôts locaux.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 34.
M. Michel Charasse.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Charasse.
M. Michel Charasse.
Nous allons voter contre les trois amendements n°s 34, 35 et 36, puisque M.
Foucaud les a exposés ensemble.
Ce mini-débat qui vient de s'instaurer entre M. Foucaud et, surtout, la
commission des finances et M. le secrétaire d'Etat m'inspire quelques
réflexions.
Nous voterons contre ces amendements car on ne peut continuer à mettre sur le
dos de l'Etat des dégrèvements supplémentaires quand on sait le poids et le
coût astronomique des dégrèvements existants.
Chacun sait bien que la solution au problème posé par nos collègues et amis du
groupe communiste républicain et citoyen, c'est effectivement la révision des
bases, qui est demandée depuis longtemps, par tout le monde, qui a été faite en
1990 et que l'on n'a jamais appliquée jusqu'à présent.
En effet, mes chers collègues, elle effraie beaucoup de monde. Qu'est-ce que
la révision ? C'est une autre répartition. Il y a ceux que M. Foucaud défend -
nous pourrions les défendre aussi - qui souhaitent payer moins parce qu'ils
paient trop, et qui attendent cela avec impatience ; il y a ceux qui paient
moins ou qui ne paient pas assez et qui ne veulent pas payer plus. Dès lors,
c'est la quadrature du cercle.
Quand j'entends M. le secrétaire d'Etat dire que tout cela nécessite des
simulations supplémentaires - suivant d'ailleurs en cela, en partie, M. le
rapporteur général - je me dis : cela fait huit ans, on va passer à dix ans, on
n'en sortira jamais.
Ce débat, mesdames, messieurs, me fait penser à cette réflexion des deux curés
qui vont au concile et qui, en cours de route, discutent du mariage des
prêtres. L'un dit : « Nous, nous ne le verrons pas ! » L'autre lui répond : «
Nous non, mais nos enfants le verront ! »
(Sourires.)
Tels sont en tout cas les motifs, entre autres arguments, pour lesquels
nous ne voterons pas ces trois amendements.
M. Thierry Foucaud.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Foucaud.
M. Thierry Foucaud.
La révision n'est pas faite. Nous nous demandons si elle se fera, car elle
tarde. Nous pensons que certaines personnes ne peuvent plus attendre. Pour
cette raison, même si, nous le reconnaissons, un effort a été fait aujourd'hui,
nous maintenons les amendements n°s 34 et 35 et nous retirons l'amendement n°
36.
M. le président.
L'amendement n° 36 est retiré.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 34, repoussé par le Gouvernement et pour
lequel la commission s'en remet à la sagesse du Sénat.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 35, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 37, Mme Beaudeau, MM. Loridant, Foucaud et les membres du
groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, avant l'article
14, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 1636 B
sexies du code général des impôts est ainsi
rédigé :
«
Art. 1636 B sexies. - Sous réserve des dispositions des articles 1636
B
septies et 1636 B
decies, les conseils régionaux autres que
celui de la région d'Ile-de-France, les conseils généraux, les conseils
municipaux et les instances délibérantes des organismes de coopération
intercommunale dotés d'une fiscalité propre votent chaque année les taux des
taxes foncières, de la taxe d'habitation et de la taxe professionnelle.
« II. - Dans le I de l'article 1636 B
septies du même code, les mots :
"deux fois et demie" sont remplacés (deux fois), par les mots : "deux fois".
« III. - Dans le IV du même article, les mots : "deux fois" sont remplacés par
les mots : "deux fois et demie".
« IV. - Les droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts
sont relevés à due concurrence des I, II et III ci-dessus. »
La parole est à M. Foucaud.
M. Thierry Foucaud.
Cet amendement porte sur une question qui a déjà été posée lors de la
discussion du projet de loi de finances pour 1999, à savoir la déliaison des
taux de progression des quatre grands impôts directs locaux.
Il nous a d'ores et déjà été indiqué que cette question pourrait être réglées
en partie dans le cadre de la future loi sur l'intercommunalité ou dans celle
qui portera sur la taxe d'habitation, voire dans la mise en oeuvre de la
révision des valeurs cadastrales.
En effet, on ne peut, me semble-t-il, se satisfaire de la situation
actuelle.
S'agissant du principe de libre administration des collectivités
territoriales, le fait d'encadrer assez étroitement les marges de manoeuvre
existant sur les taux d'imposition locale ne laisse guère de place à une
approche globalement satisfaisante de la situation.
Chacun sait, ici, que, compte tenu des correctifs apportés par la loi en
matière de dégrèvements et d'allégements des cotisations des contribuables,
nous sommes désormais dans une situation où les variations de taux votées par
les collectivités locales ont comme seul effet d'accroître le montant des
dégrèvements accordés aux contribuables.
Si nous avons déposé cet amendement, c'est, entre autres raisons, pour
permettre, éventuellement, de recentrer l'effort principal accompli par l'Etat
en matière d'allégements fiscaux vers les impôts normalement dus par les
ménages.
On ne peut en effet oublier, dans le cadre de cette réflexion, que si une part
importante de la taxe professionnelle est finalement prise en charge par l'Etat
ou par les collectivités locales - je pense à la non-compensation intégrale de
l'allégement transitoire de 16 % - il n'en est pas de même pour les impôts dus
par les ménages.
La taxe d'habitation dégage ainsi un produit de plus de 70 milliards de
francs, dont environ 10 milliards de francs sont pris en charge à travers des
mesures de dégrèvement.
Quant à la taxe foncière sur les propriétés bâties, dont le rendement est de
l'ordre de 110 milliards de francs, le coût des mesures qui visent à en
corriger les effets s'élève, aujourd'hui, à un peu plus de 1,5 milliard de
francs.
Nous ferons d'ailleurs observer que, compte tenu du dynamisme particulier de
cette taxe, la pression fiscale qui en résulte pour les ménages est, chaque
année, plus difficile à supporter.
Par conséquent, nous serions particulièrement heureux de voir confirmée à
l'occasion de la nouvelle lecture du projet de loi de finances pour 1999 la
disposition que nous avons proposée ici en faveur des assujettis à la taxe
foncière qui ne dispose que du revenu minimum d'insertion ou de l'allocation de
solidarité spécifique.
Selon nous, ces questions sont au centre du débat sur la déliaison des
taux.
Nous sommes par ailleurs convaincus que cette déliaison des taux, quoi qu'il
advienne des dispositifs existants en matière d'intercommunalité, par exemple,
est en quelque sorte inscrite dans les perspectives de la réforme des finances
locales. C'est aussi pour ces raisons que nous pourrions être amenés à la
proposer.
Une ultime motivation nous anime.
Les évolutions des finances locales au cours des dernières années ont créé une
situation assez paradoxale.
En effet, une partie des communes éligibles à la première part de la dotation
de solidarité urbaine est directement concernée par le mécanisme de
plafonnement des taux d'imposition, et singulièrement de la taxe
professionnelle.
Il est d'ailleurs remarquable de constater qu'en vertu des dispositions de
l'article 18 de la loi de finances de 1982 ce plafonnement de taux est compensé
par l'Etat, dans le cadre quelque peu lâche de la dotation de compensation de
la taxe professionnelle.
Les communes concernées subissent donc une importante moins-value fiscale, ce
qui conduit à s'interroger sur la logique de l'ensemble des dispositifs de
correction des inégalités de ressources des collectivités locales.
C'est donc aussi pour mettre un terme à cette aberration - limitée d'ailleurs
à quelques dizaines de localités - que nous avons déposé cet amendement.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général. Un amendement de même nature a été déposé voilà peu
de temps, lorsque nous examinions le projet de loi de finances pour 1999. Par
ailleurs, dans quelques mois, nous sera sans doute soumis le projet de loi sur
l'intercommunalité. Il est donc difficile de traiter ce sujet au fond ce
soir.
Certes, nous serons sans doute nombreux à reconnaître qu'il est nécessaire
d'introduire des assouplissements dans le système actuel de liaison entre les
taux. Mais peut-être faut-il, dans un premier temps, s'interroger sur la
déliaison à la baisse résultant de la création d'intercommunalités plus
fortes.
Par ailleurs, il faut sans doute évoquer, s'agissant de l'amendement du groupe
communiste républicain et citoyen, des choses auxquelles la majorité
sénatoriale ne peut souscrire. En effet, si vous restreignez la capacité des
collectivités à augmenter le taux des impositions sur les ménages, vous
accroissez au contraire leur liberté pour accroître les taux de la taxe
professionnelle qui frappe les entreprises. Une telle dissymétrie risquerait de
créer des comportements...
M. Michel Charasse.
Irresponsables !
M. Philippe Marini,
rapporteur général. ... contraires à l'emploi et à l'activité
économique.
Compte tenu de ces éléments, nous ne pouvons qu'émettre un avis défavorable
sur cet amendement, même si, nous le reconnaissons, il pose un problème réel
sur lequel il faudra revenir.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter,
secrétaire d'Etat. Le Gouvernement émet, lui aussi, un avis défavorable.
Même si la plupart des collectivités locales ont un comportement responsable en
matière fiscale, vous ouvrez, monsieur Foucaud, par cet amendement, la
possibilité aux collectivités locales qui croient pouvoir trouver ainsi des
ressources fiscales supplémentaires de majorer leur taux de taxe
professionnelle, avec le risque que les entreprises, qui, vous le savez, sont
très sensibles à ces taux, partent dans la commune voisine, ce qui conduirait
les communes qui auraient trop majoré leur taxe professionnelle à avoir pour
seule possibilité de majorer les impôts sur les ménages.
Les règles de liaison de taux, qui ont été instaurées par les lois de
décentralisation de 1982, ont pour objet de prévenir des tentations non pas de
l'ensemble des collectivités locales, mais de certaines d'entre elles.
Le deuxième argument a été employé par M. le rapporteur général : un projet de
loi relatif à l'intercommunalité sera bientôt présenté au Parlement. Il sera
alors certainement question de la liaison des taux entre impôts locaux.
Monsieur Foucaud, je comprends le sens de l'appel que vous lancez en faveur
d'une plus grande souplesse, mais je crois qu'un minimum de règles de liaison
sont nécessaires. En l'état actuel du droit et du comportement de certaines
collectivités locales - et je ne ferai pas d'amalgame entre la moyenne des
collectivités locales et certaines collectivités locales - votre amendement
présente, me semble-t-il, des risques et c'est pourquoi je vous demande de le
retirer, sinon je demanderai au Sénat de le rejeter.
M. le président.
Monsieur Foucaud, l'amendement est-il maintenu ?
M. Thierry Foucaud.
A gauche comme à droite, le problème est soulevé, monsieur le secrétaire
d'Etat, et M. le rapporteur général a lui-même rappelé le fondement même de la
question.
Pour ce qui concerne le relèvement des taux de la taxe professionnelle, il
faut laisser une part, sinon de démocratie du moins de responsabilité, aux
collectivités. Il est bien évident que, si elles augmentent trop ces taux,
elles feront très certainement fuir les entreprises qui auraient été
susceptibles de s'installer chez elles.
Quoi qu'il en soit, je maintiens mon amendement.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 37, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 14