Séance du 17 décembre 1998







M. le président. La parole est à M. Marini. (Applaudissements sur plusieurs travées du RPR)
M. Philippe Marini. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Monsieur le ministre, dans quelques jours, vous allez présenter le programme de stabilité de la France dans le cadre du pacte de stabilité et de croissance que le Gouvernement auquel vous appartenez avait souscrit à Amsterdam, en juillet 1997. Les engagements que la France a pris prévoient d'atteindre à moyen terme une position proche de l'équilibre ou excédentaire en matière de finances publiques. De la tenue de cet engagement dépendent la crédibilité de notre pays sur le plan international, la confiance, l'emploi et l'investissement.
En public, et notamment dans le texte d'un communiqué de votre ministère en date du 15 décembre 1998, vous annoncez que le Gouvernement travaille à une stratégie pour la croissance...
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Ça, c'est vrai !
M. Philippe Marini ... qui combine, comme en 1998 et en 1999, financement de ses priorités, réduction des déficits et baisse des prélèvements obligatoires.
Nous venons d'examiner le budget pour 1999 et nous savons que financement des priorités veut dire hausse des dépenses, que la baisse des prélèvements obligatoires, il faut la rechercher avec une grande attention, et que la réduction du déficit est insuffisante.
Vous avez qualifié cette combinaison de triangle magique. Ce triangle magique repose sur une croissance forte sur toute la période. Ma question peut se décomposer en trois points.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Oh non !
Mme Hélène Luc. Ce n'est plus une question !
M. René-Pierre Signé. La question !
M. Philippe Marini. Pouvez-vous nous dire clairement à quelle échéance vous situez le retour à l'équilibre des finances publiques ?
Faut-il, en ce domaine, interpréter avec inquiétude ou anxiété la dernière phrase de votre communiqué aux termes de laquelle : « Tout scénario chiffré relève à ce stade de la spéculation » ? Monsieur le ministre, avons-nous fait de la spéculation en examinant le budget pour 1999 ?
Enfin, s'agissant de la croissance, le Gouvernement, qui s'est attribué le bénéfice et la responsabilité de cette croissance, s'attribue-t-il aujourd'hui la responsabilité de son ralentissement ? (Exclamations sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.) Votre triangle magique, monsieur le ministre, n'est-il pas la quadrature du cercle ? (« Bravo ! » et applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur le sénateur, il vous appartient en effet, en tant que rapporteur général du budget, de poser cette question, mais je ne vous ferai pas l'injure de croire que vous n'en connaissez pas les réponses. (Sourires.) Les réponses sont de nature différente de celles que, peut-être, la majorité sénatoriale espère, ce qui explique que, finalement, cette question vienne tout de même en débat.
Je commence par la fin : le Gouvernement s'attribue-t-il les résultats de la croissance de 1998, qui sera la meilleure année de la décennie ? La réponse est oui,...
M. Roland Courteau. C'est clair !
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. ... pas parce que la croissance sera élevée, peut-être même - nous verrons les chiffres définitifs - supérieure à ce qui était prévu en début d'année - nous ferons peut-être plus de 3 % - mais parce que, en 1998, pour la première fois depuis cinq ans, en France, la croissance sera supérieure à la moyenne européenne. Et là, c'est bien la comparaison par rapport à nos voisins qui compte, et non plus l'environnement international. Ce qui compte, c'est la politique menée dans notre pays. Que l'ensemble européen aille bien ou mal, cela dépend des politiques que nous menons et de l'environnement international. Mais que l'on soit le premier ou le dernier de la classe, en matière de croissance, cela dépend uniquement de la politique menée dans notre pays.
M. Daniel Vaillant, ministre des relations avec le Parlement. Très bien !
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. En 1998, nous serons les premiers de la classe. Je pense que l'ensemble du Sénat, sa majorité comme son opposition, peut s'en réjouir. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. Roland Courteau. Ils devraient s'en réjouir !
M. René-Pierre Signé. Ça les embête !
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Pour 1999, vous le savez, nous avons établi une prévision de croissance de 2,7 % ; c'était au mois de septembre 1998. Aujourd'hui, on voit clairement que nous ne sommes pas sur ce rythme, parce que la crise financière a eu des effets très récessifs sur l'investissement des entreprises.
A combien finirons-nous l'année ? Nous verrons. Je ne serai pas de ceux qui, aujourd'hui, prennent un sourire faussement attristé en pensant que nous n'atteindrons pas une croissance forte. D'abord, parce que ce serait déraisonnable au regard de la qualité de notre mandat, qui est d'espérer, que l'on soit dans l'opposition ou dans la majorité, que la croissance soit la plus forte possible pour notre pays. Ensuite, parce que cela pourrait bien être faux. Certes, des statistiques publiées récemment montrent, sur le premier semestre, un ralentissement, mais le FMI, lui, va publier dans quelques jours une statistique qui se rapproche de 2,7 %. Donc, nous verrons ! Ce qui compte, c'est que nous menions la politique qui permette la plus forte croissance.
J'en viens à votre question concernant le triangle magique et les finances publiques.
A la fin de cette année, nous allons, en effet - comme nous devons le faire - publier des projections triennales de nos finances publiques. Celles-ci mettront en évidence la baisse du déficit, la baisse des prélèvements obligatoires et une croissance modérée des dépenses publiques, qui entraîne une baisse du ratio dépense publique-PIB.
M. le président. Veuillez conclure, monsieur le ministre.
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Un mot encore, si vous le permettez, monsieur le président ; je vous promets de ne plus reprendre la parole par la suite. (Sourires.)
La situation actuelle est différente de ce que nous avons vu de 1993 à 1997. En effet, je le rappelle - mais vous le savez, monsieur Marini - pendant cette période, les prélèvements obligatoires ont augmenté de deux points et la dépense publique a crû, même si le déficit, lui, a correctement baissé. Nous ferons mieux, puisque le déficit continuera de baisser, mais avec la baisse des prélèvements obligatoires et une diminution progressive du ratio dépense publique-PIB. La majorité en sera satisfaite - ses priorités sont financées - et je pense que vous avez toutes les raisons d'en être également heureux. (Applaudissements sur les travées socialistes.)

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