Séance du 26 janvier 1999







M. le président. La séance est reprise.
Voici après pointage, le résultat du dépouillement du scrutin n° 65 : :

Nombre de votants 243
Nombre de suffrages exprimés 235
Majorité absolue des suffrages 118
Pour l'adoption 83
Contre 118

Monsieur Fauchon, le sous-amendement n° 3 est-il maintenu ?
M. Pierre Fauchon. Pour les raisons que j'ai indiquées tout à l'heure et pour calmer l'impatience d'un certain nombre de nos collègues, je retire mon sous-amendement pour faire gagner du temps au Sénat. (Très bien ! et applaudissements sur quelques travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées socialistes.)
M. le président. Le sous-amendement n° 3 est retiré.
Avant de mettre aux voix l'amendement n° 1 rectifié, ce qui vaudra vote sur l'ensemble du projet de loi constitutionnelle, je donne la parole à M. Lorrain pour explication de vote.
M. Jean-Louis Lorrain. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la place et le rôle des femmes dans la vie publique constituent incontestablement un problème de société, au sens le plus noble de cette expression. Tout débat sur ce sujet met en cause des schémas sociologiques et psychologiques profondément ancrés dans les mentalités et les comportements des acteurs de la vie publique.
Les femmes ont dû attendre 1944 pour se voir reconnaître leur citoyenneté à part entière et le droit de vote, soit bien plus tard que dans beaucoup d'autres pays.
Aujourd'hui, elles ont les mêmes droits que les hommes, reçoivent la même formation. Pourtant, elles demeurent encore très minoritaires dans les instances de décision et les lieux de pouvoir, en politique comme dans la haute administration ou aux postes clés de l'économie.
La situation des Françaises dans la vie publique est donc très loin de correspondre à la place et au rôle essentiels qu'elles ont conquis dans les autres secteurs de la société.
Mais cette situation est due non à l'existence de barrières juridiques, mais à un écart entre le droit et le fait.
L'égalité des droits est assurée dans notre pays. Cette inégalité, cette difficulté d'accès tiennent avant tout à des résistances sociologiques fortes et à une pratique politique des partis que seule une action volontariste permettrait de dépasser. Il ne sert à rien de modifier la Constitution en y introduisant le principe de l'égal accès des hommes et des femmes aux mandats et fonctions si les partis ne prennent pas leur responsabilité. L'égalité d'accès ne pourra être obtenue qu'à travers la création d'un véritable statut de l'élu permettant à chacun et à chacune d'exercer mandats et fonctions quelle que soit son activité professionnelle. L'action des partis est, à cet égard, déterminante.
Voilà pourquoi la modification de l'article 4 de la Constitution, précisément relatif aux partis, a une véritable signification : c'est un signe fort en direction des partis politiques. Mais la loi, même fondamentale, ne peut qu'édicter des règles égales pour tous. Elle ne peut pas favoriser tel ou tel au risque de devenir soit opprimante, soit discriminatoire, c'est-à-dire au risque de porter gravement atteinte à la dignité de la personne, en l'occurrence la femme.
Enfin, j'ajoute que ceux de nos voisins européens qui sont arrivés à la parité, les Scandinaves, notamment, le doivent essentiellement à l'action volontariste des partis.
Notre attitude se veut dynamique et pragmatique. L'égal accès des femmes et des hommes aux mandats et fonctions ne s'inscrit pas dans une politique médiatiquement correcte ; il est un mouvement de fond que nous devons soutenir et amplifier afin de ressourcer la citoyenneté et de vivre la politique autrement.
Le groupe de l'Union centriste votera donc ce texte tel que modifié par le Sénat, sous l'impulsion de sa commission des lois, dont je tiens ici à saluer le travail. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. Badinter.
M. Robert Badinter. Monsieur le président, madame la garde des sceaux, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, j'ai indiqué de façon très précise et avec conviction pourquoi il ne fallait pas toucher à l'article 3 de la Constitution, définissant la souveraineté nationale : il s'agit là, en effet, du coeur de la Constitution.
De la même façon, j'ai marqué également avec conviction qu'il était impossible de rester dans cette situation injuste et refusée par tous.
Or tout progrès au regard de la jurisprudence du Conseil constitutionnel doit, pour être effectif, passer par la loi. C'est pourquoi je suis intervenu en faveur du sous-amendement n° 6 rectifié, déposé par M. Charasse, sans lequel - permettez-moi de le dire - l'amendement n° 1 rectifié est vide de sens. Je n'insisterai pas davantage. Je voterai donc contre l'amendement n° 1 rectifié. (Applaudissements sur les travées socialistes. - Mme Odette Terrade applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Paul Girod.
M. Paul Girod. Je pense, comme d'autres, que la réforme dont nous débattons en ce moment a plus sa place à l'article 4 qu'à l'article 3 de la Constitution, et ce pour les raisons qui viennent d'être excellemment détaillées tout à l'heure par M. Badinter. Je suis par conséquent de ceux qui considèrent que le fait de toucher à l'universalité serait une erreur de fond et que commencer à rompre l'unité totale aboutira à un moment ou à un autre, qu'on le veuille ou non, à une contagion débouchant sur des communautarisations ou des sectorisations du peuple français, qui doit rester un et indivisible. C'est la raison pour laquelle j'étais tenté de voter l'amendement n° 1 rectifié.
Mais, voilà quelques instants, le Sénat a repoussé le sous-amendement n° 2, déposé par M. Bonnet.
MM. Henri de Raincourt et Hubert Falco. Absolument !
M. Paul Girod. La confusion qui a entouré ce vote ne m'a pas permis d'intervenir. Le brouhaha était tel alors que toute tentative aurait été inutile. Autant il faut toucher à cette sectorisation d'une main tremblante, autant il faut être extrêmement prudent quand on fait figurer au sein de la Constitution une notion nouvelle. Or élever au niveau constitutionnel la notion même de financement public des partis politiques, qui perdurera alors à travers tous les temps,...
M. Henri de Raincourt. Absolument !
M. Paul Girod. ... me semble être une imprudence. C'est du ressort de la loi, et non de la Constitution !
Un sénateur socialiste. Très juste !
Mme Hélène Luc. Absolument !
M. Paul Girod. C'est la raison pour laquelle, regrettant le rejet de ce sous-amendement, je ne peux pas, en conscience, voter l'amendement n° 1 rectifié de la commission des lois, dans la mesure où il comporte cette introduction à long terme quasi définitive du financement public des partis politiques.
L'ancien système, comme tout le monde le sait, était mauvais et aboutissait à des catastrophes. Mais ce n'est pas parce que le Parlement s'est résolu au système actuel comme à un moindre mal qu'il faut en faire une disposition constitutionnelle !
C'est pourquoi, monsieur le président, mes chers collègues, tout en approuvant la démarche de la commission des lois sur l'article 4, je regrette cette intrusion du financement public dans la Constitution et je m'abstiendrai donc sur l'amendement n° 1 rectifié, qui, à mon avis, va sur ce point à l'encontre du travail du constituant. (Applaudissements sur certaines travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste, ainsi que sur quelques travées socialistes.)
M. le président. La parole est à Mme Luc.
Mme Hélène Luc. Monsieur le président, madame la garde des sceaux, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen souhaitaient que cette journée de débat soit constructive et fasse avancer, sur la voie choisie d'un commun accord par le Gouvernement et le Président de la République, l'égalité entre les hommes et les femmes dans notre vie démocratique. Je déplore que la commission des lois persiste dans sa stratégie de blocage.
Le rapport de M. Cabanel pointe des chiffres encourageants quant à la présence des femmes dans les assemblées parlementaires et locales. Alors, pourquoi ce blocage ?
Il est noté que les règles de conduite interne aux partis ont permis de féminiser les candidatures, d'augmenter le niveau de participation des femmes dans la sphère politique. Alors, pourquoi ce refus de reconnaissance officielle ?
Il n'est plus de mise ni d'attendre ni de compter sur l'évolution naturelle des choses.
Titulaires du droit de vote et du droit d'éligibilité, les femmes restent très fortement sous-représentées.
Hommes et femmes représentent respectivement la moitié des talents, des qualifications potentielles de l'humanité, et donc de la France. Leur participation complémentaire et équilibrée aux responsabilités permettrait donc de faire naître des idées, des valeurs, des comportements qui s'entremêleraient, qui produiraient de la valeur ajoutée, donnant le meilleur résultat pour l'ensemble de la société.
Les femmes représentent un ferment de changement et d'innovation pour la société, et celle-ci en a un besoin urgent et vital.
Certes, il ne suffit pas d'être femme pour être une élue efficace ou pour mener une bonne politique. Il existe des options et des choix antagoniques qui marquent leur engagement politique, comme pour les hommes.
Mais la préoccupation forte des femmes en termes de transparence, d'authenticité, de refus du combat des chefs serait de nature à redonner aux grands débats de notre pays le sens, la finalité et l'intérêt dont ils n'auraient jamais dû se départir et qui remobiliseraient nos concitoyens, à commencer par la jeunesse.
Je tenais à marquer l'attachement du groupe communiste républicain et citoyen à voir franchir une étape significative tant pour notre démocratie que pour l'évolution de notre société : celle de l'inscription à l'article 3 de notre Constitution de l'objectif de parité. Les associations, qui militent de longue date pour cette cause et qui se sont encore mobilisées aujourd'hui ont, par leur action, favorisé et conforté cette exigence : c'est au texte constitutionnel puis à la loi d'assurer cet égal accès aux mandats et aux fonctions. Madame la garde des sceaux, madame la secrétaire d'Etat, c'est la voie que, au nom du Gouvernement, vous nous proposez et que nous approuvons pleinement.
Ainsi, cet ajout à l'article 3 autorise l'introduction de mesures positives en faveur de la parité dans nos futures lois électorales, mesures permettant aux femmes d'accéder à une citoyenneté pleine et entière.
Je tiens à rappeler à cet égard que l'instauration de la proportionnelle pour tout ou partie, la limitation significative du cumul des mandats et l'amélioration sensible du statut de l'élu sont les éléments nécessairement complémentaires de la parité. (Et voilà ! sur les travées du RPR.)
J'entends les arguments juridiques avancés par les tenants du principe de l'universalité posé par la Déclaration des droits de l'homme pour tenter de justifier leurs réserves, voire leur opposition à la modification de l'article 3 de notre Constitution traitant de la souveraineté nationale.
Depuis 1982, la référence à cet article a, entre autres, permis au Conseil constitutionnel de censurer - il l'a fait très récemment encore - toute tentative du législateur pour assurer une répartition équilibrée des hommes et des femmes dans le domaine politique.
Comment s'étonner que la majorité sénatoriale, habituel adversaire de la promotion des droits des femmes. (Protestations sur les travées du RPR)...
C'est indiscutable, messieurs !
M. Jean-Claude Gaudin. Ça suffit !
Mme Hélène Luc. Malgré la plaidoirie de M. Jacques Larché, la majorité a adopté un comportement profondément rétrograde !
Nombreux sont ceux ici qui se souviennent, par exemple, des arguments parfois scandaleux de certains sénateurs de la majorité sur la remise en cause de l'IVG, notamment. (Vives protestations sur les mêmes travées.)
M. Jean-Claude Gaudin. Ne mélangez pas tout ! Ah, ce n'est pas du Victor Hugo !
M. le président. Un peu de silence, mes chers collëgues ! Seule Mme Luc a la parole !
M. Hubert Falco. Qu'elle dise des choses décentes !
Mme Hélène Luc. Nous regrettons vivement qu'une fois encore la Haute Assemblée bloque toute évolution de notre société, évolution pourtant nécessaire à la démocratisation de notre vie politique. Nous voterons donc contre le texte tel qu'il a été remanié. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen ainsi que sur les travées socialistes.)
M. le président. La parole est à M. Adnot.
M. Philippe Adnot. Monsieur le président, madame le garde des sceaux, madame le secrétaire d'Etat, je voterai cet amendement, qui constitue un moindre mal.
M. Jean-Louis Carrère. C'est bien !
M. Philippe Adnot. J'ai entendu les partisans de l'accession à la parité par la Constitution, j'ai entendu les partisans de l'accession à la parité par l'action des partis politiques. Ces deux opinions sont très louables, mais j'aurais préféré entendre exprimer la confiance en faveur des femmes dans leur capacité à atteindre la parité par l'acte volontaire de candidature (Vives exclamations sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen), par la reconnaissance simple de leurs compétences par les électeurs. (Rires sur les mêmes travées.)
Ce qui est antidémocratique, ce sont les quotas. Ce qui est antidémocratique, c'est la proportionnelle, c'est la main-mise absolue de la vie politique par les partis politiques ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du RPR.)
Le non-inscrit que je suis, élu lors de chaque scrutin en dehors et parfois contre les partis, peut prouver qu'il existe une vie en dehors de ces schémas. C'est le peuple - le peuple seul ! - qui doit déterminer qui est élu.
Toutes les femmes que j'ai interrogées se sentent outragées (Protestations sur les travées socialistes) ...
Mme Dinah Derycke. Pas nous !
M. Philippe Adnot. ... par cette envie irrépressible que certains ont de leur donner d'une manière condescendante ce qu'elles peuvent prétendre obtenir par leurs qualités personnelles. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.) M. le président. La parole est à M. Gélard.
M. Patrice Gélard. Monsieur le président, madame le garde des sceaux, madame le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, à l'issue de cette discussion, où la clarté n'a pas toujours été évidente,...
Mme Hélène Luc. C'est vrai !
M. Charles Descours. Oui, c'est vrai !
M. Patrice Gélard. ... il convient d'en tirer les enseignements.
En ce qui me concerne, j'ai été éclairé au moins sur un point, à savoir les intentions profondes des auteurs de ce projet de loi constitutionnelle. Ces intentions sont nettes : il s'agit tout d'abord d'instaurer des quotas. (Protestations sur les travées socialistes.) Nous le savions déjà, d'ailleurs, puisque, lors du vote de la loi relative aux conseils régionaux, tout avait été mis clairement noir sur blanc : il devait y avoir des listes avec 50 % de femmes et 50 % d'hommes, sans que nous sachions très bien le sort qui serait fait au cinquante et unième et au cinquante-troisième. (Exclamations ironiques sur les travées socialistes ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.) M. Claude Estier. C'est ridicule !
M. Jean-Claude Gaudin. Tirez au sort !
M. Patrice Gélard. Mais le débat ne s'arrête pas là : tout à l'heure, Mme le ministre nous a dit qu'il fallait faire figurer ces mesures à l'article 3 pour étendre les dispositions relatives aux quotas aux élections prud'homales. Mais pourquoi pas, pendant qu'on y est, à d'autres élections professionnelles ? Pourquoi ne pas instaurer également, par exemple, les quotas dans la magistrature ? (Protestations sur les travées socialistes.)
Il y aura donc des quotas aux prud'hommes, des quotas dans les tribunaux de commerce. Pourquoi n'organiserait-on pas désormais des concours séparés entre hommes et femmes dans la magistrature, puis, à terme, dans toute la fonction publique ? Ne va-t-on pas rétablir les collèges et les lycées de filles ? (Vives protestations sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen. - Applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
En réalité, ce que l'on nous propose de faire, c'est de mettre en place une citoyenneté duale, une démocratie duale.
Cette démocratie-là, cette société-là, cette citoyenneté-là, je ne la reconnais pas. Ce ne sont pas les valeurs de la République, ce ne sont pas les droits et les libertés, ce n'est pas la démocratie, c'est autre chose.
C'est la raison pour laquelle je voterai, avec la majorité de mes collègues du groupe du RPR, le texte proposé par la commission des lois. (Applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. Fauchon.
M. Pierre Fauchon. Madame le garde des sceaux, je voterai, bien sûr, ce texte, car il traduit non pas une stratégie de blocage, comme vous le soutenez - peut-être n'y avez-vous pas réfléchi suffisamment - mais bien, en réalité, nous le verrons de plus en plus, une véritable stratégie d'efficacité.
Je le voterai sous le signe de la justice et tout autant sous le signe de l'utilité, je dirai même de la nécessité, car je suis de ceux qui croient que la participation d'un plus grand nombre de femmes aux responsabilités politiques pourra contribuer très fortement à la rénovation de notre vie politique.
Je le voterai aussi sous le signe de l'égalité, valeur à laquelle tout le monde s'est référé, et permettez-moi d'y ajouter, à titre personnel, un autre signe et d'évoquer une autre vertu de la République : je le voterai, en ce qui me concerne, sous le signe de la fraternité entre les hommes et les femmes. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, des Républicains et Indépendants et du RPR.)
M. le président. La parole est à M. Jolibois.
M. Charles Jolibois. Monsieur le président, mes chers collègues, une majorité importante du groupe des Républicains et Indépendants était favorable à une modification de l'article 4 de la Constitution. En effet, le texte du Gouvernement contenait une sorte de contradiction entre l'indivisibilité de la souveraineté, l'universalité et, surtout, la liberté de candidature à laquelle, vous le comprendrez probablement, un groupe composé d'indépendants est par nature très attaché.
Le projet de loi qui nous a été proposé instituait un système pernicieux parce que, sans le dire, il amenait de manière sûre aux quotas. Nous savons, en effet, à l'issue des auditions auxquelles a procédé la commission des lois - qui a mené un débat approndi -, que les quotas étaient la seule solution pour parvenir au résultat désiré.
Il fallait donc modifier l'article 4 de la Constitution et non l'article 3.
Par ailleurs, une discussion s'est engagée au sein de notre groupe, la majorité d'entre nous considérant que le sous-amendement de M. Bonnet devait être voté. Le financement des partis politiques n'a pas sa place, en effet, dans un texte constitutionnel, et les conséquences d'une telle insertion peuvent être extrêmement dangereuses.
Le sous-amendement de M. Bonnet ayant été repoussé, une partie du groupe des Républicains et Indépendants va donc s'abstenir, tandis que certains - dont je suis - voteront l'amendement de la commission des lois et que d'autres - un tout petit nombre - voteront contre cet amendement.
Je devais à l'honnêteté de vous exprimer cette division qui s'est manifestée au sein de notre groupe. Mais, après tout, un sujet de cette importance prend de la grandeur quand les intéressés s'expriment selon leur conscience et ne suivent pas les instructions qu'on leur donne ! (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. Hamel. (Ah ! sur de nombreuses travées.)
M. Emmanuel Hamel. Les éminentes fonctions que vous assumez, madame le garde des sceaux, le prouvent : la femme n'a pas besoin de quotas pour être reconnue, pour être promue.
Ce texte est contraire à l'éminence, à la dignité de la femme et à sa capacité de rayonnement si elle veut les assumer.
Vive les femmes ! A bas les quotas ! Je voterai donc contre ce texte ! (Rires.)
M. Guy Cabanel, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Guy Cabanel, rapporteur. Mes chers collègues, nous sommes maintenant dans une situation très claire. (Exclamations amusées.) En effet, à l'issue d'un moment de grande confusion, nous avons devant nous non plus le texte original, mais un texte fondé essentiellement sur l'article 4 de la Constitution.
Ce texte transfère, certes, la responsabilité vers les partis politiques, mais nous savons que ces derniers ont une responsabilité dans cette affaire. Il ajoute, au demeurant, un élément d'incitation au travers des règles de financement des partis politiques. Ce deuxième alinéa a suscité des discussions, mais celles-ci ont été tranchées par un vote.
Maintenant, il faudrait que le Sénat s'en tienne à cette position, puis qu'il y ait suffisamment de concertation entre le Sénat, l'Assemblée nationale et le Gouvernement...
M. Claude Estier. Et le Président de la République !
M. Guy Cabanel, rapporteur. ... et le Président de la République, en effet, pour parvenir à une solution qui respecte la volonté sénatoriale de ne pas accepter de bouleversement législatif, de ne pas accepter ces lois électorales contraignantes que nous avons écartées aujourd'hui en renonçant à inscrire dans l'article 3 de la Constitution la formule envisagée.
En cet instant, je vous demande simplement de penser aux femmes. (Sourires.) Certes, ce que nous avons fait n'aura de valeur que si celles-ci ont la volonté de réclamer aux partis leur place dans la vie politique, et des mesures doivent être prises à cet égard, car le statut de l'élu et les conditions de candidature forment un ensemble.
Nous, nous avons une position claire. On ne pourra donc pas considérer, à l'issue de ce débat, que le Sénat aura accepté du bout des lèvres une demi-mesure : il a pris ses responsabilités.
Je remercie tous nos collègues qui m'ont aidé dans cette tâche, mais je n'en citerai que deux : M. Gélard, qui a été très clair dans sa condamnation sans appel des quotas et qui a peut-être contribué à transformer ma démarche initiale, et M. Fauchon, qui a eu le souci de trouver une solution jusqu'au bout, même dans certains moments délicats, pour nous permettre d'aboutir à un texte qui soit autre chose qu'une simple déclaration de principe.
Je vous appelle donc à voter ce texte, sur lequel nous poursuivrons la réflexion pendant la navette. (Applaudissements sur certaines travées du RDSE, de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.) M. le président. La parole est à Mme Cerisier-ben Guiga.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Très brièvement, je tiens à dire que je suis scandalisée d'entendre des hommes dire à quel point ils respectent les femmes tout en continuant à interdire à la majorité d'entre elles de participer à la vie politique ! (Protestations sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste. - Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. Le Sénat va maintenant procéder au vote sur l'amendement n° 1 rectifié, tendant à rédiger l'article unique constituant l'ensemble du projet de loi constitutionnelle.
Conformément à la décision de la conférence des présidents, il va être procédé à un scrutin à la tribune, dans les conditions fixées par l'article 56 bis du règlement.
Je vais tirer au sort la lettre par laquelle commencera l'appel nominal.

(Le sort désigne la lettre X.)
M. le président. Le scrutin sera clos quelques instants après la fin de l'appel nominal.
Le scrutin est ouvert.
Huissiers, veuillez commencer l'appel nominal.

(L'appel nominal a lieu.)
M. le président. Le premier appel nominal est terminé. Il va être procédé à un nouvel appel nominal.
Le scrutin va rester ouvert encore quelques minutes pour permettre à ceux qui n'ont pas répondu à l'appel nominal de venir voter.
Personne ne demande plus à voter ?...
La scrutin est clos.
J'invite MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au comptage des votes.) M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 66:

Nombre de votants 307
Nombre de suffrages exprimés 277
Majorité absolue des suffrages 139
Pour l'adoption 164
Contre 113

4