Séance du 3 juin 1999
M. le président.
La parole est à M. Le Grand.
M. Jean-François Le Grand.
Madame le ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement, les
25 et 26 mai derniers,
Les Echos et
Le Monde ont publié la liste
des zones éligibles à la prime d'aménagement du territoire, la PAT.
Ma première observation portera sur l'intérêt que peut encore présenter la
consultation que vous aviez annoncée sous l'égide des préfets de région, et
avant le comité interministériel pour l'aménagement du territoire, le CIAT, de
juin, puisque, selon toute vraisemblance, la carte des zones éligibles à la PAT
est déjà établie.
Hier, à l'Assemblée nationale, vous avez affirmé qu'il n'y avait, à cet égard,
aucun clientélisme de votre part. Force est de constater que les propos, voire
les cocoricos, exprimés ici ou là par certains parlementaires de votre
majorité, et ce matin encore dans
Ouest France, infirment très
sérieusement vos propos.
Madame le ministre, il y a un mois, notre collègue M. Garrec, président du
conseil régional de Basse-Normandie, et les trois présidents de conseils
généraux nous vous avons écrit pour dénoncer un projet qui laisse apparaître
des inégalités particulièrement malencontreuses. Je n'en veux pour exemple que
l'autoroute des Estuaires, qui est en train d'achever sa traversée de la
Normandie grâce au financement énorme des collectivités locales puisque, pour
le seul département de la Manche, ce seront 900 millions de francs qui auront
été investis sur le secteur autoroutier.
Un projet de zonage différencié le long des deux rives de l'autoroute A 84
casserait l'égalité des chances et serait totalement illogique en matière
d'aménagement du territoire. Cette absence de logique est d'ailleurs une
difficulté inhérente à toute cartographie.
C'est la raison pour laquelle, dans ce même courrier, nous vous proposions de
calculer sur le dernier plan un montant de l'ensemble des primes à
l'aménagement du territoire qui ont été attribuées à la région, de lui
appliquer les coefficients réducteurs pour aboutir, en francs 1999, à une somme
qui pourrait être allouée à notre territoire
pro rata temporis. La PAT
serait ainsi déconcentrée, comme cela avait été le cas il y a quelques
années.
Sans entrer dans le détail, je souligne que ce système présenterait plusieurs
avantages, notamment une souplesse dans le respect des critères nationaux et
européens et une collaboration facilitée entre les services de l'Etat et les
collectivités.
Il éliminerait, entre autres, les principaux inconvénients d'une carte,
notamment l'effet de frontières non justifiées.
Madame le ministre, nous vous proposions d'expérimenter ce dispositif en
grandeur réelle. Si vous le souhaitiez, nous pourrions procéder à toutes les
simulations nécessaires.
En conclusion, dans ce même courrier, nous vous demandions un rendez-vous ;
puisque nous n'avons reçu, à ce jour, aucune réponse de votre part ou de vos
services, pas même un accusé de réception, vous allez pouvoir m'apporter
aujourd'hui cette réponse, et ce d'autant plus que j'ai eu la courtoisie de
vous faire parvenir le texte de mon intervention. Au surplus - j'ai le souci
d'économiser les deniers de l'Etat ! - cela vous permettra d'économiser un
timbre.
(Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et
Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président.
La parole est à Mme le ministre.
Mme Dominique Voynet,
ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Monsieur
le sénateur, j'espère ne pas trahir un secret en disant ici que votre dernière
phrase ne figurait pas dans le texte de la question que vous m'avez transmise
!
(Sourires.) Qu'importe !
La France a bel et bien élaboré une carte de zonage de la prime d'aménagement
du territoire, carte qui, à ce jour, n'a fait l'objet que d'une consultation
informelle de la Commission européenne, et je vous expliquerai pourquoi dans un
instant.
Cette carte, qui est le résultat d'une consultation interministérielle
approfondie, a été élaborée sur la base de scénarios établis par les services
de mon ministère à l'issue d'une consultation itérative du Conseil national de
l'aménagement et du développement du territoire non pas sur les cartes mais sur
les critères à retenir pour élaborer les cartes les plus objectives et les plus
équitables possible.
J'ai eu l'occasion de m'exprimer à plusieurs reprises devant la représentation
nationale. Je l'ai fait, ce matin encore, devant la commission de la production
et des échanges à l'Assemblée nationale ; je le ferai prochainement devant la
commission des affaires économiques du Sénat puisque rendez-vous est pris, je
crois, le 30 juin prochain.
Aucune consultation sur le plan local n'a été prévue pour la PAT, qui est une
aide d'Etat. En revanche, j'ai souhaité que les critères soient largement
débattus pour permettre d'échapper à toute accusation ou à tout soupçon de
cartes politiques ou clientélistes.
Il en va en effet de la crédibilité du Gouvernement dont je suis membre, à un
moment où il nous est demandé par la Commission européenne de faire des
propositions qui s'inscrivent dans une réduction drastique de la population
couverte par la prime d'aménagement du territoire.
En effet, vous le savez, nous passerons de 40 % de la population couverte à 34
% seulement. Il sera donc bien plus difficile d'élaborer la carte. Et si
certains élus se réjouissent de voir leur territoire figurer dans la
proposition de zonage, je n'en ai pas vu beaucoup venir me dire que cela allait
beaucoup mieux et qu'ils pourraient donc porter une part du fardeau, au plus
grand bénéfice d'autres territoires plus en difficulté.
En tout cas, les critères retenus visent à soutenir les territoires fragiles.
Nous avons retenu les zones les moins riches, ayant un revenu net imposable
moyen par foyer fiscal inférieur à la moyenne de l'ensemble des zones d'emploi,
avec un taux de chômage supérieur à la moyenne nationale, avec également un
déclin démographique supérieur à 1,2 %.
Je déplore de ne pas disposer des chiffres du recensement, mais ils ne seront
pas disponibles avant le premier semestre de l'an 2000, ce qui est beaucoup
trop tardif pour une transmission à la Commission.
Il s'agira, ensuite, d'accompagner les mutations industrielles en retenant les
zones soit qui ont perdu beaucoup d'emplois, soit qui risquent d'en perdre
beaucoup dans les secteurs sensibles et qui ont simultanément un taux de
chômage supérieur à 10 %.
Je n'insiste pas sur les critères complémentaires, car je dois conclure.
La PAT n'est pas conçue comme un outil d'aménagement du territoire. Les
conditions d'attribution de cet outil sont définies de manière très stricte par
la Commission européenne en fonction de l'encadrement des aides au titre de la
politique de la concurrence.
M. le président.
Veuillez conclure, madame le ministre.
Mme Dominique Voynet,
ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. C'est pour
ce motif que nous sommes contraints de garder ce lien direct entre la PAT et
l'existence de projets industriels. La PAT est directement liée au nombre
d'emplois créés ; elle n'est pas une subvention à destination des régions.
(Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. Jean-François Le Grand.
Absolument ! Mais ma proposition reste valable.
SCHÉMAS RÉGIONAUX D'ORGANISATION SANITAIRE