Séance du 22 juin 1999
M. le président.
« Art. 2. - I. - L'article L. 222-10 du code rural est complété par l'alinéa
suivant :
« 5° Déclarés en mairie, pour la période allant du 1er juillet 1999 au 30 juin
2001, par leur propriétaire opposé à la chasse comme étant interdits de toute
action de chasse, sans préjudice des conséquences liées à la responsabilité du
propriétaire, notamment pour les dégâts qui pourraient être causés par le
gibier provenant de son fonds. Dans ce cas, et sauf convention avec
l'association communale ou intercommunale de chasse agréée, le propriétaire est
tenu de procéder à la délimitation de son terain par des pancartes. »
« II. - Le début du dernier paragraphe de l'article L. 222-19 du code rural
est ainsi rédigé :
« Sauf s'il a manifesté son opposition à la chasse dans les conditions fixées
par le 5° de l'article L. 222-10, le propriétaire non chasseur...
(Le reste
sans changement.) »
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Anne Heinis,
rapporteur. Comme je l'ai exposé lors de mon intervention, les
conclusions de la Cour européenne des droits de l'homme fragilisent
incontestablement le fonctionnement de toutes les ACCA, et ce dès la prochaine
saison de chasse.
Il importe donc de prendre en compte les aspirations légitimes des
non-chasseurs, tout en évitant une remise en cause généralisée du principe de
l'apport de terrains, qui aboutirait inévitablement au morcellement des
territoires de chasse, ce qui serait très préjudiciable à la bonne conservation
du patrimoine cynégétique et à la protection de la faune en général.
En conséquence, l'article 2 de la proposition de loi crée un droit
d'opposition pour les propriétaires opposés à la chasse en l'inscrivant dans
l'article L. 222-10 du code rural.
Ce dispositif couvre une période allant du 1er juillet 1999 au 30 juin 2001,
ce qui laisse deux ans pour élaborer un texte définitif.
Le droit d'opposition est reconnu à tout propriétaire opposé à la chasse et
doit faire l'objet d'une déclaration en mairie sans qu'aucune exigence
particulière soit requise quant à la superficie des terrains. L'intervention du
maire me paraît constituer, je le souligne, un facteur d'équilibre important
dans le déroulement de la procédure.
Les terrains qui font l'objet de ce droit d'opposition sont interdits de toute
action de chasse, ce qui vise à empêcher les petits propriétaires chasseurs de
récupérer leurs terrains pour leur propre usage cynégétique.
Cette atteinte au droit d'usage des petits propriétaires chasseurs se justifie
au nom de l'intérêt général défendu par la loi, à savoir la constitution de
territoires de chasse suffisamment vastes pour gérer correctement le capital
cynégétique. Elle répond également à l'exigence d'un juste équilibre entre la
défense de l'intérêt général et l'atteinte à un droit reconnu, défendue par la
Cour européenne des droits de l'homme.
On peut rappeler que les mesures de gestion et de développement des espèces ne
seront efficaces que sur des territoires d'une superficie suffisante, d'où la
nécessité d'imposer le regroupement des petites parcelles. En contrepartie, ces
petits propriétaires regroupés ont la jouissance d'un vaste territoire de
chasse sur lequel la conservation du gibier est menée à bien. Enfin, on peut
relever que les propriétaires de grands territoires appliquent également des
mesures de conservation du gibier, notamment à travers le respect des plans de
gestion. Ce qui diffère, ce sont les moyens, en fonction de la surface.
L'article 2 de la proposition de loi modifiée précise également que le
propriétaire opposant à la chasse reste personnellement responsable des dégâts
de gibier, ce qui pourra autoriser l'organisation de battues administratives,
s'il s'avère que le gibier répertorié dans les territoires ayant fait l'objet
d'une opposition commet des dégâts importants sur les fonds voisins. Cela
posera d'ailleurs le problème de la preuve.
Par ailleurs, le texte prévoit que la signalisation du terrain soit effectuée
par le propriétaire opposé à la chasse, à moins que, par convention,
l'association communale ou intercommunale de chasse ne s'engage à le faire pour
lui. Cette disposition doit faciliter l'usage de ce droit en amenant chasseurs
et non-chasseurs à se mettre d'accord sur la signalisation de ces terrains,
pour qu'elle soit la meilleure possible.
Enfin, s'agissant de la composition de l'association communale ou
intercommunale de chasse agréée, il est précisé à l'article L. 222-19 du code
rural que les propriétaires opposés à la chasse ne sont pas membres de droit de
l'association, ce qui était le cas auparavant.
Cette précision était nécessaire afin de tenir compte des conclusions de
l'arrêt de la Cour européenne des droits de l'homme, qui a bien sûr jugé que la
qualité de membre de droit reconnue au propriétaire non chasseur était
contraire au principe de liberté d'association, s'agissant des propriétaires
dont les convictions étaient opposées à la chasse.
Telle est, mes chers collègues, l'économie de l'article 2 de notre proposition
de loi, que je vous demande bien entendu d'adopter.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Dominique Voynet,
ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.
Défavorable.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'article 2.
M. Jean-Louis Carrère.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Carrère.
M. Jean-Louis Carrère.
J'indique simplement que le groupe socialiste votera l'article 2.
Sans avoir l'outrecuidance de changer de sujet, je dirai à Mme la ministre
que, si je respecte sa réponse sur l'ortolan, je ne l'admets pas en tant que
chasseur et en tant que Landais. La préservation de l'espèce peut à mon avis
permettre des prélèvements modérés, mais nous en reparlerons.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'article 2.
(L'article 2 est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les conclusions du rapport de la commission des affaires
économiques et du Plan.
Je suis saisi de deux demandes de scrutin public émanant, l'une du groupe des
Républicains et Indépendants, l'autre du groupe communiste républicain et
citoyen.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président.
Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président.Voici le résultat du dépouillement du scrutin n°
103:
Nombre de votants | 317 |
Nombre de suffrages exprimés
| 317 |
Majorité absolue des suffrages | 159 |
Pour l'adoption
| 317 |
Le Sénat a adopté.
(Applaudissements.)
Madame le ministre, mes chers collègues, permettez-moi de remercier, au
nom du Sénat, le personnel qui a veillé jusqu'à une heure matinale, une heure
avant le lever du soleil, c'est-à-dire dans la limite du consensuel, si j'ai
bien compris !
(Sourires.)
14