Séance du 25 juin 1999







M. le président. Par amendement n° 183, M. Charasse propose d'insérer, après l'article 21 sexies , un article additionnel ainsi rédigé :
« La dernière phrase de l'article 103 du code de procédure pénale est complétée par les mots : "dans le procès-verbal, et ce à peine de nullité". »
La parole est à M. Charasse.
M. Michel Charasse. Si vous le voulez bien, monsieur le président, je présenterai en même temps l'amendement n° 184.
M. le président. J'appelle donc en discussion l'amendement n° 184, présenté par M. Charasse et tendant à insérer, après l'article 21 sexies , un article additionnel ainsi rédigé :
« Les deux premières phrases de l'article 106 du code de procédure pénale sont ainsi rédigées :
« Dans chacun des procès-verbaux, doivent être portées, à peine de nullité, la signature du juge, la signature du greffier, la signature du témoin, ainsi que les questions posées et les réponses à ces questions. Le témoin est alors invité à relire sa déposition telle qu'elle vient d'être transcrite, puis à la signer s'il déclare y persister. »
Veuillez poursuivre, monsieur Charasse.
M. Michel Charasse. Les amendements n°s 183 et 184 visent à apporter des précisions de forme aux articles 103 et 106 du code de procédure pénale.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 183 ?
M. Charles Jolibois, rapporteur. La commission est défavorable à l'amendement n° 183, qui vise à introduire un cas de nullité systématique lorsque certains renseignements, tels que l'âge ou la profession, ne sont pas inscrits au procès-verbal de l'interrogatoire d'un témoin.
Cette disposition constitue un énorme alourdissement alors que, il faut le reconnaître, on essaie plutôt maintenant d'éviter des nullités qui obligent à tout recommencer.
De plus, en matière de droit civil et de droit commercial, il existe même une règle selon laquelle on ne peut plus invoquer une nullité, dans la majorité des cas, sans démontrer que le fait de l'avoir commise a causé un tort irréparable à la personne intéressée.
Cet amendement aurait donc pour conséquence de revenir à un droit complètement formaliste. C'est la raison pour laquelle la commission des lois n'y est pas favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Avis défavorable également.
M. le président. Monsieur Charasse, l'amendement est-il maintenu ?
M. Michel Charasse. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 183 est retiré.
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 184 ?
M. Charles Jolibois, rapporteur. Cet amendement est satisfait par un autre amendement que nous allons examiner.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Défavorable.
M. Michel Charrasse. Puisque M. le rapporteur dit qu'il est satisfait, je le retire.
M. le président. L'amendement n° 184 est retiré.
M. Haenel. Par amendement n° 158 rectifié, M. Haenel et les membres du groupe du Rassemblement pour la République proposent d'insérer, après l'article 21 sexies, un article additionnel ainsi rédigé :
« Le premier alinéa de l'article 399 du code de procédure pénale est complété par les mots : "et du procureur de la République" ».
La parole est à M. Haenel.
M. Hubert Haenel. Il n'a plus d'objet.
M. le président. L'amendement n° 158 rectifié n'a plus d'objet.
Par amendement n° 186, M. Charasse propose d'insérer, après l'article 21 sexies, un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article 429 du code de procédure pénale est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« Afin d'assurer la loyauté du procès-verbal, la personne entendue, qu'elle soit témoin ou mise en examen, doit savoir avec précision sur quelle matière chaque question lui est posée.
« Tout procès-verbal d'interrogatoire, même ceux afférents à un aveu, doit, à peine de nullité, comporter les questions auxquelles il est répondu. »
La parole est à M. Charasse.
M. Michel Charasse. L'amendement n° 186 a pour objet de noter exactement au procès-verbal les questions posées et non pas de s'en tenir à la mention « sur interrogation », cela afin que la personne entendue sache avec précision sur quelle matière chaque question lui est posée.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Charles Jolibois, rapporteur. C'est cet amendement n° 186, qui satisfait l'amendement n° 184, que vous avez retiré en me faisant confiance, monsieur Charasse, ce dont je vous remercie.
En vérité, il ne satisfait que la partie importante de votre amendement, à savoir le fait que l'on doit indiquer les questions posées dans un procès-verbal.
Nous vous proposons de rectifier cet amendement n° 186 afin de compléter l'article 429 du code de procédure pénale non pas par deux alinéas - le premier serait supprimé - mais par un alinéa ainsi rédigé : « Tout procès-verbal d'interrogatoire, même ceux afférents à un aveu, doit, à peine de nullité, comporter les questions auxquelles il est répondu. »
La clé de la discussion qui a eu lieu en commission des lois est que, pour comprendre une réponse, il faut connaître la question ! Si elle figure dans le procès-verbal, c'est beaucoup plus clair.
M. le président. Monsieur Charasse, acceptez-vous la suggestion de M. le rapporteur ?
M. Michel Charasse. J'accepte de modifier mon amendement n° 186 pour supprimer le premier alinéa et rédiger l'alinéa restant de la façon suivante : « Tout procès-verbal d'interrogatoire, même ceux afférents à un aveu, doit, à peine de nullité, comporter les questions auxquelles il est répondu ».
Mais, dans ce cas, je souhaite qu'il soit ajouté : « doit comporter la mention précise des questions auxquelles il est répondu. »
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Charles Jolibois, rapporteur. Je crois que, vraiment,...
M. Michel Charasse. Je pense que je vous embête ! Je m'en tiendrai donc à votre modification. Ne perdons pas de temps !
M. le président. Il s'agit donc de l'amendement n° 186 rectifié, présenté par M. Charasse et tendant à insérer, après l'article 21 sexies, un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article 429 du code de procédure pénale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Tout procès-verbal d'interrogatoire même ceux afférents à un aveu, doit, à peine de nullité, comporter les questions auxquelles il est répondu. »
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Je persiste à penser que cet amendement est inutile, puisque le procès-verbal est signé par la personne entendue, qui contrôle la façon dont l'officier de police judiciaire ou le juge a le cas échéant synthétisé ses questions, ainsi que les réponses qui leur ont été données.
M. Charles Jolibois, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Charles Jolibois, rapporteur. Ce point fait l'objet de tellement de discussions au cours de l'audience qu'il est bon pour la justice que les questions soient inscrites dans le procès-verbal.
M. Michel Charasse. Absolument !
M. Charles Jolibois, rapporteur. Cela évitera bien des discussions à l'audience,...
M. Michel Charasse. Voilà !
M. Charles Jolibois, rapporteur. ... en rendant très clair ce qui doit être particulièrement clair.
M. Jacques Larché, président de la commission des lois. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jacques Larché, président de la commission des lois. Je voudrais rappeler à Mme le garde des sceaux, qui a peut-être eu l'occasion d'en lire, la façon dont sont rédigés les procès-verbaux : « Sur questions posée a répondu que... ». Dans 95 % des cas, c'est l'hypothèse à laquelle on est confronté. Cette formulation comporte un élément d'incertitude !
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 186 rectifié, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 21 sexies.
Par amendement n° 187, M. Charasse propose d'insérer, après l'article 21 sexies, un article additionnel ainsi rédigé :
« A la fin du premier alinéa de l'article 427 du code de procédure pénale, les mots : "et le juge décide d'après son intime conviction" sont supprimés. »
La parole est à M. Charasse.
M. Michel Charasse. Pour le coup, ce sera très simple : le Sénat ayant rejeté un amendement de mon collègue M. Michel Dreyfus-Schmidt portant sur l'intime conviction, je ne peux pas maintenant revenir sur le sujet, même à l'occasion d'un autre article. Donc, je retire l'amendement.
M. le président. L'amendement n° 187 est retiré.
Je suis maintenant saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 224 rectifié, M. Dreyfus-Schmidt et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après l'article 21 sexies , un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article 505 du code de procédure pénale est abrogé. »
Par amendement n° 223 rectifié, MM. Badinter, Dreyfus-Schmidt et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après l'article 21 sexies , un article additionnel ainsi rédigé :
« Dans l'article 505 du même code, les mots : "deux mois" sont remplacés par les mots : "quinze jours". »
La parole est à M. Dreyfus-Schmidt, pour présenter l'amendement n° 224 rectifié.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Le Sénat a eu tort - mais c'est allé très vite et, après tout, cela fera l'objet de la navette - de porter à un mois, me semble-t-il, le délai d'appel en matière correctionnelle. Telle était bien votre proposition, monsieur Fauchon ?
M. Pierre Fauchon. Tout à fait !
M. Hubert Haenel. C'est une bonne mesure !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Cela me paraît tout à fait regrettable, notamment à une époque où, grâce au fax et au téléphone, il est possible de prendre des décisions rapidement. Ce délai d'un mois laisse dans l'incertitude toutes les autres parties.
Quand ce même délai était de dix jours pour toutes les parties, y compris le procureur de la République, on avait l'habitude de référer au procureur général, bien sûr - cela peut et doit être fait dans la journée -, qui lui-même interrogeait la place Vendôme. Cela nécessitait, bien évidemment, un certain temps !
M. Hubert Haenel. C'est fini tout cela !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Raison de plus pour que le procureur général ne dispose pas d'un délai de deux mois pour faire appel, délai que d'ailleurs tout le monde oublie. Je connais ainsi de grands praticiens qui ne s'en souvenaient plus. Il est très rare que le procureur général s'en serve et, quand il s'en sert, cela étonne tout le monde.
J'en propose pour ma part la suppression pure et simple. Surtout à une époque où les procureurs ne reçoivent plus aucune instruction particulière, il n'y a pas de raison pour que le procureur général ait un délai supplémentaire par rapport au procureur.
Tout à l'heure vous sera proposé un amendement de repli, dont le premier signataire est notre collègue et ami Robert Badinter, qui propose que les mots « deux mois » soient remplacés par les mots « quinze jours ».
M. Hubert Haenel. Ce serait moins que ce qui a déjà été adopté !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Par rapport à ce qu'a adopté le Sénat, ce serait en effet moins que le délai accordé aux parties. En tout état de cause, si nous le fixons à un mois, le délai sera le même pour tout le monde, et cela permettra à l'Assemblée nationale de le ramener à dix jours pour tous.
M. Hubert Haenel. Un mois pour tout le monde !
M. le président. La parole est à M. Badinter, pour défendre l'amendement n° 223 rectifié.
M. Robert Badinter. Comme M. Dreyfus-Schmidt l'a dit, c'est un amendement de repli.
S'agissant des délais d'appel, je voudrais marquer qu'il faut se placer du point de vue du justiciable.
Il est déplorable que au sortir d'une audience qui souvent a été longue et difficile, alors que les parties se sont expliquées, que tous les moyens ont été discutés, que le jugement a été rendu et motivé, que le justiciable ait autant à attendre pour connaître la position du parquet.
Je pense que le délai de dix jours donné au justiciable pour faire appel doit suffire pour le parquet, avec cinq jours de plus pour l'appel incident. L'extension à un mois n'est pas un avantage pour le justiciable, qui restera pendant tout ce temps dans l'incertitude de ce que va décider le parquet. Celui-ci connaît parfaitement la situation ; il n'a qu'à prendre sa décision et faire appel dans un délai court.
Il convient donc que le délai dont disposera le procureur général pour son appel très éventuel soit le plus bref possible.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 224 rectifié et 223 rectifié ?
M. Charles Jolibois, rapporteur. La commission serait favorable à ce que le délai d'appel du procureur général soit ramené à un mois, en accord avec ce que nous avons décidé précédemment pour les autres parties.
Il est difficile de ne pas accorder au procureur général le même délai. Je rappelle à M. Badinter que nous avions fixé un mois comme délai d'appel en matière correctionnelle.
Aussi, sous réserve de l'adoption d'un sous-amendement visant à remplacer quinze jours par un mois, la commission pourrait être favorable à l'amendement n° 223 rectifié.
En revanche, elle est défavorable à l'amendement n° 224 rectifié.
M. le président. Je suis donc saisi d'un sous-amendement n° 280, présenté par M. Jolibois au nom de la commission des lois et tendant, dans le texte de l'amendement n° 223 rectifié, à remplacer les mots : « quinze jours » par les mots : « un mois ».
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 224 rectifié, 223 rectifié et sur le sous-amendement n° 280 ?
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 224 rectifié parce que le procureur général a un rôle essentiel dans la coordination et la cohérence de l'action publique. Nous reverrons ce problème lorsque le projet de loi sur l'action publique, qui a été examiné par l'Assemblée nationale voilà deux jours, viendra en discussion devant votre assemblée.
Cette faculté donnée au procureur général de faire appel est un outil absolument indispensable dans la régulation de l'action publique dans son ressort, y compris par rapport à des décisions prises par le procureur.
Dans le projet de loi sur l'action publique, je donne la possibilité aux personnes de faire appel d'une décision de classement sans suite et je donne la possibilité au procureur général de faire appel de la décision de classement sans suite du procureur. Je suis donc opposée à la suppression de l'appel du procureur général.
Je suis opposée également à l'amendement n° 223 rectifié, même sous-amendé par M. le rapporteur. Il me semble indispensable que le procureur général ait un délai d'appel supplémentaire par rapport à celui du procureur.
Il est donc préférable d'en rester au système actuel.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 224 rectifié.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Dreyfus-Schmidt.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Le débat est intéressant mais il est lié, très visiblement, à celui que nous aurons lorsque nous examinerons le problème du parquet, qui sera tout aussi intéressant.
Il faudra prévoir sans doute, à ce moment-là, la possibilité d'un appel incident - que le procureur de la République a déjà - pour le procureur général, peut-être aussi pour le garde des sceaux.
En l'état actuel des choses, j'imagine mal qu'il puisse y avoir une différence d'appréciation entre le procureur et le procureur général et que la loi puisse alimenter un conflit entre eux.
Nous en discuterons lorsque viendra en débat le texte sur l'action publique ; c'est pourquoi nous retirons les amendements n°s 224 rectifié et 223 rectifié.
M. le président. Les amendements n°s 224 rectifié et 223 rectifié sont retirés et le sous-amendement n° 280 n'a plus d'objet.

Division additionnelle
après l'article 21 sexies