Séance du 22 février 2000







M. le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. Althapé pour explication de vote.
M. Louis Althapé. Monsieur le président, madame le garde des sceaux, mes chers collègues, donner au juge administratif statuant en urgence une efficacité comparable à celle que l'on reconnaît au juge civil des référés est une intention louable qui va dans le sens que nous souhaitons donner à la réforme de la justice.
Accélérer les procédures, accorder le droit à une justice plus rapide est, nous le savons, la première exigence de nos concitoyens en matière de justice. Nous formulons aujourd'hui des réponses qui me semblent dignes de leur attente.
Je me félicite de la tonalité de nos débats qui, aussi bien en première lecture qu'aujourd'hui, ont permis d'améliorer significativement un texte attendu de tous. Le remarquable travail de notre rapporteur René Garrec y est d'ailleurs pour beaucoup.
Nous pouvons nous féliciter également du certain consensus obtenu entre les deux assemblées, puisque treize articles ont été adoptés sans modification : c'est notamment le cas de l'article concernant le référé conservatoire, mais également des articles liés aux contentieux en matière de suspension de l'exécution d'une décision d'urbanisme ou en matière de suspension des actes des collectivités territoriales dans le cadre du contrôle de légalité.
Il nous faut reconnaître également les apports notables de l'Assemblée nationale, venus prolonger notre réflexion concernant l'appel du référé-injonction, en le confiant aux cours administratives d'appel, acceptant ainsi le principe légitime de l'appel, ou en matière d'expérience des juges des référés.
En dépit de ces points d'accord, il a semblé toutefois essentiel au Sénat de réaffirmer certains principes énoncés lors de la première lecture et que l'Assemblée nationale n'a pas jugé pertinent de maintenir.
Je pense tout particulièrement au référé-injonction. Cette innovation est particulièrement utile puisqu'elle donnera au juge un pouvoir d'injonction à l'égard de l'administration avant même que le juge du fond n'ait été amené à dire le droit.
Nous avons réaffirmé à bon escient que le référé-injonction ne modifie pas les règles de répartition des compétences entre le juge administratif et le juge judiciaire.
Par ailleurs, il nous a semblé nécessaire de supprimer l'intérêt à agir du préfet en ce domaine dans la mesure où celui-ci dispose déjà de procédures lui permettant de référer au juge administratif les actes des collectivités locales.
J'aimerais rappeler à ce titre que l'Assemblée nationale, ou du moins sa commission des lois, était toute disposée à nous suivre en la matière avant de rétablir cette disposition sur « injonction » - vous me permettrez ce mot - du Gouvernement. Cette disposition, si nous l'avions maintenue, constituerait une nouvelle forme de contrôle sur les collectivités territoriales.
Enfin, je souhaite rappeler que cette réforme n'a de sens que si elle s'emploie à améliorer l'efficacité et la rapidité de notre justice. C'est pourquoi je ne peux que me réjouir des nouvelles pistes ouvertes par la Haute Assemblée.
Prévoir que le juge du fond se prononce dans les meilleurs délais lorsque la suspension est accordée et impartir au juge du référé-injonction un délai de quarante-huit heures pour se prononcer en première instance sont des mesures propices - nous l'espérons du moins - à rendre optimale cette efficacité recherchée.
Néanmoins, madame le garde des sceaux, cette réforme ne sera qu'un coup d'épée dans l'eau si elle n'est pas accompagnée de moyens réels.
La lenteur des procédures s'explique en partie, nous le savons, par l'accroissement substantiel des contentieux. Or, ce texte facilitant l'accès des citoyens aux tribunaux risque d'accroître significativement le recours au juge administratif.
La conséquence immédiate serait d'allonger plus encore la longueur des procédures par la saturation des tribunaux, effet exactement inverse à l'objectif que nous recherchons.
Madame le garde des sceaux, cette réforme restera lettre morte si, parallèlement, vous ne vous donnez pas les moyens d'augmenter le nombre de magistrats et de greffiers.
C'est donc sur les faits et dans le temps que nous jugerons si cette réforme portera ses fruits, ainsi que l'attendent nos concitoyens.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.

(Le projet de loi est adopté.)
M. le président. Je constate que ce texte a été adopté à l'unanimité.

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