Séance du 2 mars 2000







M. le président. « Art. 2. - L'article L.O. 141 du code électoral est remplacé par deux articles L.O. 141 et L.O. 141-1 ainsi rédigés :
« Art. L.O. 141. - Le mandat de député est incompatrible avec l'exercice d'une des fonctions électives suivantes : président d'un conseil régional, président du conseil exécutif de Corse, président d'un conseil général, maire.
« Pour l'application du présent article, la loi détermine le montant maximal des indemnités versées aux titulaires des fonctions électives visées à l'alinéa précédent.
« Art. L.O. 141-1. - Le mandat de député est incompatible avec l'exercice de plus d'un des mandats électoraux énumérés ci-après : conseiller régional, conseiller à l'assemblée de Corse, conseiller général, conseiller de Paris, conseiller municipal. »
Sur cet article, je suis saisi de six amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 5, M. Jacques Larché, au nom de la commission des lois, propose de rédiger comme suit cet article :
« L'article L.O. 141 du code électoral est ainsi rédigé :
« Art. L.O. 141. - Le mandat de député est incompatible avec l'exercice de plus d'un des mandats énumérés ci-après : conseiller régional, conseiller à l'assemblée de Corse, conseiller général, conseiller de Paris, conseiller municipal d'une commune d'au moins 3 500 habitants. »
Cet amendement est assorti de trois sous-amendements présentés par M. Cornu.
Le sous-amendement n° 28 rectifié est ainsi rédigé :
« I. - A la fin du texte proposé par l'amendement n° 5 pour l'article L.O. 141 du code électoral, remplacer les mots : "conseiller municipal d'une commune d'au moins 3 500 habitants" par les mots : "maire, président ou vice-président d'un établissement public de coopération intercommunale doté de la fiscalité propre". »
« II. - En conséquence, dans le même texte, après les mots : "d'un des mandats", insérer les mots : "ou fonctions". »
Le sous-amendement n° 35 tend :
« I. - A la fin du texte proposé par l'amendement n° 5 pour l'article L.O. 141 du code électoral, à remplacer les mots : "conseiller municipal d'une commune d'au moins 3 500 habitants" par les mots : "maire, délégué d'un établissement public de coopération intercommunale doté de la fiscalité propre". »
« II. - En conséquence, dans le même texte, après les mots : "d'un des mandats", à insérer les mots : "ou fonctions". »
Le sous-amendement n° 36 a pour objet :
« I. - A la fin du texte proposé par l'amendement n° 5 pour l'article L.O. 141 du code électoral, de remplacer les mots : "conseiller municipal d'une commune d'au moins 3 500 habitants" par les mots : "maire, conseiller municipal, président ou vice-président d'un établissement public de coopération intercommunale doté de la fiscalité propre". »
« II. - En conséquence, dans le même texte, après les mots : "d'un des mandats", d'insérer les mots : "ou fonctions". »
Par amendement n° 26, M. Vecten propose de rédiger comme suit le premier alinéa du texte présenté par l'article 2 pour l'article L.O. 141 du code électoral :
« Le mandat de député est incompatible avec l'exercice d'une des fonctions électives suivantes : président d'un conseil régional, vice-président membre du bureau d'un conseil régional, président d'un conseil général, vice-président membre du bureau du conseil général, maire, adjoint au maire, président du conseil exécutif de Corse, vice-président du conseil exécutif de Corse, président d'un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, vice-président d'un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre. »
Par amendement n° 32 rectifié, MM. Autain, Charmant, Pastor, Dreyfus-Schmidt, Miquel, Demerliat, Lejeune, Moreigne, Trémel et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent de compléter le premier alinéa du texte présenté par l'article 2 pour l'article L.O. 141 du code électoral par les mots : « d'une commune dont les conseillers municipaux sont élus au scrutin de liste à deux tours ».
Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 31 est présenté par MM. Duffour, Bret, Mme Beaudeau, M. Bécart, Mmes Bidard-Reydet, Borvo, MM. Fischer, Foucaud, Le Cam, Lefebvre, Mme Luc, MM. Ralite, Renar, Mme Terrade.
L'amendement n° 33 rectifié est présenté par MM. Autain, Dreyfus-Schmidt, Charmant, Pastor, Demerliat, Miquel, Domeizel, Auban, Saunier et les membres du groupe socialiste et apparentés.
Tous deux tendent à compléter le premier alinéa du texte proposé par l'article 2 pour l'article L.O. 141 du code électoral par les mots : « , président d'un établissement public de coopération intercommunale doté d'une fiscalité propre ».
Par amendement n° 34 rectifié, MM. Autain, Charmant, Pastor, Dreyfus-Schmidt, Miquel, Demerliat, Lejeune, Moreigne, Trémel et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent de compléter le premier alinéa du texte présenté par l'article 2 pour l'article L.O. 141-1 du code électoral par les mots : « d'une commune dont les conseillers municipaux sont élus au scrutin de liste à deux tours ».
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 5.
M. Jacques Larché, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de principe, qui admet la compatibilité d'un mandat parlementaire avec un mandat local et refuse l'incompatibilité d'un mandat national avec les fonctions de chef d'exécutif ou de responsable de l'exécutif d'une collectivité.
M. le président. La parole est à M. Cornu, pour défendre les sous-amendements n°s 28 rectifié, 35 et 36.
M. Gérard Cornu. En préambule, je tiens à souligner très clairement que je suis d'autant plus favorable à l'amendement n° 25 de la commission des lois que, avec mon éminent collègue M. Vasselle, nous avions présenté le même en deuxième lecture. La Haute Assemblée ne l'avait pas retenu, nous reprochant un manque de lisibilité et préférant aboutir à une loi beaucoup plus simple.
Il est vrai que, depuis, il s'est passé un événement important. Lors de l'examen de la loi sur la parité, le Gouvernement et l'Assemblée nationale, loin de se préoccuper de faire une loi simple, ont ajouté des seuils. Dès lors que l'Assemblée nationale donnait le mauvais exemple, je comprends que la commission des lois n'ait plus eu aucun scrupule à aller dans le sens que nous souhaitions, Alain Vasselle et moi-même.
Pourquoi ai-je déposé maintenant des sous-amendements ? Pour introduire le problème des établissements publics de coopération intercommunale dotés d'une fiscalité propre.
Que ce soit hier ou avant-hier, et aujourd'hui encore au cours de la discussion générale, chacun a reconnu l'importance de la coopération intercommunale, qui prendra de plus en plus le pas sur les conseils municipaux.
S'agissant du sous-amendement n° 28 rectifié, alors que nous avons tous la volonté de réduire le cumul des mandats, comment pourrions-nous supporter de ne pas saisir l'occasion de cette discussion pour aborder ce problème de la coopération intercommunale ?
On nous objectera que la coopération intercommunale est balbutiante et qu'il est donc prématuré de l'introduire dans le texte de loi. Mais, mes chers collègues, est-il admissible qu'un député soit aussi maire d'une grande ville et président d'un établissement de coopération intercommunale comptant un grand nombre d'habitants et gérant des millions, voire des milliards de francs, alors qu'en votant le projet de loi organique nous allons rendre incompatible le mandat d'un parlementaire avec l'exercice d'une présidence de conseil régional, de conseil général... J'y vois une aberration et je pense sincèrement qu'il est temps d'intégrer le problème des exécutifs d'un établissement public de coopération intercommunale.
J'ai supprimé les termes de « conseiller municipal », car, pour pouvoir être président ou vice-président d'un établissement public de coopération intercommunale doté de la fiscalité propre, il est obligatoire d'être conseiller municipal.
Le sous-amendement n° 35 va plus loin. Il introduit le « délégué d'un établissement public de coopération intercommunale doté de la fiscalité propre » et, par voie de conséquence, la notion de fonctions, puisqu'il s'agit, dans ce cas, de fonctions et non de mandats.
Enfin, je retire le sous-amendement n° 36.
M. le président. Le sous-amendement n° 36 est retiré.
Mes chers collègues, j'attire votre attention sur la méthode qui a déjà été utilisée et que je vais reprendre maintenant.
Afin que le Sénat puisse se prononcer sur le texte précis de l'amendement n° 5, qui est en concurrence avec d'autres amendements, je mettrai d'abord aux voix les sous-amendements n°s 28 rectifié, 35 et 36.
Monsieur le rapporteur, quel est donc l'avis de la commission sur ces sous-amendements ?
M. Jacques Larché, rapporteur. Je remercie tout d'abord mon collègue Gérard Cornu des explications parfaitement cohérentes qu'il vient de donner.
Effectivement, dans un premier temps, nous avions pensé ne pas devoir faire un sort particulier aux communes de moins de 3 500 habitants. Mais, dans un souci d'équilibre, compte tenu de la surenchère faite par l'Assemblée nationale, que nous combattons pour les motifs que j'ai indiqués, nous avons réintroduit les maires des communes de moins de 3 500 habitants dans la liste des mandats qui resteraient compatibles. Vous l'avez parfaitement compris et exposé, mon cher collègue, et je vous en remercie.
Ce texte est difficile, mais nous avons en partie corrigé le déséquilibre dû au fait que l'Assemblée nationale considérait comme incompatible d'exercer un mandat de maire quel qu'il soit, tout en admettant, dans le même temps, la possibilité d'exercer des présidences d'établissement de coopération intercommunale.
M. Michel Caldaguès. Nous l'avons corrigé en partie !
M. Jacques Larché, rapporteur. Je sais bien ! Je n'ai pas la prétention, dans une matière aussi complexe, d'aboutir à des résultats totalement satisfaisants.
Il faut faire attention à la portée politique de ce que nous décidons dans les évolutions à venir. Nous avons peut-être, parmi les nôtres, un certain nombre de maires dont nous aurions intérêt à ce qu'ils soient en même temps présidents de communautés urbaines. Je vous le dis avec une grande franchise et, en cet instant, je ne fais pas du droit : je me livre simplement à un exercice tendant à proposer que l'on statue dans un sens qui, au-delà du droit, soit, dans un certain nombre de cas, conforme à quelques-uns de nos intérêts politiques. Ce n'est pas interdit !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Vous n'avez jamais d'arrière-pensées !
M. Jacques Larché, rapporteur. Je n'ai plus d'arrière-pensée ! La preuve en est que je viens d'exprimer ma pensée avec la plus grande netteté.
Si nous retenions les mesures qui sont proposées par vos sous-amendements, mon cher collègue, nous risquerions de nous priver d'un certain nombre de possibilités politiques qui ne sont pas dénuées d'intérêt.
Par ailleurs - et je m'exprime non pas en tant que président de la commission des lois mais comme responsable politique - nous allons être engagés dans une élection à six tours à partir du mois de mars prochain : deux tours aux municipales et cantonales, deux tours aux législatives et deux tours aux présidentielles. C'est la première fois que cela se produit dans notre histoire politique. Il faudrait peut-être songer à adopter des attitudes préventives compte tenu de ce contexte totalement inhabituel dans lequel nous sommes placés.
Par conséquent, je ne suis pas favorable, en l'état actuel des choses et en raison de ces prédictions très modestes que je me permets de vous livrer, à l'inclusion dans les incompatibilités des présidents ou vice-présidents d'un établissement public de coopération intercommunale doté d'une fiscalité propre. J'avais envisagé - mais c'était très compliqué à mettre en oeuvre et était-ce juridiquement possible ? Je n'en sais rien - d'inclure dans les incompatibilités les présidents de communautés urbaines et les présidents de communautés d'agglomération. Disons-le clairement, nous avons le plus grand intérêt à ce qu'un certain nombre de maires puissent être les animateurs, donc les présidents, de communautés de communes.
Votre amendement, mon cher collègue, a une portée globale, c'est-à-dire qu'il vise tous les présidents d'intercommunalité...
M. Gérard Cornu. A fiscalité propre !
M. Jacques Larché, rapporteur. ... Oui, mais peu à peu, elles deviendront toutes à fiscalité propre.
Nous avons voté la loi relative à l'intercommunalité, non sans peine, après de nombreuses discussions, je suis bien placé pour le savoir. Nous en avons parfaitement perçu les prolongements, croyez-le bien, et nous savons très bien à quoi elle peut conduire. Aussi il vaudrait mieux contrôler politiquement ces établissements publics.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Ce n'est pas de l'électoralisme, cela !
M. Jacques Larché, rapporteur. Bien sûr, il vaudrait mieux les contrôler politiquement et, de ce fait, dans l'état actuel des choses et pour que le système démarre, il vaut mieux ne pas inclure dans la liste des incompatibilités ces présidences.
Je me permets de vous rappeler que c'est à l'issue de la bataille - car ce fut une véritable bataille : vingt heures de travaux - que nous avons livrée avec quelques collègues au sein de la commission mixte paritaire, que nous avons réussi à faire exclure du projet de loi sur l'intercommunalité, l'élection au suffrage universel direct. Ce n'est peut-être qu'un succès temporaire, mais si, d'aventure, les choses évoluent, les exigences politiques seront de la nature de celle que je viens d'évoquer et il faudra peut-être alors revoir - nous serons tout prêts à le faire - les règles de cumul.
Finalement, la commission des lois, qui a examiné avec beaucoup d'attention, croyez-le, ces sous-amendements, et qui a parfaitement compris le souci qui inspirait leurs auteurs, n'a pas pu émettre un avis favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les sous-amendements n°s 28 rectifié et 35 ?
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Défavorable.
M. le président. Je vais mettre aux voix le sous-amendement n° 28 rectifié.
M. Patrice Gélard. Monsieur le président, en application de l'article 38 de notre règlement, je demande la clôture de la discussion sur ce sous-amendement et pour tous les votes à venir.
M. le président. Mon cher collègue, il faut auparavant que deux orateurs d'opinion contraire se soient exprimés.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Dreyfus-Schmidt.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Mon cher collègue Gélard, il ne faut jamais être systématique. Certains sujets, plus importants que d'autres, méritent de plus longues discussions. Il serait préférable de demander l'application de l'article 38 au coup par coup.
M. Patrice Gélard. Nous sommes en troisième lecture !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Mes chers collègues, nous ne pouvons pas ne pas prendre la parole sur ce sous-amendement puisque nous avons déposé des amendements qui soulèvent des problèmes similaires. Il s'agit de l'amendement n° 31, émanant de treize de nos collègues appartenant au groupe communiste républicain et citoyen, et de l'amendement n° 33 rectifié, qui émane du groupe socialiste. Tous deux tendent à ajouter à la liste d'incompatibilités les présidents des établissements publics de coopération intercommunale dotés d'une fiscalité propre.
M. le président. Ces amendements seront appelés en leur temps.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Certes, monsieur le président, mais vous souhaitiez que le Sénat ait une vue d'ensemble. Il faut bien qu'il sache sur quoi il vote et que des amendements identiques au sous-amendement en discussion seront ultérieurement soumis à son appréciation !
Je voudrais rappeler, après m'être livré à un exercice difficile parce que, dans le rapport écrit de la commission, ne figurent pas tous les textes adoptés au cours des différentes lectures - c'est peut-être dommage ; dans un cas comme celui-là, quitte à utiliser une double page, il serait bon que chacun puisse se reporter aux différentes moutures - je voudrais rappeler, dis-je, que, dès la première lecture, l'Assemblée nationale avait ajouté à cet article, parmi les incompatibilités avec l'exercice d'une des fonctions électives énumérées, la fonction de président d'un établissement public de coopération intercommunale doté d'une fiscalité propre.
Après la suppression de cette disposition par le Sénat, l'Assemblée nationale l'a rétablie en deuxième lecture tandis que le Sénat, comme l'a expliqué M. le président de la commission des lois, avait en deuxième lecture renoncé à mentionner le conseiller municipal d'une commune d'au moins 3 500 habitants pour le remplacer par le conseiller municipal, avant d'en revenir aujourd'hui à la position qui était la sienne en première lecture.
Cela peut durer longtemps ! Je me suis demandé la raison de ces changements. J'ai bien entendu les arguments de M. le président de la commission des lois, mais le moins que l'on puisse dire est qu'ils ne sont pas convaincants.
Après avoir accusé nos collègues députés, depuis ce matin et même depuis hier et avant-hier, de faire de l'électoralisme, il s'est livré lui-même tout à l'heure à un électoralisme tel qu'on n'en a jamais vu !
« Mon cher collègue Cornu - dit-il - vous avez raison, mais politiquement cela ne nous arrange pas parce qu'on a beaucoup d'amis qui vont accéder à... »
M. Michel Caldaguès. C'est une interprétation !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. C'est très exactement ce qu'il a dit et il a dit qu'il n'avait pas d'arrière-pensée, qu'il livrait le fond de sa pensée. Ce n'est pas moi qui le dis. Vous pouvez relire le Journal officiel si vous avez eu un moment d'inattention pendant que parlait le président de la commission des lois, ce qui m'étonnerait de votre part, monsieur Caldaguès.
Cela étant dit, au sein du groupe socialiste, nous avons longuement débattu de ce sujet au cours de deux séances. Nombre de nos collègues pensaient et, pour tout vous dire, une nette majorité s'est dégagée en ce sens au moment du vote, qu'il n'était pas possible que le maire d'une commune de 4 000 habitants, dirons-nous, ne puisse pas cumuler cette fonction avec une autre alors que le président d'un organisme intercommunal à fiscalité propre le pourrait.
M. Alain Vasselle. On l'a déjà dénoncé en deuxième et en troisième lecture...
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Certes, mais permettez-nous de réfléchir, de discuter encore et de signaler au Sénat et, au-delà, à nos collègues députés de manière qu'ils y réfléchissent également, cette incohérence qui nous paraît subsister dans le texte.
Il est évident qu'il n'y aura de loi organique que si l'Assemblée nationale, de guerre lasse, et ne pouvant faire autrement, finit par accepter le texte qui lui viendra du Sénat. Il est évident également qu'il faudra alors que l'Assemblée nationale fournisse un gros travail pour établir une cohérence entre la loi organique telle que vous l'aurez votée et la loi ordinaire telle que l'Assemblée nationale la votera.
En tout cas, l'opinion publique ne pourrait pas comprendre cette différence de traitement faite entre certains responsables de tout petits budgets et des responsables de gros budgets dotés d'un rôle politique important.
Je regrette que les explications de M. le rapporteur n'aient pas été plus convaincantes. Je dois dire que celles de M. le ministre ne l'ont pas été non plus puisqu'il s'est contenté de communiquer l'avis défavorable du Gouvernement sur le sous-amendement.
Si nous ne votons pas ce dernier, c'est parce qu'il est en contradiction avec l'un de nos amendements qui opère une différence entre les conseillers municipaux et les maires.
M. le président. Il vous faut conclure, mon cher collègue.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je conclus, monsieur le président. Au demeurant, nous ne pouvons qu'éprouver une sympathie certaine à son égard puisque nous proposons la même chose sur certains points.
M. le président. Donc, nous venons d'entendre un orateur contre avec une sympathie certaine !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Monsieur le président, je ne vous permets pas d'interpréter...
M. le président. Mon cher collègue, je fais le décompte à cause de la clôture. Il faut attendre qu'un orateur contre et un orateur pour se soient exprimés avant de consulter sur la clôture. Je constate donc que vous êtes contre même si vous avez de la sympathie pour ce sous-amendement.
M. Michel Duffour. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Duffour.
M. Michel Duffour. Nous sommes d'accord avec l'argumentation qu'a développée M. Cornu et que je développerai de nouveau au moment où l'amendement n° 31 viendra en discussion. Toutefois, nous ne pourrons pas voter ce sous-amendement n° 28 rectifié, dans la mesure où il se rapporte à l'amendement n° 5, auquel nous sommes défavorables.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 28 rectifié, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 35, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président. La parole est à M. Vecten, pour défendre l'amendement n° 26.
M. Albert Vecten. Cet amendement comporte deux propositions principales.
Premièrement, l'incompatibilité avec un mandat de parlementaire national, député ou sénateur, viserait non seulement les fonctions de président d'un conseil régional, d'un conseil général ou de maire, mais aussi celles de vice-président membre du bureau d'un conseil régional ou d'un conseil général et d'adjoint au maire.
Vous n'êtes pas sans savoir en effet que les vice-présidents membres du bureau d'un conseil régional ou d'un conseil général ainsi que les adjoints au maire peuvent bénéficier, de la part de l'exécutif, d'une très large délégation de pouvoir, voire d'une délégation générale.
Cette faculté de délégation peut donner lieu à des dérives fâcheuses. En effet, la tentation serait grande pour certains parlementaires de vouloir continuer à diriger une mairie, un conseil général ou un conseil régional en occupant un poste d'adjoint au maire ou de vice-président d'un conseil général ou d'un conseil régional avec le consentement d'un exécutif qui leur accorderait de très larges délégations.
J'ajouterai que la conduite d'une collectivité locale, d'une mairie, d'un conseil général ou d'un conseil régional est un travail d'équipe. L'exécutif doit pouvoir compter sur une parfaite disponibilité de ses adjoints ou de ses vice-présidents auxquels il accorde une délégation de pouvoir. Ce ne sera pas le cas avec des adjoints cumulant une fonction de parlementaire.
Contrairement à la position de la commission des lois, je propose donc d'instaurer une incompatibilité entre un mandat parlementaire et une fonction exécutive locale et d'étendre ce régime d'incompatibilité aux fonctions de vice-président membre du bureau pour les régions et départements, et d'adjoint au maire pour les communes.
Le deuxième point visé par cet amendement concerne les fonctions de président et de vice-président d'un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre.
Je ne détaillerai pas les raisons qui me poussent à vouloir introduire une incompatibilité entre les fonctions de parlementaire et celles de président ou de vice-président d'un établissement public à fiscalité propre. Certains de mes collègues viennent de les exposer.
M. le ministre de l'intérieur leur a répondu qu'il s'agissait d'encourager l'intercommunalité en excluant ces fonctions du régime des incompatibilités. Cet argument ne me paraît pas valable. Aucun système n'est parfait, mais soit on veut une limitation du cumul des mandats, soit on n'en veut pas !
Il ne me paraît pas raisonnable de prétexter un encouragement à l'intercommunalité pour admettre une situation dans laquelle un parlementaire ne serait plus autorisé à être maire d'une commune de 5 000 habitants mais pourrait présider une communauté d'agglomération de 500 000 habitants.
Non seulement ce système est ridicule, mais il risque d'entraîner une confusion entre les différents niveaux de pouvoir et de fausser les relations de travail au niveau local comme au niveau national.
M. le président. La parole est à M. Charmant, pour présenter l'amendement n° 32 rectifié.
M. Marcel Charmant. Il n'est pas dans nos habitudes de modifier profondément nos positions lorsque le texte en est à sa troisième lecture.
M. Jean-Jacques Hyest. On a toujours le droit de réfléchir !
M. Marcel Charmant. Oui, monsieur Hyest.
Il faut considérer que nous débattons de deux projets de loi, un projet de loi organique et un projet de loi ordinaire, et que ces deux textes traitent du même sujet mais ne concernent pas forcément les mêmes élus.
Or nous constatons que, du fait de la position adoptée par la majorité sénatoriale, le projet de loi organique dans sa version finale et le projet de loi ordinaire, tel qu'il pourrait être voté en dernière lecture par l'Assemblée nationale, ne seraient pas en cohérence.
C'est la raison pour laquelle le groupe socialiste a déposé un certain nombre d'amendements qui ont pour l'objet d'attirer l'attention du Sénat, de l'Assemblée nationale et du Gouvernement sur cette question.
En effet, si le projet de loi organique était voté selon les voeux du Sénat et le projet de loi ordinaire selon les voeux de l'Assemblée nationale, nous consacrerions deux types d'élus : les élus parlementaires, qui relèvent de la loi organique et à qui seraient autorisés certains cumuls - tout à l'heure, M. Vecten et d'autres ont mis en évidence les différences de nature entre les fonctions de président d'une communauté urbaine comptant un ou deux millions d'habitants et celles de président d'une communauté urbaine de 4 000 ou 5 000 habitants - et les élus visés par la loi ordinaire, celle-ci faisant que le président du conseil général du moins peuplé des départements de France ne pourrait pas être en même temps maire de la plus petite commune de son département !
M. Jean-Jacques Hyest. Ce qui serait quand même excessif !
M. Marcel Charmant. Nous sommes certes en troisième lecture, mais nous ne pouvons accepter qu'une loi ordinaire ne soit pas en concordance avec une loi organique alors qu'elles traitent du même objet.
M. Charles Revet. Cela démontre bien l'absurdité !
M. Marcel Charmant. Nous souhaitons donc attirer l'attention sur la situation de blocage qui existe aujourd'hui et qui doit être levée. Nous espérons que la sagesse et surtout la raison l'emporteront.
Notre amendement concerne les maires des communes dont les conseils municipaux sont élus au scrutin de liste à deux tours - il faut bien prendre une référence - étant entendu que, dans un esprit de conciliation et pour faire encore un pas par rapport à la précédente loi sur le cumul des mandats, qui avait déjà représenté une avancée certaine, nous serions disposés, si le Sénat et l'Assemblée nationale, en accord avec le Gouvernement, le souhaitaient, à accepter que ce seuil soit remonté de façon à tenir compte de l'importance des mandats exécutifs en cause.
M. Gérard Delfau. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Duffour, pour défendre l'amendement n° 31.
M. Michel Duffour. Nous avions jugé excellent le texte tel qu'il avait été adopté par l'Assemblée nationale en deuxième lecture et qui était ainsi libellé : « Le mandat de député est incompatible avec l'exercice d'une des fonctions électives suivantes : président d'un conseil régional, président du conseil exécutif de Corse, président d'un conseil général, maire, président d'un établissement public de coopération intercommunale doté d'une fiscalité propre. »
Nous avons regretté que le Sénat, en deuxième lecture, dénature ce texte en autorisant le cumul entre le mandat parlementaire et une fonction exécutive.
A fortiori nous regrettons que, en troisième lecture, le Sénat veuille encore élargir les possibilités de cumul, en l'occurrence en autorisant le cumul avec l'exercice d'un mandat dans une commune de moins de 3 500 habitants.
Au demeurant, le texte adopté par l'Assemblée nationale en troisième lecture ne fait qu'inutilement compliquer les choses. Je l'ai dit au cours de la discussion générale : nous sommes pour un projet simple, fort, cohérent. C'est pourquoi nous proposons de revenir au texte adopté par l'Assemblée nationale en deuxième lecture.
M. le président. La parole est à M. Dreyfus-Schmidt, pour défendre l'amendement n° 33 rectifié.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Pour peu que l'on soit superstitieux, on peut espérer que l'amendement n° 31 bénéficiera du fait qu'il est signé, non par le groupe communiste - il n'y a plus de groupe communiste au Sénat, il y a un groupe communiste républicain et citoyen - mais par treize de nos collègues qui se trouvent être tous communistes. (Sourires.)
M. Michel Duffour. Bien vu !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Dans la mesure où je défends, au nom du groupe socialiste tout entier, un amendement identique, j'espère que ce chiffre treize a été déterminé de manière à lui porter bonheur ! (Nouveaux sourires.)
Le texte du projet de loi organique tel qu'il est proposé par le Sénat - qui, conformément à son habitude, use pleinement de la nécessité de son adhésion - ne fait pas de différence entre les mandats et les fonctions, alors que la loi ordinaire, à l'instar du projet de loi organique dans sa rédaction initiale, distingue les uns et les autres.
C'est sur ce point que se situe la divergence soulignée tout à l'heure par notre collègue M. Charmant, divergence qui contraindra l'Assemblée nationale et le Gouvernement à un travail important pour rendre à l'ensemble sa cohérence, en tout cas le plus de cohérence possible.
Dans cette perspective, il est évident que les présidents d'établissements publics de coopération intercommunale dotés d'une fiscalité propre doivent prendre place à côté des conseillers municipaux des communes de plus de 3 500 habitants. Cela relève du bon sens !
Je serais très gêné si ce texte visait les ministres puisque je suis moi-même membre d'une communauté d'agglomération que préside le ministre de l'intérieur ! (Sourires.) Mais, les ministres n'étant pas visés, je ne vois aucun inconvénient à être le porte-parole du groupe socialiste pour soumettre cet amendement n° 33 rectifié à l'approbation du Sénat (Nouveaux sourires.)
M. le président. La parole est à M. Charmant, pour présenter l'amendement n° 34 rectifié.
M. Marcel Charmant. Les explications que j'ai données en exposant l'amendement n° 32 rectifié valent pour celui-ci. Il s'agit surtout d'attirer l'attention du Sénat, de l'Assemblée nationale et du Gouvernement sur les difficultés qui nous attendent.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 26 et 32 rectifié, sur les amendements identiques n°s 31 et 33 rectifié, ainsi que sur l'amendement n° 34 rectifié ?
M. Jacques Larché, rapporteur. S'agissant de l'amendement n° 26, M. Vecten ne s'étonnera pas que je lui dise qu'il est en contradiction avec la position fondamentale de la commission des lois et avec les décisions que nous avons prises au cours des deux précédentes lectures.
On a certes mis l'accent sur un risque d'incohérence. Mais à qui la faute ? L'incohérence, elle vient de l'Assemblée nationale !
M. Patrick Lassourd. Et du Gouvernement !
M. Jacques Larché, rapporteur. M. le ministre a d'ailleurs tout à fait la possibilité d'y mettre fin puisque la prochaine lecture du projet de loi ordinaire à l'Assemblée nationale n'est en aucune manière obligatoirement une dernière lecture ! Il dépendra de lui d'en décider. S'il décide que c'est une dernière lecture, l'incohérence que certains ont soulignée lui sera imputable.
L'amendement n° 32 rectifié montre la nécessité du débat parlementaire, et je remercie M. Charmant - on sait le travail qu'il accomplit au sein de la commission des lois - de l'avoir fait ressortir. Il s'agit de reconnaître le caractère difficilement acceptable - je n'emploierai pas d'autres mots pour ne pas être désagréable - de l'inclusion de certaines catégories de communes dans le régime des incompatibilités. Le groupe socialiste a fait un progrès considérable, et nous lui en donnons acte.
Comme quand on note un élève, je dirai : « Très bien, mais peut mieux faire. » (Sourires.)
M. Marcel Charmant. Merci !
M. Jacques Larché, rapporteur. Pour l'instant, les efforts étant encore insuffisants, je ne suis pas prêt à vous donner un satisfecit intégral !
M. Marcel Charmant. Avec la majorité que vous avez, c'est souvent difficile !
M. Jacques Larché, rapporteur. S'agissant des amendements identiques n°s 31 et 33 rectifié, il va de soi qu'ils ne sont pas compatibles avec la position de la commission. Cela étant, je n'avais pas remarqué que l'amendement n° 31 n'avait que treize signataires.
M. Michel Duffour. En fait, nous sommes quatorze !
M. Jacques Larché, rapporteur. Alors, il n'en manque qu'un ! (Sourires.)
Pour ce qui est de l'amendement n° 34 rectifié, je me permets de dire de nouveau à nos collègues du groupe socialiste qu'ils ont compris le caractère véritablement abrupt des premières dispositions qu'ils avaient arrêtées et votées. Depuis, ils ont fait quelques progrès. Je ne doute pas qu'ils poursuivront leurs efforts au cours des lectures qui interviendront encore. Dans l'état actuel des choses, je donne un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 5, 26 et 32 rectifié, sur les amendements identiques n°s 31 et 33 rectifié, et sur l'amendement n° 34 rectifié ?
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Le Gouvernement est défavorable à ces amendements. Je n'ai pas besoin d'expliciter davantage ma position, l'ayant fait tout à l'heure à la tribune, même si M. Dreyfus-Schmidt m'a pressé d'argumenter à sa place ! Il faut savoir aussi rester dans des limites convenables de temps. Faute de quoi c'est tout l'ordre du jour parlementaire qui sera remis en cause.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 5, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 2 est ainsi rédigé et les amendements n°s 26, 32 rectifié, 31, 33 rectifié et 34 rectifié n'ont plus d'objet.

Article 2 bis