Séance du 9 mars 2000







M. le président. « Art. 1er. - Après la première phrase du dernier alinéa de l'article 15 de l'ordonnance n° 59-2 du 2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de finances, il est inséré une phrase ainsi rédigée :
« Ce dépôt est facultatif pour les fonds provenant de l'aliénation forcée d'un élément de patrimoine par suite de tempête ou autre calamité publique. »
Sur cet article, la parole est à M. le rapporteur.
M. Michel Mercier, rapporteur. Je tiens d'abord à vous remercier, madame la secrétaire d'Etat, d'avoir souligné les difficultés que rencontrait le Parlement pour agir sous l'empire de textes qui le brident depuis maintenant longtemps.
Vous avez également fort bien expliqué que la loi n'était pas faite pour permettre l'intervention de mesures rapides, que le Parlement n'était pas là pour aider ceux qui en avaient besoin mais que, heureusement, le Gouvernement y veillait et que toutes les choses allaient bientôt s'arranger. Tout cela est peut-être vrai, mais on ne peut pas dire que les choses s'arrangent vite...
Or, notre proposition de loi a précisément pour premier objet d'accélérer un peu le processus.
La discussion qui vient d'avoir lieu a bien montré qu'il existait un large accord entre le Parlement et le pouvoir exécutif sur la nécessité de mesures spécifiques. Tout le problème est de faire en sorte que cet accord se traduise par des solutions concrètes pour tous ceux qui sont concernés.
Je souhaite que ce débat puisse au moins nous permettre de montrer aux communes forestières, aux exploitants forestiers et aux propriétaires forestiers qu'à Paris on ne se contente pas de faire des discours et que l'on s'y préoccupe aussi de répondre concrètement à leurs difficultés.
M. Serge Vinçon. Exactement !
M. Michel Mercier, rapporteur. S'agissant maintenant de l'article 1er, je voudrais rappeler, notamment à l'intention de Mme Beaudeau, que l'obligation pour les collectivités locales de déposer leurs fonds au Trésor n'est en rien un principe républicain. La République, c'est bien autre chose !
Mme Marie-Claude Beaudeau. Cela en fait aussi partie !
M. Michel Mercier, rapporteur. Ma chère collègue, le texte fondateur de cette obligation est un décret impérial de 1811 : il remonte donc à une époque où les idées républicaines en avaient quand même « pris un coup ». Et ce n'est pas ce texte qui les a restaurées dans leur plénitude ! Ce qui a suivi 1811, c'est 1815 et le baron Louis ! C'est en fait le baron Louis qui est à l'origine de nos finances publiques modernes.
L'obligation de déposer ces fonds au Trésor répond à un besoin évident : il faut que le moins d'argent possible sorte du circuit du Trésor, de manière que le Trésor soit toujours alimenté. C'est un bon principe technique, mais ce n'est pas du tout un principe républicain !
M. Alain Lambert, président de la commission. Il vaut en fait pour tous les régimes !
M. Michel Mercier, rapporteur. La République, grâce à Dieu, c'est bien autre chose !
Madame la secrétaire d'Etat, si vous ne voulez pas que nous touchions à ce principe - et je vous concède que l'occasion est un peu ténue pour modifier l'ordonnance du 2 janvier 1959 - vous avez une solution toute simple ! Il suffit que vous nous disiez que, puisque l'article 15 de l'ordonnance du 2 janvier 1959 permet au ministère des finances d'accorder des dérogations à cette obligation de placement, il examinera les demandes qui lui seront présentées et, lorsque le montant des ventes ou des recettes exceptionnelles justifiera la pertinence du placement envisagé, y compris hors du circuit du Trésor, il fera usage de ce pouvoir que lui confère l'article 15.
Si vous nous dites cela, madame la secrétaire d'Etat, je proposerai sans hésiter à la commission de retirer l'article 1er.
M. le président. La parole est à M. Gaillard.
M. Yann Gaillard. J'ai écouté avec beaucoup d'attention, non seulement en tant que sénateur d'un département sinistré, mais aussi en tant que vice-président de la fédération des communes forestières de France, les explications de Mme la secrétaire d'Etat, et je dois confesser ma perplexité sur un point.
Mme la secrétaire d'Etat a paru indiquer que, par assimilation au régime des aliénations forcées du patrimoine communal, certains placements bénéficiant de conditions privilégiées pourraient être autorisés. Il s'agirait en fait de procéder auprès du réseau des comptables du Trésor, à des placements sans doute un peu plus rémunérateurs - mais dans quelles proportions ? - correspondant à une nouvelle catégorie de bons du Trésor ou ressemblant aux obligations assimilables du Trésor. C'est en tout cas ce que j'ai cru comprendre.
J'aimerais d'abord obtenir de vous, madame la secrétaire d'Etat, quelques précisions sur l'avantage financier que représenteraient de tels placements.
Il reste que la réforme de l'administration des finances annoncée par M. Christian Sautter et par vous-même prévoit, semble-t-il, à très brève échéance, la suppression des services chargés de l'épargne dans le réseau de la comptabilité publique. Dès lors, comment peut-on suggérer la réalisation de nouveaux placements auprès du réseau des comptables du Trésor alors que l'on va le supprimer d'ici six à sept mois ?
M. le président. Mes chers collègues, M. le rapporteur ayant évoqué l'éventualité d'un retrait de l'article 1er, en fonction de la réponse que lui apporterait Mme la secrétaire d'Etat, je vous propose d'interrompre nos travaux pendant quelques minutes, afin de permettre à la commission des finances de se réunir.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix heures cinquante-cinq, est reprise à onze heures dix.)