Séance du 4 avril 2000







M. le président. « Art. 19 bis. - Une commission de suivi de la détention provisoire est instituée. Elle est placée auprès du ministre de la justice. »
« Elle est composée de deux représentants du Parlement, d'un magistrat de la Cour de cassation, d'un membre du Conseil d'Etat, d'un professeur de droit, d'un avocat et d'un représentant d'un organisme de recherche judiciaire.
« Elle est chargée de réunir les données juridiques, statistiques et pénitentiaires concernant la détention provisoire, en France et à l'étranger. Elle se fait communiquer tout document utile à sa mission et peut procéder à des visites ou à des auditions.
« Elle publie dans un rapport annuel les données statistiques locales, nationales et internationales concernant l'évolution de la détention provisoire ainsi que la présentation des différentes politiques mises en oeuvre. Elle établit une synthèse des décisions en matière d'indemnisation de la détention provisoire prises en application des articles 149-1 à 149-4 du code de procédure pénale.
« Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités d'application du présent article. »
Par amendement n° 42, M. Jolibois, au nom de la commission, propose de supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Charles Jolibois, rapporteur. L'Assemblée nationale a institué une commission du suivi de la détention provisoire chargée de collecter des statistiques, d'élaborer un rapport annuel et de faire une synthèse des décisions de la commission d'indemnisation.
La commission des lois a estimé que cette commission supplémentaire, qui s'ajouterait, évidemment, à tant d'autres, n'était pas nécessaire dès lors qu'un certain nombre de dispositions étaient prévues : ainsi, dorénavant, les parlementaires pourront tous visiter les prisons dans leur département ; par ailleurs, la Cour de cassation dresse déjà, chaque année, un bilan des décisions de la commission d'indemnisation des détentions provisoires abusives, bilan que les commissions des lois des assemblées parlementaires peuvent naturellement se procurer.
J'ajoute, au surplus - ce point n'est pas sans importance - que la question relève du domaine réglementaire et non pas du domaine législatif.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 42.
M. Alain Vasselle. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle. Je regrette la suppression d'une disposition qui, aux yeux de M. le rapporteur, n'a pas d'utilité dans la mesure où il est permis à tout parlementaire de visiter les prisons.
Soit, nous allons visiter des prisons et des maisons d'arrêt ! Mais qu'en résultera-t-il ? Lorsqu'un parlementaire, après avoir visité des prisons, adressera un courrier au garde des sceaux ou au Premier ministre pour faire état des conditions dans lesquelles les détenus sont hébergés, peut-il espérer que cette initiative trouvera auprès d'eux quelque écho ?
J'en doute, et c'est la raison pour laquelle je considérais - sans doute à tort, si j'en crois M. le rapporteur - que cette commission de suivi aurait eu quelque utilité, et qu'au moins un rapport annuel aurait pu être présenté sur les conditions dans lesquelles les détenus sont hébergés.
J'ai moi-même visité, sans doute comme d'autres dans leur département, une ou deux prisons et les maisons d'arrêt de mon département. J'ai été effaré de constater dans quelles conditions l'hébergement était assuré et quelles étaient les conditions de vie. Il s'agit certes de détenus, mais voilà bien longtemps que les directeurs de prison dénoncent l'insuffisance, quels que soient les gouvernements, des moyens mis à leur disposition pour l'humanisation des établissements !
Certes, si cette commission avait eu pour seul objet d'établir des statistiques sur le plan national, elle n'aurait présenté qu'un intérêt relatif, mais, si elle avait pu appeler l'attention de la représentation nationale et du Gouvernement sur les moyens qu'il faut mettre en oeuvre pour que les prisons et les maisons d'arrêt soient aménagées de façon acceptable, encore une fois, elle aurait eu son utilité.
M. Charles Jolibois, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Charles Jolibois, rapporteur. Monsieur Vasselle, je comprends parfaitement votre souci, qui est d'ailleurs également le nôtre.
Vous le savez, une commission d'enquête a été créée pour étudier ce sujet. Vous savez également que M. Canivet, Premier président de la Cour de cassation, a établi un rapport sur ce problème des prisons. Dans ce texte même, nous avons fait un certain nombre de démarches, notamment celle visant l'emprisonnement individuel lorsqu'on est en détention provisoire.
C'est vrai, cette commission de suivi n'est pas faite seulement pour établir des statistiques, mais nombre d'informations convergent déjà vers nous sur la détention provisoire, et nous continuerons à suivre cette affaire, qui est de la plus haute importance.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 42, pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 19 bis est supprimé.

Articles additionnels après l'article 19 bis