Séance du 6 avril 2000







M. le président. La parole est à M. Bel.
M. Jean-Pierre Bel. Ma question s'adresse à M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.
Depuis le 1er avril, les entreprises françaises du secteur du textile, de l'habillement et de la chaussure se voient contraintes de rembourser les allégements de charges salariales accordés en 1996 par le gouvernement d'Alain Juppé.
Il faut rappeler à ce propos la légèreté avec laquelle ce plan dit « Borotra » a été promulgué. En effet, ni les avertissements de la Commission européenne ni un précédent parfaitement identique chez nos voisins belges n'avaient empêché la mise en oeuvre d'un dispositif qui nous a conduit dans l'impasse.
Aujourd'hui, c'est à nos entreprises de payer les pots cassés : alors que la plupart d'entre elles ont respecté le contrat qui leur avait été proposé, elles sont tenues de rembourser des sommes considérées comme indûment perçues.
Le paradoxe, c'est qu'aujourd'hui plus encore qu'en 1996 la situation est extrêmement difficile et tendue. Ces reversements peuvent avoir des conséquences extrêmement graves dans un secteur fragilisé.
M. Dominique Braye. C'est vrai.
M. Jean-Pierre Bel. Monsieur le secrétaire d'Etat, pouvez-vous préciser quels aménagements vous comptez prendre pour le remboursement de ces aides ?
Plus globalement, je relève qu'il s'agit de 340 000 emplois directs, de milliers d'entreprises, qui constituent souvent le seul poumon d'oxygène, la seule activité sur leur territoire, d'entreprises modernes qui n'ont plus rien à voir avec l'image vieillotte qu'on leur renvoie communément, mais aussi de salariés inquiets et mobilisés.
Ne pensez-vous pas de ce fait, monsieur le secrétaire d'Etat, qu'il est urgent que vous nous disiez si ce secteur doit être considéré comme définitivement condamné ou si l'Europe est prête à prendre les mesures adaptées qui s'imposent ?
Vous savez, par ailleurs, que les représentants des collectivités ont demandé que, en France, un comité interministériel à l'aménagement du territoire soit consacré au textile et à l'habillement.
Sans attendre, plusieurs bassins industriels textiles - c'est le cas, en Midi-Pyrénées, du Tarn et de l'Ariège - se sont regroupés pour présenter un plan cohérent de dynamisation de la filière. D'autres régions françaises sont en train de s'engager dans la même voie.
Pouvez-vous me dire, monsieur le secrétaire d'Etat, face à cette approche, qui est, cette fois, non pas sectorielle, mais territoriale, quels moyens le Gouvernement français envisage de dégager pour donner espoir à tous ceux qui vivent du textile ? (Applaudissements sur les travées socialistes, sur celles du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur certaines travées de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie. Monsieur le sénateur, les charges supplémentaires des entreprises du textile et de l'habillement proviennent d'une mauvaise évaluation en 1996 et 1997 du risque entrepreneurial attaché au plan dont vous avez parlé dans votre question.
Il est vrai que nous sommes obligés aujourd'hui d'appliquer la loi de Bruxelles, en particulier le jugement de la Cour européenne de justice du mois d'octobre 1999, qui nous enjoint de faire procéder aujourd'hui au remboursement des aides indues, illégales au regard des règles européennes, perçues par ces entreprises.
Nous nous sommes battus, je me suis vraiment beaucoup battu pour que ce remboursement soit supportable, et je crois que nous avons obtenu le maximum.
Compte tenu de la structure des salaires, les entreprises de moins de quatre-vingts salariés à l'époque auront très peu à rembourser, voire rien. Sur 5 500 entreprises environ, 600 au plus, et peut-être moins, seraient redevables d'une aide litigieuse.
Par ailleurs, l'organisation d'une franchise de remboursement de 100 000 euros, un correctif fiscal permettant de déduire le remboursement de l'impôt sur les sociétés payé à l'époque et l'étalement du remboursement sur trois ans participent du succès de la négociation que j'ai entamée dès 1997 avec la Commission.
Monsieur le sénateur, vous avez évoqué le rôle des entreprises du textile et de l'habillement dans l'action régionale.
Toutes les régions sont aujourd'hui peu ou prou concernées.
J'ajoute à cet égard que les directions régionales de l'industrie, par les conseils et les aides qu'elles peuvent prodiguer à l'investissement, à l'innovation et à la formation, ont été mobilisées pour qu'une réponse positive et dynamique soit apportée aux entreprises du secteur.
De plus, les contrats de plan Etat-région prévoient, dans leur volet industriel et technologique, une mobilisation au profit de ces entreprises. Des projets régionaux ambitieux, comme le projet MUTEX, dans la région de Roanne, peuvent voir le jour lorsque les industriels, l'Etat et les collectivités se mobilisent.
Enfin, je note que l'action européenne a toujours été au coeur de la politique suivie par la France dans ce domaine. Dans la seconde partie de l'année, je présiderai le conseil « Industrie ». Nous serons alors certainement appelés à réviser le plan en faveur du textile établi en 1997 par la Commission, qui, hélas ! n'a pas produit de grands effets, le dossier ayant été mal suivi par Bruxelles. Je souhaite que le conseil en dresse un bilan et analyse les axes de relance de ce secteur à l'échelon européen.
Je renouvelle enfin ma confiance et celle de tout le Gouvernement dans notre secteur du textile-habillement et dans les entreprises qui se battent dans des conditions difficiles pour exister et pour se développer. (Applaudissements sur les travées socialistes, sur celles du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Alain Gournac. Très bien !

DEVENIR DES RÉFORMES
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