Séance du 8 juin 2000







M. le président. La parole est à M. Leclerc. (Applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. Dominique Leclerc. Ma question s'adresse à M. le ministre de la défense.
Je souhaiterais revenir sur les conséquences désastreuses de la loi du 28 octobre 1997 portant réforme du service national, et ce, bien évidemment, pour une tranche de jeunes gens, sursitaires ou non.
Cette loi - dois-je le rappeler ? - s'applique différemment selon l'âge du jeune appelé puisqu'elle prolonge l'état actuel pour les jeunes nés avant 1979 et qui devront effectuer un service de dix mois, alors qu'elle le modifie du tout au tout pour ceux qui sont nés après 1978 et qui n'auront à effectuer qu'une journée d'appel de préparation à la défense.
Je comprends que cette situation soit difficile à accepter pour ceux que quelques mois, voire quelques jours seulement, séparent de la date couperet !
Cette mesure crée deux populations dotées de droits et de devoirs différents.
Elle est d'autant plus aberrante qu'elle ne tient pas compte de la réalité des choses, à savoir : l'allongement des études, la diversité des formations qu'il est possible de suivre, la vitesse à laquelle chacun suit sa formation et devient disponible sur le marché du travail, et la concurrence, qui reste forte sur le marché du travail, notamment entre garçons et filles de même compétence.
Aussi cette loi est-elle perçue par beaucoup de jeunes gens concernés comme totalement inégalitaire et ce d'autant plus que l'attribution du report et sa prolongation prévus par la loi restent trop aléatoires.
En effet, selon les termes de l'alinéa 1 de l'article 5 bis A du code du service national, le report d'incorporation d'une durée de deux ans dont a bénéficié un jeune homme titulaire d'un contrat de travail de droit privé à durée déterminée peut faire l'objet d'une prolongation.
Ce report supplémentaire, à l'instar du report initial, est octroyé selon des critères arbitraires, à la discrétion d'une commission régionale. Il doit notamment répondre à la condition suivante : l'incorporation immédiate du demandeur a-t-elle pour conséquence de compromettre son insertion professionnelle ou la réalisation d'une première expérience professionnelle ?
Or, plusieurs de mes collègues et moi-même sommes, depuis quelque temps, sensibilisés par des jeunes gens, qui se trouvent dans des situations professionnelles et des conditions familiales catastrophiques parce qu'ils ne peuvent obtenir le renouvellement du report prévu par la loi.
M. le président. Veuillez conclure !
M. Dominique Leclerc. Cette situation est incompréhensible !
Aussi, monsieur le secrétaire d'Etat, souhaitez-vous poursuivre dans la voie de ce qui est considéré comme une injustice par les jeunes gens concernés ou apporter des solutions pratiques et concrètes ? (Applaudissements sur les travées du RPR.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Jean-Pierre Masseret, secrétaire d'Etat à la défense chargé des anciens combattants. Monsieur le sénateur, pour répondre à votre question, il faut concilier une exigence et une préoccupation.
L'exigence, c'est celle de l'organisation de nos armées, de la pertinence de notre défense. La professionnalisation deviendra réalité le 31 décembre 2002 ; d'ici là, il faut donc concilier la montée en puissance de l'engagement professionnel et la décrue de l'appel au contingent. La règle est parfaitement connue : elle résulte, en effet, de la loi d'octobre 1997.
La préoccupation, c'est celle de nos jeunes concitoyens qui entrent dans une activité professionnelle et qui sont titulaires d'un contrat de travail, notamment à durée indéterminée.
M. le Premier ministre s'est exprimé sur ce sujet le 12 mai à La Villette. Il a alors tracé des directives qui ont conduit le ministre de la défense, M. Alain Richard, à écrire aux préfets en leur demandant la plus large interprétation possible de la loi sur l'insertion professionnelle et du dispositif de 1997. Cela va être fait aussi de façon à harmoniser les décisions dans l'ensemble de nos départements.
Par ailleurs, en ce qui concerne les reports, nous allons améliorer la concertation et le dialogue avec les jeunes, qui, très tôt, connaîtront leur sort.
Ces dispositions visent à prendre en compte les préoccupations dont vous faites état, dont nous connaissons, nous-mêmes, la réalité dans nos permanences politiques. Mais vous ne pouvez pas perdre de vue la nécessité de répondre aux besoins de nos armées.
Il n'est pas possible, d'un coup de baguette magique, de perturber le processus actuellement en cours et qui s'achèvera le 31 décembre 2002. Les directives édictées par M. le Premier ministre, la traduction que vient d'en donner le ministre de la défense, l'esprit dans lequel ces questions sont traitées permettent de répondre utilement aux préoccupations exposées.
Il faut, je le répète, concilier l'intérêt de notre défense, le caractère opérationnel de nos armées et la préoccupation sociale. Les directives qui ont été données permettent de concilier ces deux exigences. (Très bien ! sur les travées socialistes.)

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