Séance du 13 juin 2000






LYON - TURIN

M. le président. La parole est à M. Vial, auteur de la question n° 831, adressée à M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.
Jean-Pierre Vial. Cette question, qui concerne M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement, a trait à l'état d'avancement du projet de liaison ferroviaire Lyon-Turin.
A l'occasion de la visite officielle du Président de la République en Savoie les 4 et 5 mai derniers, un message fort a été réaffirmé : la nécessité de faire de la liaison ferroviaire Lyon-Turin un axe est-ouest majeur du développement de l'Europe du Sud, qui a fait l'unanimité au sein des élus savoyards et régionaux, mais aussi parmi les représentants des autres partenaires, qu'il s'agisse de la SNCF, de Réseau ferré de France, du groupement européen d'intérêt économique Alpetunnel ou encore de la mission Lyon-Turin.
Cette nécessité, tant en termes de rééquilibrage économique entre le Nord et le Sud qu'en termes de flexibilité du passage des Alpes, a été renforcée le 15 mai dernier, lors de la rencontre à Modane du ministre français de l'équipement, des transports et du logement, et de son homologue italien, qui ont décidé de poursuivre, sur la lancée du sommet franco-italien de Nîmes, les réunions techniques en vue d'accélérer le transfert du transport de marchandises de la route vers le rail et de fixer les premières échéances de lancement du projet.
Dans un contexte marqué par le drame du Mont-Blanc ainsi que par le lancement des projets suisse de Lötschberg et du Saint-Gothard, la liaison Lyon-Turin permettrait de développer les échanges et le transport de marchandises en évitant l'engorgement des routes des Alpes ou de la cluse chambérienne - 90 000 véhicules circulent chaque jour dans Chambéry - qui a des conséquences inquiétantes sur la pollution sonore et atmosphérique, ainsi que sur la sécurité routière.
Dans le meilleur des cas, la ligne Lyon-Turin mettra quinze ans avant d'entrer en service, avec l'objectif de faire transiter par le fer 40 millions de tonnes par an.
Sans attendre cette échéance, une première phase à moyen terme permettrait un accroissement du trafic de marchandises sur l'axe France-Italie pour atteindre 20 millions de tonnes en utilisant au mieux le tunnel actuel du Fréjus.
Au moment où est lancée la consultation complémentaire sur la section ligne nouvelle Lyon-Sillon alpin et les itinéraires d'accès de fret à la liaison ferroviaire internationale Lyon-Turin, il est indispensable que des engagements sur les mesures transitoires soient prises concrètement afin que la ligne Ambérieu-Modane permette d'accroître la capacité de fret pour passer de 10 millions à 20 millions de tonnes par an, sans pour autant aggraver la situation des itinéraires existants par l'augmentation du trafic qui ne saurait être acceptée sur l'axe Aix-les-Bains - Chambéry ni, au sud, pour la traversée de Grenoble.
La seule initiative susceptible de répondre à court et à moyen terme à ces enjeux est la réalisation d'un tunnel pré-Alpes. Compte tenu des déclarations d'intention, seuls des engagements précis sur la mise en oeuvre d'un tel tunnel sont susceptibles de répondre aux préoccupations des populations et des responsables de ce territoire alpin.
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Michelle Demessine, secrétaire d'Etat au tourisme. Monsieur le sénateur, M. Jean-Claude Gayssot préside en ce moment la réunion du Fonds d'investissement des transports terrestres et des voies navigables, le FITTVN, qui décide des engagements financiers en faveur du rail, de la voie d'eau et des routes nationales présentant un intérêt certain en matière d'aménagement du territoire. Il m'a donc demandé de l'excuser auprès de vous et de vous communiquer la réponse qu'il a préparée à votre intention.
Face aux dysfonctionnements liés à la forte croissance des transports routiers et à l'engorgement des routes et des autoroutes, le Gouvernement français met en oeuvre, depuis juin 1997, une politique donnant au rail un rôle accru, notamment en ce qui concerne le transport de marchandises.
Lors de leur dernière rencontre à Modane, le 15 mai dernier, M. Gayssot et son homologue italien ont confirmé la volonté des deux gouvernements de parvenir à un doublement du trafic de fret ferroviaire entre la France et l'Italie d'ici à dix ans et d'atteindre un volume annuel de 20 millions de tonnes sur l'ensemble des lignes qui conduisent à l'actuel tunnel ferroviaire du Fréjus. A plus long terme, le nouvel itinéraire ferroviaire entre Lyon et Turin devrait permettre d'offrir une capacité de 40 millions de tonnes pour le trafic de marchandises sur rail.
La mise en service du tunnel international de la nouvelle liaison ferroviaire pourrait avoir lieu, ainsi que vous l'avez dit, entre 2015 et 2020, compte tenu des procédures administratives et des délais d'études et de construction. Aussi, sans attendre cette mise en service, les ministres français et italien ont demandé aux opérateurs ferroviaires de définir un programme d'amélioration de l'acheminement du fret à court et à moyen terme.
Ce programme porte sur la période 2000-2006 et concerne l'ensemble de l'itinéraire principal Dijon-Ambérieu-Modane-Turin. Il comporte des mesures qui touchent les procédures d'exploitation de la ligne, la maintenance et les travaux d'entretien. Elles impliquent des investissements importants sur les infrastructures et la mise en service de matériels de traction adaptés aux deux pays. L'augmentation progressive de la charge des trains et ce programme de modernisation devraient permettre d'offrir entre Ambérieu et Montmélian une capacité de l'ordre de 13 millions de tonnes par an de marchandises aux alentours de 2005-2006.
Par ailleurs, il est envisagé deux autres itinéraires complémentaires susceptibles d'acheminer à Montmélian le trafic de marchandises. Il s'agit, d'une part, de la ligne Valence-Grenoble, avec un volume escompté de l'ordre de un million à deux millions de tonnes par an en provenance du sud de la France. Il s'agit, d'autre part, de l'itinéraire Lyon-Montmélian, qui pourrait acheminer un trafic de fret de trois à quatre millions de tonnes par an après la mise en service, autour de 2010, de la nouvelle ligne à grande vitesse entre Lyon et le sillon alpin.
Dans ces conditions, la capacité totale des itinéraires d'accès à la ligne ferroviaire de la Maurienne serait, comme je viens de l'indiquer, de près de 20 millions de tonnes par an. Ce volume correspond à la capacité maximale admissible sur la section de ligne actuelle entre Montmélian et Bussoleno moyennant les aménagements prévus au programme 2000-2006, tant sur les infrastructures que sur les systèmes d'exploitation.
Selon les estimations et en prenant en compte ces mesures de modernisation, la saturation du tunnel actuel du Mont-Cenis serait atteinte autour de 2020 dans un scénario tendanciel ou autour de 2010-2013 dans le cas d'un fort report modal de la route vers le rail.
Le nouveau tunnel entre la France et l'Italie parviendrait, avec une mise en service entre 2015 et 2020, à satisfaire les besoins du trafic de marchandises. Une nouvelle ligne consacrée au fret, entre la région d'Ambérieu et Saint-Jean-de-Maurienne, ne deviendrait donc indispensable qu'après la mise en service du tunnel international.
M. Jean-Pierre Vial. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Vial.
M. Jean-Pierre Vial. Madame le secrétaire d'Etat, j'ai bien noté les assurances que M. Gayssot a voulu donner sur la volonté de voir le trafic de fret croître progressivement jusqu'à 40 millions de tonnes lorsque l'itinéraire définitif sera réalisé. L'objectif à moyen terme de 20 millions de tonnes est bien confirmé.
En revanche, j'ai noté que le tunnel pré-Alpes n'a jamais été évoqué dans la réponse du ministre, d'où une double crainte. D'une part, je redoute qu'on n'utilise les itinéraires actuels, c'est-à-dire que l'on n'aggrave la situation des itinéraires que j'ai évoqués dans ma question. D'autre part, je crains que, tout en aggravant cette situation, nous n'arrivions pas aux 20 millions de tonnes par an. En effet, je crois voir une contradiction entre la position de la SNCF et celle de RFF. Celui-ci propose, en effet, l'itinéraire et la solution qui m'ont été exposés. En revanche, il me semble que la SNCF craint de ne pouvoir atteindre les objectifs fixés en utilisant l'itinéraire que le ministre paraît vouloir maintenir.

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