Séance du 27 juin 2000







M. le président. La parole est à M. Signé, auteur de la question n° 834, adressée à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.
M. René-Pierre Signé. J'ai souhaité attirer votre attention, monsieur le ministre, sur la perte de diversité dans les productions qu'ont entraînée indirectement les crises agricoles des années quatre-vingt-dix dans le département de la Nièvre.
Pour avoir en bonne partie surmonté ces crises, l'agriculture nivernaise est devenue plus performante et, sans doute, mieux adaptée à la fourniture de marchés précis. Elle s'est, en revanche, exagérément spécialisée, perdant ainsi tant sa capacité à diversifier ses ressources que la possibilité de créer des emplois nouveaux, Il en est résulté, outre un agrandissement désastreux des structures et la perte de nouvelles installations, l'abandon massif de la production ovine ainsi que l'absence de progrès de la pratique de l'engraissement.
Les aides européennes tout comme celles de l'Etat et des collectivités ont contribué à l'adaptation des éleveurs. Aujourd'hui, leur situation s'est éclaircie. En revanche, il reste très difficile de tirer parti, sur le plan commercial, de la qualité remarquable de la production à l'herbe de bovins charolais issus de la région, tout simplement parce que l'immense majorité d'entre eux sont engraissés, puis abattus ailleurs.
Monsieur le ministre, au début de cette session, je vous avais demandé votre concours pour la relance de la production ovine dans le bassin allaitant et, dans votre réponse, vous aviez montré que vous partagiez ces préoccupations des élus nivernais.
C'est pourquoi, certain que l'Etat saura accompagner, dans les années à venir, l'effort entrepris sur place pour relancer la diversité des productions de l'agriculture nivernaise, je vous interroge à nouveau sur les mesures qui pourraient être prises pour encourager cette volonté de diversification indispensable.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Monsieur le sénateur, la problématique de l'agriculture nivernaise est très représentative des enjeux et des atouts d'un département rural pour lequel les productions ovines et bovines sont déterminantes.
Le Gouvernement est convaincu de la nécessité d'interventions ciblées et cohérentes pour permettre à ce type de territoire de maintenir à la fois une production compétitive et de qualité mais aussi une population de producteurs qui puisse tirer un revenu satisfaisant sans avoir à recourir à des agrandissements de structure ou à des spécialisations excessives.
Ces objectifs ont été soutenus clairement tout au long de la négociation communautaire relative à la réforme de la politique agricole commune, dans le cadre de l'agenda 2000, ainsi qu'à l'occasion des débats que nous avons eus, y compris dans cet hémicycle, sur la loi d'orientation agricole adoptée l'an dernier.
Ils se traduisent notamment par les mesures d'appui que l'Office national interprofessionnel des viandes, de l'élevage et de l'aviculture, l'OFIVAL, met en place dans la nouvelle génération des contrats de plan.
Ils se traduisent également par les choix effectués au niveau national pour l'application de la réforme de l'organisation commune du marché de la viande bovine.
S'agissant plus particulièrement du secteur ovin, qui est effectivement menacé dans bien des régions herbagères, notamment par les conséquences indirectes des réformes des autres secteurs décidées en 1999, le Gouvernement, après avoir demandé un rapport d'évaluation sur le secteur, a mis en place un plan d'action national assez ambitieux. Celui-ci vise à permettre aux éleveurs ovins de tirer un meilleur revenu de leur activité, de répondre aux attentes des consommateurs, notamment en termes de qualité, et de maintenir le plus grand nombre possible d'éleveurs en encourageant l'installation des jeunes dans ce métier. J'ai exposé ce plan au mois de février dernier et les mesures concrètes se mettent déjà en place sur tout le territoire.
Au sein de ce plan, une place centrale a été accordée aux contrats territoriaux d'exploitation, les CTE, qui permettent de mieux prendre en compte et de rémunérer à leur juste valeur les différentes fonctions assurées par les éleveurs.
Au-delà même du secteur ovin, les CTE constituent désormais un outil sur lequel les agriculteurs savent pouvoir s'appuyer dans leurs démarches de diversification ou de valorisation de leurs productions. Ces contrats doivent permettre, à l'avenir, d'apporter des réponses concrètes pour des enjeux territoriaux majeurs, tels que la valorisation des espaces herbagers de la Nièvre.
Il faut bien comprendre, monsieur le sénateur, que le contrat territorial d'exploitation, qui est signé pour cinq ans entre l'Etat et l'agriculteur et par lequel celui-ci s'engage à produire mieux en termes d'emplois, de qualité de produits et de pratiques paysagères ou environnementales, relève d'une démarche volontaire de sa part : nous ne pouvons pas contraindre les agriculteurs, même ceux qui sont le plus en difficulté, à le signer.
La mise en oeuvre concrète de ces contrats territoriaux d'exploitation dans le monde rural exige donc la mobilisation de tous : non seulement les directions départementales de l'agriculture et de la forêt - et croyez bien que je fais tout pour qu'elles se mobilisent - les chambres d'agriculture, les ADASEA, associations départementales pour l'aménagement des structures des exploitations agricoles - dont l'ardeur à s'impliquer est, dirai-je, « à géométrie variable » - mais aussi les élus, qui sont le plus au contact des réalités du terrain, qui animent souvent des structures de développement ou de coopération intercommunale.
Les élus ont donc un rôle fondamental à jouer dans l'impulsion de cette dynamique. Je profite d'ailleurs de la réponse à votre question, monsieur Signé, pour lancer un appel à tous les élus du Morvan et, au-delà, à l'ensemble des élus du monde rural, pour qu'ils se placent au coeur du mouvement de développement des CTE, pour faire réussir le monde rural, bien entendu avec le soutien de l'Etat, autour des exploitations familiales de taille modeste, qui ont indiscutablement un avenir dans notre pays.
M. René-Pierre Signé. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Signé.
M. René-Pierre Signé. Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse, qui prouve une nouvelle fois que vous partagez nos préoccupations en ce qui concerne les CTE. Les CTE constituent effectivement un outil susceptible de résoudre, à l'avenir, une partie des problèmes de notre agriculture.
Monsieur le ministre, vous connaissez bien la Nièvre et vous savez certainement que ce département cumule ces indicateurs alarmants quant à l'évolution vers une agriculture sans hommes : la taille moyenne des exploitations est très élevée, le rendement à l'hectare est de plus en plus faible, ce qui autorise de moins en moins l'embauche d'un salarié. Ainsi se constitue un cercle vicieux : moins de revenus, donc moins de bras, moins de bras, donc moins de revenus...
Certaines zones céréalières - y compris dans la Nièvre - pourraient subir une évolution de type nord-américain ; des géographes ont parlé d'une « logique de pampa ». C'est une projection sans doute exagérée, mais non tout à fait fausse. Or ce n'est pas l'agriculture dont nous voulons, ni vous ni moi, monsieur le ministre, ce n'est pas le pays où nous voulons vivre.
L'urgence d'une reprise en main est réelle, et je suis heureux de constater que vous partagez cette analyse. La traduction de cette volonté qui nous est commune appelle sans doute un nouvel effort public, tant en termes de communication qu'en matière de facilitation des projets.

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